IFEX
FAIRE CAMPAGNE EN FAVEUR
DE LA LIBERTÉ D’EXPRESSION
GUIDE DES DÉFENSEURS
ÉCHANGE INTERNATIONAL DE LA LIBERTÉ D’EXPRESSION
GUIDE DE L’IFEX REMERCIEMENTS
Remerciements
LE PRÉSENT GUIDE EST LE FRUIT D’UN EFFORT COLLECTIF. PLUSIEURS
PERSONNES ONT RENDU SA RÉALISATION POSSIBLE ET NOUS LES EN
REMERCIONS CHALEUREUSEMENT.
Ce guide n’aurait jamais pu voir le jour sans l’aide généreuse du Ministère royal des Affaires
étrangères de Norvège.
Plusieurs membres de l’IFEX nous ont généreusement offert temps et énergie en remplissant des questionnaires et en répondant
à nos diverses demandes dans le cadre des
études de cas. Nous remercions tout particulièrement les personnes suivantes :
Luitgard Hammerer et Sara Buchanan,
ARTICLE 19
Amanda Watson-Boles, Comité pour la protection des journalistes (un merci particulier
à Amanda pour avoir également rédigé la section pratique des Missions d’enquête)
Simon Kimani Ndung’u, Freedom of
Expression Institute
Juliana Cano Nieto, Fundación para la
Libertad de Prensa
Mak Yin-Ting, Association des journalistes de Hong Kong
Veronika Leila Szente Goldston, Human
Rights Watch
Carlos Eduardo Huertas et Gabriel
Chávez-Tafur, Instituto de Prensa y Sociedad
Anthony Löwstedt et Barbara Trionfi,
Institut international de la presse
Zoé Titus, Media Institute for Southern
Africa
Sara Whyatt et Cathy McCann, Comité des écrivains emprisonnés, PEN international
Nous remercions particulièrement les personnes suivantes qui ne font pas partie de la communauté de l’IFEX et qui ont généreusement partagé leurs expériences sur les méthodes de campagne :
Mats Abrahamsson, Selene
Elizabeth Bernstein, Campagne internationale pour l’interdiction des mines terrestres
Sarah Bladen, WWF International
Anyle Côté, Droits et Démocratie
Carl Morten Iversen du PEN-Norvège a fourni d’importants documents de recherche qui ont constitué la base de plusieurs études de cas.
Nous aimerions également remercier
Amnistie internationale de nous avoir permis d’utiliser des documents tirés de leur manuel de campagne pour plusieurs chapitres pratiques de notre guide.
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GUIDE DE L’IFEX REMERCIEMENTS
Nous avons eu la chance de bénéficier de l’expertise de Soapbox Design
Communications, dont les créations se sont mérité des prix.
Merci à Maureen James, Amanda Watson-
Boles et Juliana Cano Nieto de nous avoir livré de précieux conseils éditoriaux, et à
Fitsum Kassa pour avoir révisé ce guide.
Merci aux membres suivants du Secrétariat de l’IFEX de nous avoir fourni des idées et consacré leur temps : Nick Fillmore, Maureen
James, Michaël Elbaz et Marianna Tzabiras du
Secrétariat de l’IFEX. Les talents éditoriaux et les idées de notre stagiaire Ned Richardson-
Little se sont également avérés précieux pour les chapitres pratiques de ce guide.
Finalement, nous remercions tout particulièrement Anders Hayden pour son magnifique travail de rédaction de la présentation et des études de cas, ainsi que pour son engagement continu envers ce projet.
Geoffrey Chan et Rachael Kay
COORDONNATEURS DU GUIDE
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GUIDE DE L’IFEX PARLEZ-NOUS DE VOS EXPÉRIENCES DE CAMPAGNE
Parlez-nous de vos expériences de campagne
Nous invitons les membres de l’IFEX et les autres organisations non gouvernementales
à nous faire part de tout outil ou technique de campagne qui aurait été utilisé avec succès dans le cadre d’une campagne de défense de la liberté d’expression. Comme le présent guide sera vraisemblablement mis à jour à l’avenir, nous serions heureux de recueillir vos commentaires et suggestions. Veuillez communiquer avec nous à l’adresse suivante : campaigns@ifex.org
PUBLIÉ EN 2005.
LE SECRÉTARIAT DE L’ÉCHANGE INTERNATIONAL DE LA LIBERTÉ D’EXPRESSION (IFEX),
A/S DE JOURNALISTES CANADIENS POUR LA LIBERTÉ D’EXPRESSION
489, RUE COLLEGE, TORONTO (ONTARIO) M6G 1A5 CANADA
L’IFEX AUTORISE LA REPRODUCTION ET LA REPUBLICATION DES RENSEIGNEMENTS
CONTENUS DANS LE PRÉSENT DOCUMENT, À CONDITION QUE LE NOM DE L’IFEX SOIT
INDIQUÉ COMME RÉFÉRENCE ET QU’UN LIEN VERS SON SITE WEB SOIT INCLUS (WWW.IFEX.ORG).
GUIDE DE L’IFEX TABLE DES MATIÈRES
DIRECTIVES AUX UTILISATEURS
1 ONGLETS DE DROITE cliquez sur les onglets de couleur à droite de la page pour aller directement à chacune des sections.
2 TABLE DES MATIÈRES accédez à chacun des sous-chapitres en cliquant sur le titre en caractères gras qui figure dans la table des matières.
3 POUR RETOURNER À LA TABLE DES MATIÈRES cliquez sur l’onglet marron pour accéder à la table des matières.
4 PRÉSENTATION OPTIMISÉE pour les écrans de 1024 sur 768 pixels et plus
Table des matières
INTRODUCTION ET MODE D’EMPLOI DU GUIDE
L’ÉLABORATION D’UNE STRATÉGIE POUR
Un cadre stratégique pour l’organisation de campagnes
L’analyse des pouvoirs – un outil permettant l’élaboration de campagnes efficaces
Une campagne efficace : Greenpeace et le
Aller au-delà des alertes : Le MISA et la campagne
Journalists Under Fire de la SADC
OUTILS DE CAMPAGNE ET ÉTUDES DE CAS
ILLUSTRANT LES PRATIQUES RECOMMANDÉES
Index de la Troisième Partie: Boîte à outils,
Les actions conjointes de l’IFEX
Boîte à outils : Comment lancer une action conjointe de l’IFEX 30
Étude de cas : L’Association des journalistes de Hong
Kong (HKJA) et sa campagne contre l’article 23 40
Boîte à outils : Des outils Internet pouvant être utilisés pour faire campagne 43
Gérer les ressources juridiques
Boîte à outils : Comment les ressources juridiques peuvent renforcer une campagne 55
Étude de cas : La campagne pour la Loi sur le libre accès à l’information d’ARTICLE 19 en Croatie 60
Travailler au sein d’une coalition
Boîte à outils : Comment la formation de coalitions peut renforcer une campagne 65
L’appui de personnalités publiques
Boîte à outils : Comment l’appui de personnalités publiques peut renforcer une campagne 75
Étude de cas : La campagne internationale pour l’interdiction des mines terrestres 79
Boîte à outils : Comment les tournées de conférences peuvent renforcer une campagne 86
Étude de cas : Droits et Démocratie et la tournée annuelle du Prix John Humphrey pour la liberté 91
Boîte à outils : Comment planifier une mission d’enquête 98
Étude de cas : Mission conjointe internationale à
Barrancabermeja, en Colombie 102
Boîte à outils : Comment effectuer un lobbying efficace 106
Études de cas :
b) Lobbying national : La mission de 2003 de l’Institut international de la presse en Israël 117
Boîte à outils : Comment organiser une conférence de presse efficace 122
Étude de cas : Le rapport annuel du Comité pour la protection des journalistes 128
Boîte à outils : Comment l’écriture de lettres peut renforcer une campagne 132
Étude de cas : Le PEN international et sa campagne en faveur du général Gallardo 138
RÉPERTOIRE DES MEMBRES DE L’IFEX
Préface
GUIDE DE L’IFEX PRÉFACE
Grâce au pouvoir de l’Internet, le Réseau d’alertes de l’IFEX permet à la communauté internationale de détecter rapidement les violations de la liberté d’expression qui surviennent partout dans le monde.
Lorsque des journalistes, des écrivains et des activistes des droits de la personne sont emprisonnés ou harcelés simplement parce qu’ils font leur travail, les alertes de l’IFEX suscitent une réponse rapide, permettant souvent de libérer des individus et de sauver des vies.
Le rôle des alertes est donc crucial – malheureusement, les alertes ne sont lancées qu’après les faits.
L’importance et le caractère unique de ce guide résident dans le fait qu’il nous présente le contexte particulier qui favorise des violations. Il propose ainsi des techniques de campagne éprouvées qui aideront les défenseurs de la liberté d’expression à amener le changement de différentes manières. Il fournit des exemples clairs illustrant les façons dont ces techniques ont été appliquées avec succès pour obliger les gouvernements à cesser certaines pratiques répressives.
Enfin et surtout, ce guide nous apprend qu’en organisant des campagnes avec habileté, en faisant preuve de tact et de stratégie – en élaborant des campagnes comme celles décrites dans le présent guide – les défenseurs de la liberté d’expression pourront maximiser leurs ressources et auront ainsi la chance de réellement changer les choses.
Rod Macdonell
D I R E C T E U R A D M I N I S T R AT I F, S E C R É TA R I AT D E L’ I F E X
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Introduction
GUIDE DE L’IFEX INTRODUCTION
Depuis la fondation de l’IFEX en 1992, les membres de l’Échange international de la liberté d’expression ont su mettre à profit le Réseau des alertes pour sensibiliser l’opinion publique aux atteintes à la liberté d’expression dans le monde. En attirant l’attention nationale et internationale sur de nombreux cas d’atteinte à cette liberté fondamentale, l’IFEX a aidé à la libération de journalistes et d’écrivains emprisonnés, signalant ainsi aux violateurs que le monde entier les surveille de près.
Bien qu’il soit difficile, voire impossible, d’affirmer qu’il existe une relation de cause à effet entre la publication d’une alerte et la libération d’une personne emprisonnée, de nombreux cas semblent indiquer que cette pratique, lorsqu’elle est combinée à d’autres stratégies, a un effet bien réel.
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Plusieurs, au sein de la communauté de l’IFEX, se demandent comment mettre à profit la publication d’alertes et même faire plus pour accroître l’impact de cette stratégie sur la défense et la promotion de la liberté d’expression. C’est dans cette optique que le
Secrétariat de l’IFEX a décidé de publier le présent guide pratique, pour offrir aux membres une « boîte à outils » remplie d’idées, de pratiques recommandées et de ressources en matière de campagne.
Aujourd’hui, il devient de plus en plus urgent de mener des campagnes concertées pour défendre la liberté d’expression sous ses différentes formes. Les menaces posées à la liberté d’expression ne se limitent pas à l’arrestation et à l’emprisonnement des personnes dont les écrits ou les opinions déplaisent aux pouvoirs en place
– même si cela demeure encore trop fréquent dans certains pays.
Les gouvernements et les autres forces en présence emploient des méthodes toujours plus sophistiquées pour restreindre la liberté de parole. Dans l’après 11 septembre, de nombreux pays ont voté en faveur de lois antiterroristes
1 Kim Brice. Une Evaluation de l’echange international de la liberté d’expression, HIVOS, 2003.
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GUIDE DE L’IFEX INTRODUCTION
générales, qui contraignent les journalistes à révéler leurs sources et les rendent plus vulnérables face aux poursuites et aux arrestations. Les lois contre la diffamation, quant à elles, sont utilisées pour limiter les possibilités que l’on a d’examiner les activités des représentants gouvernementaux, des chefs d’entreprises et autres. Pendant ce temps, la censure sur Internet s’étend à l’échelle de la planète alors que les gouvernements découvrent de nouvelles façons de limiter la liberté d’expression et l’accès à l’information des citoyens à travers le réseau Internet. Enfin, en bien des endroits, la violence envers les journalistes et les autres travailleurs des médias demeure une menace permanente.
Dans ce contexte, les membres de l’IFEX devront faire preuve, dans les combats qu’ils livrent, d’une imagination égale ou supérieure
à celle dont font preuve les violateurs de la liberté d’expression. Bien que les alertes constituent une première mesure importante, leur impact se voit décuplé quand elles s’inscrivent dans le cadre de stratégies de campagne plus étendues, qui adoptent des approches concertées à la défense et à la promotion de la liberté d’expression.
COMMENT UTILISER CE GUIDE PRATIQUE
La première partie du guide concerne les stratégies de campagne. Mats Abrahamsson, ancien coordonnateur de campagnes pour
Greenpeace et fondateur du groupe-conseil suédois Selene, vous expliquera ce qui suit :
•
Comment mettre au point un cadre stratégique de campagne, qui aidera ceux et celles qui font campagne à choisir des activités qui répondent de près à leurs objectifs, afin d’éviter de choisir à la hâte des activités qui gaspilleront temps et ressources (article 1.1);
•
Comment effectuer une « analyse des pouvoirs » qui permet d’identifier les acteurs du pouvoir en place et leurs interactions, afin de déployer des ressources parfois limitées là où leur impact sera le plus grand
(article 1.2);
•
Comment une campagne de Greenpeace a réussi à convaincre Coca-Cola de cesser d’utiliser des produits chimiques nuisibles à la couche d’ozone dans ses équipements de réfrigération (article 1.3).
Dans la deuxième partie, nous nous pencherons sur l’exemple d’un membre de l’IFEX – le Media Institute of Southern Africa – qui a compris l’importance de tirer parti de la publication d’alertes et de dépasser les limites de cet outil en élaborant une vision stratégique de défense de la liberté d’expression.
La troisième partie propose dix outils de campagne que les membres de l’IFEX peuvent utiliser, en plus de la publication d’alertes. Ces outils peuvent être utilisés séparément ou collectivement, dans le cadre d’une campagne.
Chaque outil comprend :
• une « boîte à outils pratique » remplie de conseils, d’idées et de sujets sur lesquels se pencher;
• une étude de cas illustrant les pratiques recommandées, portant sur un membre de
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l’IFEX ou sur un autre organisme qui aurait utilisé avec succès l’outil de campagne en question;
• une liste de ressources pour obtenir plus de renseignements.
Bien sûr, votre organisation devra choisir soigneusement les outils les plus susceptibles de répondre à ses objectifs particuliers. Les outils décrits ici ne s’avéreront pas nécessairement utiles dans tous les cas, et cet ouvrage ne décrit pas de manière exhaustive tous les outils possibles. Cependant, nous espérons que ces renseignements et ces exemples sauront éclairer les choix de ceux et celles qui désirent accroître l’efficacité de leur travail dans la défense de la liberté d’expression.
GUIDE DE L’IFEX INTRODUCTION
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Premiere Partie
L’élaboration d’une stratégie pour les campagnes
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PREMIÈRE PARTIE 1.1 UN CADRE STRATÉGIQUE POUR L’ORGANISATION DE CAMPAGNES
Un cadre stratégique pour l’organisation de campagnes
PAR MATS ABRAHAMSSON, SELENE
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Sommaire Il existe aujourd’hui de nombreuses techniques offertes aux organisateurs de campagnes, tant au Nord qu’au Sud. Le présent document propose la description sommaire d’un modèle pratique mis au point par la compagnie Selene pour aider les organisateurs de campagnes à définir le cadre stratégique de leurs campagnes. Plutôt que de se lancer tête première dans des activités de toutes sortes, il est fortement conseillé aux organisateurs de campagnes de prendre le temps de suivre les étapes qui consistent à définir ses objectifs, à effectuer une analyse utile des pouvoirs, à mettre au point une stratégie de communication efficace et enfin, à se servir des résultats de ce processus pour choisir les activités qui répondront le mieux aux objectifs visés.
QUE VEUT DIRE FAIRE CAMPAGNE ?
On a souvent tenté de définir ce que l’on appelle « faire campagne ». Nous proposons ici,
à toutes fins utiles, la définition suivante : Une action publique organisée qui vise à amener un changement social. « Organisée » signifie que nous distinguons la campagne d’un acte de protestation spontané visant à dénoncer une injustice, etc. « Publique », pour la distinguer des campagnes commerciales (pensez aux campagnes publicitaires) et des diverses campagnes que les autorités pourraient organiser (par exemple, pour réduire le taux de criminalité ou pour combattre le trafic de stupéfiants, etc.).
Faire campagne suppose communiquer et communiquer suppose influencer les autres (et
être influencé par les autres). Si, dans le passé, faire campagne était souvent une activité à sens unique, les campagnes réussies d’aujourd’hui mettent presque toujours en jeu un processus de communication à double sens.
À la base, deux options se présentent aux organisateurs de campagnes qui désirent influencer des décideurs :
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PREMIÈRE PARTIE 1.1 UN CADRE STRATÉGIQUE POUR L’ORGANISATION DE CAMPAGNES
1 l’influence directe (le lobbying traditionnel);
2 l’influence indirecte (lorsque l’on fait appel à une partie du « public » pour s’assurer un appui, comme dans le renforcement d’alliances et la sensibilisation du public).
STRATÉGIE
L’une des erreurs les plus courantes que commettent les organisateurs de campagnes est de tomber dans le « piège des activités ». On passe directement de l’étape des bonnes intentions à celle des activités – avec ou sans plan d’activités. Le résultat d’une telle façon de faire est habituellement une mauvaise utilisation des ressources, la frustration et, finalement, l’échec. En s’arrêtant un moment et en faisant ses devoirs stratégiques, l’organisateur de campagnes a de bien meilleures chances de maximiser ses ressources pour parvenir à ses fins.
Une bonne stratégie aide à faire les bons choix. On posera ainsi quatre questions fondamentales pour aider l’organisateur de campagnes à élaborer une stratégie :
1 Que voulez-vous changer ?
2 Qui a le pouvoir d’apporter ce changement ?
3 Qu’est-ce qui convaincra ceux qui ont le pouvoir de changer les choses ?
4 Que devrez-vous faire pour les convaincre ?
La réponse à la première question réside dans les objectifs ou les buts de la campagne.
La réponse à la seconde question sera fournie par l’analyse des pouvoirs.
On répondra à la troisième question en mettant au point une stratégie des
communications.
La quatrième question nous fournira un plan
d’activités.
DÉFINIR LES OBJECTIFS OU LES BUTS DE LA CAMPAGNE
La plupart des gestionnaires de campagnes connaissent sans doute l’importance d’avoir des objectifs bien définis. Encore maintenant, le manque d’objectifs bien définis constitue l’une des principales causes d’échec des campagnes. Chaque fois que l’on décide de lancer une nouvelle campagne, on devra s’assurer de bien définir ses objectifs et de savoir comment ils s’articulent les uns par rapport aux autres.
Tous les membres de l’équipe doivent discuter des objectifs, s’accorder sur ces derniers et les partager. Bien qu’un objectif à court terme puisse servir d’étape intermédiaire au sein d’une stratégie à plus long terme, le fait de travailler avec plusieurs objectifs d’importance égale sème la confusion et brouille les pistes dans les situations difficiles.
Lorsqu’il existe plus d’un objectif, leur ordre de priorité devra être clairement défini.
EFFECTUER L’ANALYSE DES POUVOIRS
Si l’objectif des campagnes est d’influencer des personnes puissantes pour faire changer les choses, il faut savoir tout d’abord qui l’on veut influencer. En observant de plus près les détenteurs du pouvoir et en découvrant de quelle manière ils peuvent être influencés, les organisateurs de campagnes, qui la plupart du temps disposent de ressources limitées, seront en mesure de faire des choix stratégiques plus
éclairés. L’analyse des pouvoirs peut s’avérer un outil fort utile dans l’élaboration d’une stratégie de campagne (voir « L’analyse des pouvoirs », à l’article 1.2)
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PREMIÈRE PARTIE 1.1 UN CADRE STRATÉGIQUE POUR L’ORGANISATION DE CAMPAGNES
L’analyse des pouvoirs aidera les organisateurs de la campagne à se faire une idée claire du rôle respectif de chacun des acteurs de la scène – un bon point de départ pour la mise au point d’une stratégie des communications.
ÉLABORER UNE STRATÉGIE DES COMMUNICATIONS
Une fois que vous aurez déterminé ce que vous voulez changer, de même que l’acteur qui aura le pouvoir de vous aider à le faire, il s’agit de convaincre l’acteur en question de passer à l’action. La plupart des gens sont aujourd’hui inondés d’informations et le seul fait de faire entendre sa voix constitue déjà un défi.
La clé d’une communication réussie réside dans la connaissance et la compréhension de
l’auditoire. Il est important de savoir ce qui motive les gens en général et ce qui peut les inciter à changer les choses. Trop souvent, les communications d’une campagne sont modelées à partir des motivations de la personne qui fait campagne et non à partir de celles des individus que l’on tente d’influencer.
Une stratégie des communications doit comprendre ce qui suit :
•
Les acteurs clés – identifiés lors de l’analyse des pouvoirs.
•
Le message convaincant – les arguments que vous croyez être assez forts pour inciter l’auditoire cible à changer les choses.
•
La tribune – ce sur quoi vous vous appuyez pour livrer votre message. La réputation de l’organisme, son accès aux décideurs et aux médias et des activités accrocheuses sont quelques exemples de ce qui peut constituer une tribune.
•
La voie, le médium – une description des modes de communication qui seront utilisés, comme par exemple des rencontres personnelles, le courriel, des publicités, des articles d’opinion, etc.
•
Le résultat/l’action – la communication doit
être très claire et précise quant au type d’action que vous attendez de la part de chacun des acteurs clés.
Ces cinq composants forment un tout interrelié. Il devrait exister un certain degré de cohérence entre eux, et ils doivent être élaborés ensemble.
Acteurs
Clés
Résultat/action
Message
Convaincant
Voie/
Médium
Tribune
Comme exemple de stratégie des communication réussie, citons la campagne
« Don’t Mess with Texas » menée par l’État du
Texas. L’abandon de détritus par le public était coûteux et enlaidissait le paysage. Les responsables de cette pollution étaient essentiellement des jeunes hommes âgés de 15
à 25 ans. Une firme de communications a donc été mandatée par le gouvernement pour mettre au point une campagne de relations
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PREMIÈRE PARTIE 1.1 UN CADRE STRATÉGIQUE POUR L’ORGANISATION DE CAMPAGNES
publiques ciblant ce segment précis de la population.
Le slogan choisi était « Don’t Mess with
Texas » (« ne provoquez pas le Texas », avec le double sens de « mess », qui fait allusion ici tant à la provocation qu’à la saleté); on a eu recours à une vedette rock pour réaliser une publicité télévisée et, une semaine à peine après le lancement de la campagne, la quantité de détritus abandonnés était réduite de 30 p.
100. L’objectif de la campagne était d’améliorer l’hygiène publique et de nettoyer les rues. Or, le message – qui visait les jeunes hommes – a touché la fibre patriotique locale et le chauvinisme masculin (« Seuls les vrais
Texans ne laissent pas traîner leurs détritus »).
COMMENT CHOISIR DES ACTIVITÉS POUR SA CAMPAGNE
Les meilleures activités de campagne sont toujours celles qui sont le plus susceptibles de convaincre ceux qui ont le pouvoir de changer les choses de le faire. Les activités de la
Dans nos sociétés modernes, avec l’énorme flot d’informations que nous connaissons et les messages qui visent continuellement à s’enterrer les uns les autres, il est préférable de
« prévoir l’imprévisible ».
campagne devraient être élaborées à partir de la stratégie des communication, de manière à
être les activités qui véhiculent le mieux le message convaincant de la campagne.
Les activités de la campagne peuvent être choisies parmi l’arsenal de techniques du groupe qui organise la campagne. Les personnes qui font campagne sont encouragées
à essayer de nouvelles façons de communiquer, d’une part en s’inspirant de ce que les autres groupes font et d’autre part, en mettant au point des techniques inédites. En territoire inconnu, les organisateurs devront assurer une certaine cohérence entre l’activité, le message et l’image que projette le groupe qui fait campagne au sein de la société.
Traditionnellement, les organisateurs de campagnes produisaient souvent des plans d’activités détaillés tout au long de leur campagne. Dans nos sociétés modernes, avec l’énorme flot d’informations que nous connaissons et les messages qui visent continuellement à s’enterrer les uns les autres, il est préférable de « prévoir l’imprévisible ».
Avec une solide stratégie pour les guider, ceux et celles qui font campagne seront à même de
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PREMIÈRE PARTIE 1.1 UN CADRE STRATÉGIQUE POUR L’ORGANISATION DE CAMPAGNES
saisir les occasions et, en réagissant aux
événements extérieurs, pourront décupler les impacts de leurs activités.
Dans ce contexte, faire campagne peut être considéré comme l’entretien d’un dialogue continu entre le groupe qui fait campagne et les divers acteurs sur le terrain. Il devient aussi important d’écouter que de parler.
LA PLANIFICATION STRATÉGIQUE AU QUOTIDIEN
Prenons un exemple courant pour voir comment on peut élaborer une stratégie de campagne simple.
Suzie est contrariée. Elle veut une crème glacée mais sa mère ne le lui permet pas. Par contre, son père pourrait être sympathique à sa cause. Il travaille de longues heures et ne voit pas souvent sa fille unique ces jours-ci. Suzie entreprend donc de convaincre son père.
Elle se fixe un Objectif de campagne : « Je veux une crème glacée. »
Elle effectue une Analyse des pouvoirs :
« Maman ne me permet pas d’avoir une crème glacée, mais il se peut que je sois capable de convaincre papa. Il est si occupé qu’il passe peu de temps avec moi. »
Elle choisit une Stratégie des
communications : « Je suis la fille unique de mon père. Je sais qu’il se sent coupable de ne pouvoir passer plus de temps avec moi. Je vais utiliser son sentiment de culpabilité pour obtenir ce que je désire. »
Elle trouve une Activité de campagne : Un jour, Suzie appelle son père au bureau à la fin de la journée. « Papa, je t’aime. Tu m’as tellement manqué que j’ai pleuré toute la journée pendant que tu étais au travail.
Pourrais-tu m’acheter une crème glacée en revenant à la maison ? »
Elle a ainsi atteint son Objectif de
campagne : Le père de Suzie est revenu à la maison avec un gros pot de crème glacée.
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PREMIÈRE PARTIE
1.2 L’ANALYSE DES POUVOIRS – UN OUTIL PERMETTANT
D’ÉLABORER DES CAMPAGNES EFFICACES
L’analyse des pouvoirs – un outil permettant d’élaborer des campagnes efficaces
PAR MATS ABRAHAMSSON, SELENE
Sommaire Les organisateurs de campagnes sont invités à analyser les pouvoirs en place et la façon dont les différents joueurs interagissent, afin que les ressources mises à contribution soient utilisées de la manière la plus efficace possible et maximiser leur impact. Nous présentons ici trois outils pratiques qui vous permettront, lorsque vous les utiliserez ensemble, d’effectuer une analyse des pouvoirs. Nous vous encourageons à utiliser ces outils en groupe afin d’améliorer vos résultats, de renforcer vos équipes et d’acquérir une bonne connaissance commune du contexte des campagnes.
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L’ANALYSE DES POUVOIRS
Chaque personne qui fait campagne sait que le but premier d’une telle activité est d’influencer les autres pour faire changer les choses. Mais qui sont ceux que nous tentons d’influencer ? Trop souvent, la réponse à cette question repose sur une analyse par trop superficielle, qui, la plupart du temps, suit les conventions du passé.
Les groupes de revendication s’empêtrent souvent dans l’analyse du problème. Bien que la bonne compréhension du problème constitue le fondement de toute campagne, une attention excessive accordée au problème peut se révéler coûteuse en temps et, trop souvent, ne permet pas de profiter des personnes qui pourraient réellement aider à changer les choses. Ainsi, transférer l’attention aux pouvoirs réels qui se trouvent derrière le problème aidera la campagne à porter fruit.
Voici trois questions de base à se poser lorsque l’on effectue une analyse des pouvoirs :
Qui a le pouvoir de changer les choses ?
Qui a le pouvoir d’influencer ceux qui peuvent changer les choses ?
Qui avons-nous le pouvoir d’influencer ?
LA LISTE DES ACTEURS CLÉS
Pour vous aider dans cette tâche, voici quelques outils à votre disposition. Le plus rudimentaire, c’est la « Liste des acteurs clés ». Il s’agit simplement d’une liste des acteurs 1 que vous estimez être en mesure d’influencer l’issue de votre campagne. Une façon inventive de valider,
1 Un « acteur » peut être tout individu, groupe, institution, etc.
qui est en mesure d’influencer la situation.
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PREMIÈRE PARTIE
1.2 L’ANALYSE DES POUVOIRS – UN OUTIL PERMETTANT
D’ÉLABORER DES CAMPAGNES EFFICACES
voire d’allonger cette liste, consiste à demander aux acteurs clés qui figurent sur la liste (à certains d’entre eux ou à tous) quels sont les noms qui, selon eux, devraient également y figurer. Le plus vous en savez au sujet des acteurs et de leurs motivations, le mieux vous saurez comment les influencer.
LE TABLEAU DES ACTEURS CLÉS
Le second outil est le « tableau des acteurs clés », dans lequel chacun des acteurs est
évalué et placé dans une catégorie en fonction d’un certain nombre de critères. Un exemple d’un tel tableau est proposé ci-dessous, mais il faudra noter que les critères utilisés peuvent
être adaptés selon les besoins de la campagne.
Dans ce tableau, les cinq colonnes comprennent ce qui suit :
•
L’acteur – le nom de la personne, du groupe ou de l’institution
•
La motivation – la ou les motivation(s) principale(s) de cet acteur dans ce cas particulier
ACTEUR MOTIVATION PROCESSUS/RISQUE INFLUENCÉ PAR INFLUENCE
•
Le processus/le risque – l’évaluation de la possibilité qu’un acteur modifie son point de vue sur un sujet ainsi que les risques de le cibler (par exemple, un ministre du gouvernement qui semble appuyer votre cause pourrait ne pas être la meilleure cible s’il n’a pas beaucoup d’influence dans le cabinet)
•
Influencé par – les autres acteurs susceptibles d’influencer cet acteur particulier
•
Influence – les autres acteurs susceptibles d’être influencés par cet acteur
LE GRAPHIQUE DES ACTEURS CLÉS
Le graphique des acteurs clés est un outil encore plus dynamique permettant d’analyser les acteurs clés et la façon dont ils interagissent entre eux. Commencez par dresser un graphique en deux dimensions.
Les acteurs clés sont positionnés sur le graphique en fonction de leur « pouvoir » et de leur « position ». Le « pouvoir » indique la capacité de l’acteur à exercer un pouvoir dans ce cas particulier.
Sur la dimension « position », on situera les acteurs selon leur point de vue favorable à notre cause : plus on les positionne vers la droite, plus ils sont favorables à notre cause.
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PREMIÈRE PARTIE
1.2 L’ANALYSE DES POUVOIRS – UN OUTIL PERMETTANT
D’ÉLABORER DES CAMPAGNES EFFICACES
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Une manière inventive d’utiliser le graphique en pratique serait d’utiliser des autocollants et une grande feuille de papier
(par exemple, un tableau à feuilles mobiles).
On peut ainsi discuter de la façon de positionner chacun des acteurs et la modifier au fil du processus d’élaboration du graphique.
Les acteurs pourraient également être identifiés
à l’aide d’autocollants de différentes couleurs.
Parfois, certains acteurs semblent moins importants à prime abord et peuvent causer des problèmes s’ils sont négligés. Un « facteur de risque » pourrait être ajouté au graphique pour faire face à cette éventualité. Chacun des acteurs sera analysé en fonction des risques qu’il présente, et ceux qui présentent un risque
élevé recevront une étoile rouge.
Les acteurs clés qui sont positionnés au centre du graphique sont ceux qui sont le plus susceptibles d’être influencés, puisqu’ils sont plus faciles à persuader (étant des modérés).
Pour de meilleurs résultats, l’élaboration de l’analyse des pouvoirs devrait toujours se faire en présence de tous les membres participant à la campagne. L’effort commun permettra à l’équipe de se resserrer et de se renforcer, puisque les membres pourront plus facilement cerner ensemble ce qui les unit et ce qui les divise et arriver à un consensus.
Pouvoir
Position
+
MISE EN ŒUVRE
L’outil d’analyse des pouvoirs offre des stratégies d’analyse simples et efficaces. En consultant ces documents à intervalles réguliers, les organisateurs de campagnes pourront cerner les tendances et les changements. Ces outils peuvent également
être utilisés pour évaluer la campagne, si certains changements touchent les activités de l’équipe qui la prépare.
L’utilisation de ces outils constitue un bon point de départ dans l’élaboration d’une stratégie des communications, puisqu’ils permettent d’identifier les acteurs clés, leurs motivations et leurs positions, ainsi que les changements qu’ils sont susceptibles d’apporter.
Professeur C
Professeur C
Professeur C
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TV
Entreprise Y
Ministère A
Pouvoir
Nous
Groupe W
Radio
Ministère B
Professeur E
Position
Groupe Z
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PREMIÈRE PARTIE
1.3 UNE CAMPAGNE EFFICACE : GREENPEACE ET LE
« COKE SPOTLIGHT »
Une campagne efficace :
Greenpeace et le
« Coke Spotlight »
PAR MATS ABRAHAMSSON, SELENE
1
.3
Jusqu’en 2000, Coca-Cola avait pour politique d’utiliser des systèmes de réfrigération pour les appareils de boissons gazeuses qui fonctionnaient à l’aide des hydrofluorocarbures (HFC) – un des gaz qui contribuent le plus au réchauffement de la planète. Depuis plusieurs années, Greenpeace menait plusieurs campagnes, souvent couronnées de succès, visant à abolir l’utilisation de ces substances. Toutefois, certains secteurs de l’industrie refusaient de bannir totalement ces gaz. Des recherches ont été menées afin de savoir où étaient encore utilisés les HFC, et Greenpeace, par une analyse de la situation, a cherché à savoir où sa campagne projetée aurait le plus d’impact. Coca-Cola a été choisie comme cible. Le raisonnement était le suivant : « Si nous réussissons à faire plier Coca-Cola, les autres entreprises du genre suivront plus facilement. »
Le 1er juin 2000, Greenpeace et le groupe
Adbusters (le chien de garde canadien des médias) ont lancé une campagnes sur Internet dénonçant Coca-Cola – l’un des commanditaires principaux des Jeux
Olympiques de 2000 à Sydney, en Australie – en raison de son non-respect des directives environnementales pour ces Jeux et pour son utilisation des HFC à l’échelle de la planète.
Avant les Jeux de Sydney, Greenpeace avait
élaboré un site parodique
(http://www.cokespotlight.org/) qui proposait une trousse de campagne complète comprenant des autocollants, des affiches, des cartes postales et des images de courriel à télécharger permettant d’exercer un lobbying direct auprès de l’entreprise. Le groupe cible de la campagne
était celui des jeunes utilisateurs d’Internet et plus particulièrement les étudiants collégiaux des États-Unis.
Parmi les entreprises faisant usage des HFC,
Greenpeace estimait que Coca-Cola était l’une des plus vulnérables à une attaque contre sa marque. Coca-Cola dépense des millions de
IFEX 19
PREMIÈRE PARTIE
1.3 UNE CAMPAGNE EFFICACE : GREENPEACE ET LE
« COKE SPOTLIGHT »
COKE ÉTAIT VULNÉRABLE EN
CE SENS, À CAUSE DE SON
STATUT DE MARQUE MONDIALE
- L’ENTREPRISE FAISAIT FACE À
UNE CAMPAGNE TOUT AUSSI
MONDIALE QUI POUVAIT NUIRE
À SA RÉPUTATION.
dollars pour entretenir son image, et on estimait que les étudiants collégiaux constituaient une catégorie de consommateurs très importante pour cette entreprise.
Tout en révélant « la vérité derrière la marque de commerce », le site fournissait
également aux cybermilitants des lettres à envoyer au PDG d’alors de l’entreprise, Doug
Daft. Le directeur des technologies de l’information de Greenpeace, Brian Fitzgerald, affirmait que cette façon d’isoler des cibles précises permettait d’injecter une dose de controverse autour d’une marque en l’associant au crime environnemental. « Coke était vulnérable en ce sens, à cause de son statut de marque mondiale - l’entreprise faisait face à une campagne tout aussi mondiale qui pouvait nuire à sa réputation. »
Les coûts de cette campagne sont demeurés extrêmement bas. Le travail à temps partiel d’une seule personne a suffi pour mettre en ligne et gérer le site Web. Quelques autres personnes ont travaillé à temps partiel pour effectuer un travail médiatique et exercer des pressions auprès de représentants de Coca-Cola.
L’étape de planification de la campagne a duré plusieurs mois et comprenait des communications soutenues avec la compagnie
Coca-Cola. Le lancement comme tel s’est fait très simplement et une fois lancée, la campagne a fait son chemin toute seule à travers le monde, par boîtes de courrier
électronique interposées.
Dans cette campagne, Greenpeace avait appris des erreurs commises lors de cybercampagnes ratées. Une leçon importante
était que la cible de la campagne doit être sensible au type d’attaque choisi. Lors de cette campagne, par contre, tout s’est bien passé.
Le 28 juin 2000, Coca-Cola annonçait qu’avant les Jeux Olympiques d’Athènes de
2004, l’entreprise commencerait à cesser d’utiliser des HFC dans ses équipements de réfrigération. Elle s’est également engagée à poursuivre ses recherches pour trouver des alternatives à ces produits réfrigérants et a insisté auprès des fournisseurs d’équipements réfrigérants afin que ceux-ci se fixent un
échéancier précis pour la complète cessation d’utilisation des HFC dans tous les nouveaux
équipements de réfrigération pour les boissons gazeuses, et ce avant 2004.
Au moment de l’ouverture des Jeux
Olympiques d’Athènes en juillet 2004, Coca-
Cola avait adopté une politique consistant à ne pas acheter de nouveaux appareils de réfrigération pour les boissons gazeuses employant des HFC là où « existaient des alternatives commercialement rentables et disponibles 1 ». Coca-Cola a également promis de réduire sa consommation d’énergie de 40 à
50 p. 100 avant 2014.
1 Coca-Cola: Politique environnementale en matière de réfrigération http://www2.coca-cola.com/contactus/faq/ refrigerants.html
IFEX 20
Deuxieme Partie
Aller au-delà des alertes
2
IFEX 21
DEUXIEME PARTIE 2.1 ALLER AU-DELÀ DES ALERTES
Aller au-delà des alertes : Le MISA et la campagne Journalists
Under Fire de la SADC
« NOUS RECEVIONS
LES ALERTES, MAIS
QUE FAIRE ENSUITE ? »
2
.1
Bien des membres de la communauté de l’IFEX se demandent comment renforcer le réseau d’alertes et d’actions et comment dépasser ses limites pour améliorer l’efficacité de leur travail de défense de la liberté d’expression. Le Media Institute of Southern Africa (MISA) fait partie des membres de l’IFEX qui ont décidé de répondre à cette question.
Depuis 1994, le MISA surveille les violations de la liberté des médias et de la liberté d’expression au sein de la Southern African Development
Community (Communauté de développement de l’Afrique australe, SADC)
1
.
Cet organisme est d’ailleurs devenu très efficace dans sa publication et sa distribution d’alertes à travers le réseau de l’IFEX.
Or, le MISA a commencé à soulever certaines questions quant à l’efficacité de ses alertes en tant qu’outils de représentation. « Les alertes du
MISA sont d’excellents outils de représentation, en ce qu’elles renforcent la cause de la liberté d’expression. Malheureusement, la publication d’alertes ne garantit en rien la protection des journalistes, » selon Zoé Titus, gestionnaire du programme régional de surveillance de la liberté des médias. « Nous recevions les alertes, mais que faire ensuite ? »
Le MISA a reconnu qu’un suivi plus concret devait être donné aux alertes et que les journalistes devaient être soutenus plus efficacement. Le MISA a donc entrepris d’écouter le point de vue de travailleurs des médias qui ont été victimes de violations de la liberté d’expression pour savoir comment mieux aider les personnes dans de telles situations. À travers ce processus de consultation, le MISA a
élaboré sa campagne « SADC Journalists Under
Fire », qui vise non seulement à révéler des cas d’atteinte à la liberté d’expression et des médias, mais également à appuyer de façon concrète les victimes et militer pour un environnement favorable à la liberté d’expression.
1 Le travail du MISA porte surtout sur l’Angola, le Botswana, le Lesotho, le Malawi, le Mozambique, la Namibie, L’Afrique de Sud, le Swaziland, la Tanzanie, la Zambie et le
Zimbabwe. Parmi les autres pays de la SADC, on compte la République démocratique du Congo, la République de
Maurice et les Seychelles.
IFEX 22
DEUXIEME PARTIE 2.1 ALLER AU-DELÀ DES ALERTES
ÉTUDES PRÉLIMINAIRES
Le MISA a mandaté deux consultants pour
étudier différentes façons de donner suite efficacement à ses alertes. Les études ont d’abord été menées en Afrique australe par le
MISA et un consultant de la région, pour ensuite faire l’objet d’ateliers et être poursuivies par un consultant des Pays-Bas.
Le consultant d’Afrique du Sud a également reçu le mandat d’analyser les alertes actions que le MISA avait émises entre 2000 et 2002. La tâche du consultant consistait à cerner les tendances en matière de harcèlement des médias, à suggérer des actions de suivi efficaces pour différents types de violations et à identifier les journalistes et les travailleurs des médias qui se voyaient attaqués le plus souvent.
LES ATELIERS ONT FOURNI
L’OCCASION AUX JOURNALISTES DE
DÉCRIRE LES VIOLATIONS QU’ILS
ONT SUBIES ET LES AUTRES
MESURES QUI AURAIENT PU LEUR
ÊTRE UTILES.
L’analyse a révélé que l’étendue des violations de la liberté des médias ne se limitait pas au Zimbabwe, mais que ces violations avaient également lieu dans d’autres pays de la
SADC. L’étude a permis de déterminer les 12 violations les plus courantes de la liberté des médias, avec en tête de liste les restrictions sur les déplacements des journalistes, les arrestations et les menaces verbales. Ces informations, qui mettaient en lumière les enjeux prioritaires auxquels une attention immédiate devait être apportée, ont permis au
MISA de poser un regard critique sur ses propres programmes et de décider s’il fallait y apporter des ajustements.
Le consultant néerlandais a étudié les possibilités de coopération entre le Nord et le
Sud, en plus de poursuivre la mise au point de stratégies de suivi aux alertes.
ATELIERS CONSULTATIFS
En plus des études qu’il a commanditées, le
MISA a organisé deux ateliers consultatifs auxquels ont participé 19 journalistes en provenance de 10 pays différents, qui avaient tous été victimes d’atteinte à la liberté d’expression. Les ateliers ont fourni l’occasion aux journalistes de décrire les violations qu’ils ont subies et l’effet de ces violations sur leur vie, l’aide qu’ils ont reçue ou non, l’aide qui leur a été le plus utile et les autres mesures qui auraient pu leur être utiles.
Le premier atelier, tenu en juillet 2002, a rassemblé des journalistes ayant subi des attaques ainsi que des membres d’un groupe central d’agents d’information du MISA du
Zimbabwe et de la Zambie, deux pays considérés à haut risque pour la liberté des médias. Cet atelier a suscité de nombreux
échanges sur les différentes façons d’améliorer l’efficacité des activités du MISA.
En mai 2003, un nombre beaucoup plus
élevé de participants ont assisté au second atelier, incluant des agents d’information et de représentation du MISA venus de 10 pays de la SADC, des victimes de violations de la liberté des médias, ainsi que plusieurs organismes en faveur des droits de la personne et de la liberté d’expression. Les deux consultants ont présenté leurs rapports lors du forum alors que les participants, réunis en groupes de travail, ont formulé des
IFEX 23
DEUXIEME PARTIE 2.1 ALLER AU-DELÀ DES ALERTES
recommandations précises pour guider les activités futures du MISA.
DOCUMENT DU PROJET JOURNALISTS UNDER FIRE
Les recommandations émises à l’occasion du second atelier ont constitué la base du document du projet de la campagne « SADC
Journalists Under Fire », qui résume les stratégies et les activités en matière de collecte et de diffusion d’informations, d’appui direct aux journalistes dont les droits ont été bafoués, de représentation et de lobbying, de formation spécialisée et de recherche ciblée.
LA CONCLUSION LA PLUS
IMPORTANTE À LAQUELLE EN SONT
ARRIVÉS LES MEMBRES DU MISA EST
QU’IL FAUT AMÉLIORER
L’ASSISTANCE DIRECTE AUX
JOURNALISTES DONT LES DROITS
ONT ÉTÉ VIOLÉS.
Stratégie d’information, incluant les alertes actions
Le MISA et ses sections nationales prévoient poursuivre leur surveillance des médias et la diffusion d’alertes. La stratégie d’information du MISA consiste également à faire ce qui suit:
• rédiger des articles portant sur des journalistes locaux qui ont été victimes de violations de la liberté des médias, publiés dans un bulletin de nouvelles régionales;
• distribuer ce bulletin de nouvelles aux organismes de presse, aux ambassades, aux représentants politiques et aux groupes internationaux de défense des droits de la personne;
• encourager les organismes médiatiques nationaux à utiliser le bulletin.
Bien que sa stratégie de l’information demeure d’une importance vitale, le MISA a réalisé qu’il était essentiel de mettre de l’avant des stratégies complémentaires pour parvenir à ses fins.
L’ASSISTANCE DIRECTE AUX JOURNALISTES
La conclusion la plus importante à laquelle en sont arrivés les membres du MISA est qu’il faut améliorer l’assistance directe aux journalistes dont les droits ont été violés. « L’arrestation d’un journaliste constitue un événement dramatique , dit Zoé Titus. Les journalistes et leur famille doivent savoir qu’ils seront appuyés en cas de problème. » Même si le MISA a déjà fourni une assistance directe à certains journalistes, cela se faisait plutôt au cas par cas et non de façon systématique et organisée.
Le programme d’assistance directe aux journalistes, qui a vu le jour à la suite des deux ateliers consultatifs, comprend des mesures telles que les suivantes :
• visiter les journalistes emprisonnés;
• fournir une aide médicale en ayant recours aux fonds d’urgence;
• fournir un service de consultation à la suite d’un traumatisme;
• mobiliser des journalistes pour assister aux audiences en cour, en signe de solidarité;
• offrir rapidement une aide juridique aux journalistes emprisonnés;
• soutenir financièrement les familles des journalistes emprisonnés qui sont seuls à subvenir aux besoins de leur famille;
• déterminer des lieux sûrs pour le séjour de journalistes en exil et aider financièrement les journalistes exilés.
IFEX 24
DEUXIEME PARTIE 2.1 ALLER AU-DELÀ DES ALERTES
En améliorant le soutien direct aux journalistes, le MISA vise à renforcer les actions déjà entreprises dans certains pays. Par exemple, un réseau d’avocats pour le droit des médias, dont les activités sont appuyées par le
MISA-Zimbabwe, s’assure qu’un avocat sera disponible en moins d’une heure presque partout au pays lorsqu’un journaliste est arrêté ou détenu pour être interrogé. Les nombreux points du réseau de défense du MISA situés partout au pays permettent une aide juridique aussi rapide. Le MISA-Zimbabwe dispose
également d’un fonds de défense juridique, qui paie le salaire des avocats et fournit les fonds nécessaires à la libération des journalistes. De tels fonds nationaux de défense juridique sont
également gérés par les sections du MISA en
Zambie et au Botswana. Le MISA reconnaît qu’il existe un besoin particulier de la part des journalistes du Malawi et du Swaziland et que le réseau d’aide juridique devrait s’étendre à ces deux pays.
DÉFENSE ET LOBBYING
Le MISA prévoit déployer des efforts supplémentaires de défense et de lobbying pour réagir à certains enjeux prioritaires dans chaque pays, comme la levée de l’interdit de publication qui frappe le journal The
Guardian au Swaziland et la réforme des lois sur la diffamation au Lesotho. Le MISA entend également exercer un lobbying actif auprès d’organismes humanitaires régionaux, nationaux et internationaux pour leur signifier l’urgence de la défense des droits des médias.
Parmi les autres cibles que le MISA vise à atteindre par le lobbying, on note les ambassades de gouvernements africains, les ministères locaux des Affaires étrangères (dans le but de contester les politiques étrangères touchant les pays où se produisent des violations), les corps intergouvernementaux de la SADC et la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.
Ce n’est pas la première fois que le MISA entreprend de telles démarches de défense et de lobbying. Par exemple, depuis un certain temps, le secrétariat régional finance différentes sections pour modifier ou révoquer certaines lois répressives sur les médias dans leur propre pays et pour demander de meilleures lois. En mars
2001, le MISA s’était déjà repositionné en tant qu’organisme de pression.
Ainsi, le MISA en est venu à mieux reconnaître l’importance du travail de défense des droits pour installer un climat favorable à la liberté d’expression, plutôt que de se limiter
à réagir aux violations en publiant des alertes.
Par ailleurs, le rapport du consultant de l’Afrique australe a insisté sur le besoin d’accélérer les réformes juridiques. Le rapport incite les sections nationales à prioriser une ou deux lois dans le but de mettre en œuvre la réforme et de poser des gestes concrets en ce sens, comme l’embauche d’avocats et le lancement de contestations judiciaires, des gestes qui dépassent les simples efforts de sensibilisation du public.
FORMATION
Même si la formation ne constitue plus un aspect prioritaire du programme, le MISA reconnaît la valeur d’une formation « ciblée et liée à un programme » pour appuyer ses efforts de défense et de lobbying. Ainsi, par les aptitudes qu’elle développe chez les journalistes, la formation proactive permet aux journalistes d’éviter de se placer en situation difficile, et ce dès le départ.
IFEX 25
DEUXIEME PARTIE 2.1 ALLER AU-DELÀ DES ALERTES
RECHERCHE
Les recommandations émises à l’issue des ateliers ont incité le MISA à ajouter un
élément de recherche à sa campagne. Parmi les priorités de ces recherches, il y a notamment l’étude de cas de crimes impunis contre des journalistes. Il y a également la promotion d’une meilleure compréhension des institutions de l’Union africaine, du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique
(NEPAD), du Commonwealth et de l’Union européenne, et de la façon dont ces entités peuvent servir à promouvoir la liberté d’expression. Le MISA espère également démarrer un projet dont le but serait de déterminer si certaines cycles de violations de la liberté des médias peuvent servir de signal d’alarme précoce pour déceler les conflits qui
émergent dans un pays.
LANCEMENT DE LA CAMPAGNE ET ACTIVITÉS DE SUIVI
La campagne Journalists Under Fire de la
SADC a été officiellement lancée le 3 mai
2003, soit la Journée mondiale de la liberté de la presse. Depuis lors, les actions ont largement ciblé le Zimbabwe, pays où les atteintes à la liberté d’expression ont été particulièrement nombreuses.
TOURNÉE RÉGIONALE D’INFORMATION ET DE
LOBBYING DU MISA
Un exemple des efforts déployés par le MISA pour ajouter des activités de lobbying aux alertes que publie l’organisme a été sa réaction
à la fermeture, le 12 septembre 2003, des journaux The Daily News et le Daily News on
Sunday. Le MISA estimait qu’une campagne de défense ciblée était nécessaire pour révéler la répression des médias au Zimbabwe. Le secrétariat régional a lancé une tournée de lobbying dans six pays de la SADC – le
Botswana, le Malawi, la Namibie, l’Afrique du
Sud, la Tanzanie et la Zambie – entre la fin de septembre et le début d’octobre 2003. « Ces pays ont été choisis en raison de leur importance stratégique au sein de la SADC et du potentiel qu’ils ont d’influencer positivement la situation des droits de la personne au Zimbabwe », affirme Zoé Titus.
La délégation zimbabwéenne comprenait plusieurs journalistes, éditeurs, membres du personnel du MISA, avocats des médias et activistes de la population civile. Les sections nationales du MISA ont joué un rôle critique dans cette initiative, ayant la responsabilité d’organiser les conférences de presse et les entrevues, les forums de discussion publique et les rencontres avec les organisations des médias, les clubs de la presse et les ministres.
Parallèlement à ces activités, le secrétariat régional a coordonné la production de ressources documentaires sur papier et en ligne.
« Cette tournée régionale de publicité et de lobbying s’est révélée être l’un des grands succès du MISA en 2003 , déclare Zoé
Titus. L’intérêt et la couverture qu’a reçus cette tournée à l’échelle régionale, nationale et internationale ont été très importants.
L’expérience nous a beaucoup appris et nous avons l’intention d’y donner suite en organisant d’autres activités du même ordre. »
(Pour plus de renseignements sur le lobbying auprès des gouvernements, se référer à l’étude de cas décrivant la mission de l’Institut international de la presse en Israël,
à l’article 3.8).
IFEX 26
DEUXIEME PARTIE 2.1 ALLER AU-DELÀ DES ALERTES
ACTIVITÉS DES SECTIONS NATIONALES
À ce jour, les sections du MISA en Zambie, en
Tanzanie et au Zimbabwe ont activement mis en œuvre certains aspects de la campagne
Journalists Under Fire de la SADC.
BIEN QUE LE PROGRAMME DE
SURVEILLANCE DES MÉDIAS DU
MISA ÉTAIT À L’ORIGINE UNE
INITIATIVE ISOLÉE, IL S’INSCRIT
DÉSORMAIS DANS UNE STRATÉGIE
PLUS VASTE ET PROACTIVE.
Le MISA-Tanzanie a rapporté un lancement de campagne très réussi le 3 mai 2003, qui a fait l’objet d’une grande couverture médiatique.
En réaction à ce lancement et aux activités de lobbying de la section, le directeur des renseignements criminels a retiré toutes les accusations qui pesaient contre le journaliste indépendant John Maziku, qui faisait face à une accusation d’outrage au tribunal pour avoir présumément « insulté » le parlement en 2001.
Le MISA-Zambie continue d’offrir son appui financier aux membres qui sont aux prises avec des difficultés financières, par l’entremise des prêts du Threatened Media
Fund. La section zambienne a fait l’acquisition d’une imprimante pour le journal privé The
Monitor, dont les reportages ont su parfois provoquer la colère des autorités. Cette section a également aidé trois journalistes indépendants à installer un bureau à domicile en achetant des appareils photo et des ordinateurs.
Dans le cadre de la campagne Journalists
Under Fire, le MISA-Zimbabwe a fourni une assistance aux journalistes du Daily News et du
Daily News on Sunday en mettant à leur disposition des espaces de réunion, des
équipements permettant l’échange de messages
électroniques dans les bureaux du MISA-
Zimbabwe, ainsi qu’une aide financière pour assumer les frais liés aux services juridiques. Le fonds d’urgence de la section a également servi
à appuyer le journal hebdomadaire indépendant The Tribune par l’achat de trois ordinateurs, à la suite du vol de 20 ordinateurs dans les bureaux du journal.
CONCLUSION
En s’appuyant sur les découvertes faites lors des consultations menées auprès de journalistes et sur l’évaluation de ses activités, le MISA s’efforce de compléter la publication d’alertes par une série d’actions destinées à appuyer les journalistes. « En un mot, la campagne Journalists Under Fire de la SADC devrait être perçue comme procédant d’une nouvelle approche ‘holistique’ à la surveillance de la liberté de la presse et à la défense des droits des médias, dit Zoé Titus. Bien que le programme de surveillance des médias du
MISA était à l’origine une initiative isolée, il s’inscrit désormais dans une stratégie plus vaste et proactive. »
La vision stratégique plus complète du
MISA constitue un exemple précieux d’un organisme qui se dote de nouveaux moyens pour défendre la liberté d’expression qui vont au-delà de la publication d’alertes.
IFEX 27
Troisième Partie
Outils de campagne et études de cas illustrant les pratiques recommandées
3
IFEX 28
TROISIÈME PARTIE
INDEX DE LA TROISIÈME PARTIE: BOÎTE À OUTILS,
ÉTUDES DE CAS ET RESSOURCES
Index de la Troisième
Partie: Boîte à outils,
Études de cas et
Ressources
TABLE DES MATIÈRES
Les actions conjointes de l’IFEX
Boîte à outils : Comment lancer une action conjointe de l’IFEX 30
Étude de cas : L’Association des journalistes de Hong Kong
(HKJA) et sa campagne contre l’article 23 40
Boîte à outils : Des outils Internet pouvant être utilisés pour faire campagne 43
Gérer les ressources juridiques
Boîte à outils : Comment les ressources juridiques peuvent renforcer une campagne 55
Étude de cas : La campagne pour la Loi sur le libre accès à l’information d’ARTICLE 19 en
Travailler au sein d’une coalition
Boîte à outils : Comment la formation de coalitions peut renforcer une campagne 65
Expression Institute et la campagne contre le Projet de loi antiterroriste d’Afrique du Sud 69
L’appui de personnalités publiques
Boîte à outils : Comment l’appui de personnalités publiques peut renforcer une campagne 75
Étude de cas : La campagne internationale pour l’interdiction des mines terrestres 79
Boîte à outils : Comment les tournées de conférences peuvent renforcer une campagne 86
Démocratie et la tournée annuelle du Prix John Humphrey pour la liberté 91
Boîte à outils : Comment planifier une mission d’enquête 98
Étude de cas : Mission conjointe internationale à
Boîte à outils : Comment effectuer un lobbying efficace 106
Études de cas :
Human Rights Watch et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement 111
b) Lobbying national : La mission de 2003 de l’Institut international de la presse en Israël 117
Boîte à outils : Comment organiser une conférence de presse efficace 122
Étude de cas : Le rapport annuel du Comité pour la protection des journalistes 128
Boîte à outils : Comment l’écriture de lettres peut renforcer une campagne 132
Étude de cas : Le PEN international et sa campagne en faveur du général Gallardo 138
IFEX 29
TROISIÈME PARTIE 3.1 ACTIONS CONJOINTES DE L’IFEX (BOÎTE À OUTILS)
Actions conjointes de l’IFEX
NOTA
: Cet outil de campagne a été spécialement conçu pour les membres de l’IFEX. Cependant, il peut être adapté aux besoins des autres organisations des droits de la personne.
BOÎTE À OUTILS
COMMENT LANCER UNE ACTION CONJOINTE DE L’IFEX
Les membres de l’IFEX ont la possibilité de se servir du Réseau d’alertes et d’actions pour permettre aux autres groupes membres de signer leurs lettres et leurs pétitions (ou encore de les encourager à lancer leurs propres appels et à prendre d’autres mesures). Un appel par courriel est d’abord envoyé aux abonnés de la liste interne d’adresses électroniques de l’IFEX, qui encourage les membres de l’IFEX à participer à l’action et qui fixe une
échéance pour les réponses.
Lorsque la date limite pour recevoir les réponses est échue et que tous les membres de l’IFEX désirant participer à l’action ont eu l’occasion de signifier leur intérêt, la déclaration finale, présentée en tant qu’action conjointe de l’IFEX, sera distribuée auprès des membres de la communauté internationale.
3
.1
AVANTAGES
L’utilisation du réseau de l’IFEX pour mener des actions conjointes comporte les avantages suivants :
•
Il s’agit d’un moyen efficace et rapide de s’assurer du soutien de l’ensemble des membres de l’IFEX pour les campagnes locales de votre organisation.
•
Le taux de réponse des membres de l’IFEX à un appel est habituellement élevé.
•
Le fait de disposer d’appuis au sein d’une grande communauté internationale et d’être en mesure de le montrer renforce une campagne et la rend plus légitime.
•
Le coût aux membres est nul ou presque, si ce n’est le temps passé à rédiger un appel et à distribuer le produit fini.
•
Permet d’établir des relations entre les membres de l’IFEX et peut mener à de nouvelles campagnes conjointes à l’avenir.
•
Permet aux autres membres de l’IFEX d’appuyer la campagne de votre groupe sans qu’ils n’aient à vous consacrer beaucoup de temps ou de ressources.
Même si les avantages sont nombreux, on doit se rappeler qu’une action conjointe n’a pas les mêmes effets à long terme qu’une implication des autres membres dans une
IFEX 30
TROISIÈME PARTIE 3.1 ACTIONS CONJOINTES DE L’IFEX (BOÎTE À OUTILS)
campagne plus complète et comportant plusieurs volets. Puisque l’engagement des autres membres de l’IFEX se limite habituellement à répondre ponctuellement à l’appel que lance votre groupe, les liens qui se créent peuvent ne pas être aussi durables que ceux créés dans le cadre d’une campagne plus complète.
PLANIFIER UNE ACTION CONJOINTE DE L’IFEX
Énoncez clairement vos attentes aux autres membres de l’IFEX
•
Réfléchissez bien à l’action que vous désirez entreprendre et communiquez clairement vos attentes aux autres membres de l’IFEX.
S’agit-il de signer une lettre? D’appuyer la création d’un comité ? Devraient-ils communiquer avec vous directement, ou passer par le Secrétariat de l’IFEX ?
•
Acceptez-vous des signatures d’organismes qui ne sont pas membres de l’IFEX ? Si tel est le cas, vous pourriez demander aux membres de l’IFEX d’encourager d’autres groupes à y adhérer. Rappelez-vous que certains membres de l’IFEX pourraient être réticents à l’idée d’ajouter leur nom à une liste où figurent des organismes qui ne sont pas membres et qu’ils ne connaissent pas.
Mettre l’accent sur l’initiative de votre groupe ou sur la nature internationale de l’action
•
Vous devrez décider si vous présentez l’action comme une initiative particulière de votre groupe, à laquelle adhèrent les autres membres, ou si vous préférez mettre de l’avant l’aspect international de l’action – c’est-à-dire une action conjointe menée par tous les signataires (et où le nom de votre groupe figurera parmi tous les autres noms).
•
Dans la plupart des cas, il est préférable de mettre en évidence le fait que votre groupe est à l’origine de l’action conjointe.
Toutefois, dans certains contextes où la sécurité devient un enjeu, certains groupes locaux préféreront minimiser leur implication pour mettre davantage l’accent sur la nature internationale du projet, afin d’éviter toute forme de représailles.
Laisser aux autres le temps de répondre
•
Laissez aux autres membres de l’IFEX le temps de vous répondre. Habituellement, une semaine à dix jours suffisent.
Tirer le meilleur parti d’une action conjointe
Votre organisation doit réfléchir aux moyens qu’elle prendra pour obtenir l’appui des autres membres de l’IFEX et à la façon dont l’action conjointe sera réalisée, une fois toutes les signatures recueillies. Parmi les options choisies par des membres dans le passé, on notera notamment :
• la publication d’un communiqué de presse;
• la tenue d’une conférence de presse;
• la présentation de l’action conjointe aux autorités lors d’une rencontre;
• l’envoi d’une lettre conjointe aux autorités par courriel, télécopieur, etc;
• la conduite d’une enquête indépendante après avoir obtenu l’appui des autres membres de l’IFEX dans cette initiative.
IFEX 31
TROISIÈME PARTIE 3.1 ACTIONS CONJOINTES DE L’IFEX (BOÎTE À OUTILS)
Mise en garde
•
Le fait qu’un certain nombre de membres de l’IFEX appuie votre action conjointe ne signifie pas que la communauté entière de l’IFEX l’appuie. Vous devrez vous en souvenir lorsque vous présenterez l’action conjointe.
UNE OPTION ALTERNATIVE
Le plus souvent, les membres choisissent de demander aux autres de signer un appel qu’ils ont eux-mêmes rédigé. On peut également choisir d’envoyer une note interne aux membres de l’IFEX, leur demandant d’envoyer leur propre lettre (ou de poser un geste quelconque, comme de communiquer avec un ambassadeur dans leur propre pays, d’envoyer une lettre aux journaux, etc.). Habituellement, cela signifie qu’il faut produire une lettre type pour donner aux membres une bonne idée du message que vous désirez transmettre. Ces derniers pourront ainsi suivre cet exemple lorsqu’ils rédigeront leurs propres lettres.
L’avantage de cette option est qu’une lettre rédigée par un autre membre de l’IFEX aura, dans certains cas, plus de poids que le simple ajout d’une signature à une action conjointe.
Le désavantage de cette même option est que le taux de réponse sera parfois plus faible, puisque le temps et l’effort que vous demandez aux membres de fournir sont plus grands. Il en revient à votre organisme de décider laquelle de ces options devrait être la plus efficace, compte tenu des circonstances.
Si vous choisissez cette dernière option, vous aurez sans doute besoin d’assurer un suivi téléphonique à la suite de l’envoi d’un appel interne aux membres de l’IFEX, afin de les encourager à écrire leurs propres lettres. D’un point de vue purement pratique, il faut se rappeler qu’il est plus facile d’obtenir la signature des membres que de réussir à leur faire écrire une lettre.
RÉDIGER UN APPEL INTERNE POUR OBTENIR UN APPUI
Exactitude
•
Comme dans le cas des alertes, l’exactitude des faits rapportés est essentielle. Menez votre propre enquête pour vous assurer de la véracité des faits. Les autres membres de l’IFEX, en s’associant à votre action, présument que vous avez bien fait votre travail et que vous vous êtes assuré que les faits sont réels. Les données inexactes discréditent l’ensemble des signataires et elles réduisent également les chances que les membres de l’IFEX appuient votre groupe à l’avenir.
•
Les membres de l’IFEX qui ont reçu l’appel peuvent relever des erreurs avant que la lettre ne soit envoyée à l’extérieur, mais il est important d’éviter de transmettre des informations inexactes, puisque cela oblige à corriger l’appel et à demander aux membres de l’IFEX de signer une nouvelle version.
Souvenez-vous également qu’une deuxième version du même appel ne suscitera pas autant de réponses que la première.
Éviter les déclarations non fondées
•
Évitez les déclarations non fondées ou les hypothèses vagues, car elles finissent toujours par causer plus de tort que de bien et minent la crédibilité de l’appel dans son ensemble
(ainsi que celle des signataires).
IFEX 32
TROISIÈME PARTIE 3.1 ACTIONS CONJOINTES DE L’IFEX (BOÎTE À OUTILS)
Citer des traités internationaux et des constitutions nationales
•
Lorsque la situation s’y prête, faites référence aux passages pertinents de traités internationaux qui ont été signés ou ratifiés par l’État qui s’est rendu coupable des violations en question, comme l’Article 19 du
Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Déclaration universelle des droits de l’homme.
•
Il peut aussi s’avérer utile de faire référence aux dispositions en matière de liberté d’expression figurant dans la constitution du pays dans lequel des violations ont eu lieu.
Rendre l’appel facile à lire et à comprendre
•
Débutez votre appel en résumant très brièvement les enjeux et en présentant votre position face à ces enjeux.
•
Employez un langage courant et évitez l’argot.
•
Faites des phrases courtes et utilisez une grammaire simple.
•
Divisez les paragraphes trop longs.
•
Définissez les termes que vous employez.
•
Indiquez les noms complets des organismes politiques, des mouvements, etc., en plus des acronymes.
Fournir les détails essentiels
•
Expliquez clairement et de manière concise les principaux faits.
•
Expliquez la pertinence de ces détails pour la liberté d’expression.
Expliquer le contexte
•
Ne présumez pas que les autres membres de l’IFEX sont déjà au courant des détails de votre cause.
•
Fournissez les renseignements de base essentiels de manière claire et concise.
Faire un bon travail de révision
•
Il peut être souhaitable de recueillir les avis d’autres groupes avant d’obtenir l’approbation finale de votre propre organisme et d’envoyer l’appel à travers le réseau de l’IFEX.
•
Fournissez les renseignements de base essentiels de manière claire et concise.
•
Vérifiez l’orthographe. Assurez-vous que les noms sont correctement épelés dans l’ensemble du document.
•
Évitez les répétitions.
POUR OBTENIR UNE MEILLEURE RÉPONSE
Assurer un suivi auprès des autres membres de l’IFEX
•
Une fois l’appel envoyé aux membres de l’IFEX, il est recommandé d’assurer un suivi téléphonique pour améliorer le taux de réponse.
•
Si vous vous demandez pourquoi certains membres n’ont pas répondu à votre appel, il peut être utile de les contacter par téléphone pour en connaître la raison. Cela peut
également permettre à votre groupe d’apprendre comment lancer plus efficacement ses appels à l’avenir.
Réviser le document pour recueillir plus d’appuis
•
Parfois, certains membres désirent répondre à un appel mais ne le font pas parce qu’ils
IFEX 33
TROISIÈME PARTIE 3.1 ACTIONS CONJOINTES DE L’IFEX (BOÎTE À OUTILS)
s’opposent à un point particulier du libellé.
Une révision inciterait peut-être un plus grand nombre de membres à signer le document. Toutefois, il se peut que votre groupe préfère ne pas modifier son message trop en profondeur si les modifications envisagées en réduiraient l’impact auprès du public cible.
•
Il est également possible d’éviter de réviser votre appel une fois qu’il a été envoyé à l’ensemble des membres en recueillant les réactions de deux ou trois membres de l’IFEX avant de transmettre l’appel à la communauté entière.
•
En bout de ligne, il revient à votre organisation de décider jusqu’à quel point vous désirez réviser le contenu de votre message à la lumière des remarques des autres membres, pour gagner de nouveaux appuis.
La communication après l’action conjointe
•
Une fois toutes les signatures recueillies et l’action conjointe lancée, il est recommandé de remercier les signataires et de les informer des suites de l’action et de ses éventuels résultats. Ce type de suivi encouragera les membres à participer à d’autres appels à l’avenir.
IFEX 34
APPEL INTERNE DE L’IFEX : UN EXEMPLE
TROISIÈME PARTIE 3.1 ACTIONS CONJOINTES DE L’IFEX (BOÎTE À OUTILS)
IFEX – NOUVELLES DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE DE DÉFENSE DE LA LIBERTÉ D’EXPRESSION
APPEL INTERNE - CHINE (HONG KONG)
Le 8 novembre 2002
La HKJA presse les membres de l’IFEX de signer un appel dénonçant une proposition de loi sur la sécurité nationale
SOURCE : L’Association des journalistes de Hong Kong (HKJA)
(HKJA/IFEX) – Ci-après, un appel interne de la HKJA :
Chers collègues,
Nous désirons par la présente attirer votre attention sur un enjeu de la plus haute importance pour la liberté d’expression et la liberté de la presse à Hong Kong. Nous espérons vivement recevoir votre appui dans cette affaire.
L’article 23 de la Loi fondamentale de Hong Kong prévoit l’adoption de lois dont l’objectif serait d’assurer la sécurité nationale après la reprise du pouvoir par les autorités chinoises. Le 24 septembre 2002, le gouvernement de Hong Kong a publié des propositions visant à appliquer l’article 23. L’Association des journalistes de Hong Kong (HKJA) considère que ces propositions accordent une importance démesurée à la sécurité nationale, au détriment des libertés civiles, notamment la liberté de parole et la liberté de la presse.
Nous nous opposons également avec véhémence à la façon dont ces propositions sont mises en application. Le gouvernement demande au public de réagir à un document de consultation qui ne fait que résumer la loi en question. Le public ne peut que deviner la formulation réelle de cette loi. Ainsi, le gouvernement minimise les inquiétudes de nombreuses personnes en les qualifiant de non fondées. Le plan officiel prévoit la fin de la consultation le 24 décembre 2002.
Nous vous demandons, en tant que partisans de la liberté de la presse, de signer la lettre de protestation ci-dessous. Elle sera envoyée au gouvernement de Hong Kong pour demander que le
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TROISIÈME PARTIE 3.1 ACTIONS CONJOINTES DE L’IFEX (BOÎTE À OUTILS)
projet de loi, sous forme de projet de loi blanc, soit d’abord présenté au public pour qu’il puisse formuler des commentaires et demander que des mesures de protection garantissant la liberté d’expression soient incluses dans la nouvelle loi. Notre document d’information sur l’article 23, qui décrit plus en détail nos préoccupations, peut être consulté à l’adresse suivante : www.hkja.org.hk.
Nous prévoyons tenir une conférence de presse le 24 novembre pour présenter cette lettre de protestation conjointe aux représentants du gouvernement de Hong Kong. Plus le nombre de membres de l’IFEX qui signent cette lettre sera grand, plus notre message sera fort.
Les membres de l’IFEX qui désirent signer notre lettre sont invités à contacter le Secrétariat de l’IFEX à l’adresse ifex@ifex.org avant midi (heure normale de l’Est) le 15 novembre.
Salutations chaleureuses,
MAK YIN TING
Présidente du HKJA
IFEX 36
TROISIÈME PARTIE 3.1 ACTIONS CONJOINTES DE L’IFEX (BOÎTE À OUTILS)
Au : Secrétaire de la sécurité, Mme Regina Ip, Région administrative spéciale de Hong Kong,
République populaire de Chine
Le 24 septembre 2002, le gouvernement de Hong Kong a publié des propositions visant à mettre en application l’article 23 de la Loi fondamentale, en vue d’adopter la législation pertinente avant juillet 2003.
Nous, les organisations soussignées, exprimons notre plus vive inquiétude face à ces propositions qui accordent une importance démesurée à la sécurité nationale au détriment des libertés civiles, notamment la liberté de parole et la liberté de la presse.
Les personnes les plus directement touchées sont celles qui travaillent avec les idées et les informations. Il s’agit entre autres d’universitaires, d’artistes, de journalistes, d’analystes en valeurs mobilières, d’éditeurs et de distributeurs de journaux, de livres, de périodiques et de films. L’étendue du filet jeté par ces propositions englobe même les paroles et les actes d’un grand nombre d’étrangers qui possèdent des liens avec Hong Kong, comme les cadres expatriés de plusieurs firmes multinationales. Nous croyons que de telles lois auront un effet intimidant, en forçant les individus à s’autocensurer et en figeant le débat public.
Nous craignons que les dispositions de l’article 23 rendent possible la poursuite judiciaire de tout résident permanent, y compris les étrangers ayant obtenu le droit de résider à Hong Kong pendant sept ans, pour ce qu’ils pourraient dire à Hong Kong comme à l’étranger.
De plus, la définition que donne la loi projetée de « publications séditieuses », une accusation permettant d’emprisonner pendant sept ans toute personnes trouvée coupable de « trahison, de sécession ou de subversion », ou « qui met en péril la stabilité de la Chine et de Hong Kong » est si vague que les bibliothécaires de l’université de Hong Kong ont indiqué qu’ils craignaient que la plupart des livres de leur bibliothèque ne soient considérés comme séditieux.
Ces dispositions auraient pour effet de paralyser les individus, les groupes et les entreprises qui
œuvrent dans le domaine de l’échange d’informations, ce qui contreviendrait à l’esprit de l’article
19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 des Nations Unies, qui stipule que
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TROISIÈME PARTIE 3.1 ACTIONS CONJOINTES DE L’IFEX (BOÎTE À OUTILS)
« Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit. »
Nous craignons que l’article 23 ne donne au Secrétaire de la sécurité le pouvoir de bannir des organisations politiques locales et étrangères. Dans certains cas, une simple déclaration indiquant qu’une organisation met en danger la sécurité nationale de la Chine suffirait à faire interdire l’organisation en question – avec une possibilité d’appel limitée devant les tribunaux de Hong
Kong, augmentant ainsi la possibilité d’intervention du gouvernement chinois à Hong Kong.
Nous nous opposons également avec force à la façon dont ces propositions sont mises en application. Votre gouvernement demande au public de réagir à un document de consultation qui ne fait que résumer la loi en question. Le public peut seulement deviner la formulation réelle de cette loi et ainsi, votre gouvernement minimise les inquiétudes de nombreuses personnes en les considérant non fondées. Le projet de loi détaillé sera présenté au Conseil législatif en février
2003. Il sera alors trop tard pour qu’un débat significatif puisse avoir lieu ou pour présenter des contre-propositions.
Le principal objectif déclaré de la Loi fondamentale est de devenir la pierre angulaire du principe « un pays, deux systèmes », un concept qui permet à Hong Kong de conserver un mode de vie distinct de celui du système socialiste chinois. C’est ainsi que la Loi fondamentale stipule que les libertés personnelles, le système de common law et l’économie de marché de Hong Kong demeureront inchangés pendant une période de 50 ans, à compter du 1er juillet 1997.
Aujourd’hui, cinq ans après le retour de Hong Kong à la Chine, rien n’indique que Hong
Kong représente une menace à la sécurité nationale de quelque manière que ce soit.
Nous demandons instamment au gouvernement de Hong Kong de présenter d’abord le projet de loi à la population de Hong Kong afin qu’elle puisse formuler des commentaires. Le gouvernement, avant de présenter le projet de loi au Conseil législatif, devrait s’assurer que les
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TROISIÈME PARTIE 3.1 ACTIONS CONJOINTES DE L’IFEX (BOÎTE À OUTILS)
révisions nécessaires ont été apportées au projet de loi, à la lumière des commentaires du peuple.
Nous demandons également au gouvernement de Hong Kong de poser les gestes suivants :
• annuler les délits de sédition et de publication séditieuse;
• assurer que la liberté d’expression soit protégée de façon significative dans les nouvelles lois, en vertu des Principes de Johannesburg sur la sécurité nationale, la liberté d’expression et l’accès
à l’information;
• assurer qu’une poursuite en vertu de l’article 23 puisse être entamée seulement s’il y a intention d’inciter à la violence et s’il existe un rapport direct et immédiat entre une telle expression et la probabilité de violence ou une violence réelle;
• assurer que personne ne sera puni pour avoir révélé des renseignements dans l’intérêt du public si les bénéfices de ces renseignements pour le public dépassent les inconvénients qu’ils créent.
Pour plus de renseignements, veuillez communiquer avec Mak Yin-ting à l’Association des journalistes de Hong Kong (HKJA), Flat A, 15/F, Henta Commercial Bldg., 348-350 Lockhart
Road, Wanchai, Hong Kong, téléphone : +852 2591 0692, télécopieur : +852 2572 7329, courriel : hkja@hk.super.net, site Web : http://www.hkja.org.hk/.
La HKJA assume l’entière responsabilité des renseignements contenus dans le présent appel interne. Veuillez citer la HKJA et les autres groupes si vous publiez ou diffusez ce texte, en entier ou en partie.
DIFFUSÉ PAR LE SECRÉTARIAT DE L’ÉCHANGE
INTERNATIONAL DE LA LIBERTÉ D’EXPRESSION (IFEX)
, rue College, Bureau , Toronto (Ontario)
M
G A CANADA
Téléphone : +
télécopieur : ․
Alertes par courriel : alerts@ifex.org courriel général : ifex@ifex.org
Site Web : http://www.ifex.org/
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TROISIÈME PARTIE 3.1 ACTIONS CONJOINTES DE L’IFEX (ÉTUDE DE CAS)
Actions conjointes de l’IFEX
3
.1
ÉTUDE DE CAS
L’ASSOCIATION DES JOURNALISTES DE HONG KONG (HKJA) ET SA CAMPAGNE CONTRE L’ARTICLE 23
C O N T E X T E
Hong Kong, une ancienne colonie britannique, est devenue une région administrative spéciale de la
Chine en 1997, selon le principe « un pays, deux systèmes ». La Chine accepte d’accorder une grande autonomie à la région et de maintenir ses systèmes économique et social actuels pendant une période de 50 ans suivant la date du retour à la Chine.
La Loi fondamentale (Basic Law), une mini constitution de Hong Kong, fixe la pleine démocratie comme objectif
éventuel. Or, l’article 23 de ce document exige également que soient considérés illégaux certains actes comme la trahison, la subversion et la sécession, la sédition (y compris la publication, la vente ou la présentation de « publications séditieuses », le vol de secrets d’État (y compris la révélation d’informations gouvernementales pouvant mettre en danger la sécurité nationale) et certaines activités politiques menées par des organisations étrangères.
En septembre 2002, le gouvernement de Hong Kong a présenté des propositions visant à appliquer l’article
23. Cinq mois plus tard, il présentait un projet de loi sur la sécurité nationale, pour permettre l’adoption de l’article. Les opposants indiquent que les dispositions du projet de loi projeté pourraient mener, entre autres, à rendre illégaux certains groupes déjà frappés d’interdit en Chine, menacer le droit de manifester pacifiquement et mettre en cause les droits des journalistes et des organisations non gouvernementales.
Le 1er juillet 2003, à l’occasion du 6e anniversaire du retour de Hong Kong à la Chine, un demi-million de personnes sont descendues dans les rues pour dénoncer le projet de loi. Quelques jours plus tard, le gouvernement retirait ce projet de loi controversé.
L’abandon de ce projet de loi a constitué une grande victoire pour les forces démocratiques de Hong Kong, même si l’on craint que Beijing ne tente de le réintroduire plus tard. Dans leur rapport annuel 2004, l’Association des journalistes de Hong Kong (HKJA) et l’ARTICLE 19 émettent certaines inquiétudes quant à la volonté des gouvernements de Hong Kong et de Chine de défendre les valeurs clés de la région, dont la liberté d’expression.
En novembre 2002, l’Association des journalistes de Hong Kong (HKJA) a lancé un appel pour obtenir l’appui de la communauté internationale, surtout par le biais du réseau de l’IFEX. Cet appel s’inscrivait dans une campagne de défense de la liberté d’expression et d’autres droits contre certaines mesures proposées en matière de sécurité nationale, qui visaient la mise en application des dispositions de l’article 23 de la Loi fondamentale de Hong
Kong (voir « Contexte »).
« Nous avons déclaré à maintes reprises qu’il
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TROISIÈME PARTIE 3.1 ACTIONS CONJOINTES DE L’IFEX (ÉTUDE DE CAS)
n’était pas nécessaire de voter de nouvelles lois pour appliquer l’article 23 », explique l’ancienne présidente de la HKJA, Mak Yinting. « Au contraire, nous croyons qu’il serait préférable d’améliorer les lois existantes, afin que les droits de la personne à Hong Kong ne soient pas remis en question. »
La HKJA s’est associée à d’autres organisations non gouvernementales du Civil
Human Rights Front (Front civil pour les droits de la personne de Hong Kong) pour s’opposer à la mise en application de l’article
COMPTE TENU DE L’ÉTENDUE DU
RÉSEAU DE L’IFEX, NOUS AVONS
PENSÉ QU’IL PERMETTRAIT DE
CANALISER EFFICACEMENT LE
SOUTIEN INTERNATIONAL.
23, que l’on considère comme une menace pour tous ceux qui travaillent avec des idées et des informations – ce qui regroupe, entre autres, les journalistes, les universitaires, les artistes, les éditeurs, les distributeurs de films et les libraires.
En seulement une semaine, la HKJA a recueilli les signatures de 879 journalistes locaux s’opposant aux mesures du gouvernement, soit environ 45 p. 100 des journalistes du territoire. L’association a
également lancé un appel à la communauté internationale pour recevoir son appui.
LE RENFORCEMENT DE L’APPUI INTERNATIONAL
« Pendant nos discussions sur la façon d’exprimer notre opposition, j’ai réalisé qu’il
était important d’attirer l’attention de la communauté internationale sur ce sujet , de remarquer Mak Yin-Ting. Le gouvernement de
Hong Kong tiendrait compte de la réaction de la communauté internationale pendant le processus législatif. Compte tenu de l’étendue du réseau de l’IFEX, nous avons pensé qu’il permettrait de canaliser efficacement le soutien international. »
La HKJA a rédigé un appel interne, que l’IFEX a ensuite distribué par courriel à ses plus de 50 organisations membres. Après avoir appris combien de membres avaient répondu à son appel, la HKJA a émis un communiqué de presse à l’attention du public et du gouvernement, pour faire part du vaste appui reçu. L’association a également tenu une conférence de presse, qui a retenu l’attention de la plupart des médias locaux.
« Je considère que l’IFEX est un outil efficace pour lancer un appel international », dit Mak Yin-Ting. La HKJA a également écrit des lettres à d’autres organisations pour demander un appui, mais cette façon de faire s’est avérée plus fastidieuse que l’approche rapide de nombreux groupes par le réseau de l’IFEX. La plupart des groupes étrangers qui ont éventuellement appuyé la campagne de la
HKJA, soit 19 groupes sur 29, étaient des membres de l’IFEX. La HKJA a également effectué du lobbyisme auprès de diplomates
étrangers à Hong Kong pour exprimer leur inquiétude face aux mesures de sécurité.
Parmi les signataires de l’IFEX, on note l’Association mondiale des journaux, qui représente plus de 18 000 publications dans cinq continents, ainsi que la Fédération internationale des journalistes, qui compte
500 000 membres (voir les sites http://www.ifex.org/en/content/view/full/3223
9/ et http://www.ifex.org/en/content
/view/full/17894/). La HKJA a pu indiquer qu’elle bénéficiait de l’appui d’organisations
IFEX 41
TROISIÈME PARTIE 3.1 ACTIONS CONJOINTES DE L’IFEX (ÉTUDE DE CAS)
situées dans 155 pays différents, dont les membres réunis représentent plus d’un demimillion de personnes, parmi lesquelles des journalistes de première ligne, des propriétaires et des dirigeants de l’industrie des médias, des
écrivains et des caricaturistes.
L’association a également envoyé une lettre de remerciements aux membres de l’IFEX.
« Nous désirons d’une part vous remercier, mais également, nous pensons qu’il est important d’encourager les membres de l’IFEX
à répondre aux appels internes », explique Mak
Yin-Ting.
En plus de signer l’action conjointe de la
HKJA, plusieurs membres de l’IFEX, parmi lesquels Freedom House, Human Rights
Watch et le Comité pour la protection des journalistes, ont fait parvenir leurs propres critiques du projet de loi au gouvernement de
Hong Kong.
RESSOURCES DE LA CAMPAGNE
Une action conjointe de l’IFEX utilise avantageusement le courriel qui permet de mobiliser rapidement les appuis à peu ou pas de frais. Ainsi, la seule dépense occasionnée à la HKJA a été le temps – environ une semaine
– passé par Mak Yin-Ting et un autre membre du comité exécutif à rédiger et à réviser l’appel,
à obtenir l’appui du comité exécutif de l’association et à rédiger un communiqué de presse présentant les résultats de l’action conjointe. Aucune autre forme de levée de fonds n’a été requise.
IMPACT
« Il est difficile de cerner les effets particuliers de l’action conjointe de l’IFEX », affirme Mak
Yin-Ting. Elle indique que le gouvernement de
Hong Kong, même au courant de la réaction suscitée au sein de la communauté internationale par cette affaire, avait d’abord décidé d’imposer le projet de loi malgré tout.
Cependant, certaines inquiétudes exprimées par plusieurs membres de consulats et de chambres de commerce étrangers (qui comptent plusieurs grandes entreprises
étrangères parmi leurs membres) ont
éventuellement forcé le gouvernement à réduire la portée de certains articles du projet de loi. « L’inquiétude des membres de la communauté internationale a clairement contribué à empêcher le gouvernement d’adopter des mesures répressives pour parvenir à ses fins », ajoute Mak Yin-Ting.
« Il est également difficile d’évaluer l’impact de la réaction internationale sur la population de Hong Kong , dit-elle. J’ai entendu des individus qui se disaient impressionnés par ce que les journalistes locaux et les membres des autres professions avaient accompli, ainsi que par l’ampleur des réactions à l’étranger.
Certains se sont intéressés de plus près à la question, l’opposition s’est renforcée et finalement le 1er juillet 2003, un demi-million de personnes défilaient dans les rues. »
La cause directe du retrait du projet de loi
était la démission, le 6 juillet, du chef du Parti libéral du Conseil exécutif, ce qui a retiré au gouvernement les appuis nécessaires pour adopter le projet de loi. « Or, la démission du chef du parti libéral était reliée, en partie, aux manifestations du 1er juillet », ajoute Mak
Yin-Ting.
Dans l’ensemble, l’action conjointe de l’IFEX aura joué un rôle isolé mais important dans l’opposition générale à ce projet de loi.
Nous encourageons les membres de l’IFEX à entreprendre de telles actions conjointes pour mieux appuyer leurs propres campagnes.
IFEX 42
TROISIÈME PARTIE 3.2 CYBERACTIVISME (BOÎTE À OUTILS)
Cyberactivisme
3
.2
BOÎTE À OUTILS
DES OUTILS INTERNET POUVANT ÊTRE UTILISÉS POUR FAIRE CAMPAGNE
C O N T E X T E
L’évolution de l’Internet a été fulgurante depuis que les membres de l’IFEX ont commencé à utiliser des outils en ligne dans les années 1990. En effet, la plupart des membres disposent désormais de leur propre site Web et utilisent couramment le courrier électronique et les autres outils permettant l’échange d’informations et la coordination d’actions conjointes. Toutefois, le cyberactivisme dépasse largement la création de sites Web et les listes de courriels. Les nouvelles technologies permettent maintenant la création d’outils plus sophistiqués qui permettent à ceux et celles qui militent en faveur de la liberté d’expression de mieux mobiliser l’appui du public et de lancer des campagnes.
On trouvera ci-après un échantillonnage d’outils Internet que les membres de l’IFEX peuvent utiliser dans le cadre d’une campagne.
LES « BLOGUES »
Les « Weblogues », mieux connus sous le nom de « blogues », sont des carnets Web faciles à créer qui permettent à un individu de placer des renseignements en ligne à tout moment et sur quelque sujet que ce soit. Au cours des dernières années, les blogues se sont avérés de puissants outils pour les journalistes et les activistes de la liberté d’expression. En tant qu’outils, les blogues ne coûtent pas cher, sont accessibles et polyvalents et peuvent être intégrés à toutes les campagnes.
L’une des grandes forces du blogue, c’est son caractère instantané. Dans une situation de crise, les médias imprimés et télévisuels peuvent mettre des heures, des jours, voire des semaines avant de porter un événement à l’attention du public. Avec le blogue, toute personne qui a accès à l’Internet peut obtenir les renseignements dès la mise à jour du « blogue » par son auteur. Ceci permet aux défenseurs de la liberté d’expression vivant sous des régimes répressifs d’atteindre un auditoire mondial en
évitant toutes les difficultés inhérentes aux modes de communication traditionnels.
Les « blogues » constituent également d’excellents outils pour diffuser des renseignements sur votre organisation ou votre campagne. Si votre blogue se concentre sur une question ou une région particulières, il y a de fortes chances que des personnes effectuant des recherches sur l’Internet sur ces mêmes sujets
IFEX 43
TROISIÈME PARTIE 3.2 CYBERACTIVISME (BOÎTE À OUTILS)
tombent sur votre site. Puisque la réputation d’un blog se propage « de bouche à oreille » sur l’Internet, la preuve de sa popularité et de sa crédibilité sera faite par le nombre de sites qui renvoient à votre blogue par des liens et vice versa. Plus il y a de liens qui renvoient à un blogue, plus ce dernier aura de chances d’être découvert et consulté par les autres.
Un « blogue » peut également assumer le rôle de secrétariat pour les personnes situées dans une même région. Les informations peuvent être envoyés par une personne vivant dans un pays sous l’emprise d’un régime totalitaire à une personne vivant dans un endroit plus sécuritaire, où les informations pourront être placées en ligne. C’est le cas pour plusieurs blogues décrivant la situation politique dans certains pays où sévit une censure féroce, comme l’Iran ou la Birmanie.
COMMENT LES IRANIENS UTILISENT DES BLOGUES POUR
ILLUSTRER LA SITUATION DE LA LIBERTÉ D’EXPRESSION
DANS LEUR PAYS
En Iran, pays dans lequel la croissance de l’utilisation de l’Internet a été la plus forte de tous les pays du Moyen-Orient, les blogues connaissent une immense popularité et sont de plus en plus utilisés comme outils pour contrer la censure. Des centaines de blogueurs parviennent à diffuser des informations, à mobiliser des appuis et à attirer l’attention internationale sur l’état de la libre expression dans ce pays. Lorsque les autorités ont fermé les sites Web de trois journaux qui étaient en faveur de la réforme et qu’elles ont arrêté plusieurs de leurs journalistes en août 2004, des dizaines de blogueurs se sont mobilisés pour organiser des manifestations de protestation.
Les blogueurs ont ainsi copié sur leur propres sites le contenu des sites interdits, puis ont renommé leurs sites en empruntant les noms des journaux, mettant au défi les censeurs de l’Internet iraniens de les fermer.
Finalement, les sites à censurer étaient trop nombreux pour les ressources du gouvernement. Par ailleurs, les blogueurs ont recueilli des centaines de signatures en appuyant les journalistes emprisonnés, dont un a été relâché le mois suivant.
EXEMPLES DE BLOGUES LIÉS À LA
LIBERTÉ D’EXPRESSION
Back to Iraq
http://www.back-to-iraq.com/
Le blogue du journaliste indépendant
Christopher Allbritton des États-Unis, un ancien journaliste de l’Associated Press qui envoyait des dépêches indépendantes en tant que journaliste « non intégré » à l’armée américaine pendant la guerre en Irak. Son travail a été rendu possible par des dons totalisant 14 000 $US, recueillis auprès du million de lecteurs que comptait son blogue.
Stop Censoring Us
http://stop.censoring.us/
Un blogue qui surveille l’état de la censure sur l’Internet en Iran.
Sudan: Passion of the Present
http://platform.blogs.com/passionofthepresent/
Un blogue « centralisé » qui propose des reportages, des vidéoclips, des mises à jour quotidiennes et diverses informations concernant la crise humanitaire qui touche le Darfour, au Soudan.
IFEX 44
TROISIÈME PARTIE
China Digital News
http://journalism.berkeley.edu/projects/chinadn/en
/Un projet de la Graduate School of Journalism,
University of California, Berkeley, ce blogue sert de réseau d’information et de forum de discussion sur les droits de la personne et la
« révolution de l’information » en Chine.
SITES EN LIGNE PROPOSANT DES LOGICIELS D’ÉDITION
DE BLOGUES
Les sites suivants proposent des logiciels gratuits permettant la création et la gestion simplifiées de blogues, ainsi que des didacticiels à l’intention des blogueurs novices.
•
Word Press http://wordpress.org/
•
Blogger.com
http://www.blogger.com
•
Grey Matter http://noahgrey.com/greysoft/
•
Live Journal http://www.livejournal.com/
•
Movable Type http://www.movabletype.org/
MEETUP.COM
Cet outil gratuit (www.Meetup.com) permet aux personnes ayant des intérêts ou des causes en commun d’organiser des rencontres personnelles pour discuter de n’importe quel sujet dans à peu près tous les pays du monde.
Vous pourrez y effectuer des recherches pour trouver des groupes existants qui se sont formés dans votre région pour discuter de thèmes particuliers (la liberté d’expression, par exemple), ou encore former un nouveau groupe. Meetup.com pourra vous suggérer des lieux de rencontre dans la ville de votre choix. Les personnes possédant des intérêts semblables aux vôtres pourront s’inscrire comme membres de votre groupe. Les membres passent au vote pour décider de la date et du lieu des rencontres. Meetup.com
envoie ensuite un message aux membres leur indiquant la date et le lieu convenus.
Depuis sa création en 2002, plus d’un million de personnes dans 40 pays différents se sont inscrites à des groupes par l’entremise de Meetup.com.
On trouvera un exemple de groupe formé par Meetup.com autour de la question de la liberté d’expression à l’adresse : http://censorship.meetup.com/
PÉTITIONS PAR INTERNET
Pour de nombreux défenseurs de la liberté d’expression, les pétitions se sont souvent avérées des outils efficaces pour rallier l’opinion publique à leur cause. De plus en plus de militants choisissent les pétitions en ligne, solution qui permet d’atteindre un grand nombre de personnes en peu de temps.
Plusieurs sites Web proposent des outils informatiques permettant de lancer des pétitions en ligne, qui peuvent être conçues pour répondre à des besoins individuels spécifiques. Ces outils permettent aux organisateurs de campagnes de recueillir des signatures et des dons, ou encore d’avoir des discussions en ligne.
OUTILS GRATUITS POUR LA CRÉATION DE
PÉTITIONS EN LIGNE
• iPetitions.com
http://www.ipetitions.com/index.html
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TROISIÈME PARTIE 3.2 CYBERACTIVISME (BOÎTE À OUTILS)
•
•
Petition Them http://www.petitionthem.com/default.asp
Petition Spot http://www.petitionspot.com/
MESSAGERIE TEXTE (SMS)
La messagerie texte (ou SMS, qui signifie Short
Message Service) est un mode de communication qui gagne en popularité auprès des utilisateurs de téléphones portables dans des dizaines de pays à travers le monde. Amnistie
Internationale (AI) aux Pays-Bas a trouvé une façon imaginative d’utiliser cette technologie pour mobiliser l’opinion publique contre la torture et pour recruter de nouveaux membres.
En 2001, dans le cadre de sa campagne mondiale contre la torture, la section d’AI aux
Pays-Bas a incorporé la messagerie texte dans ses actions urgentes. Lors d’une des émissions de télévision les plus populaires du pays, diffusée le samedi soir, AI a invité des milliers d’utilisateurs de téléphones portables, surtout des jeunes, à devenir des « activistes du SMS ».
On a donc demandé à ces nouveaux activistes de répondre aux appels d’urgence lancés par AI par messagerie texte en passant à l’action pour défendre certains détenus qui risquaient la torture. C’est ainsi qu’en novembre 2001, plus de 6 000 d’entre eux ont répondu à un appel lancé en faveur du poète ouzbek Yusuf Dzhumaev, qui a été relâché le
29 décembre. Quarante-quatre pour cent des personnes ayant répondu à l’appel étaient des jeunes de moins de 20 ans. Cet appel a
également eu pour résultat le recrutement de plus de 500 nouveaux membres par AI aux
Pays-Bas, la plupart de ces membres s’inscrivant d’ailleurs pour la première fois.
Pour plus de renseignements sur la façon dont AI, section des Pays-Bas, a utilisé la messagerie texte, voir le site suivant : http://database.newtactics.org/NewTactics/Cas eInformation.aspx
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TROISIÈME PARTIE
Cyberactivisme
3
.2
ÉTUDE DE CAS
LES PASSEPORTS PANDA DE L’ORGANISATION MONDIALE DE PROTECTION DE LA NATURE (WWF)
ET SA CAMPAGNE EN FAVEUR DES DAUPHINS DE MAUI
C O N T E X T E
Le dauphin de Maui – anciennement appelé le dauphin d'Hector de l'île du Nord – est l’un des plus rares et des plus petits mammifères marins du monde. Ce dauphin est gravement menacé et l’on estime sa population actuelle à moins d’une centaine d’individus.
Avec de tels effectifs réduits, le décès d’un seul animal tous les sept ans menace gravement les chances de survie de l’espèce. Depuis mars 2001, on a trouvé les cadavres de sept dauphins dans les eaux de la Nouvelle-
Zélande, dont cinq résultant des activités de pêche. Le WWF considère que ce chiffre pourrait être bien plus élevé.
La menace la plus grave pour les dauphins de Maui provient des activités de pêche au filet fixe. Les dauphins ne semblent pas détecter les minces filets de nylon et ils s’y emmêlent. Incapables de se rendre à la surface pour respirer, les dauphins se noient en quelques minutes à peine.
En 2001, le ministre des pêches de la Nouvelle-Zélande a réagi en interdisant la pêche commerciale et la pêche de loisir au filet fixe dans la plus grande partie du territoire des dauphins. Toutefois, après une poursuite judiciaire entreprise par les pêcheurs, le moratoire commercial a été levé.
LE PASSEPORT PANDA
Le WWF, une organisation de conservation de la nature qui milite dans plus de 90 pays, a su utiliser l’Internet de façon imaginative dans son travail de défense environnementale par le biais de son « Passeport Panda ». Cet outil permet aux individus de faire campagne en faveur de différentes causes environnementales, où qu’ils se trouvent dans le monde. Le Passeport Panda permet de lancer des appels à l’action directs et concis pour défendre certaines causes importantes liées à la protection de la nature.
Selon le WWF, « l’idée derrière le Passeport, c’est qu’il permet aux personnes qui manquent de temps de se faire tout de même entendre sur des questions importantes ».
Le passeport permet ainsi aux individus de participer à des campagnes en envoyant des courriels, des pétitions ou des télécopies aux décideurs, sans que cela ne leur coûte quoi que ce soit. Dans certains cas, les participants peuvent rédiger et imprimer des lettres qui seront envoyées aux individus cibles qui réagissent mieux au courrier postal. D’autres
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TROISIÈME PARTIE 3.2 CYBERACTIVISME (ÉTUDE DE CAS)
campagnes encouragent les gens à envoyer des courriels ou des lettres aux membres du personnel de conservation du WWF sur le terrain pour les appuyer dans leur travail.
Certaines campagnes encouragent les personnes à s’engager personnellement en achetant, par exemple, du bois certifié
écologique, ou encore en choisissant une source d’énergie renouvelable.
L’IDÉE DERRIÈRE LE PASSEPORT,
C’EST QU’IL PERMET AUX
PERSONNES QUI MANQUENT DE
TEMPS DE SE FAIRE TOUT DE
MÊME ENTENDRE SUR DES
QUESTIONS IMPORTANTES.
Le Passeport Panda offre des récompenses aux individus qui participent, en plus de leur faire sentir qu’ils aident à la protection de la planète. Chaque fois qu’une personne pose un geste, on appose un timbre sur son passeport virtuel. Ceci permet aux participants de gravir les échelons et de passer du statut d’organisateur de campagne de niveau 1, à celui d’organisateur de niveau 2, 3 et ainsi de suite. Les organisateurs de campagnes peuvent imprimer un certificat de remerciements qui indique leur statut d’organisateur. Ces personnes peuvent également télécharger des
économiseurs et des fonds d’écrans, des bannières Internet, etc.
« Nous avons reçu d’excellents commentaires à propos des récompenses », dit
Sarah Bladen, gestionnaire de campagnes en ligne au secrétariat du WWF à Genève (WWF
International). « Ces récompenses aident les individus à sentir qu’ils participent vraiment aux campagnes », ajoute-t-elle. À l’avenir,
Bladen prévoit mettre au point des récompenses plus sophistiquées pour la participation aux actions passeport.
Avant d’agir avec le Passeport Panda, il faut s’inscrire. Le programme ne permet pas l’envoi de messages anonymes car ils sont inefficaces, selon le WWF. Les noms et adresses sont indiqués dans les messages adressés aux gouvernements et aux dirigeants du secteur privé. L’inscription permet
également au WWF de contacter les individus rapidement par courriel lorsqu’une intervention urgente est requise.
Pour plus de renseignements, voir le site http://www.passport.panda.org
LA CAMPAGNE EN FAVEUR DES DAUPHINS DE MAUI
L’une des applications très réussies du
Passeport Panda a été la campagne menée en
2002 et 2003 pour protéger les dauphins au large de la côte nord-ouest de l’Île Nord de la
Nouvelle-Zélande. La campagne a eu pour résultat l’interdiction des filets fixes dans le secteur.
PLANIFICATION ET OPTIONS INITIALES DE LA CAMPAGNE
« Les dauphins de Maui couraient un réel danger », explique Bladen. « Il était nécessaire de faire campagne très rapidement pour interdire l’utilisation des filets fixes pour protéger cet animal. »
Le WWF de la Nouvelle-Zélande (WWF-
NZ) a donc demandé au département des communications du secrétariat international en Suisse de fournir des suggestions quant à la meilleure façon d’intervenir. Des représentants des unités de la presse, de la télévision, de la photographie et des sites Web se sont réunis pour discuter de l’aide à fournir à la section néo-zélandaise. Ces unités ont ensuite envoyé
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TROISIÈME PARTIE 3.2 CYBERACTIVISME (ÉTUDE DE CAS)
des propositions concrètes liées à des actions
Passeport Panda, à un reportage télévisé et à un communiqué de presse international à associer au lancement de la campagne. Le secrétariat international a également fait parvenir une longue liste de questions au
WWF-NZ pour mieux cerner les besoins de l’organisme et les actions envisageable, notamment :
•
Quel est le ton global que vous désirez adopter dans cette campagne ? Tentez-vous d’effectuer un lobbying discret associé à une légère pression auprès de l’opinion publique, ou avezvous besoin d’une forte pression de la part des communautés internationale et locale ?
•
Quel est le message général de cette campagne?
•
Quel est le public cible ? Revient-il au gouvernement d’adopter les bonnes mesures législatives ? S’agit-il des pêcheurs qui pêchent dans le secteur ? Les pressions doivent-elles s’appliquer à différents groupes, et quelle serait la séquence à suivre ?
•
Quel serait le calendrier de l’action ? Doit-on exercer des pressions sur le ministre à un moment précis ?
•
Quelles sont les espèces de poissons qui sont pêchées dans le secteur ? Où ces poissons sont-ils vendus et à qui (aux grandes entreprises, en Europe, etc., ce qui offrirait d’autres possibilités en termes de pression que l’on peut exercer) ?
•
Avez-vous des photos du dauphin (vivant et mort) que nous pourrions utiliser ?
Le secrétariat international a suggéré d’entreprendre une action Passeport Panda qui ciblerait les représentants et les entreprises concernées, en fonction des publics ciblés. Il a
également proposé de rédiger l’introduction de l’action, mais WWF-NZ devrait rédiger les documents destinés aux cibles et indiquer le titre, le nom et les coordonnées des individus à contacter. Le bureau de la Nouvelle-Zélande pourrait choisir autant de cibles qu’il le désire et produire des textes personnalisés pour chaque individu.
TÉLÉCOPIE OU COURRIEL ?
Le WWF-NZ avait également le choix d’entreprendre une campagne par télécopieur ou par courriel, chacune de ces options présentant certains avantages. « Souvent, les télécopies fonctionnent mieux parce qu’elles sont tangibles et très visibles lorsqu’elles sortent de la machine de la personne ou de l’entreprise ciblée », indique Bladen. Toutefois, les campagnes par télécopieur ont tendance à s’effondrer après quelques jours, en raison de l’attente de transmission aux télécopieurs.
« En général, nous tentons de voir s’il est possible d’utiliser le courriel plutôt que le télécopieur, puisque c’est moins cher, note
Bladen. De plus, si vous obtenez une adresse de courriel qui vous permet d’atteindre directement la bonne personne, c’est sans doute mieux que d’envoyer une télécopie à une machine qui se situe probablement dans un autre bureau, ailleurs dans le bâtiment. »
« L’envoi de télécopies est davantage une tactique de choc, que l’on utilise dans les situations urgentes, lorsque la réaction des personnes visées doit être très rapide », ajoute
Bladen.
LE LANCEMENT DE L’ACTION
Le WWF-NZ a étudié les questions et a décidé d’adopter l’option des communiqués de presse et du Passeport Panda. L’utilisation des images
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TROISIÈME PARTIE 3.2 CYBERACTIVISME (ÉTUDE DE CAS)
télévisées et des photographies a d’abord été exclue en raison de la rareté du dauphin et du fait qu’il est difficile de s’en approcher.
« On a considéré qu’il était nécessaire de lancer une cybercampagne percutante, car la situation des dauphins de Maui était désespérée, dit Bladen. Nos efforts récents visant à discuter du problème avec le ministère des Pêches n’avaient donné aucun résultat et
DES IMAGES FORTES
VALENT MILLE MOTS.
nous estimions qu’il était temps de braquer les projecteurs du monde entier sur cette question et de mettre le ministère sur la sellette. Nous voulions aider le ministre à prendre la bonne décision. »
Le WWF a choisi le courriel plutôt que le télécopieur en raison des coûts associés à l’initiative, mais également parce que l’organisation disposait d’une bonne liste de courriels. « Nous avons utilisé l’adresse du ministère et non celle du ministre, afin de pouvoir continuer d’entretenir des relations constructives et un dialogue ouvert avec le ministre, dit Bladen. Nous ne voulions pas agresser et frustrer qui que ce soit, mais simplement montrer qu’il ne s’agissait pas seulement d’un enjeu national et que le monde entier était à l’écoute ! »
L’action Passeport Panda ciblait le ministre des Pêches et pressait le gouvernement néozélandais de poser les gestes suivants :
• décréter un moratoire immédiat sur la pêche au filet fixe et la pêche par paire à moins de quatre milles nautiques du rivage, incluant les ports;
•
établir un sanctuaire pour les mammifères marins couvrant la totalité du territoire fréquenté par le dauphin;
•
élaborer et mettre en œuvre de toute urgence un plan de rétablissement de l’espèce pour tous les dauphins de Maui.
À la suite de la création de l’action
Passeport, une alerte action a été envoyée par courriel aux 30 000 détenteurs du Passeport à travers le monde, en plus des 30 000 alertes distribuées aux abonnés par le biais du bulletin
électronique du WWF et de la diffusion de communiqués de presse aux médias internationaux. (Le nombre des détenteurs de passeports s’élève depuis à 50 000.)
LE POUVOIR DES IMAGES
L’unité photographique du secrétariat international s’est éventuellement procurée des photos utilisables, ce qui a eu pour effet de stimuler la campagne. « Des images fortes valent mille mots, note Bladen. C’est particulièrement vrai dans le cas de campagnes internationales qui dépendent de l’appui de personnes dont la maîtrise de l’anglais n’est pas nécessairement très bonne. »
« Les images vont droit au cœur et à ce titre, elles nous sont très utiles dans notre travail de conservation des espèces », indique
Bladen. Elle ajoute que les images sont particulièrement importantes dans le contexte d’une cybercampagne, puisque la plupart des gens n’aiment pas lire de longs textes en ligne.
« Dans ce genre de campagne, il s’agit d’abord de mobiliser les individus, puis de les
éduquer, selon Bladen. Les éléments visuels mobilisent et intéressent les gens. »
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TROISIÈME PARTIE 3.2 CYBERACTIVISME (ÉTUDE DE CAS)
RESSOURCES DE LA CAMPAGNE
L’action Passeport Panda n’a pas coûté plus cher que le temps de travail du personnel déjà en place. Au besoin, une action passeport pourrait être déclenchée en très peu de temps
– une heure ou moins. Cependant, Bladen indique qu’idéalement, elle préfère disposer de deux semaines à un mois pour assurer le temps nécessaire à une planification et une consultation adéquates, un bon choix des cibles, l’élaboration d’un contenu attrayant pour le site Web, l’obtention d’appuis de la part de membres de la communauté
MOINS DE QUATRE JOURS
APRÈS LE LANCEMENT DE
L’ACTION PASSEPORT PANDA,
LE MINISTÈRE DES PÊCHES
RECEVAIT 5 000 COURRIELS.
scientifique et autres, ainsi que le marketing.
On estime à 20 ou 30 heures le temps de travail nécessaire à la préparation de l’action néo-zélandaise, ce qui comprend le temps de travail de Bladen et celui du personnel de
WWF-NZ.
Même si le lancement d’une action passeport n’est pas particulièrement coûteux, les coûts initiaux liés à la mise au point du système ont été « considérables ». Bladen estime qu’ils sont de l’ordre de plusieurs centaines de milliers de dollars, même si ces coûts sont difficiles à évaluer, puisque le système est en développement continuel.
Maintenant que le secrétariat international a mis au point le système, les bureaux nationaux du WWF peuvent l’utiliser sans que cela ne les oblige à réinventer la roue à chaque fois.
« Les outils en ligne ont de grands avantages, mais les éléments informatiques et les logiciels qu’ils exigent sont considérables », note Bladen. Elle indique que des outils logiciels sont maintenant disponibles en ligne pour aider à la défense de différentes causes, et sans doute à des coûts moindres que ce qu’il en coûtait en 1998, lorsque le système
Passeport Panda a été lancé. Les groupes qui envisagent d’utiliser de tels outils en ligne doivent mesurer les avantages et les inconvénients de l’achat d’un système clé en main, par opposition au développement d’un système qui sera adapté aux besoins spécifiques de l’organisation.
Le système Passeport Panda implique
également des frais courants, qui sont assumés par le secrétariat international. Parmi ces frais, on compte la gestion, la solution de problèmes et les mises à jour de l’application Passeport
Panda, la gestion du serveur et de la banque de données, ainsi que le travail d’un gestionnaire
à temps partiel qui répond aux centaines de courriels venant de détenteurs d’un Passeport, qui posent des questions, félicitent l’organisation, se plaignent, etc.
DÉFIS
Le WWF a fait face à peu de difficultés importantes pendant la campagne, outre celles d’avoir à maintenir la pression après que le moratoire imposé par le ministre eut été levé par une décision de la cour en 2001, et de s’assurer que la volonté de pleinement protéger les dauphins de Maui demeurait forte.
Bladen indique qu’à plus long terme, tous les groupes qui utilisent les courriels dans le cadre de leurs campagnes feront face au même
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TROISIÈME PARTIE 3.2 CYBERACTIVISME (ÉTUDE DE CAS )
défi. Dans plusieurs pays, les décideurs, tout comme les citoyens ordinaires, sont de plus en plus inondés de courriels divers et de pourriels.
La valeur de cet outil de campagne en a ainsi
été réduite. C’est tout particulièrement vrai pour les pays de l’Union Européenne et les
États-Unis, où les décideurs reçoivent des courriels traitant de tous les sujets possibles et imaginables. « Par exemple, il n’est pas très utile de prendre le temps d’écrire à George Bush pour lui demander de signer le Protocole de
Kyoto », selon Bladen.
« L’utilisation du courriel devient de plus en plus difficile, dit Bladen. Plusieurs d’entre nous sommes à l’affût de la nouvelle approche révolutionnaire – au-delà du simple envoi de courriels aux autorités – même si nous ne savons pas encore ce qu’elle sera. »
Pour l’instant, Bladen recommande de bien réfléchir aux personnes que vous ciblez dans vos envois de courriels. « Dans certains pays qui ne se retrouvent pas régulièrement sous les feux des projecteurs de la communauté internationale, comme la Nouvelle-Zélande et le Mozambique, le courriel demeure assez efficace, dit-elle. L’envoi de quelques centaines de messages aux autorité dans ces pays a un effet certain, tant que l’on amplifie cet effet par d’autres actions locales. »
IMPACT
Moins de quatre jours après le lancement de l’action Passeport Panda, le ministère des
Pêches recevait 5 000 courriels. Le lancement de la campagne a suscité une grande couverture médiatique, incluant la BBC, CNN
Asie et Reuters. Le trafic sur le site Web de
WWF-NZ a également doublé au plus fort de la campagne.
À l’époque, le WWF-NZ déclarait au secrétariat international, « [...] la campagne de
Maui a connu un franc succès ! Nous avons reçu un appel lundi à 9 heures de la part du ministère des Pêches nous demandant une rencontre [...] Le ministère a indiqué que le grand nombre de courriels qu’il recevait était problématique et que son gestionnaire des communications avait indiqué que tous ces courriels nuisaient aux affaires du ministère. »
À la suite de sa rencontre avec le ministre, le
WWF-NZ a répliqué en incitant les détenteurs de Passeport Panda qui n’avaient pas envoyé de courriel à le faire. Plusieurs bureaux du réseau mondial du WWF, et plus particulièrement le
Conservation Action Network du WWF aux
États-Unis, ont ajouté des informations et des liens sur leurs sites pour diriger les internautes vers l’action et alerter les activistes. Le nombre de messages envoyés au ministre a continué de croître, pour atteindre un total d’environ
15 000 messages. (Le système Passeport Panda comprend un outil de suivi qui compte automatiquement le nombre d’actions individuelles qui ont été entreprises.)
Le ministre des Pêches a éventuellement instauré les mesures d’urgence recommandées par le WWF. Au début de 2003, soit environ
12 mois après le lancement de la campagne, le ministre annonçait un moratoire sur l’utilisation de filets fixes dans les eaux côtières de la côte du nord-ouest de l’Île Nord de la
Nouvelle-Zélande pour protéger les dauphins de Maui.
Ironiquement, lorsque le ministre a annoncé sa décision, il l’a communiquée à tous les activistes du Passeport Panda ayant participé à la campagne, et ce sans même que le WWF n’en soit informé.
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Le WWF a qualifié cette décision de
« grande victoire pour la conservation ». En plus du fait d’avoir su utiliser efficacement différents outils de cybercampagnes, Bladen attribue la réussite de la campagne à une excellente planification, une forte présence sur le terrain et une grande expertise des intervenants, ainsi qu’à la nature urgente et rassembleuse de ce cas, qui a suscité un grand intérêt chez les activistes et les médias.
La campagne poursuit ses efforts d’aide au rétablissement de l’espèce et encourage l’adoption de nouvelles mesures qui viseront à protéger le dauphin de Maui de la pêche au chalut.
Pour plus de renseignements, voir le site http://www.wwf.org.nz/dolphin.
TROISIÈME PARTIE 3.2 CYBERACTIVISME (ÉTUDE DE CAS )
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TROISIÈME PARTIE
3.2 CYBERACTIVISME (RESSOURCES )
CYBERACTIVISME – RESSOURCES
ActionWorks.ca – Propose des outils novateurs
en ligne pour faire campagne
http://www.actionworks.ca/
American Civil Liberties Union – Stratégies en
ligne : L’activisme numérique
http://www.aclu.org/TakeAction/TakeAction.cf
m?ID=12834&c=242
Aspiration – Relie les organisations sans but
lucratif aux solutions informatiques qui maximisent les impacts
http://www.aspirationtech.org/ e-Advocates – L’une des plus importantes firmes
spécialisées dans la défense de causes aux États-
Unis
http://www.e-advocates.com/index.html
Greenpeace – Communauté de cyberactivistes http://www.greenpeace.org/international_en/fe atures/details?item_id=486962
ItrainOnline.org – Des ressources en formation
Internet en français, en anglais et en espagnol
http://www.itrainonline.org/
Inter American Press Association – Une
campagne contre l’impunité qui présente des lettres de protestation en ligne
http://www.impunidad.com/
Martus – Un logiciel qui permet de documenter
des violations des droits de la personne
http://www.martus.org/
MoveOn.org – Comment la technologie de
l’Internet change la nature de l’activisme
http://www.thenation.com/doc.mhtml?i=20030
804&c=1&s=boyd
Network for Good: http://www.networkforgood.org/npo/advocacy/
Peekabooty – Des ressources pour contourner la
censure sur Internet
http://www.peek-a-booty.org/
Techsoup – Un site destiné aux organisations
sans but lucratif
http://www.techsoup.org/index.cfm
The Virtual Activist – Un cours de formation http://netaction.org/training/
World Wildlife Fund – Le Passeport Panda http://www.passport.panda.org/
IFEX 54
TROISIÈME PARTIE 3.3 GÉRER LES RESSOURCES JURIDIQUES (BOÎTE À OUTILS)
Gérer les ressources juridiques
3
.3
BOÎTE À OUTILS
COMMENT LES RESSOURCES JURIDIQUES PEUVENT RENFORCER UNE CAMPAGNE
C O N T E X T E
L’idée des droits de la personne, incluant le droit à la liberté d’expression, est plus qu’un concept moral ou philosophique – elle fait partie de la loi. Le sens et l’étendue du terme « droits de la personne » sont définis par le droit international, alors que la plupart des violations des droits de la personne violent également le droit national.
Les avocats, les juges, les magistrats, les universitaires, les étudiants en droit et d’autres personnes connaissant la théorie et la pratique du droit jouent un rôle déterminant dans le travail de défense des droits de la personne, incluant la défense de la liberté d’expression.
AVANTAGES
L’implication de personnes possédant une expertise juridique dans votre campagne offre de nombreux avantages, la profession juridique
étant notamment :
• influente dans la plupart des pays;
• bien informée et habile dans le domaine de la communication;
• respectée à travers le monde;
• dotée d’associations nationales reliées entre elles;
• reliée à l’échelle internationale par le biais de contacts personnels et professionnels, les associations professionnelles et la participation
à des associations internationales.
Les avantages de travailler avec des avocats et leurs organisations comprennent notamment:
1 Les conseils techniques offerts à votre organisation ou à votre campagne
Ces personnes peuvent travailler à titre de consultants juridiques auprès des coordonnateurs de campagnes et de ceux qui effectuent un lobbying auprès des organisations intergouvernementales et des gouvernements nationaux.
2 Les liens établis entre le mouvement en faveur de la liberté d’expression et le milieu juridique en général
Ces personnes peuvent contacter leurs collègues – en communiquant avec les barreaux locaux ou nationaux, les associations d’avocats et les institutions académiques – pour effectuer un travail de sensibilisation et pour aider à l’organisation de campagnes
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TROISIÈME PARTIE 3.3 GÉRER LES RESSOURCES JURIDIQUES (BOÎTE À OUTILS)
unifiées et, au besoin, hautement médiatisées concernant des questions ou des causes précises.
3 La défense des victimes de violations de la liberté d’expression et la promotion de réformes juridiques
Ces représentations par avocat peuvent permettre la défense de causes individuelles ou celle de grands enjeux liés à la liberté d’expression, par la présentation d’arguments juridiques fondés sur le droit international.
CE QUE LES EXPERTS JURIDIQUES PEUVENT FAIRE POUR
APPUYER VOTRE CAMPAGNE
Étudier ou proposer des projets de loi
La participation d’experts juridiques peut s’avérer extrêmement importante lorsqu’il s’agit d’étudier et de commenter les nouvelles mesures législatives qu’un gouvernement veut appliquer et qui sont susceptibles d’avoir un impact sur la liberté d’expression, ou lorsque votre organisation fait campagne pour proposer de nouvelles lois.
Rencontres avec la presse
La participation d’un avocat réputé à un
événement médiatique – par exemple, une conférence de presse entourant le lancement d’un rapport sur un pays dans lequel des considérations d’ordre juridique posent problème – peut vous aider à assurer une visibilité au sein de la communauté juridique et dans les médias en général.
Faire une déclaration
Une déclaration publique émanant d’une organisation juridique ou d’un avocat reconnu peut être ciblée ou d’ordre plus général :
•
Une déclaration ciblée portant, par exemple, sur le besoin qu’ont les journalistes emprisonnés d’avoir accès à des avocats, des médecins et des membres de leur famille, peut servir à mettre en lumière le problème.
•
Une déclaration d’ordre général qui, par exemple, vient souligner le travail de votre organisation, pourra être citée au besoin – que ce soit pour établir des contacts avec des représentants du gouvernement, pour obtenir des appuis ou pour amener certains avocats
à réagir.
•
Une brève déclaration pourra être signée par tous les individus et les organisations pertinents et permettra de montrer rapidement et facilement l’étendue des appuis dont vous disposez.
ÉCRIRE UNE LETTRE
•
Une lettre officielle, rédigée par une organisation juridique respectée ou un membre éminent de la communauté juridique et adressée aux représentants du gouvernement et aux ambassades pertinents, permettra de bien indiquer l’inquiétude de votre communauté face à une situation de non-respect des droits de la personne.
•
Une lettre d’un avocat particulier, imprimée sur du papier à en-tête, est impressionnante et indique clairement le statut de son auteur.
•
De telles lettres prouvent également que la communauté dans son ensemble partage les inquiétudes de votre organisation.
Promouvoir la solidarité professionnelle
Demandez aux avocats ou aux organisations juridiques de votre pays de communiquer avec leurs homologues dans un pays cible pour
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Dans les grands médias, un avocat réputé et sympathique à votre cause pourrait écrire un article d’opinion dans un journal.
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TROISIÈME PARTIE 3.3 GÉRER LES RESSOURCES JURIDIQUES (BOÎTE À OUTILS)
proposer leur appui, en tant que collègues, dans certains cas de défense des droits de la personne. Cette manifestation d’intérêt et de solidarité professionnelle pourra également mener à des visites d’échange et au partage d’expertise et de ressources.
Révéler les inquiétudes de votre organisation dans les médias
Une chronique régulière consacrée aux droits de la personne dans une publication juridique publiée par le barreau ou l’ordre des avocats de votre pays pourrait traiter des causes en appel ou de thèmes et d’enjeux d’importance pour le pays, à l’aide de renseignements provenant du réseau de l’IFEX, dont l’aspect juridique est mis en évidence. De temps à autre, on peut consacrer plus d’espace à des articles de fond
écrits par des avocats et traitant, d’un point de vue juridique, de différentes questions liées aux droits de la personne et à la liberté d’expression.
Dans les grands médias, un avocat réputé et sympathique à votre cause pourrait écrire un article d’opinion dans un journal.
Des copies d’articles dans la presse juridique ou la presse de masse portant sur des problèmes à l’étranger peuvent être envoyées avec une lettre d’accompagnement aux ambassades pertinentes, demandant des commentaires ou une réponse.
Aider à lever des fonds
Votre organisation pourrait faire appel à un membre respecté de la communauté juridique pour inviter les avocats à faire des dons, pendant que vous organisez des événements de levée de fonds qui seraient susceptibles d’intéresser les membres du réseau juridique international.
Sensibiliser davantage
Organisez une présentation dans une université pendant la période de stage des
étudiants en droit. Commanditez un avocat spécialisé en droits de la personne pour qu’il prononce une conférence lors d’une assemblée publique.
Contacter les autres
Contactez les autres professionnels ou les organisations qui pourraient manifester un intérêt particulier pour une cause.
S’associer à une délégation
Là où interviennent des questions juridiques plus générales ou des causes juridiques particulières, il peut s’avérer utile d’inciter des professionnels du domaine juridique de faire partie de délégations qui rencontrent des représentants du gouvernement ou qui voyagent à l’étranger.
QUESTIONS À SE POSER
Quelles sont les associations nationales qui représentent les avocats dans votre pays ?
• Ces associations disposent-elles de souscomités ou d’individus chargés des droits de la personne ?
• Des associations juridiques réputées ou des groupes d’avocats se sont-ils exprimés publiquement sur des questions nationales ou internationales de liberté d’expression ?
• La politique de votre gouvernement en matière de liberté d’expression est-elle susceptible d’être influencée par les interventions d’organisations juridiques ou d’avocats particuliers ?
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TROISIÈME PARTIE 3.3 GÉRER LES RESSOURCES JURIDIQUES (BOÎTE À OUTILS)
•
Y a-t-il des avocats ou des organisations juridiques dans un pays cible qui exercent une certaine influence en matière de liberté d’expression ? Ont-ils pris position ou ont-ils fait des déclarations au sujet de ces enjeux ?
•
Comment les organisations juridiques de votre pays communiquent-elles avec leurs membres; par exemple, quels sont ses moyens de communication ?
•
Existe-t-il des médias spécialisés en affaires juridiques ? Ces publications acceptent-elles des articles de personnes qui ne sont pas des avocats ?
•
Y a-t-il des avocats particuliers qui écrivent des chroniques ou qui s’expriment par le biais d’éditoriaux dans les médias de masse ?
•
Y a-t-il des avocats et des organisations juridiques affiliés aux organismes internationaux qui puissent agir, en envoyant une lettre soulevant les inquiétudes en matière de liberté d’expression, par exemple ?
RÉFÉRENCES
©Publications d’Amnistie internationale.
Guide de campagne d’Amnistie internationale,
2001. 1, rue Easton, Londres WC1X 0DW,
Royaume-Uni. http://www.amnesty.org
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TROISIÈME PARTIE
Gérer les ressources juridiques
3
.3
ÉTUDE DE CAS
LA CAMPAGNE POUR LA LOI SUR LE LIBRE ACCÈS À L’INFORMATION D’ARTICLE 19 EN CROATIE
C O N T E X T E
Le contexte politique de la Croatie semblait prometteur aux yeux des organisateurs de la campagne visant à faire adopter une loi sur le libre accès à l’information. Puisque la Croatie était l’un des derniers pays en
Europe centrale et de l’Est à ne pas avoir encore adopté une telle loi, les organisateurs pouvaient se servir de comparaisons avec les régions voisines et faire appel à la pression des pairs.
Le désir de la Croatie de faire partie de l’Union Européenne (UE) et de l’Organisation du Traité de l’Atlantique
Nord (OTAN) a également permis aux organismes internationaux d’influencer le processus de réforme du pays.
Parmi les critères requis pour l’adhésion à l’UE, il y a l’existence d’institutions stables qui garantissent la démocratie, la règle de droit, les droits humains, ainsi que le respect et la protection des minorités.
Pendant le règne de l’ancien président Franjo Tudjman, on avait refusé d’inviter la Croatie à faire partie de l’UE en raison des tendances totalitaires du régime en place. Un nouveau gouvernement, dirigé par le président Stjepan
Mesic, a été élu en février 2000 avec la volonté de faire du pays un modèle de nation en route vers la démocratie et l’économie de marché, afin d’être reçu au sein de l’UE et de l’OTAN. En février 2003, la Croatie déposait une demande de candidature officielle pour devenir membre de l’UE, devenant ainsi le premier pays des Balkans de l’Ouest à entreprendre une telle démarche.
À l’automne 2002, l’ARTICLE 19 lançait une campagne de concert avec le Comité Helsinki croate (Croatian Helsinki Committee, CHC) pour appuyer l’adoption d’une loi sur le libre accès à l’information en Croatie qui réponde aux normes internationales en vigueur. D’entrée de jeu, les organisateurs de la campagne ont noté un niveau de sensibilisation plutôt faible au sein de la société civile de Croatie et de son gouvernement quant au besoin de disposer d’une telle loi, qui constitue pourtant un élément clé de la fondation juridique d’une démocratie moderne. Qu’à cela ne tienne, en octobre 2003, le Parlement du pays votait l’adoption d’une Loi sur le droit d’accès à l’information.
PARTENAIRES NATIONAUX, EXPERTISE INTERNATIONALE
La collaboration d’ARTICLE 19 avec des partenaires nationaux forts, qui pouvaient expliquer à la population l’importance pour une société de disposer d’une loi protégeant le libre accès à l’information, et qui insistaient sur le bien-fondé des principes de cette loi, a constitué l’un des éléments clés de cette campagne. Une
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TROISIÈME PARTIE 3.3 GÉRER LES RESSOURCES JURIDIQUES (ÉTUDE DE CAS)
coalition formée de 18 ONG de Croatie – menée par le CHC et comprenant des journalistes, des organismes pour les droits de la personne, des groupes environnementalistes, des universitaires, ainsi que d’autres activistes – s’était associée à cette campagne d’envergure nationale. « La nature étendue de cette coalition a joué en faveur de la crédibilité de la campagne aux yeux du gouvernement », notait
Sara Buchanan, la responsable européenne du programme d’ARTICLE 19.
L’ARTICLE 19 a mis à la disposition de la coalition locale d’ONG sa vaste expertise juridique. En avril 2003, l’ARTICLE 19 a formulé des commentaires au sujet d’une déclaration de principe de la coalition locale et, en septembre, l’organisme a étudié le projet de loi officiel à la lumière des normes internationales.
PRESSIONS RÉGIONALES ET INTERNATIONALES
La campagne visait à appliquer une certaine pression à l’endroit de la Croatie pour l’inciter
à uniformiser ses lois avec celles des pays membres de l’UE. En mars 2003, l’ARTICLE
19, la Open Society Justice Initiative et le
CHC ont organisé un séminaire régional rassemblant des participants venus de l’ensemble de la région et qui ont partagé leurs expériences de promotion de lois sur le libre accès à l’information. « Les récits des militants et des membres de gouvernements des pays limitrophes, dans lesquels certaines lois semblables avaient été passées, ont motivé les militants croates à poursuivre leur campagne », dit Luitgard Hammerer, le directeur du programme pour l’Europe de l’ARTICLE 19.
« Ils ont également réussi à faire sentir aux représentants du gouvernement croate qu’un telle loi était vraiment nécessaire », ajoute-t-il.
Les organisateurs de la campagne sont aussi parvenus à exercer des pressions sur les autorités croates en conviant certains organismes et personnages de renom, tels que l’ambassadeur en Croatie de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe
(OSCE), ainsi que des représentants du
Conseil de l’Europe, de l’UE et de l’OTAN.
L’adoption par le Conseil de l’Europe d’une
Recommandation sur l’accès aux documents officiels en février 2002 constitue également une référence importante en matière de normes d’ouverture, normes que l’on s’attend à voir respecter par tous les gouvernements européens.
S’ASSOCIER À DES POLITICIENS DE PREMIER PLAN
La campagne a réussi à s’attirer des alliés de marque parmi les politiciens et les représentants du gouvernement croate. Il importe de préciser que le CHC a utilisé son influence et ses contacts pour obtenir du président Mesic qu’il prononce un discours d’ouverture lors du séminaire régional de mars
2003. Le désir du président de mettre en valeur les compétences démocratiques de la
Croatie en vue de son adhésion à l’UE a très certainement joué un rôle important dans sa participation à l’événement.
MOBILISER L’OPINION PUBLIQUE
L’opinion publique croate a été mobilisée par la publication d’une simple déclaration de principe, rédigée par le CHC, qui expliquait les avantages d’une Loi sur le libre accès à l’information. Les organisateurs de la campagne ont ainsi pu capter l’attention des médias, qui ont amplement couvert le séminaire régional en raison, notamment, de la présence du président national.
ÉVALUER LES FORCES ET LES OPPORTUNITÉS
« Nous avons adopté ces stratégies de campagne après avoir établi les forces au sein
IFEX 61
TROISIÈME PARTIE 3.3 GÉRER LES RESSOURCES JURIDIQUES (ÉTUDE DE CAS)
d’ARTICLE 19 et du Comité Helsinki croate et analysé le climat politique en Croatie », a déclaré Hammerer.
L’ARTICLE 19 était en mesure de fournir les ressources juridiques requises et d’organiser un événement régional auquel s’associeraient des collaborateurs internationaux et régionaux, parmi lesquels on trouve son réseau de partenaires étrangers. En même temps, la réputation du CHC et ses contacts avec des acteurs clés de la scène politique croate lui permettaient de constituer un fort lobby local.
Les ambitions politiques de la Croatie de se joindre à l’UE et à l’OTAN fournissaient
également l’occasion d’attirer l’attention sur son peu de liberté en matière de lois sur l’accès
à l’information.
RESSOURCES DE LA CAMPAGNE
Les aspects clés à considérer d’un point de vue budgétaire dans cette campagne étaient les suivants :
• le temps travaillé par le coordonnateur du projet/l’organisateur de la campagne et l’équipe juridique chez ARTICLE 19;
• le temps travaillé par le coordonnateur du projet/l’organisateur de la campagne en
Croatie;
• les frais de voyage associés au déplacement de l’équipe d’ARTICLE 19, à celui des autres experts internationaux et à celui des participants de la région devant se rendre en
Croatie pour assister au séminaire régional, aux tables rondes et aux rencontres avec les représentants du gouvernement croate;
• l’hébergement et la nourriture pour le séminaire régional;
• la location du lieu de l’événement, l’équipement d’interprétariat et les interprètes pour le séminaire régional;
• la traduction des ébauches de la loi croate en anglais aux fins d’analyse par les membres d’ARTICLE 19 et la traduction en croate de la substance de l’analyse d’ARTICLE 19 et de publications sur la liberté d’information;
• les coûts liés à l’impression et à la diffusion;
• optionnel : les coûts de production d’un rapport de séminaire qui pourrait devenir un nouvel outil de sensibilisation du public (un rapporteur assisterait à la conférence complète, puis produirait un rapport).
DÉFIS
Faire face à un faible niveau de sensibilisation
« La principale difficulté que nous avons rencontrée en Croatie était le faible niveau de sensibilisation quant à la raison d’être d’une loi sur le libre accès à l’information », expliquait Hammerer. À la fin de 2002, le gouvernement croate était occupé à faire passer une loi générale sur les médias et ne voyait pas l’utilité d’une loi précise portant sur l’accès à l’information. Le droit à l’information était perçu, de façon erronée, comme un droit réservé exclusivement aux journalistes, et non
à la population générale.
En guise de réponse, ARTICLE 19 et ses alliés ont lancé une campagne d’éducation qui ciblait le public en général et le gouvernement.
La campagne misait sur les expériences semblables dans les pays avoisinants pour expliquer le concept de liberté d’information et pour mettre le gouvernement croate dans l’embarras en révélant qu’il ne suit pas les tendances des autres pays de la région et qu’il
IFEX 62
TROISIÈME PARTIE 3.3 GÉRER LES RESSOURCES JURIDIQUES (ÉTUDE DE CAS)
ne répond pas aux normes internationales dans ce domaine.
La campagne de sensibilisation de la population menée par le CHC se concentrait sur une déclaration de principe, publiée en avril 2003, qui expliquait en langage accessible le raisonnement derrière une loi sur la liberté d’information et les principes fondamentaux qu’une loi digne de ce nom devrait refléter.
Une campagne antérieure menée en Slovaquie, lors de laquelle on avait énoncé neuf principes fondamentaux d’une loi sur l’accès à l’information, a servi de modèle au CHC.
IMPACT
Cette campagne fort réussie a culminé lors de l’adoption d’une loi sur le libre accès à l’information, et ce en moins de 12 mois. Le
CHC a attribué la cause de cette adoption anormalement rapide aux pressions internationales exercées lors du séminaire régional. La reconnaissance du fait que la
Croatie accusait un retard par rapport aux autres pays de la région, ainsi que l’approche des
élections, ont contribué à installer un sentiment d’urgence autour de l’adoption de la loi.
Cette loi répond largement aux normes internationales, mais le CHC poursuit ses efforts pour la renforcer.
LEÇONS
Ce succès repose notamment sur les faits suivants :
• les organisateurs de la campagne ont su tirer profit des occasions que présentait le contexte politique du pays;
• ils ont su apprendre des réussites de campagnes semblables menées dans d’autres pays;
• ils ont échafaudé leur campagne en tirant parti des forces de chacun des partenaires.
En plus d’ajouter à la crédibilité de la campagne en affichant de nombreux appuis, une coalition étendue permet aux groupes de profiter d’un plus grand échantillonnage de ressources et d’aptitudes. Dans ce cas particulier, les penseurs de la coalition qui ont
élaboré la loi croate sont des universitaires spécialistes du domaine juridique, qui siègent sur le conseil de différentes ONG. Les groupes qui ne disposent pas d’une telle expertise juridique pourraient tenter d’établir des liens semblables avec des départements universitaires et d’autres ressources juridiques en vue d’accroître leurs aptitudes en matière d’organisation de campagnes.
Pour plus de renseignements sur les coalitions, voir « Travailler au sein d’une coalition », à l’article 3.4.
COLLABORATION AVEC ARTICLE 19
L’ARTICLE 19 dispose de certaines ressources qui sont mises à la disposition de groupes locaux pour effectuer l’analyse de projets de loi
à la lumière des normes internationales et, à l’occasion, pour s’occuper de certains cas mettant en jeu la liberté d’expression. Ceux et celles qui approchent ARTICLE 19 en visant une possible collaboration devront fournir le plus de renseignements possible concernant la situation qui prévaut dans leur pays – par exemple, l’échéancier pour l’adoption d’une loi précise, le contexte et la pertinence d’un cas particulier, afin qu’ARTICLE 19 puisse évaluer s’il peut offrir son aide.
Pour plus de renseignements, voir le site http://www.article19.org
IFEX 63
TROISIÈME PARTIE 3.3 GÉRER LES RESSOURCES JURIDIQUES (RESSOURCES)
GÉRER LES RESSOURCES JURIDIQUES – RESSOURCES
Guide de campagne d’Amnistie internationale,
2001 (disponible sous forme de document
PDF à l’adresse suivante : http://web.amnesty.org/pages/campaigningmanual-eng)
Commission de juristes des Andes : http://www.cajpe.org.pe/
ARTICLE 19 : http://www.article19.org
Commonwealth Press Union – Un programme
de soutien juridique
http://www.cpu.org.uk/legal_support.html
Conectus – Un institut de bénévoles http://www.conectas.org/site/en/index4.htm
Freedom of Expression Institute – Fonds de
défense de la liberté d’expression
http://fxi.org.za/fxi_defence_fund.htm
GlobalRights.org - Promoting Justice: Un guide
de défense juridique des droits de la personne
http://www.globalrights.org/what_we_do/issue s_we_work_on/human_rights_lawyering/prom oting_justice.cfm
International Bar Association – Institut de
défense des droits de la personne
http://www.ibanet.org/humri/action.asp
Association internationale d’avocats pour la défense des droits des médias : http://www.justiceinitiative.org/activities/foifoe
/foe/imla
Media Institute of Southern Africa
(Zimbabwe) : http://www.misa.org
Programme de formation sur la défense des droits des médias : http://pcmlp.socleg.ox.ac.uk/Advocates.htm
Open Society Justice Initiative (une initiative juridique pour une société ouverte) : http://www.justiceinitiative.org
L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe – Fonds d’aide juridique
Veronica Guerin : http://www.osce.org/fom/
Rights Consortium : http://www.rightsconsortium.org/
Stanhope Centre for Communications Policy
Research: http://www.stanhopecentre.org/
Zambia Independent Media Association –
Fonds d’aide juridique des médias
http://www.zima.co.zm/mldf.htm
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TROISIÈME PARTIE 3.4 TRAVAILLER AU SEIN D’UNE COALITION (BOÎTE À OUTILS)
Travailler au sein d’une coalition
3
.4
BOÎTE À OUTILS
COMMENT LA FORMATION DE COALITIONS PEUT RENFORCER UNE CAMPAGNE
C O N T E X T E
Il est très probable qu’à l’avenir, la coopération entre différents ONG sa de plus en plus fréquente. Les coalitions
– c’est-à-dire des alliances temporaires créées pour mener une campagne particulière – constituent une forme de coopération qui s’avère un outil très efficace pour les organisateurs de campagnes.
LES AVANTAGES DES COALITIONS
La mise en commun des ressources
Les coalitions rendent possible la réalisation de campagnes dont l’ampleur dépasse les moyens de tout groupe individuel. Elles permettent de partager les coûts entre plusieurs groupes, réduisent les chevauchements et encouragent une division des tâches qui met à profit les forces individuelles des différents participants.
Le partage des connaissances et les réseaux de contacts
Les campagnes peuvent profiter considérablement des expertises diverses, des connaissances locales, des liens et des réseaux de contacts des différents groupes participant à la coalition. Le partage de bases de données et de technologies de l’information profite également
à tous.
Envoyer le message dans les différentes circonscriptions
Les différents partenaires de la coalition peuvent diffuser le message de la campagne et ses documents clés à leurs membres et dans leur circonscription, rejoignant ainsi un plus grand nombre de personnes que ne l’aurait permis une organisation isolée.
Amélioration du profil et de la crédibilité
Une organisation qui fait campagne seule peut
être perçue comme une voix isolée, susceptible d’être ignorée. Une vaste coalition montre qu’une campagne obtient de nombreux appuis, ce qui facilite l’accès aux décideurs et capte mieux l’attention des médias.
L’aptitude à profiter des expertises variées des organisations participantes permet à la coalition de paraître bien informée et digne d’être prise au sérieux.
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TROISIÈME PARTIE 3.4 TRAVAILLER AU SEIN D’UNE COALITION (BOÎTE À OUTILS)
Complémentarité locale et internationale
Les grandes organisations internationales disposent sans doute d’expertises et de ressources financières qui font défaut aux groupes locaux. En contrepartie, les groupes locaux possèdent souvent les connaissances locales et les contacts sur le terrain qui sont nécessaires au succès d’une campagne.
Dans les situations où les défenseurs des droits de la personne travaillent dans un climat de violence dans leur propre pays, il peut être utile d’avoir des personnes à l’étranger qui
œuvrent pour la même cause.
Appuyer tous les droits de la personne, pas seulement ceux de la liberté d’expression
Le droit à la liberté d’expression est inexorablement lié aux autres droits de la personne – les droits civils, politiques,
économiques, sociaux et culturels – tels qu’ils sont formulés par la Déclaration universelle des droits de l’homme. On reconnaît de plus en plus que ces droits sont indivisibles. Ainsi, la participation à une coalition impliquant des
ONG dont les mandats sont divers permettra
à votre organisation de montrer son engagement envers un ensemble de droits de la personne, même si son travail propre est davantage ciblé.
DÉSAVANTAGES POSSIBLES
Bien que les coalitions offrent de nombreux avantages, les organisations doivent connaître les inconvénients possibles avant de s’associer à une coalition :
• Il est inévitable qu’il y ait certains conflits lorsque les différents groupes d’une coalition apportent avec eux leurs forces, leurs faiblesses, leurs perspectives et leurs personnalités distinctes.
• La gestion d’une coalition peut s’avérer difficile et prendre beaucoup de temps. Sans une coordination efficace et de bonnes communications internes, les coalitions peuvent s’effondrer.
• La création et la re-création d’un consensus entre les différents partenaires nécessitent souvent beaucoup de temps, d’énergie et de dévouement.
• Une fois qu’une coalition a été formée pour mener une campagne, les organisations individuelles devront abandonner en partie le contrôle de la campagne et le remettre à la coalition.
• Le fait d’être potentiellement associé à certains membres d’une coalition – par exemple, les groupes qui encouragent ou tolèrent le recours à des tactiques violentes – peut susciter la controverse. S’associer à une coalition qui regroupe des organisations politiques partisanes peut nuire aux visées de groupes qui aspirent à l’impartialité.
CRÉER DES COALITIONS EFFICACES
Même s’il n’existe pas d’ensemble de règles universelles à appliquer lorsque l’on forme une coalition, voici quelques suggestions qui méritent d’être prises en considération :
• N’éliminez pas d’emblée les alliances improbables. Des organisations qui ne s’accordent pas sur un enjeu particulier peuvent néanmoins s’entendre sur d’autres points.
• Faites preuve de souplesse et d’ouverture d’esprit – les autres organisations peuvent vouloir procéder différemment. En même
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TROISIÈME PARTIE 3.4 TRAVAILLER AU SEIN D’UNE COALITION (BOÎTE À OUTILS)
temps, souvenez-vous des « limites » que votre organisation s’impose en termes d’approches et de tactiques acceptables.
• Déterminez un nombre restreint d’objectifs que la coalition visera à atteindre en une période donnée.
•
La structure de gestion de la coalition devra
être très bien planifiée. Certaines coalitions forment un comité de direction composé d’un représentant de chacune des organisations membres, afin d’éviter qu’une organisation ne se retrouve en position dominante.
•
Communiquez régulièrement et partagez vos renseignements.
•
Partagez toute publicité générée par la coalition de manière à limiter la concurrence entre les organisations membres.
•
Assurez-vous que la charge de travail est
équitablement répartie entre les membres de la coalition.
•
Ne critiquez pas publiquement le travail des autres membres de la coalition.
•
Les groupes membres devraient s’unir autour de la cause à défendre, plutôt que se livrer une concurrence mutuelle.
•
Si, en fin de compte, votre groupe décide de ne pas former une coalition, votre campagne pourra tout de même profiter d’appuis et d’alliances informelles avec d’autres groupes.
CONTINUUM D’ACTION CONJOINTE
L’engagement des différentes organisations envers la coalition peut grandement varier. Les organisations entretiennent des liens qui vont de l’indépendance la plus totale à la coalition serrée et structurée. Les étapes de ce continuum sont les suivantes :
Indépendance – Coopération – Coordination
– Collaboration – Coalition
Indépendance – les organisations travaillent sur les mêmes enjeux de manière isolée
Coopération – les organisations s’aident mutuellement de façon ponctuelle
Coordination – les organisations s’assurent toujours que leurs actions tiennent compte de celles des autres organisations
Collaboration – les organisations travaillent conjointement et de façon continue sur un projet particulier, en vue d’un objectif commun
Coalition – les organisations disposent d’une stratégie d’ensemble conjointe et fonctionnent au sein d’une structure commune continue, qu’elle soit serrée ou non
Engagement
Différentes organisations au sein de la coalition se situent à différentes étapes du continuum, en fonction de la durée de leur engagement, du niveau de confiance qui règne entre les membres, des ressources financières et humaines que les organisations fournissent, etc.
QUESTIONS À SE POSER
Avant de s’engager dans une coalition, il convient de se poser les questions suivantes :
•
Les objectifs et le mandat de la coalition sont-ils compatibles avec ceux de votre organisation ?
•
Ces objectifs sont-ils réalistes ?
•
Y a-t-il entente mutuelle concernant l’enjeu et l’approche que doit adopter la campagne pour y faire face ?
•
Chaque organisation retire-t-elle des avantages de son travail auprès des autres organisations ?
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TROISIÈME PARTIE 3.4 TRAVAILLER AU SEIN D’UNE COALITION (BOÎTE À OUTILS)
•
La confiance mutuelle entre les organisations membres est-elle suffisante pour leur permettre de travailler ensemble de façon efficace ?
•
S’agit-il d’une collaboration ponctuelle visant
à atteindre un but rapidement, ou s’agit-il d’une campagne à plus long terme ?
•
Votre organisation devra-t-elle céder trop de son pouvoir de décision ?
•
La charge de travail est-elle équitablement répartie entre les membres de la coalition ?
Évaluation de l’activité de la coalition :
•
La coopération s’avère-t-elle réussie ?
•
Les ressources sont-elles bien utilisées ?
•
Les cibles sont-elles en voie d’être atteintes ?
•
Y a-t-il eu des résultats négatifs jusqu’à maintenant ?
•
Les efforts doivent-ils être réorientés ?
•
La coalition a-t-elle eu des effets bénéfiques pour tous les membres impliqués ?
•
La visibilité/la reconnaissance/le pouvoir générés par les réalisations de la coalition sont-ils bien répartis entre les partenaires ?
•
Quelles leçons avez-vous apprises pour les campagnes à venir ?
RÉFÉRENCES
©Publications d’Amnistie internationale.
Guide de campagne d’Amnistie internationale,
2001. 1, rue Easton, Londres WC1X 0DW,
Royaume-Uni. http://www.amnesty.org
« A Guide to Coalition Building. » http://www.cypresscon.com/coalition.html
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TROISIÈME PARTIE 3.4 TRAVAILLER AU SEIN D’UNE COALITION (ÉTUDE DE CAS)
Travailler au sein d’une coalition
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ÉTUDE DE CAS
LE FREEDOM OF EXPRESSION INSTITUTE ET LA CAMPAGNE CONTRE LE PROJET DE LOI
ANTITERRORISTE D’AFRIQUE DU SUD
C O N T E X T E
La présentation du Projet de loi antiterroriste en 2002 menaçait de compromettre le degré de liberté relativement élevé dont jouissent les médias en Afrique du Sud. La lutte contre le projet de loi s’est inscrite dans la « riche tradition d’activisme » du pays qui, selon le coordonnateur des projets contre la censure du Freedom of
Expression Institute (FXI) Simon Kimani Ndung’u, « s’explique par la résistance passée aux politiques répressives du pays à l’ère de l’apartheid ».
En plus de ces restes d’activisme hérités de l’ère de l’apartheid, de nouveaux organismes non gouvernementaux
(ONG) et organismes communautaires ont vu le jour. Ces groupes entretiennent leur indépendance et conservent une distance critique face au gouvernement, dirigé par le Congrès national africain (ANC). Parmi les autres acteurs clés, il y a le Congress of South African Trade Unions (COSATU), un partenaire de l’alliance de l’ANC au pouvoir, qui compte deux millions de membres.
Une décennie après la chute de l’apartheid, la démocratie a gagné du terrain. Malgré tout, de nombreux organismes et individus se disent déçus du peu de progrès réalisé sur certains fronts socioéconomiques, comme l’accès à la terre, au logement, à l’eau, à l’électricité et aux soins de santé. Le FXI a tenté d’établir des liens entre le peu de progrès réalisé en Afrique du Sud en matière de droits sociaux et économiques et le développement encore partiel des droits civils et politiques, ce qui comprend le droit à la liberté d’expression. L’organisme soutient que le manque de droits socioéconomiques, la pauvreté grandissante et les inégalités toujours plus flagrantes montrent des liens directs avec la censure, qui est de plus en plus utilisée pour empêcher les personnes d’exprimer un point de vue critique.«
Nous avons étudié le contexte et nous nous en sommes servis pour donner un sens à notre campagne », indique
Kimani Ndung’u. Le FXI a su trouver des objectifs communs avec d’autres organismes également inquiets de la menace que représente le Projet de loi antiterroriste pour le droit à la liberté d’expression, le droit d’association, d’assemblée, de manifestation et de piquetage.
En 2002, au lendemain des attaques du 11 septembre, le gouvernement sud-africain a réintroduit l’idée d’un Projet de loi antiterroriste (Anti-Terrorism Bill, ATB), connu sous le nom de Projet de loi sur la
Protection de la démocratie constitutionnelle contre le terrorisme et autres activités
(officiellement : The Protection of
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TROISIÈME PARTIE 3.4 TRAVAILLER AU SEIN D’UNE COALITION (ÉTUDE DE CAS)
Constitutional Democracy against Terrorist and Related Activities Bill).
Le FXI a expliqué que ce projet de loi compromettrait sérieusement les droits fondamentaux et les libertés, puisqu’il n’offre aucune définition précise du terme
« terrorisme ». Une définition si large et si vague des actes terroristes pourrait servir à interdire un grand nombre d’activités légitimes tant civiles que politiques, telles que les demandes pour accéder à des terres, les manifestations pacifiques, les piquets de grève ou les campagnes de désobéissance civile. Par exemple, le FXI a noté que les actions menées par des organismes tels le Treatment Action Campaign, qui milite en faveur de traitements abordables
NOUS AVONS RÉALISÉ QU’IL ÉTAIT
IMPOSSIBLE DE MENER UNE CAMPAGNE
CONTRE LE PROJET DE LOI QUI
PORTERAIT FRUIT SANS CRÉER UNE
COALITION À GRANDE ÉCHELLE.
pour le VIH-SIDA, et celles menées par le
Soweto Electricity Crisis Committee, qui s’oppose aux coupures d’électricité dans les secteurs pauvres, deviendraient criminelles en
étant qualifiées d’« actes terroristes ». Le FXI a ajouté que ce type de loi était inutile, surtout à la lumière des propres déclarations du gouvernement concernant sa capacité à combattre des actes terroristes au pays à l’aide de lois déjà en vigueur.
Depuis 1994, le FXI a participé, auprès d’autres organismes de la société civile, à un certain nombre de campagnes couronnées de succès. « En repensant à ces réussites passées, nous avons réalisé qu’il était impossible de mener une campagne contre le projet de loi qui porterait fruit sans créer une coalition à grande échelle », a indiqué le coordonnateur des projets contre la censure du FXI, Simon
Kimani Ndung’u. Une coalition élargie était tout particulièrement indiquée dans ce cas, en raison de la nature délicate de la question du
« terrorisme » après le 11 septembre. « Nous ne voulions pas être seuls à crier dans le désert », a ajouté Kimani Ndung’u.
La coalition comptait parmi ses rangs le bureau sud-africain du Media Institute of
Southern Africa (MISA-SA), la Media Workers
Association of South Africa, le Media Review
Network, la Anti-War Coalition ainsi que certains organismes sociaux comme le Anti-
Privatisation Forum, le Landless People’s
Movement et la Treatment Action Campaign.
Ses objectifs étaient les suivants :
• conscientiser et informer le public quant à ce projet de loi pour mieux s’y opposer;
• demander plus de temps pour discuter du projet de loi que ce que le Parlement avait prévu d’accorder;
•
échanger avec les membres du gouvernement et du Parlement;
• faire abroger ou retirer le projet de loi en question.
Adoption d’un programme d’action
En février 2003, le FXI a organisé une série de réunions de planification avec des ONG, des syndicats, des groupes religieux, des mouvements sociaux et des partis politiques en vue d’arriver à un consensus au sujet de certains aspects clés du projet de loi. Ces rencontres ont débouché sur un programme d’action.
Le FXI a également accordé à un expert juridique le mandat d’étudier la constitutionalité du projet de loi, son utilité
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TROISIÈME PARTIE 3.4 TRAVAILLER AU SEIN D’UNE COALITION (ÉTUDE DE CAS)
pour l’Afrique du Sud et les alternatives possibles au projet de loi; l’expert a également
été chargé de mener une étude comparative de lois antiterroristes dans des pays comme les
États-Unis, le Royaume-Uni, le Canada, l’Allemagne et l’Inde.
Stratégie médiatique
L’organisme a ensuite mis en application une stratégie médiatique à grande échelle, visant à conscientiser le public face à ce projet de loi.
Parmi les initiatives de cette stratégie figuraient des entrevues diffusées dans les médias écrits et
électroniques et l’envoi d’articles d’opinion aux journaux. La coalition a également identifié des journalistes sympathiques à la cause et qui seraient disposés à écrire au sujet des problèmes que représente un tel projet de loi; il s’agissait ainsi d’un premier pas important visant à attirer davantage l’attention des médias sur cet enjeu.
Programme publicitaire et de sensibilisation
Entre les mois de mars et de juin 2003, le FXI a mis sur pied un programme publicitaire et de sensibilisation et a organisé plusieurs séminaires et ateliers, en plus de participer aux manifestations publiques contre le Projet de loi antiterroriste. Ces activités coïncidaient avec la distribution d’environ 50 000 dépliants, 100 affiches et 1 600 autocollants, publiés en quatre des onze langues officielles de l’Afrique du Sud.
Audiences de la commission parlementaire
À la fin du mois d’avril, le FXI avait envoyé une soumission écrite à la commission parlementaire qui étudiait le Projet de loi antiterroriste, dans laquelle il signalait les nombreuses lacunes du projet de loi, les dangers inhérents d’une telle loi non seulement en Afrique du Sud mais ailleurs, et terminait en demandant que le projet de loi soit retiré.
La campagne encourageait également les autres membres de la coalition, certains organismes de la société civile ne faisant pas partie de la coalition, ainsi que plusieurs particuliers, à faire parvenir leurs commentaires écrits à la commission en vue d’empêcher l’adoption du projet de loi.
En juin, le FXI a prononcé un discours devant la commission parlementaire. Plusieurs autres ONG, des organismes communautaires, des groupes de défense des droits de la personne, des organismes regroupant des avocats et des groupes religieux se sont présentés devant la commission, unissant leurs voix pour demander que le projet de loi soit retiré.
À la suite des audiences, la commission a entièrement réécrit le projet de loi. Avant son dépôt final au Parlement à la fin de novembre, le projet avait été réécrit pas moins de trois fois.
DÉFIS
Concilier des points de vue divergents
Le fait que différents organismes abordaient le problème avec des idéologies et des approches différentes a constitué le principal défi de la coalition. Par exemple, certains organismes s’opposaient totalement au projet de loi, alors que d’autres voulaient seulement en modifier certaines clauses. Dès le début, des divergences profondes caractérisaient les échanges et certains organismes se sont éventuellement retirés de la coalition.
« Jusqu’à un certain point, nous étions prêts
à tenter de réconcilier ces différents points de vue afin de pouvoir travailler ensemble et agir comme une seule entité, a expliqué Kimani
Ndung’u. Toutefois, il n’est pas toujours facile
IFEX 71
TROISIÈME PARTIE 3.4 TRAVAILLER AU SEIN D’UNE COALITION (ÉTUDE DE CAS)
de s’associer à des personnes qui ne partagent pas une même vision des choses. »
L’EFFET D’ENTRAÎNEMENT A FAIT
BOULE DE NEIGE ET A FAIT EN
SORTE QUE L’INFORMATION S’EST
PROPAGÉE PARMI LES
PARTENAIRES DE LA COALITION,
LEURS MEMBRES ET LES
CIRCONSCRIPTIONS.
Parvenir à ses fins malgré des ressources limitées
« Alors que nous ne manquions pas de ressources organisationnelles en termes de locaux et d’équipement de bureau, nous souffrions d’un manque certain de moyens financiers », selon Kimani Ndung’u. Le FXI a ainsi obtenu d’un bailleur de fonds local les ressources nécessaires pour organiser des ateliers et des séminaires dans les principales villes, et pour faire imprimer des dépliants.
La création d’une grande coalition a
également permis le partage de ressources.
Différents partenaires ont assumé des rôles bien définis, comme imprimer des dépliants, agir comme hôte de réunions, et participer à des entrevues auprès des médias. Les organismes partenaires devaient également mobiliser leurs membres et circonscriptions respectifs lors des ateliers ou des manifestations. La possibilité d’avoir recours aux ressources financières et logistiques des organisations membres a ainsi enlevé une certaine pression sur le FXI.
IMPACT
La campagne a connu de nombreuses réussites avant de remporter sa victoire décisive.
« Nous voulions d’abord faire connaître le projet de loi au plus grand nombre possible, dit Kimani Ndung’u. Il nous semblait
évident qu’à défaut de réussir à conscientiser la population, le Parlement nous aurait ignorés et n’aurait eu aucun mal à faire adopter le projet de loi. » À l’origine, le Projet de loi antiterroriste était, à toutes fins utiles, totalement inconnu; mais le FXI et ses partenaires ont réussi à susciter un débat public autour de la question dans une bonne partie du pays. « L’effet d’entraînement a fait boule de neige et a fait en sorte que l’information s’est propagée parmi les partenaires de la coalition, leurs membres et les circonscriptions », ajoute Kimani Ndung’u.
La coalition a également réussi à susciter un intérêt médiatique grandissant, alors que la campagne faisait son chemin. « Au début de la campagne, il n’y avait que très peu de discussions médiatiques autour du projet de loi, dit Kimani Ndung’u. Au début, cette question manquait de ‘sex-appeal’ aux yeux des médias, mais une fois que les gens ont commencé à en parler, il n’y avait plus moyen de l’ignorer. » Les médias ont également réalisé qu’ils pourraient être sérieusement touchés par certaines dispositions du Projet de loi antiterroriste, et sont alors devenus une force active de diffusion d’informations et d’opposition au projet de loi.
L’opposition générale au projet de loi a grandi avec le temps. Les membres du
Parlement se sont mis à contacter le FXI et les autres partenaires de la coalition pour obtenir
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TROISIÈME PARTIE 3.4 TRAVAILLER AU SEIN D’UNE COALITION (ÉTUDE DE CAS)
des renseignements sur le projet de loi. Même si certains députés s’opposaient en privé au projet de loi, ils ne pouvaient le faire publiquement puisqu’ils devaient suivre la ligne de leur parti. (À l’origine, l’ANC au pouvoir et les principaux partis d’opposition ont tous appuyé le projet de loi.)
La coalition a également réussi à faire prolonger la période de soumission des commentaires du public, accordant ainsi beaucoup plus de temps pour réfléchir au projet de loi et à ses enjeux.
Enfin, le projet de loi a été abandonné à la fin du mois de février 2004.
LES FACTEURS QUI EXPLIQUENT LA VICTOIRE
Le FXI déclare que cette victoire est due à plusieurs facteurs. Les efforts importants de lobbying de la coalition ont sans aucun doute joué un rôle important dans la sensibilisation du gouvernement quant à l’opposition générale au projet de loi.
Le gouvernement a dû réécrire le projet de loi à plusieurs reprises pour tenter de répondre aux inquiétudes des différents groupes d’intérêt. Le FXI indique que cela explique sans doute la décision éventuelle d’annuler son projet de loi, puisque le gouvernement a constaté que ce dernier ne serait jamais suffisamment acceptable.
Parmi les autres facteurs décisifs, il y avait la position prise par le Congress of South African
Trade Unions (COSATU), qui avait menacé de mobiliser ses membres à l’occasion d’une grève
à l’échelle du pays si le projet de loi était accepté. Bien que le COSATU ne faisait pas partie de la coalition contre le Projet de loi antiterroriste, le Congrès a finalement conclu que la définition étendue d’un « acte terroriste » pourrait violer le droit de grève constitutionnel des travailleurs et, dans les faits, « replonger l’Afrique du Sud dans l’ère de l’apartheid ». Des grèves importantes auraient nui à l’image de l’ANC lors de la course aux troisièmes élections générales du pays, qui ont eu lieu en avril 2004. Le gouvernement craignait sans doute de s’aliéner certains de ses partisans et alliés les plus fidèles au sein du
COSATU.
« La coalition a réussi son effort de sensibilisation quant à ce projet de loi, qui aurait sans doute été adopté en secret sans nos efforts, dit Kimani Ndung’u. Mais seuls, nous n’aurions pas réussi à attirer l’attention du gouvernement. » Il insiste sur le fait que différents acteurs ont joué des rôles clés à différentes étapes du processus, et le rôle du
COSATU s’est avéré déterminant vers la fin de celui-ci. « Nos efforts visant à rendre public le projet de loi ont réussi, ce qui a incité le
COSATU à finalement s’impliquer », ajoute-t-il.
De plus, le FXI fait remarquer que le gouvernement ne voulait pas perdre le vote de ses électeurs musulmans, qui s’étaient farouchement opposés au projet de loi depuis le début, craignant d’être les premiers visés.
La campagne contre le Projet de loi antiterroriste illustre clairement l’utilité d’assembler une coalition et de provoquer la participation de membres dont les intérêts dépassent largement les questions de liberté d’expression et de droits des journalistes.
IFEX 73
TROISIÈME PARTIE 3.4 TRAVAILLER AU SEIN D’UNE COALITION (RESSOURCES)
TRAVAILLER AU SEIN D’UNE COALITION – RESSOURCES
Amnistie internationale - Guide de campagne,
2001 http://web.amnesty.org/pages/campaigningmanual-eng)
Building Coalitions to Bring About Change
(Bâtir des coalitions pour changer les choses).
John F. Kennedy School of Government,
Harvard University, Cambridge, MA; The
Urban Seminar Series on Children’s Health and Safety (2003)
Building Strategic Relationships: How to Extend
Your Organization’s Reach through Partnerships,
Alliances, and Joint Ventures (Établir des relations stratégiques : Comment étendre la portée de votre organisation par le biais de partenariats, d’alliances et d’actions concertées);
William Berquist, Juli Betwee, David Meuel
CIVICUS – Alliance mondiale pour la participation civique http://www.civicus.org/new/default.asp?skip2= yes
Coalition for the International Criminal Court http://www.iccnow.org/
Boîte à outils communautaire : How to Create
Coalitions and Partnerships (Comment créer des coalitions et des partenariats)
http://ctb.ku.edu/tools/coalitions/create/index.
jsp
Developing Coalitions and Collaborations: A
Guide for the 21st Century (Établir des coalitions et des collaborations : Un guide pour le
21e siècle), Center for Excellence in Aging
Services, The University at Albany, State
University of New York, 2001
Freedom of Information Advocates Network
(Réseau pour les défenseurs de la liberté d’information) : http://www.foiadvocates.net/index_eng.html
Campagne internationale contre les mines terrestres : http://www.icbl.org/
Interaction Institute for Social Change -
Facilitating Change (Faciliter le changement)
http://www.interactioninstitute.org/services/fac ilitating_change.php
Jubilee Debt Campaign : http://www.jubileedebtcampaign.org.uk/
Partnering in Action: A Guide for Building
Successful Collaboration Across Organizational
Boundaries; Diane Fasel; Oxford, UK: How to
Books (2000)
Prevention Institute - Developing Effective
Coalitions (Établir des coalitions efficaces)
http://www.preventioninstitute.org/eightstep.h
tml
Smart Alliances: A Practical Guide to Repeatable
Success, John Harbison, Peter Pekar;
The Access Initiative: http://www.accessinitiative.org/
World Movement for Democracy: http://www.wmd.org/wmd.htm
IFEX 74
L’appui de personnalités publiques
3
.5
TROISIÈME PARTIE 3.5 L’APPUI DE PERSONNALITÉS PUBLIQUES (BOÎTE À OUTILS)
BOÎTE À OUTILS
COMMENT L’APPUI DE PERSONNALITÉS PUBLIQUES PEUT RENFORCER UNE CAMPAGNE
CONTEXTE
Pourquoi avoir recours à des personnalités publiques ? Le vedettariat est un bon vendeur. Une vedette qui endosse votre campagne peut réellement avoir un impact sur la couverture médiatique, la sensibilisation du public et les pressions exercées sur les organisations pertinentes. Les vedettes montrent l’exemple et la population peut s’en inspirer, ce qui ajoute une valeur importante aux efforts de votre organisation.
Les effets positifs de l’appui de vedettes comprennent notamment :
• la capacité d’attirer un nouvel auditoire;
• la levée de fonds par l’encouragement des commandites et des contributions;
• la mobilisation de l’opinion publique et la participation;
• la contribution au repositionnement de l’organisation dans la perception du public;
• la stimulation ponctuelle d’une campagne à long terme.
Les premières questions à se poser sont les suivantes :
•
Comment identifier une personnalité connue qui serait susceptible d’appuyer votre cause ?
•
Qui serait indiqué ?
Les facteurs à considérer sont les suivants :
•
Quel type de vedette désirez-vous ?
•
Avez-vous réellement besoin de ce type d’appui
? Considérez le chemin parcouru par votre organisation à ce jour et pensez à ce que l’appui d’une vedette vous apportera de plus.
•
L’enjeu est-il local ? Si tel est le cas, peut-être devriez-vous songer à avoir recours à une personnalité publique locale.
•
Existe-t-il déjà des vedettes qui s’expriment en faveur de la liberté d’expression ? Si tel est le cas, vous pourriez songer à leur demander leur appui pour votre campagne.
IFEX 75
TROISIÈME PARTIE 3.5 L’APPUI DE PERSONNALITÉS PUBLIQUES (BOÎTE À OUTILS)
LES VEDETTES QUI PEUVENT VOUS AIDER
Chaque personnalité publique présente des avantages et des inconvénients. Avant de contacter des vedettes, réfléchissez à leurs motifs, aux efforts que vous devrez déployer pour entretenir leur intérêt et pensez à quel point leur présence aidera votre cause.
•
Ciblez des vedettes qui plairont au public cible de votre organisation. Prenez soin de choisir des vedettes qui n’auront pas tendance
à banaliser l’enjeu ou à miner votre message.
•
Enquêtez pour déterminer quelles personnalités publiques seront susceptibles de s’intéresser à votre cause. Votre organisation aura plus de chances de développer une relation à long terme avec une vedette si celleci éprouve une réelle sympathie ou a vécu une expérience personnelle en rapport avec la cause dont elle fera la promotion.
•
Effectuez des recherches pour vous assurer que les antécédents des vedettes n’entrent pas en conflit avec les objectifs de votre organisation, ou suscitent une publicité négative.
•
Les vedettes doivent ajouter une valeur à votre cause. Pensez à la manière dont elles pourront changer les choses. Évitez de chercher l’appui de vedettes dans le simple but d’associer des noms connus à votre campagne.
•
Plusieurs vedettes considèrent le travail charitable comme une partie intégrante de leur autopromotion, si bien que toutes les vedettes qui répondent à vos appels ne sont pas animées de véritables sentiments altruistes.
Cependant, cela ne devrait pas faire oublier les avantages potentiels que l’appui de vedettes pourra apporter à votre organisation. Par exemple, une vedette qui arbore le logo de votre organisation dans une photo de magazine procurera à chacune des parties le type de notoriété quelle désire.
•
Si vous avez l’intention de recourir à une vedette comme ambassadeur ou porte-parole, des rôles qui impliquent davantage que la simple campagne promotionnelle, choisissez cette vedette très soigneusement. Certaines personnes sont plus habiles que d’autres à traiter d’enjeux complexes, et la qualité de la promotion en sera influencée.
•
Ayez une perception réaliste de la taille de votre organisation, des enjeux que vous aimeriez voir défendus et des tâches que vous confierez aux vedettes. Des vedettes de catégorie « A » seront peu susceptibles d’assister à un déjeuner-causerie venant en aide à un organisme caritatif local, par exemple, alors que des vedettes de catégorie
« C » ou « D » seraient sans doute heureuses d’y participer.
LE RECRUTEMENT D’UNE VEDETTE
Les vedettes et leurs agents reçoivent quotidiennement des demandes d’appui venant d’organismes caritatifs, ainsi que des propositions de participation à des campagnes publicitaires. L’approche de votre organisation devra être subtile mais déterminée et votre campagne très bien présentée si vous voulez inciter une vedette à vous aider.
La première étape vise à établir un contact :
•
Contactez les vedettes par l’entremise de leur site Web, de leur agent ou en ayant recours à vos propres contacts.
IFEX 76
TROISIÈME PARTIE 3.5 L’APPUI DE PERSONNALITÉS PUBLIQUES (BOÎTE À OUTILS)
•
Lorsque c’est possible, contactez les vedettes directement. Plusieurs personnalités publiques emploient des agents qui filtrent les demandes d’appui, ce qui constitue un obstacle à franchir.
Une fois le contact établi, expliquez le mandat de votre organisation et ce que suppose la proposition que vous faites à la vedette :
•
Expliquez-lui ce que votre organisation peut lui offrir. Soulignez les avantages publicitaires associés à son implication dans votre campagne.
•
Soyez très précis quant à ce que la vedette devra faire pour votre organisation. La vedette participera-t-elle à une seule campagne, ou aimeriez-vous initier une relation qui ferait d’elle le visage de votre organisation ?
•
Souvent, les causes qu’appuient les vedettes sont par nature des causes à long terme, comme la pauvreté chez les enfants. Si votre cause est ponctuelle, vous devrez le souligner car cela n’implique pas un appui à long terme.
Une fois que vous aurez obtenu l’appui d’une vedette, laissez-lui savoir que sa contribution est importante :
•
Rendez la relation plus personnelle et informez la vedette des développements de la campagne dans laquelle elle a accepté de participer.
•
Remerciez-la et soulignez adéquatement tout geste d’appui de la vedette.
•
Envisagez d’accorder le statut de membre bienfaiteur aux vedettes qui ont participé d’une manière particulière aux campagnes de votre organisation, ou qui l’appuient depuis longtemps.
COMMENT UTILISER LEUR APPUI
Offrez aux vedettes une série d’options d’engagement. Parfois, une déclaration suffit – vous pourrez l’ajouter à un communiqué de presse. Évidemment, la solution idéale serait que la vedette vous offre son plein appui, mais il existe une variété de solutions intermédiaires. Il faut faire preuve d’imagination. Rappelez-vous que les vedettes sont des personnes très occupées, alors une forme de participation qui ne leur demande pas trop de temps sera plus susceptible d’avoir un effet. Voici quelques suggestions :
•
Obtenir des vedettes qu’elles signent (et
écrivent) des lettre de demande de dons aux commanditaires potentiels et qu’elles les envoient par publipostage.
•
Leur demander d’apparaître dans des activités promotionnelles et des messages de campagne destinés à la télévision et la radio.
•
Leur demander de s’exprimer en conférence de presse et lors d’entrevues, ou d’agir à titre d’invité principal lors d’événements de levée de fonds.
•
Participer à des activités hautement médiatisées qui amassent des fonds ou sensibilisent le public à la cause que défend votre organisation.
•
Leur demander d’utiliser leurs réseaux de contacts pour augmenter les appuis à votre organisation. La participation de vedettes aux activités de campagne et aux conférences médiatiques peut susciter l’intérêt des médias pour des événements qui, autrement, passeraient inaperçus.
IFEX 77
TROISIÈME PARTIE 3.5 L’APPUI DE PERSONNALITÉS PUBLIQUES (BOÎTE À OUTILS)
RISQUES POTENTIELS ASSOCIÉS À L’APPUI DE
PERSONNALITÉS PUBLIQUES
Alors que de nombreux organismes caritatifs entretiennent de bonnes relations avec les personnalités publiques qui appuient leur cause, certains ont connu des ennuis. Assurezvous que votre organisation tiendra compte de toutes les éventualités liées à l’appui par des personnes en vue.
•
Certains enjeux ou certaines campagnes attirent difficilement les appuis de personnes célèbres et la plupart d’entre elles sont peu enclines à s’associer à une campagne dont l’enjeu fait l’objet d’un tabou. Votre organisation trouvera également qu’il est difficile de trouver des vedettes qui incarneront ou appuieront certaines causes.
•
Méfiez-vous d’une trop grande dépendance à l’égard de l’appui des vedettes et assurez-vous que la célébrité et la publicité ne prennent pas le dessus sur le message fondamental de votre campagne.
•
Élaborez un plan d’urgence au cas où les vedettes attireraient de la part des médias une attention qui serait non désirée et potentiellement nuisible. Préparez-vous à répondre aux médias et décidez en quelles circonstances vous appuierez les vedettes, et à quel moment vous devriez permettre à votre organisation de prendre ses distances.
•
Préparez-vous à négocier avec des vedettes qui peuvent se montrer exigeantes. Dans le cadre de campagnes importantes et coûteuses, envisagez de faire signer un contrat entre la vedette et votre organisation, établissant les modalités et les conditions de leur travail. En général, les organismes caritatifs ne paient pas les vedettes. Vous devriez toutefois viser à défrayer leurs dépenses, dont celles du déplacement et de l’hébergement.
•
Assurez-vous que la contribution de la vedette en vaut la peine et que cette dernière la considère utile également.
RÉFÉRENCES
©Publications d’Amnistie internationale.
Guide de campagne d’Amnistie internationale,
2001. 1, rue Easton, Londres WC1X 0DW,
Royaume-Uni. http://www.amnesty.org
Media Trust: Attracting and Keeping Celebrity
Support (S’attirer l’appui de vedettes et conserver cet appui).
http://www.mediatrust.org/
BBC iCan: How to Get Celebrity and High
Profile Support (Comment obtenir l’appui de vedettes)
http://www.bbc.co.uk/dna/ican/
CONSEILS PRATIQUES
•
Exprimez clairement ce que vous voulez, quand et pourquoi.
•
Expliquez clairement le soutien que vous pourrez apporter.
•
Indiquez clairement si une rétribution sera versée ou des dépenses défrayées.
•
Fournissez autant de renseignements de base que possible.
IFEX 78
L’appui de personnalités publiques
3
.5
TROISIÈME PARTIE 3.5 L’APPUI DE PERSONNALITÉS PUBLIQUES (ÉTUDE DE CAS)
ÉTUDE DE CAS
LA CAMPAGNE INTERNATIONALE POUR L’INTERDICTION DES MINES TERRESTRES
C O N T E X T E
En 1991-1992, plusieurs individus et organisations non gouvernementales, parmi lesquels figurait le membre de l’IFEX Human Rights Watch, se sont réunis pour coordonner leurs efforts sous la bannière de la
Campagne internationale pour l’interdiction des mines terrestres (ICBL)
Aujourd’hui, la ICBL a donné naissance à un réseau de plus de 1 400 groupes dans plus de 90 pays, dont des groupes de défense des droits de la personne, des groupes humanitaires, des groupes pour les droits des enfants, pour la paix, pour les handicapés, des groupes de vétérans, médicaux, d’action contre les mines, de développement, de contrôle des armes, religieux, environnementaux et des groupes de femmes. La campagne vise à obtenir l’interdiction internationale de l’utilisation, de la production, de l’accumulation de stocks, de la vente, du transfert et de l’exportation des mines antipersonnel. Le réseau revendique les actions suivantes :
• la ratification, la mise en œuvre et le suivi du traité de 1997 sur l’interdiction des mines;
• l’allocation de ressources plus importantes pour le déminage humanitaire et les programmes d’éducation aux risques des mines;
• l’allocation de ressources plus importantes pour la réhabilitation et l’assistance aux survivants des explosions de mines.
Le message de la ICBL se résume ainsi : « Interdisons les mines ! Détruisons les mines ! Aidons les survivants ! »
Les efforts de la campagne ont mené au traité de 1997 interdisant les mines, également appelé Convention d’Ottawa. Depuis juillet 2004, 143 pays ont ratifié ce traité international ou y ont adhéré, lequel interdit l’utilisation, la production, l’accumulation de stocks et le transfert de mines antipersonnel. Neuf autres pays l’ont signé, mais n’ont pas encore complété le processus de ratification. Quarante-deux pays n’ont pas encore adhéré au traité.
En 1997, la ICBL, ainsi que sa coordonnatrice et fondatrice, Jody Williams, ont reçu le prix Nobel de la paix.
Pour plus de renseignements, voir http://www.icbl.org
La Campagne internationale pour l’interdiction des mines terrestres (ICBL) et ses groupes membres ont reçu l’appui de nombreuses vedettes au cours des quelques dernières années, notamment feue Diana, princesse de Galles. Cet appui, qui s’est ajouté à plusieurs autres méthodes de campagne, a contribué aux nombreux succès de la campagne, parmi lesquels on note le traité de 1997 sur l’interdiction des mines.
Or, la ICBL ne considère pas l’appui de personnalités publiques comme étant une partie
IFEX 79
TROISIÈME PARTIE 3.5 L’APPUI DE PERSONNALITÉS PUBLIQUES (ÉTUDE DE CAS)
importante de sa boîte à outils de campagne.
En fait, lorsque la campagne a été lancée au début des années 1990, la ICBL avait décidé de ne pas faire appel à des vedettes.
« Puisqu’il s’agissait d’une campagne politique en faveur de l’élimination d’une arme, nous pensions que les vedettes pourraient trouver la campagne trop complexe, trop
IL FAUT ABSOLUMENT FAIRE PREUVE
DE « CRÉATIVITÉ ET DE PERSISTANCE
ET SAVOIR RECOURIR AUX CONTACTS
DE VOS MEMBRES, DES CONTACTS
DONT VOUS NE SOUPÇONNEZ
PROBABLEMENT PAS L’EXISTENCE.
survécu à l’explosion de mines et les organisations qui travaillent sur le terrain. »
La ICBL, comme telle, n’a fait aucun effort pour s’attirer l’appui de personnalités publiques, mais certains membres ont, à titre personnel, commencé à recruter des vedettes localement. « Notre campagne est menée par une coalition plutôt souple dont chaque membre est libre de mettre au point ses propres stratégies en fonction de ce qui fonctionnera le mieux dans son pays, note
Bernstein. Nous n’avons pas de modèle de campagne prêt-à-porter. » politique ou trop militaire », explique Elizabeth
Bernstein, coordonnatrice de la ICBL. « Même si nous considérions que notre message et nos objectifs étaient clairs et simples, nous avons choisi de nous concentrer sur d’autres outils en début de campagne, soit de sensibiliser la population en ayant recours à des experts dans le domaine – c’est-à-dire les personnes ayant
UN VASTE APPUI DE LA PART DE VEDETTES ET DE PER-
SONNAGES IMPORTANTS
En 1992, le membre fondateur de l’ICBL
Handicap International a lancé un appel en
France pour interdire les mines antipersonnel.
Parmi les premiers signataires figuraient la soprano Barbara Hendricks et Bernard
Kouchner, fondateur de Médecins sans
Frontières et une figure importante de la politique française. Depuis, Barbara
Hendricks a offert son appui à Handicap
International pour, entre autres, lever des fonds destinés à venir en aide aux victimes des mines au Cambodge.
Parmi les efforts de recrutement à l’échelle nationale de figures publiques importantes, notons la campagne italienne visant à obtenir l’appui du Vatican et qui a eu pour résultat l’appel lancé en 1995 par le pape pour interdire l’utilisation de mines terrestres. La campagne cambodgienne, par le biais du travail de moines et de nonnes bouddhistes, a
également cherché un appui auprès du Dalaï
Lama et de l’archevêque Desmond Tutu, tous deux devenus, par la suite, d’ardents supporters de la campagne.
Parmi les autres vedettes ayant accordé leur appui à des groupes membres de la ICBL figurent Heather Mills McCartney et son mari, l’ancien membre des Beatles Paul McCartney, devenus présidents d’honneur internationaux de Adopt-A-Minefield. M. McCartney a joué lors de concerts et d’événements caritatifs pour lever des fonds en vue du déminage et a fait la promotion du message « No More Land
Mines » (Mettons fin à l’utilisation de mines) pendant sa série de concerts en 2003.
La chanteuse Emmylou Harris a aidé la
Vietnam Veterans of America Foundation à lancer une série de concerts pour promouvoir
IFEX 80
Il est surtout important qu’une campagne soit claire dès le départ quant aux demandes faites
à la vedette et quant à l’objectif visé par l’engagement de la vedette dans la campagne.
IFEX 81
TROISIÈME PARTIE 3.5 L’APPUI DE PERSONNALITÉS PUBLIQUES (ÉTUDE DE CAS)
un monde sans mines terrestres, qui a obtenu l’appui de plusieurs artistes tels que Willie
Nelson, Bruce Cockburn, Bruce Springsteen,
David Byrne et Lucinda Williams.
L’actrice Angelina Jolie a animé une activité de levée de fonds pour la ICBL, a écrit des lettres ouvertes dans des journaux comme le
Bangkok Post, et s’est exprimée lors de voyages
à titre de porte-parole du Haut Commissariat
BERNSTEIN SUGGÈRE AUX GROUPES
DÉSIRANT OBTENIR L’APPUI DE
VEDETTES DE FAIRE DES RECHERCHES
POUR IDENTIFIER LES PERSONNES
SUSCEPTIBLES D’APPUYER UNE
CAMPAGNE EN FONCTION DE LEUR
TRAVAIL ANTÉRIEUR, DE LEURS
INTÉRÊTS ET DE LEURS EXPÉRIENCES
PERSONNELLES.
des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).
Pendant ce temps, la Reine Noor de Jordanie
œuvrait auprès du Landmine Survivors
Network et appuyait la ICBL. Elle s’est présentée devant les membres du Congrès des
États-Unis, a rencontré le secrétaire d’État
Colin Powell, s’est prononcée lors de conférences internationales sur les mines terrestres, et a régulièrement parlé de son opposition aux mines terrestres lors d’entrevues dans les médias.
La personnalité publique que l’on associe le plus à la campagne était Diana, princesse de
Galles. En 1997, la Croix Rouge britannique a invité la princesse en Angola, lors de ce que l’on considère maintenant comme un
événement marquant. Le Landmine Survivors
Network (le réseau des survivants de mines terrestres) l’a également conduite en Bosnie plus tard la même année, peu avant sa mort, à la veille des négociations du traité sur les mines
à Oslo. « Des photos de la princesse dans des champs minés ont fait le tour du monde, indique Bernstein. Même aujourd’hui, lorsque je me retrouve dans une région isolée et que je mentionne la ICBL, certaines personnes me demandent s’il s’agit bien du groupe que Lady Di appuyait. »
ÉTABLIR DES LIENS
Après que la ICBL et sa coordonnatrice et fondatrice Jody Williams eurent gagné le prix
Nobel de la paix en 1997, la campagne ellemême a atteint le statut de « vedette », et, par conséquent, certains contacts avec des personnalités publiques se sont établis. « Après le Nobel, bien des portes se sont ouvertes pour
Jody Williams et pour nous, pour ce qui est d’établir des premiers contacts, dit
Bernstein. Mais même sans profiter d’un tel avantage, il n’est jamais mauvais d’essayer. »
« L’idée, c’est de tirer le meilleur parti des contacts personnels, fait remarquer Bernstein.
Souvent, un membre d’un conseil d’administration ou un organisateur de campagne connaît quelqu’un qui connaît quelqu’un, qui connaît quelqu’un, etc. » Par exemple, des personnes qui œuvrent dans une campagne pourraient connaître quelqu’un qui travaille dans l’ombre dans l’industrie du cinéma ou de la musique, ou encore un agent.
Ces personnes pourront transmettre le message
à la vedette.
Bernstein indique que ce sont des contacts personnels qui ont permis d’intégrer la question des mines dans le scénario de la populaire série télévisée américaine West
Wing, tout comme la torture avait été évoquée dans la série ER. Dans le cas de West Wing, les efforts simultanés de membres de la campagne ont eu de bons résultats : Jody
IFEX 82
TROISIÈME PARTIE 3.5 L’APPUI DE PERSONNALITÉS PUBLIQUES (ÉTUDE DE CAS)
Williams a rencontré les scénaristes de la série pour les inciter à insérer la question des mines dans le scénario, alors que le Landmine
Survivors Network (le réseau des survivants de mines terrestres) recourait à ses propres contacts pour parvenir aux mêmes fins en prenant d’autres voies.
IL EST IMPORTANT DE CONSIDÉRER
L’APPUI DE VEDETTES COMME UNE
FAÇON DE COMPLÉTER ET DE
RENFORCER D’AUTRES MÉTHODES
DE CAMPAGNE, PLUTÔT QUE COMME
UNE ALTERNATIVE.
Bernstein suggère aux groupes désirant obtenir l’appui de vedettes de faire des recherches pour identifier les personnes susceptibles d’appuyer une campagne en fonction de leur travail antérieur, de leurs intérêts et de leurs expériences personnelles.
De telles recherches ont amené la ICBL à contacter Angelina Jolie, qui avait pris conscience des conséquences désastreuses des mines terrestres à l’occasion du tournage du film Tomb Raider au Cambodge.
Dans certains cas, les vedettes entretiennent des liens étroits avec l’enjeu en question. Parmi ces cas, il y a celui, tragique, de Heather Mills
McCartney, qui a perdu la moitié d’une jambe en se faisant heurter par un policier en motocyclette à Londres. Cet accident constitue sans aucun doute un facteur important qui explique l’intérêt de Mills McCartney pour les amputés et autres victimes des mines.
Il faut absolument faire preuve de
« créativité et de persistance et savoir recourir aux contacts de vos membres, des contacts dont vous ne soupçonnez probablement pas l’existence, dit Bernstein. Si vous n’avez pas de contacts, n’ayez pas peur d’essayer quand même. Si vous êtes convaincus de l’importance de votre cause, si vous avez une demande claire
à formuler et si vous croyez que certaines personnes seront susceptibles de vous appuyer, alors tentez le coup. »
DÉFIS
Le travail auprès de vedettes offre des avantages très importants pour ce qui est de la sensibilisation du public à une cause, mais il pose également de grands défis.
Certaines vedettes hésiteront à prendre une position politique qui peut être controversée et c’est là un des aspects problématiques de l’entreprise. « Comme tout le monde, certaines vedettes sont plus politisées que d’autres, note
Bernstein. Certaines d’entre elles ne se sentiront pas à l’aise avec tous vos objectifs politiques. »
En ce qui concerne les mines terrestres, certaines vedettes préfèrent limiter leur participation à la sensibilisation et à la levée de fonds, en évitant de participer à des appels directs faits aux gouvernements pour modifier certaines politiques, comme par exemple l’appel lancé au gouvernement des États-Unis pour qu’il ratifie le traité international.
« Toute vedette peut offrir son appui de différentes façons, qu’il s’agisse de susciter l’intérêt des médias, de sensibiliser le public, de lever des fonds ou d’appuyer la défense d’objectifs politiques, dit Bernstein. Il est surtout important qu’une campagne soit claire dès le départ quant aux demandes faites à la vedette et quant à l’objectif visé par l’engagement de la vedette dans la campagne.
Enfin, il faut savoir si la vedette se sent à l’aise avec le niveau de participation qu’on lui propose. »
Un autre défi consiste à s’assurer que le message transmis est le bon. Bernstein relate le
IFEX 83
TROISIÈME PARTIE 3.5 L’APPUI DE PERSONNALITÉS PUBLIQUES (ÉTUDE DE CAS)
cas d’une vedette de cinéma qui a récemment participé à des événements dénonçant les mines terrestres et qui a ensuite fait des déclarations trompeuses qui ont été reprises dans les médias. « Vous ne pouvez pas contrôler tout ce qu’elles disent, dit-elle. Le défi, c’est de trouver le temps et la façon de bien les informer, afin qu’elles soient à l’aise avec le sujet et qu’elles puissent faire plus que simplement parler de l’existence d’un problème, mais aussi poser des gestes. »
Dans le même ordre d’idées, il faut se rappeler que les vedettes endossent souvent plus d’une cause. Il est important de savoir si l’image des autres causes n’entre pas en conflit avec celle de votre campagne. « Ce n’est pas nécessairement un problème, mais soyez au courant des autres causes auxquelles sont associées les vedettes, puisque les médias
établiront des liens entre ces différentes causes », dit Mme Bernstein.
Il y a également le danger de voir les projecteurs se braquer sur la personne plutôt que sur l’enjeu. « Les médias demandent aux vedettes de parler de leurs projets de films et de leur vie personnelle, indique Mme
Bernstein. La plupart des vedettes savent manipuler les médias pour faire passer leur message, mais vous pouvez les encourager à prendre les devants et aborder le sujet de la campagne en débutant l’entrevue par quelque chose comme Je suis ici aujourd’hui pour vous parler de X. »
Enfin, il est important de comprendre les motivations des vedettes, qui peuvent s’échelonner entre une participation personnelle convaincue et le simple désir d’améliorer leur image. « Il faut éviter de servir de véhicule pour obtenir une couverture médiatique positive à la suite d’un échec cinématographique, par exemple », ajoute
Bernstein. Si l’engagement de la vedette ne semble pas authentique, cela pourra même nuire à votre cause.
IMPACT
L’appui de personnalités publiques a grandement contribué aux victoires remportées par la ICBL, comme le traité de
1997 sur l’interdiction des mines, et cet appui continue de jouer un rôle important au sein de la campagne.
« Le rôle de Diana, par exemple, a été de sensibiliser la population du globe à la question des mines et de capter l’attention des médias, ce qui a appuyé nos efforts », dit
Bernstein. Ces contributions ont été essentielles à la préparation des négociations du traité sur l’interdiction des mines.
L’appui de vedettes peut clairement aider à attirer l’attention sur une cause, quand on utilise parallèlement d’autres éléments dans une même campagne. La ICBL et ses organisations membres se sont engagées dans des activités très diverses pour publiciser des messages, renforcer leurs appuis et lever des fonds. Parmi ces activités, notons l’installation de tables dans des centres commerciaux, l’érection de pyramides de chaussures devant la tour Eiffel à Paris, l’organisation de concerts sur une place publique de Maputo, la sonnerie de cloches dans des écoles et des églises à travers le monde, des manifestations dans les rues, des marches et des vigiles dans différents pays, ainsi que des conférences de presse lors de rencontres de négociation de traités.
Il est important de considérer l’appui de vedettes comme une façon de compléter et de renforcer d’autres méthodes de campagne, plutôt que comme une alternative.
Ultimement, l’appui de vedettes ne remplacera jamais le travail de défense effectué par des organisations et des activistes convaincus.
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TROISIÈME PARTIE 3.5 L’APPUI DE PERSONNALITÉS PUBLIQUES (RESSOURCES)
L’APPUI DE PERSONNALITÉS PUBLIQUES – RESSOURCES
Adopt-a-Landmine –L’ancien Beatle Paul
McCartney et sa femme Heather Mills
McCartney aident à sensibiliser le public en assurant la promotion de cette organisation en faveur de l’interdiction des mines terrestres.
http://www.landmines.org.uk/299
American Civil Liberties Union – Une
campagne publicitaire qui a eu recours à des vedettes des États-Unis pour promouvoir le droit
à la libre expression
http://www.aclu.org/SafeandFree/SafeandFree.
cfm?ID=13587&c=206
Amnistie internationale – L’organisation a
produit une série de vidéos dans lesquels de nombreuses vedettes parlent des violations des droits de la personne dans le monde
http://www.amnesty.ca/lightdarkness/light.htm
http://www.amnesty.ca/support_amnesty/cry_f or_justice/
Amnistie internationale – Guide de campagne http://web.amnesty.org/pages/campaigningmanual-eng
BBC iCan – Comment obtenir l’appui de
vedettes et de personnes connues
http://www.bbc.co.uk/dna/ican/A2062531
Jubilee 2000 – Une campagne en faveur de
l’annulation de la dette du tiers-monde a recours au chanteur Bono du groupe U2 comme porteparole
http://news.bbc.co.uk/1/hi/entertainment/179
9103.stm
Media Trust – Attracting and keeping celebrity
support (Comment attirer l’appui de personnes célèbres et le garder)
http://www.mediatrust.org/online_guides/cele brity%20support.pdf
People for the Ethical Treatment of Animals –
Use of celebrities in a variety of campaigns, from advertising to musical DVDs to a celebrity vegan cookbook (Le recours à des vedettes pour différentes campagnes, allant de DVD musicaux jusqu’à la préparation d’un livre de recettes par
une vedette).
http://www.peta.org/feat/dvd/
United Nations High Commission on
Refugees –Hollywood actor Angelina Jolie
Becomes UNHCR Goodwill Ambassador
(L’actrice hollywoodienne Angelina Jolie devient ambassadrice de l’UNHCR).
http://news.nationalgeographic.com/news/200
3/06/0618_030618_angelinajolie.html
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Tournées de conférences
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TROISIÈME PARTIE 3.6 TOURNÉES DE CONFÉRENCES (BOÎTE À OUTILS)
BOÎTE À OUTILS
COMMENT LES TOURNÉES DE CONFÉRENCES PEUVENT RENFORCER UNE CAMPAGNE
C O N T E X T E
Une personne ayant survécu à des violations des droits de la personne et qui raconte son histoire dans ses propres mots constitue l’une des façons les plus efficaces de transmettre un message. On obtiendra un effet comparable avec le témoignage d’un défenseur des droits de la personne œuvrant sur la ligne de front, ou avec celui d’un officiel de l’ONU spécialisé en droits de la personne. Les tournées de conférences sont des tribunes efficaces pour ces personnes et de bien d’autres manières, elles offrent de nombreuses occasions aux organisateurs de campagnes.
DÉFINIR LES OBJECTIFS
•
•
•
•
•
La première étape dans l’organisation d’une tournée de conférences consiste à s’assurer que le but de la tournée est clair et que ses objectifs spécifiques sont bien établis. Une tournée de conférences peut contribuer à atteindre certains objectifs liés à la campagne et à l’organisation dans des secteurs tels que les suivants : la couverture médiatique; le lobbying; la motivation des membres; la levée de fonds; la diffusion.
CHOISIR UN CONFÉRENCIER
Les tournées de conférences peuvent faire appel à n’importe qui, mais nous nous pencherons plus particulièrement ici sur les conférenciers invités internationaux, en supposant que vous serez chargé de la prise de décisions, de l’organisation et de la coordination du programme. Le fait de savoir clairement quels sont les buts et les priorités de la tournée projetée vous aidera à décider qui vous devriez inviter.
Une personne ayant survécu à des violations des droits de la personne, ou un proche de la victime, attirera le plus l’attention médiatique ou l’appui du public. Toutefois, ces personnes peuvent ne pas posséder l’expertise nécessaire dans les secteurs politiques vers lesquels vous dirigez vos efforts de lobbying, ou n’ont pas l’expérience requise pour participer à des entrevues en profondeur dans les médias.
Sachant cela, vous serez plus à même de choisir le bon candidat.
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TROISIÈME PARTIE 3.6 TOURNÉES DE CONFÉRENCES (BOÎTE À OUTILS)
Si l’objectif principal de la tournée est de capter l’attention des médias, alors vous devrez sans doute voir à ce qui suit :
•
Porter une attention particulière aux questions de langue, car certaines organisations médiatiques seront très réticentes à l’idée d’avoir recours à des interprètes.
•
Cibler certains secteurs des médias d’information qui seront plus susceptibles d’être intéressés par la cause en question ou par le conférencier.
•
Décider quel auditoire vous tentez d’atteindre.
Si le lobbying est l’aspect le plus important de la visite, alors la langue sera sans doute un facteur moins problématique (dans la mesure où un interprète est disponible). Cependant, assurez-vous que votre conférencier contribuera à vos efforts de lobbying en présentant des déclarations et des arguments clairs et convaincants et que cette personne aura un certain poids aux yeux de ceux que vous désirez influencer, que ce soit par sa réputation personnelle ou par le statut qu’elle assume au sein d’une organisation.
ORGANISER UNE TOURNÉE DE CONFÉRENCES
L’invitation
Votre lettre d’invitation devrait comprendre les
éléments suivants :
•
Une description de l’objectif de la visite.
•
Un résumé du programme proposé – la durée du séjour du conférencier, les personnes à rencontrer, les entrevues éventuelles dans les médias, etc.
•
Ce que vous vous proposez de payer – par exemple, les frais de déplacement, les frais accessoires, l’hébergement.
Confirmation de la tournée
Une fois qu’un conférencier potentiel a accepté votre invitation, vous devriez lui envoyer une lettre de remerciements et des renseignements complémentaires, dont les suivants:
•
Des détails sur le programme proposé, dont les profils des personnes à rencontrer; la durée des conférences lors des différentes occasions; les résultats attendus de la tournée; des détails de toute couverture médiatique ou d’entrevues déjà prévues; des informations de base utiles concernant le pays visité, sa situation politique, etc.
•
Des renseignements pratiques sur le climat local; l’accueil du conférencier à l’aéroport ou
à la gare; les numéros de téléphone d’urgence; tout besoin particulier éventuel.
•
Une demande pour une courte biographie et une photographie du conférencier. Ces détails seront utiles pour obtenir des rendez-vous, attirer les médias, préparer les documents publicitaires et organiser le programme.
Informer le conférencier
Si l’échéancier le permet, il est recommandé de ne rien prévoir la première journée, pour laisser au conférencier le temps de se reposer, de s’installer et de se familiariser avec les sujets que vous désirez voir abordés. Vous pouvez
également profiter de ce temps pour déterminer la meilleure façon de fournir au conférencier les renseignements qui lui seront nécessaires. Il peut également s’avérer utile de prendre le temps de faire une mise au point après chaque journée, de manière à corriger tout problème qui a pu survenir, parler des
événements de la journée et permettre au conférencier de relaxer un peu.
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TROISIÈME PARTIE 3.6 TOURNÉES DE CONFÉRENCES (BOÎTE À OUTILS)
Formation en matière de médias
Au début de la visite, il est souvent utile d’organiser une séance de formation médiatique destinée à votre conférencier, afin que les thèmes et les points principaux de la campagne soient véhiculés aux médias de manière « conviviale ». Vous pouvez également passer un peu de temps à discuter et à préparer les réponses aux questions difficiles qui pourraient être posées. Vous devriez vous informer auprès du conférencier pour savoir s’il a déjà interagi avec les médias, afin de pouvoir en tenir compte lors de la formation.
Idéalement, un journaliste professionnel sympathique à la cause devrait participer à la formation, mais un simple jeu de rôles peut
également atteindre les mêmes objectifs.
Le programme
Durant l’élaboration du programme d’une tournée de conférences, vous devrez vous souvenir que donner une conférence devant un public est un exercice épuisant. Le conférencier peut également être épuisé par son voyage, un régime alimentaire différent, l’adaptation à la vie parmi des étrangers, ou par des difficultés de communication dans une langue étrangère.
Par conséquent, il est préférable de ne pas combiner des entrevues tard le soir avec des engagements tôt le matin suivant. Si la durée prévue de la visite est de quatre jours ou plus, tentez de réserver une journée complète de repos à votre invité. Tentez également de créer des trous dans l’horaire pour assurer des périodes de relaxation. Si le programme comprend une rencontre publique ou un discours, alors assurez-vous que la personne dispose d’une période libre suffisamment longue avant l’événement pour qu’elle ait le temps de réfléchir à ce qu’elle va dire.
Il est également important de penser à ce que le conférencier retirera de la tournée. Une partie de votre objectif pourrait être de lui montrer votre solidarité et/ou de donner à cette personne une notoriété internationale, ce qui, dans certains cas, pourra lui servir de protection. Vous devriez discuter avec tout conférencier pour déterminer si certaines activités de la tournée sont susceptibles de mettre cet individu en danger une fois qu’il sera de retour chez lui. Si un conférencier vous accorde son temps, il serait également important de savoir si vous pouvez lui fournir des contacts utiles, comme des organismes de financement, par exemple.
TIRER LE MEILLEUR PARTI D’UNE TOURNÉE
DE CONFÉRENCES
Couverture médiatique
Rédigez un bref résumé de votre stratégie médiatique pour expliquer ce que vous attendez de la visite, d’un point de vue médiatique. Cette stratégie devrait comprendre les points ou les messages principaux que vous désirez transmettre aux médias, les médias particuliers que vous désirez cibler ainsi que les matériaux dont vous aurez besoin pour mener votre projet à terme.
Questions à se poser
•
Si vous ne pouvez véhiculer qu’un seul message, quel serait-il en une seule phrase?
•
Quel serait le deuxième message le plus important, encore en une seule phrase ?
•
Quel est le public cible à atteindre ? S’agit-il de politiciens, d’autres décideurs, de femmes, de personnes ayant des intérêts particuliers dans les affaires étrangères, le grand public ?
•
Pourquoi les médias devraient-ils s’intéresser à votre visiteur ?
•
Quels documents devrez-vous présenter ?
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TROISIÈME PARTIE 3.6 TOURNÉES DE CONFÉRENCES (BOÎTE À OUTILS)
Un cahier de presse peu volumineux peut aider à préciser vos objectifs. Des passages efficaces du cahier sont susceptibles d’être reproduits dans les articles et les questions des journalistes. En plus du cahier de presse, vous pourriez préparer une série de communiqués de presse avant et pendant la visite, dans le but notamment :
• d’informer les médias de l’arrivée d’un visiteur, pour leur expliquer les raisons pour lesquelles cette visite devrait les intéresser et pour leur fournir les noms des personnes à contacter pour des entrevues;
• d’aviser les médias de tout événement particulier durant lequel le visiteur prononcera une conférence, présentera une entrevue, participera à une rencontre publique, etc;
• de relever les commentaires intéressants faits par le visiteur lors d’un événement particulier;
• de résumer les faits saillants de la visite et ses résultats, mettre en lumière certains enjeux particuliers, etc.
Lobbying
L’organisation d’une rencontre entre un conférencier invité et vos principaux supporters membres du gouvernement et des autres partis politiques peut s’avérer une façon efficace de reconnaître et de consolider les appuis de votre organisation. Il est important de déterminer longtemps à l’avance les objectifs en matière de lobbying de toute tournée de conférences.
Questions à se poser
•
Qui devrait rencontrer le visiteur pendant la tournée ?
•
Qu’attendez-vous de cette rencontre ?
•
Le statut du visiteur peut-il ouvrir des portes à votre organisation, portes qui demeureraient normalement closes, et comment faire en sorte que ces portes restent ouvertes, une fois le visiteur reparti ?
•
Quels sont les rôles que devraient assumer le visiteur et votre organisation lors de la rencontre ?
•
Qui est chargé d’assurer le suivi de toute action décidée lors des rencontres ?
Levée de fonds
Les frais associés à une tournée de conférences peuvent grimper rapidement, c’est pourquoi il est utile de profiter des occasions de collecte de fonds qu’elles présentent.
• Les dîners bénéfices
Si votre visiteur est susceptible d’intéresser un public particulier, vous pourriez envoyer des invitations à un dîner au cours duquel la personne agira à titre de conférencier invité.
Vendez les places à un prix qui vous permettra de générer suffisamment de profits, une fois les dépenses payées, pour justifier la tenue de l’événement.
• Rencontres publiques
Facturez un prix d’entrée aux rencontres publiques où le conférencier prendra la parole, si vous croyez que cela ne découragera pas trop de personnes d’y assister. Lorsque le président de la rencontre demande aux participants une contribution monétaire, occupez-vous de la collecte de cette contribution.
• Lettres de demandes de fonds par la poste
Le visiteur pourrait désirer apposer son nom à
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TROISIÈME PARTIE 3.6 TOURNÉES DE CONFÉRENCES (BOÎTE À OUTILS)
une demande de fonds adressée à vos supporters pour expliquer à quel point il est important que votre organisation dispose des ressources nécessaires à la poursuite de son travail. La personne pourrait également désirer fournir des citations mettant en valeur l’importance de votre travail de son propre point de vue.
• Appels au public
Le visiteur aura peut-être l’occasion d’annoncer des événements de levée de fonds
à venir, ou d’encourager le public à donner de l’argent lors d’entrevues dans les médias, etc.
Relier la tournée de conférences au travail de sensibilisation
Un visiteur pourrait exercer un attrait particulier sur certains secteurs de la communauté, permettant ainsi de contribuer au travail de sensibilisation de votre organisation. Il peut s’avérer utile, par exemple, d’inviter un représentant militaire qui
œuvre dans votre domaine à l’étranger pour parler de la pertinence du travail de l’armée dans la défense des droits de la personne, en tant que première étape de la création ou du renforcement d’une structure de sensibilisation pour ce secteur. Différents secteurs de sensibilisation disposent déjà de leurs propres réseaux médiatiques et publicitaires, dont certains participants pourraient être intéressés
à couvrir l’événement.
CONSEILS
Il existe différentes façons de profiter de la lancée que cette visite a donnée à votre campagne.
•
Prenez des photos, tournez des vidéos et notez des citations à utiliser lors de communications ultérieures.
•
Tenez un registre des personnes qui vous ont aidé lors de la visite pour vous assurer qu’on les remerciera.
•
Tenez un registre des personnes qui ont assisté aux différents événements et invitez-les à se joindre à votre organisation, si ce n’est déjà fait.
•
Tenez un registre des contacts utiles au sein de la communauté en général, que vous pourrez consulter au moment de solliciter des appuis à une autre occasion – par exemple, les représentants des autres ONG et les journalistes.
•
•
Assurez-vous que les engagements pris lors de rencontres et visant à assurer un suivi sont respectés.
Demeurez en contact avec le conférencier par la suite.
RÉFÉRENCES
©Publications d’Amnistie internationale.
Guide de campagne d’Amnistie internationale,
2001. 1, rue Easton, Londres WC1X 0DW,
Royaume-Uni. http://www.amnesty.org
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Tournées de conférences
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TROISIÈME PARTIE 3.6 TOURNÉES DE CONFÉRENCES (ÉTUDE DE CAS)
ÉTUDE DE CAS
DROITS ET DÉMOCRATIE ET LA TOURNÉE ANNUELLE DU PRIX JOHN HUMPHREY POUR LA LIBERTÉ
C O N T E X T E
Le Centre international des droits de la personne et du développement démocratique, désormais connu sous le nom de Droits et Démocratie, a été créé par le Parlement du Canada en 1988 pour encourager et appuyer la coopération entre le Canada et d’autres pays dans le développement, la promotion et le renforcement des institutions et des pratiques démocratiques dans le monde entier.
Chaque année depuis1992, Droits et Démocratie présente le Prix John Humphrey pour la liberté, qui vise à récompenser les contributions extraordinaires à la promotion et à la défense des droits de la personne et du développement démocratique. Le prix consiste en une bourse de 25 000 $CAN (soit environ 19 000 $US.) et en une tournée de conférences à travers les principales villes canadiennes pour présenter le travail humanitaire du récipiendaire. Le prix a été nommé en l’honneur de John Peters Humphrey, le professeur de droit canadien spécialisé en droits de la personne qui a participé à la rédaction de la première version de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Pour plus de renseignements, voir le site www.dd-rd.ca
En 2003, Droits et Démocratie a organisé une tournée de conférences pancanadienne en l’honneur des deux récipiendaires du Prix John
Humphrey pour la liberté, Kimy Pernia
Domicó, un chef indien colombien disparu, et
Angelica Mendoza de Ascarza, une Péruvienne militant au nom des personnes disparues.
Martha Cecilia Domicó a reçu le prix au nom de son père et a participé à la tournée.
La tournée s’est concentrée sur les effets désastreux des disparitions forcées, expérience qui a directement touché les deux lauréats. Les droits des peuples autochtones constituaient l’autre thème de cette tournée, qui avait lieu à la toute fin de la Décennie internationale des populations autochtones. La tournée a mis en lumière la question des disparitions forcées, une question importante au cours des années 1980, mais qui depuis reçoit peu d’attention de la part des médias et du public.
Une tournée de conférences fait partie intégrante du Prix John Humphrey pour la liberté depuis sa création. Traditionnellement,
Droits et Démocratie présente le prix lors d’une cérémonie qui coïncide avec la Journée des droits de l’homme, le 10 décembre. Les objectifs du prix sont les suivants :
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TROISIÈME PARTIE 3.6 TOURNÉES DE CONFÉRENCES (ÉTUDE DE CAS)
•
Récompenser le gagnant – qu’il s’agisse d’un individu ou d’une organisation – et souligner son travail de défense des droits de la personne et de la démocratie.
•
Sensibiliser le public canadien aux questions de droits de la personne dans le pays du gagnant.
•
Accroître la visibilité de Droits et Démocratie
à travers le Canada et étendre ses liens avec le public – par le biais des écoles, des églises et des médias locaux – et remplir son mandat d’éducation du public.
NOUS DEVONS ADAPTER LES
CÉRÉMONIES ET LES TOURNÉES À
LA PERSONNALITÉ, AUX MESSAGES
ET À LA VOLONTÉ DES
RÉCIPIENDAIRES DE PARTICIPER À
LA TOURNÉE DE CONFÉRENCES.
Avec les années, la cérémonie de remise des prix et la tournée de conférences ont également permis d’accroître la visibilité du travail de
Droits et Démocratie sur la scène internationale. Les gagnants ont ainsi pu s’exprimer devant de nouveaux auditoires, incluant des ONG locaux, des universitaires, des étudiants, des dirigeants clés des domaines de l’aide et des affaires étrangères, des membres du Parlement du Canada, des ministres du gouvernement et, dans certains cas, ils se sont exprimés devant le premier ministre du Canada.
Le mandat de Droits et Démocratie étant international, le Prix John Humphrey pour la liberté constitue son principal événement de sensibilisation au Canada.
PLANIFICATION DE LA TOURNÉE
Chaque année, Droits et Démocratie lance un appel de candidatures en mars, avec une
échéance fixée à la fin du mois d’avril. Plus de
3 000 partenaires reçoivent le dépliant de l’appel de candidatures ou sa version
électronique, disponible en ligne. Droits et
Démocratie reçoit entre 80 et 100 mises en candidature chaque année. Un jury international, composé de cinq membres de son conseil d’administration, choisit un gagnant au début du mois de juin, date qui coïncide avec la réunion du conseil d’administration de l’organisation. « L’un de nos objectifs consiste à appuyer et à aider ceux et celles qui risquent leur vie dans la défense et la promotion des droits de la personne », dit
Anyle Côté, l’agente chargée des événements spéciaux et des publications pour Droits et
Démocratie et qui est aussi chargée du Prix
John Humphrey pour la liberté. « Le jury favorise donc ceux et celles qui œuvrent en première ligne, dans des conditions hostiles », ajoute-t-elle.
Une fois le choix du candidat gagnant arrêté, la planification débute rapidement.
Droits et Démocratie contacte le lauréat et publie un communiqué de presse. Les dates de la tournée sont habituellement fixées durant la première moitié de décembre, pour coïncider avec la Journée des droits de l’homme et la cérémonie officielle de remise des prix. « Ces dernières années, la mauvaise météo, les annulations de vols et le grand nombre d’événements simultanés pendant la période des Fêtes ont rendu très difficile l’établissement d’un échéancier. Pour cette
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TROISIÈME PARTIE 3.6 TOURNÉES DE CONFÉRENCES (ÉTUDE DE CAS)
raison, nous faisons tout pour débuter la tournée avant la cérémonie de remise des prix du 10 décembre », indique Côté.
Auparavant, la cérémonie avait lieu à
Montréal, où Droits et Démocratie a son siège social, mais dans le but d’augmenter la visibilité de l’organisation auprès des parlementaires, des ministères clés et des décideurs, l’organisation a choisi d’organiser sa cérémonie de 2003 dans la capitale du pays, Ottawa.
« Nous devons adapter les cérémonies et les tournées à la personnalité, aux messages et à la volonté des récipiendaires de participer à la tournée de conférences », indique Côté.
Lorsque l’organisation a décidé du message clé et de la stratégie à adopter, elle informe ses organisations partenaires à travers le Canada –
ONG, universités et associations – au sujet de la tournée à venir et du lauréat. L’organisation demande également à certains partenaires clés s’ils désirent organiser un événement en collaboration avec Droits et Démocratie ou, dans certains cas, devenir l’hôte d’un
événement auquel participe le lauréat.
Le choix des villes canadiennes qui seront visitées lors de la tournée dépend du niveau d’intérêt manifesté dans chaque ville envers la cause du lauréat, de la présence de communautés de personnes issues du même pays que le lauréat et de la présence de partenaires qui se montrent intéressés à accueillir un événement ou à en organiser un en collaboration avec Droits et Démocratie.
« Au cours des dernières années, nous avons réalisé que les tournées étaient épuisantes pour les lauréats – trop de villes visitées en trop peu de temps, dit Côté. Nous avons donc tenté, l’année dernière, de limiter le nombre des villes que nous visitons. » À l’avenir, le but sera de visiter cinq villes, tout au plus.
Droits et Démocratie tente également de visiter d’autres villes que Montréal, Ottawa et
Toronto – les principales villes du centre du
Canada. Si une année la tournée s’arrête dans le centre du Canada et dans les provinces
Maritimes (à l’est), alors les villes visitées l’année suivante seront celles de la Colombie-
Britannique et des Prairies dans l’ouest du pays.
Une fois les villes choisies par l’organisation, cette dernière commence à planifier les
événements avec ses partenaires. Puis, au cours des mois suivants, une ébauche de calendrier de tournée est rédigé.
RESSOURCES DE LA CAMPAGNE
De 1998 à 2003, le budget moyen consacré au prix et à la tournée était de 65 000 $CAN
(soit environ 49 000 $US), ce qui couvre tous les frais connexes, incluant :
• la production et la diffusion de plus de 3 000 dépliants d’appels de candidature en trois langues (français, anglais et espagnol);
• l’organisation de la rencontre du jury (la traduction des candidatures, la location du local, une indemnité journalière des membres du jury, etc.);
• le prix de 25 000 $CAN (environ 19 000
$US versé au lauréat;
• toutes les dépenses liées à la tournée au
Canada (incluant celles du gagnant, du personnel, la traduction des documents, l’interprétation dans certaines villes, etc.);
• la cérémonie de remise du prix
(l’interprétation, la location du local, les artistes, etc.);
• les communications (le site Web, les documents de référence, les dossiers de presse, etc.).
IFEX 93
TROISIÈME PARTIE 3.6 TOURNÉES DE CONFÉRENCES (ÉTUDE DE CAS)
Puisque le prix fait partie de la programmation régulière de Droits et
Démocratie, l’organisme n’entreprend aucune autre campagne de financement comme telle.
En travaillant avec ses partenaires dans chacune des villes visitées, Droits et
Démocratie parvient à réduire les coûts associés au soutien logistique, à la promotion et à la planification d’événements.
LES DIFFICULTÉS AUXQUELLES NOUS
FAISONS FACE VARIENT EN FONCTION
DE LA PERSONNE QUI GAGNE LE
PRIX. CELA VA DES SÉRIEUX
PROBLÈMES DE SÉCURITÉ À DES
QUESTIONS PLUS PRATIQUES COMME
LES DIFFÉRENCES LINGUISTIQUES.
L’agente responsable des événements spéciaux et des publications pour Droits et
Démocratie coordonne la remise du prix et la tournée. Au besoin, un employé est embauché
à contrat pour aider à l’organisation logistique de la tournée. Les deux agents des relations extérieures de Droits et Démocratie participent
à la planification et à la mise en œuvre de la stratégie des communications. Les agents de programmes chargés du domaine thématique et de la région géographique du lauréat participent également à la planification et à la tournée même. Des rencontres régulières permettent de discuter de questions allant des priorités en matière de communication aux problèmes logistiques et politiques.
DÉFIS
« Les difficultés auxquelles nous faisons face varient en fonction de la personne qui gagne le prix. Cela va des sérieux problèmes de sécurité à des questions plus pratiques comme les différences linguistiques », dit Côté. Avec deux lauréats en 2003, les difficultés ont été nombreuses.
prix mettrait Martha en danger à son retour dans une zone instable de la Colombie, où s’activent des groupes paramilitaires », dit Côté.
Par le biais de communiqués de presse, l’ambassade canadienne en Colombie et ses partenaires colombiens, Droits et Démocratie a tout fait pour rendre publique l’information selon laquelle l’argent du prix serait placé dans un fonds destiné au peuple Emberá-Katío, qui est administré à partir du Canada par Droits et Démocratie.
Au-delà des problèmes de sécurité associés au cas de Domicó, il importe de considérer les conséquences de l’apparition soudaine d’une somme de 25 000 $CAN au sein d’un groupe ou d’une communauté. « La gestion d’une telle somme peut représenter un défi dans certaines circonstances », note Côté.
LA SÉCURITÉ ET L’ARRIVÉE SOUDAINE
DE L’ARGENT DU PRIX
Le cas de Martha Cecilia Domicó, qui a accepté la bourse au nom de son père, a obligé
Droits et Démocratie à voir à ce que sa sécurité soit assurée après son retour chez elle. « Notre plus grande inquiétude était que l’argent du
TRADUCTION
« L’autre grande difficulté était que ni Martha
Cecilia Domicó ni Angelica Mendoza ne parlaient le français ou l’anglais, les deux langues officielles au Canada », dit Côté. Il fallait offrir un service de traduction lors de chacune des présentations, service fourni par des membres du personnel de Droits et
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TROISIÈME PARTIE 3.6 TOURNÉES DE CONFÉRENCES (ÉTUDE DE CAS)
Démocratie parlant espagnol ou des interprètes professionnels. Une autre difficulté était que
Mendoza parlait seulement le quechua et avait besoin d’une traduction supplémentaire, fournie par une personne qui l’accompagnait du Pérou.
SUSCITER L’INTÉRÊT DES MÉDIAS
La question de la langue rend parfois difficile, voir impossible, la couverture médiatique. À toutes fins utiles, la radio et la télévision
étaient exclues, laissant à Droits et Démocratie la seule option des médias imprimés.
« Les deux gagnants ne suscitaient pas le même intérêt auprès des médias, pour des raisons qui n’avaient rien à voir avec les personnes elles-mêmes », dit Côté. Par exemple, plusieurs journalistes considèrent que pour les Canadiens, le Pérou est moins intéressant que la Colombie. « Ce traitement inégal diluait l’attention que chacun des récipiendaires méritait pour sa lutte particulière », ajoute Côté.
L’intérêt des médias varie également année après année, ce qui complique encore davantage les choses. Une étude de cinq ans portant sur la couverture médiatique des activités de Droits et Démocratie entre 1998 et
2003 a montré que la couverture médiatique allait de « raisonnable » la plupart du temps, à
« exceptionnelle » en 2002, lorsque la récipiendaire, Dr Sima Samar, a été choisie pour occuper un poste dans le cabinet du nouveau gouvernement afghan pendant sa visite. L’article énonçait ce qui suit :
Le choix des récipiendaires influence grandement le niveau de sensibilisation que Droits et
Démocratie suscite au Canada par le biais de rencontres publiques et la couverture médiatique.
Il y a le désir manifeste d’accorder un prix pour reconnaître une situation oubliée dans laquelle les droits de la personne sont bafoués, tout en sachant que l’actualité de la question et la réputation des lauréats influence l’opinion publique.
« Dans les cas où le lauréat n’est pas bien connu ou que son pays ne fait pas souvent les manchettes, il est plus difficile de susciter l’intérêt du public et des médias », affirme Côté.
IMPACT
La tournée et la cérémonie de remise du prix
L’évaluation interne que Droits et Démocratie a faite de la tournée de 2003 a révélé que même si l’horaire était très chargé, la stratégie
– qui prévoyait un événement public dans chacune des villes visitées, des rencontres informelles avec des communautés aborigènes ou des groupes locaux colombiens et/ou péruviens, ainsi que des entrevues dans les médias – semblait avoir réussi à « étendre le réseau des partenariats et à améliorer le profil de Droits et Démocratie ».
« En ce qui concerne la cérémonie de remise des prix à Ottawa, tous s’entendent pour dire qu’elle était très réussie », dit Côté. Plus de
200 personnes y ont asisté, bien que le
Parlement n’était pas en session et qu’il s’agissait de la première fois que le prix était remis à Ottawa.
Des lettres avaient été préparées pour inviter les personnes présentes à appuyer la cause des lauréats. Le contenu de ces lettres avait été rédigé par Droits et Démocratie en tenant compte des recommandations des lauréats quant à ce qu’ils souhaitaient voir accompli par leur propre gouvernement et par le gouvernement canadien. « Même si le nombre de lettres signées était modeste, l’initiative a contribué à nos efforts visant à faire valoir l’importance de ce dossier auprès des
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TROISIÈME PARTIE 3.6 TOURNÉES DE CONFÉRENCES (ÉTUDE DE CAS)
représentants du gouvernement, notamment le ministre canadien des Affaires étrangères », dit
Côté.
Couverture médiatique
« La couverture médiatique de l’événement a, dans l’ensemble, été très satisfaisante », indique
Côté, bien qu’il ait été difficile de susciter l’intérêt des médias puisque les gagnants ne parlaient ni français ni anglais. En dépit du fait que peu de journaux ont couvert la tournée, des articles ont été publiés dans certains journaux canadiens importants, comme The Globe & Mail, le Ottawa Citizen et le Edmonton Journal. Les médias internationaux se sont intéressés à l’événement par l’entremise d’EFE, la première agence de presse mondiale en langue espagnole. La couverture médiatique locale a été assurée par
Radio Canada International et le Aboriginal
Peoples’ Television Network (le réseau de télévision des peuples autochtones).
Avantages pour les gagnants et leur lutte
La tournée canadienne a également eu des effets positifs pour les récipiendaires, notamment :
• leurs rencontres avec les représentants du gouvernement, comprenant le ministre des
Affaire étrangères du Canada, ont permis de réaliser à quel point il est important pour les ministères et les organismes concernés de considérer le Pérou et la Colombie comme deux pays à surveiller attentivement;
• la lettre de Droits et Démocratie au président colombien Uribe visant à assurer la sécurité de Martha Cecilia Domicó a eu pour résultat une meilleure protection de sa personne;
• certains contacts entre des dignitaires canadiens et colombiens ont eu lieu, à l’occasion desquels il a été question de l’enquête sur la disparition de Kimy
Pernia Domicó;
• l’ambassade canadienne à Bogotá a décidé de poursuivre sa participation à la commission conjointe visant à évaluer la situation qui prévaut sur le territoire du peuple
Emberá-Katío.
Droits et Démocratie prévoit continuer de suivre de près l’évolution de la situation au
Pérou et en Colombie et de fournir tout l’appui nécessaire aux lauréats.
Informer le public
La tournée de 2003 a également permis d’informer le public à travers le Canada au sujet des disparitions et des luttes que doivent mener les populations autochtones sudaméricaines. « Puisque l’objectif du Prix John
Humphrey pour la liberté est de sensibiliser le public à la lutte pour les droits de la personne que mènent les lauréats du Prix, nous pouvons affirmer que cet objectif a été atteint, malgré le problème posé par les différences linguistiques », dit Côté. Un numéro spécial du bulletin électronique Libertas de Droits et
Démocratie consacré aux disparitions a
également contribué à sensibiliser le public.
La revue quinquennale de Droits et
Démocratie a mis en lumière de tels avantages pédagogiques dans les années passées. Des entrevues avec des organisateurs dans les différentes villes visitées ont indiqué que la présence des lauréats permettait de « mettre un visage sur des causes parfois abstraites et de contrer les préjugés médiatiques pour montrer que des personnes courageuses faisaient face à leurs propres problèmes dans le Sud ».
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TOURNÉES DE CONFÉRENCES – RESSOURCES
Amnistie internationale - Guide de campagne http://web.amnesty.org/pages/campaigningmanual-eng
Global Exchange http://www.globalexchange.org/campaigns/ftaa/ chucho.html
Madre - an International Women’s Human
Rights Organisation
http://www.madre.org/mem_bringspeaker.html
Nobel Peace Prize Winner Shirin Ebadi
Launches Speaking Tour – Tournée de
conférences lancée par Shirin Ebadi, lauréate du prix Nobel de la paix
http://www.inform.umd.edu/News/Diamondba ck/archives/2004/05/07/news3.html
Rights and Democracy - John Humphrey
Freedom Award
http://www.dd-rd.ca/
TROISIÈME PARTIE 3.6 TOURNÉES DE CONFÉRENCES (RESSOURCES)
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Les missions d’enquête
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TROISIÈME PARTIE 3.7 LES MISSIONS D’ENQUÊTE (BOÎTE À OUTILS)
BOÎTE À OUTILS
COMMENT PLANIFIER UNE MISSION D’ENQUÊTE
C O N T E X T E
Les missions d’enquête – qu’elles visent une région dans votre propre pays ou à l’étranger – peuvent représenter un élément important de plusieurs campagnes. Elles permettent à votre organisation :
• d’obtenir des renseignements importants sur les conditions locales, qui pourraient autrement s’avérer difficiles à recueillir par d’autres voies;
• d’établir ou de renforcer des contacts avec des journalistes ou des activistes de la liberté d’expression locaux;
• d’exprimer vos inquiétudes et de formuler des recommandations aux autorités locales; d’attirer l’attention des médias et du grand public sur certaines situations problématiques.
La section suivante a été préparée par Amanda Watson-Boles, rédacteur en chef au Comité pour la protection des journalistes (CPJ).).
LA PLANIFICATION DES MISSIONS D’ENQUÊTE
L’organisation d’une mission d’enquête doit débuter tôt
L’organisation d’une mission d’enquête efficace peut nécessiter des mois de préparation. Dans certains pays (le Bangladesh, par exemple), l’obtention d’un visa peut prendre jusqu’à six mois. Trouver et organiser les personnes qui se joindront à la délégation et obtenir toutes les autorisations peut également s’avérer un processus long.
Plus vous débuterez tôt, plus il vous sera facile ensuite de coordonner les échéanciers, de planifier la logistique (incluant les interprètes, l’hébergement et les déplacements) et d’organiser des rencontres avec les journalistes locaux, les organisations de droits de la personne et les membres importants du gouvernement.
N’oubliez pas de prendre en considération les congés nationaux et religieux du pays lorsque vous établissez le calendrier du voyage. C’est une des nombreuses raisons pour lesquelles il est important de demeurer en contact avec un journaliste ou un autre contact sur place, qui vous aidera à vous orienter en ce sens.
Inviter des personnalités importantes locales ou étrangères à participer à la mission
Le fait d’inviter des commissaires et/ou des journalistes locaux à participer à une mission peut permettre d’accroître sa visibilité. Par exemple, le CPJ a invité plusieurs commissaires,
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TROISIÈME PARTIE 3.7 LES MISSIONS D’ENQUÊTE (BOÎTE À OUTILS)
parmi lesquels le chroniqueur des États-Unis bien connu Clarence Page, à participer à une mission d’enquête en Haïti en août 2003.
À l’occasion de sa mission de mars 2004 au
Bangladesh, le CPJ a invité un journaliste de grande expérience du Sri Lanka ainsi qu’un journaliste très respecté d’Indonésie. La présence de journalistes de la région qui soutenaient le CPJ a accordé une légitimité supplémentaire à la mission.
Rencontrer une brochette de journalistes
œuvrant dans divers médias (imprimés, télévision, radio) au début de la mission
De nombreux pays sont polarisés politiquement et la communauté journalistique reflète souvent ces divisions. Pendant une mission d’enquête, il est important d’être une partie neutre et d’être perçu comme telle. Par exemple, à l’occasion de la mission du CPJ en Haïti, le gouvernement a perçu les médias privés comme étant des alliés de l’opposition, plutôt que comme indépendants. Il était donc essentiel de rencontrer des journalistes des médias d’État et des médias privés afin que les représentants du gouvernement ne puissent en aucun cas accuser le CPJ d’appuyer l’opposition.
De même, au Bangladesh, certains médias sont divisés entre le Parti Nationaliste du
Bangladesh (BNP) et la Ligue Awami (AL). Le
CPJ a rencontré tant des journalistes et des représentants pro-BNP que pro-AL, non seulement pour assurer son image de neutralité, mais pour équilibrer son portrait de la situation dans le pays.
Il est également recommandé de rencontrer des groupes locaux de défense de la liberté de la presse, des organisations des droits de la personne et des organisations non gouvernementales, afin de vous assurer d’avoir autant d’informations que possible.
De plus, il est important de prévoir ces rencontres dès le début de la mission, afin de vous familiariser avec les différentes perspectives et opinions concernant l’état local de la liberté de la presse. Ainsi, vous pourrez parler en toute connaissance de cause de ces questions aux représentants du gouvernement que vous rencontrerez vers la fin de votre séjour.
Rencontrer les représentants du gouvernement après avoir rencontré les journalistes
Il est toujours préférable de rencontrer les représentants du gouvernement vers la fin d’une mission, puisque à ce moment, vous aurez recueilli plus de renseignements et disposerez d’une meilleure compréhension de la situation et des problèmes qui doivent être
évoqués devant les autorités.
Tentez de rencontrer les représentants les plus éminents possible. La meilleure façon d’obtenir un rendez-vous consiste à utiliser tous vos contacts sans exception – aussi insignifiants qu’ils puissent paraître a priori.
Avant d’entreprendre sa mission en Haïti, le
CPJ avait tenté d’obtenir un rendez-vous avec le président d’alors, Jean-Bertrand Aristide.
Pour faire valoir l’importance de la mission du
CPJ aux yeux du président et pour signaler le désir des membres de la mission de le rencontrer, l’Association des Journalistes
Haïtiens et l’Association Nationale des Médias
Haïtiens ont écrit des lettres au président, lui demandant de recevoir la délégation. Le CPJ s’était également préparé, lors de la conférence de presse qui clôturait la mission (voir cidessous), à annoncer le refus de la part de M.
Aristide de rencontrer la délégation, un geste qui aurait nui à l’image d’un gouvernement déjà en difficulté. Le CPJ en avait d’ailleurs
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De nombreux pays sont polarisés politiquement et la communauté journalistique reflète souvent ces divisions.
Pendant une mission d’enquête, il est important d’être une partie neutre et d’être perçu comme telle.
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TROISIÈME PARTIE 3.7 LES MISSIONS D’ENQUÊTE (BOÎTE À OUTILS)
informé les conseillers d’Aristide.
Or, une brèche inattendue a été créée lorsque le CPJ a réussi à établir une relation ténue qui, bien exploitée, avait la chance de porter fruit. Un journaliste haïtien a indiqué au CPJ que l’ancien conseiller national pour la sécurité du président Bill Clinton, Anthony
Lake, était le parrain de l’un des enfants de M.
Aristide. Le CPJ a donc contacté le bureau de
M. Lake pour demander son aide. En même temps, le commissaire du CPJ Clarence Page contactait M. Lake de son côté. Grâce à l’aide de M. Lake, la rencontre avec M. Aristide a été rapidement confirmée. La rencontre, qui devait durer 15 minutes seulement, a finalement duré plus d’une heure.
Organiser une conférence de presse à la fin de la mission
Il est essentiel d’organiser une conférence de presse à la fin d’une mission. Un tel événement reçoit habituellement une bonne couverture médiatique locale, là où elle aura le plus d’impact.
Une délégation peut utiliser la conférence de presse pour mettre en lumière les problèmes importants qu’elle a découverts ou confirmés lors de ses rencontres. De surcroît, la conférence de presse constitue l’événement public idéal pour appeler les représentants du gouvernement à prendre des mesures particulières, ou pour critiquer leurs actions
(ou leur inertie, selon le cas).
Consultez les journalistes ou vos contacts locaux pour déterminer la date et l’heure de la conférence de presse. En Haïti, par exemple, le
CPJ a organisé sa conférence de presse tôt dans la journée pour profiter du cycle des nouvelles, qui débute avec les émissions de radio et de télévision matinales. Par la suite, les membres de la délégation ont accordé des entrevues aux journaux, destinées aux éditions du lendemain.
Autres éléments à considérer
L’un des membres de votre délégation devrait louer un téléphone cellulaire pendant la durée de la mission. Cela permettra de contacter les personnes clés plus facilement pour confirmer ou prendre des rendez-vous.
Les commissaires et les autres invités de marque qui participent à votre mission ne sont pas nécessairement très familiers avec le pays ou les problèmes auxquels y sont confrontés les journalistes. C’est pourquoi il est conseillé de leur fournir, quelques semaines avant le début de la mission, un cahier contenant des renseignements de base sur le climat politique qui règne actuellement dans le pays, la situation des médias, la météo, les devises, le taux de change, etc.
Dans certains cas, il est fort utile de s’informer des situations délicates et des perceptions locales concernant les interventions étrangères. En Afrique, par exemple, où se poursuit une longue tradition de résistance à la colonisation, il se dessine une tendance grandissante chez les gouvernements répressifs locaux de justifier leur règne en accusant les organisations occidentales d’imposer leurs « programmes colonialistes » à leur pays. Les activités d’une délégation internationale pourraient être dépeintes comme des intrusions dans les affaires internes du pays, risquant ainsi de nuire aux efforts des organisations partenaires locales, qui pourraient se voir accuser de collaborer avec des « agents étrangers ». Dans ce type de situation, une délégation régionale composée d’Africains éminents et d’organisations respectées pourrait se révéler plus efficace.
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TROISIÈME PARTIE 3.7 LES MISSIONS D’ENQUÊTE (ÉTUDE DE CAS)
Missions d’enquête
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ÉTUDE DE CAS
MISSION CONJOINTE INTERNATIONALE À BARRANCABERMEJA, EN COLOMBIE
C O N T E X T E
Les journalistes colombiens continuent de payer un prix élevé pour exercer leur métier, alors qu’une guerre civile qui dure depuis 40 ans oppose deux grands groupes de rebelles gauchistes à l’armée colombienne et aux groupes paramilitaires de droite. En 2003, la Colombie était de nouveau sur la liste publiée par le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) sur laquelle figurent les pires endroits au monde pour exercer la profession de journaliste.
Reporters sans frontières (RSF) note qu’en 2003, cinq journalistes ont été tués en Colombie, près de 60 d’entre eux ont été kidnappés, menacés ou physiquement attaqués, et plus de 20 autres ont dû quitter leur région ou le pays. Ces chiffres pourraient bien s’avérer inférieurs aux chiffres réels, car plusieurs journalistes préfèrent garder le silence à la suite d’une attaque, de peur de s’attirer des représailles. Face à de tels dangers, certaines régions du pays sont désormais privées de couverture médiatique.
Les difficultés auxquelles font face les journalistes dans leurs efforts pour couvrir la guerre civile ont incité la
Fondation pour la liberté de la presse (Fundación para la Libertad de Prensa, FLIP) à publier un manuel de sécurité à l’intention des journalistes, visant à réduire leurs chances d’être attaqués par les diverses factions armées en présence.
Les professionnels des médias de
Barrancabermeja faisant face à un nombre croissant d’attaques, une mission d’enquête s’est rendue dans cette ville du nord de la Colombie du 15 au 17 avril 2004 pour rencontrer les autorités locales et les journalistes. La mission comprenait des participants du Comité pour la protection des journalistes (CPJ), de l’Institut pour la presse et la société (Instituto Prensa y
Sociedad, IPYS), de la Fondation pour la liberté de presse (Fundación para la Libertad de Prensa,
FLIP) et de Reporters sans frontières (RSF).
Barrancabermeja a longtemps été contrôlée par le groupe rebelle l’Armée de libération nationale (Ejército de Liberación Nacional,
ELN), mais des groupes paramilitaires ont graduellement pris le contrôle de la ville. « Les combats entre différents groupes armés illégaux ont isolé des journalistes au milieu du champ de bataille », dit la co-coordonnatrice de la FLIP,
Juliana Cano-Nieto. « Ces journalistes ont depuis commencé à être identifiés à l’un ou l’autre des groupes », ajoute-t-elle.
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TROISIÈME PARTIE 3.7 LES MISSIONS D’ENQUÊTE (ÉTUDE DE CAS)
Le nombre d’attaques contre des journalistes dans cette ville a grimpé au cours des deux dernières années. Au cours des six mois précédant la mission, de nombreux cas d’agressions impliquant des groupes paramilitaires se sont produits. Les journalistes ont également indiqué que les forces militaires les encourageaient fortement à ne pas couvrir certains sujets.
Les organismes de promotion de la liberté de presse ont fait face à de nombreux obstacles en tentant d’obtenir des renseignements fiables concernant ces violations. « Il a été très difficile
CHOISIR LA DESTINATION DE LA MISSION
La FLIP, l’IPYS et d’autres organismes pour la liberté de presse – dont le CPJ, la Inter
American Press Association (IAPA) et la
Fédération internationale des journalistes (FIJ)
– se réunissent tous les mois pour discuter de la situation colombienne. Lors de ces rencontres, les participants déterminent les régions qui vivent les plus grandes difficultés.
Ils discutent également de la possibilité pour différentes organisations de se rendre en
Colombie pour participer à une mission. « En raison du nombre d’attaques à
Barrancabermeja, nous avons décidé de nous rendre dans la région », a indiqué Cano.
LA CHOSE LA PLUS IMPORTANTE DANS
CE TYPE DE MISSION, C’EST D’ÊTRE
BIEN PRÉPARÉ.
de documenter ces cas, parce que les gens avaient peur de parler au téléphone », dit Carlos
Eduardo Huertas, le correspondant d’IPYS en
Colombie. Les journalistes de la ville ne partageaient pas les mêmes points de vue, ce qui rendait plutôt difficile l’obtention de renseignements fiables sur l’état de la situation.
PRÉVOIR À L’AVANCE
« La chose la plus importante dans ce type de mission, c’est d’être bien préparé », indique
Cano. Cela peut sembler évident, mais il est utile de répéter que tous les rendez-vous doivent
être fixés avant le départ pour la région, et qu’il faut aussi contacter à l’avance toutes les personnes qu’il est important de rencontrer.
RESSOURCES DE LA CAMPAGNE
Chacune des organisations participant à la mission à Barrancabermeja défrayait ses propres dépenses. La mission a coûté environ
500 $US à la FLIP, ce qui comprenait les frais de voyage dans la région. L’IPYS, la FLIP, le
CPJ et RSF ont tous participé à la rédaction du rapport de mission.
RAPPORT DE MISSION ET SUIVI
Le rapport de mission, qui documente les principales entraves à la liberté d’expression dans la ville, a été diffusé à l’échelle internationale ainsi que dans les journaux locaux et nationaux, dans l’espoir de mieux faire connaître la situation qui prévaut à
Barrancabermeja. La mission a entre autres permis de dévoiler les fortes tensions qui existaient entre les journalistes et les autorités locales, selon Huertas.
Cano a mis l’accent sur l’importance d’émettre des recommandations constructives dans le rapport de mission, une fois l’état de la liberté de la presse bien évalué : « Vous devez montrer que vous ne vous contentez pas de critiquer, mais que vous proposez aussi des solutions. »
Elle ajoute qu’il est important d’assurer un suivi une fois le rapport publié, en rencontrant des représentants du gouvernement et en les
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TROISIÈME PARTIE 3.7 LES MISSIONS D’ENQUÊTE (ÉTUDE DE CAS)
encourageant à donner suite aux recommandations.
LES AUTORITÉS SAVENT QUE DES
ORGANISMES TANT AU PAYS QU’À
L’ÉTRANGER VEILLENT À LA SÉCURITÉ
DES JOURNALISTES.
DÉFIS
« L’organisation de la mission de
Barrancabermeja n’a pas posé de problème particulier », dit Cano. Mais réussir à obtenir l’écoute des autorités constitue un défi de taille. « Le plus difficile, c’est de parvenir à influencer les autorités, surtout les autorités militaires, affirme Cano. Vous ne savez jamais si vous avez réussi quoi que ce soit. »
Malgré ces incertitudes, certains signes indiquent que la mission de Barrancabermeja a eu certains impacts positifs.
IMPACTS
La mise sur pied de la mission d’enquête de
Barrancabermeja était motivée par le nombre grandissant d’attaques contre des journalistes.
Depuis la mi-avril 2004, alors que la mission avait lieu, jusqu’à la rédaction de ce rapport au début de juin, il n’y a eu aucune nouvelle attaque contre des journalistes dans la ville et les forces militaires n’ont imposé aucune nouvelle mesure restrictive à l’endroit des journalistes.
« Le fait d’avoir parlé aux autorités locales et aux membres des forces armées a certainement aidé », dit Cano. Elle insiste également sur l’utilité d’une collaboration avec des organismes internationaux quand il s’est agi d’attirer l’attention du monde sur la situation prévalant dans la ville : « Désormais, [les autorités] devront y penser à deux reprises avant d’agir contre la presse. Elles savent que des organismes tant au pays qu’à l’étranger veillent à la sécurité des journalistes. »
« Les journalistes locaux deviennent plus confiants quand ils savent que des organismes de défense de la liberté de la presse connaissent leur situation et les appuient, ajoute Cano. Il
était important qu’ils réalisent que nous nous intéressons à ce qui se passe dans leur ville. »
Les problèmes auxquels font face les journalistes en Colombie sont souvent plus criants dans les petites villes et les régions rurales loin de la capitale, puisque ces dernières reçoivent habituellement moins d’attention et de couverture des médias. Par conséquent, les rapports que produisent de telles missions d’enquête peuvent jouer un rôle décisif en alertant le gouvernement du pays, « qui se met alors à faire attention aux
événements qui se produisent dans les régions », indique Cano.
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TROISIÈME PARTIE 3.7 LES MISSIONS D’ENQUÊTE (RESSOURCES)
MISSIONS D’ENQUÊTE – RESSOURCES
Barrancabermeja – Rapport de la délégation
internationale, 2004 http://www.cpj.org/regions_04/americas_04/b arrancabermeja.html
Commonwealth Human Rights Initiatives –
Missions d’enquête
http://www.humanrightsinitiative.org/program s/aj/ffm/ffm.htm
Comité pour la protection des journalistes –
Mission d’enquête 2004 en Haïti
http://www.cpj.org/Briefings/2004/haiti_7_04
/haiti_7_04.html
Considerations for Human Rights Fact Finding by NGOs (Considérations sur les pratiques d’enquête sur les droits de la personne des organisations non gouvernementales); Julie
Mertus, American University
http://academic3.american.edu/~mertus/HR%
20fact-finding.htm
Human Rights Missions : A Study of the Fact-
Finding Practice of Non-Governmental
Organizations (Missions sur les droits de la personne : Étude sur les pratiques d’enquête des
organisations non gouvernementales); Hans
Thoolen, Berth Verstappen; Boston: Martinus
Nijhoff, 1986.
http://www.brill.nl/m_catalogue_sub6_id19520.
htm
General Information on Fact-Finding
(Informations générales sur les enquêtes),
International Online Training Program on
Intractable Conflict, University of Colorado:
Conflict Research Consortium
Reporters sans frontières – The Importance of
Fact Finding Missions (L’importance des missions d’enquête)
http://www.rsf.org/article.php3?id_article=9593
IFEX 105
Le lobbying
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (BOÎTE À OUTILS)
BOÎTE À OUTILS
COMMENT EFFECTUER UN LOBBYING EFFICACE
C O N T E X T E
On associe souvent le lobbying à des mots chuchotés derrière des portes closes, mais il ne s’agit là que d’une technique parmi d’autres. Il est habituellement nécessaire de combiner plusieurs méthodes de campagne pour convaincre un gouvernement d’écouter sérieusement ces chuchotements et de poser les gestes appropriés.
Le lobbying peut comprendre notamment :
• Des visites ou des rencontres avec les dignitaires dans la capitale nationale, à l’ambassade ou dans les bureaux locaux ou de district;
• Des discussions avec des représentants lors de rencontres intergouvernementales (par exemple les conférences des Nations Unies, les sommets de l’Union Africaine, les rencontres du Commonwealth);
• Des voyages ou des excursions organisés pour les dignitaires;
• Des lettres, des pétitions et d’autres formes de communication avec les décideurs.
Pourquoi il est important d’effectuer du lobbying auprès des gouvernements :
• Les gouvernements détiennent le pouvoir.
• Les politiciens mènent l’opinion publique autant qu’ils la suivent.
• Les gouvernements peuvent influencer les autres gouvernements.
• Les gouvernements décident des actions des organisations intergouvernementales.
• Les gouvernements peuvent améliorer les normes internationales et les mécanismes de protection des droits de la personne.
• Les gouvernements peuvent changer les lois et les pratiques.
VERS QUI DIRIGER LE LOBBYING
Étude et analyse
Le point de départ de la mise au point de stratégies, c’est l’étude et l’analyse de la situation dans laquelle vous vous trouvez, des problèmes que vous tentez de régler, des opportunités dont vous pourriez profiter et des ressources disponibles.
Questions :
•
Le gouvernement auprès duquel vous faites du lobbying a-t-il signé et ratifié un traité international sur les droits de la personne ?
•
Ce gouvernement a-il explicitement présenté un énoncé de principes sur la question des droits de la personne à l’échelle internationale, ou s’est-il engagé en ce sens ?
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (BOÎTE À OUTILS)
•
Existe-t-il des mécanismes de surveillance ou de contrôle des politiques du gouvernement au niveau parlementaire ou officiel ?
•
Existe-t-il des mécanismes indépendants d’examen des liens qui existent entre les droits de la personne et la politique étrangère, commerciale ou militaire ? Qui contrôle ces mécanismes ? Les soumissions sont-elles acceptées ?
•
Existe-t-il des mécanismes formels à la disposition des organisations des droits de la personne pour contribuer aux politiques en général, ou dans le cas de certains pays ou enjeux particuliers ?
•
Le gouvernement profite-t-il de liens militaires, économiques ou culturels particuliers avec d’autres pays, qui lui accorderaient une certaine influence ?
Quels sont ces pays ? Quelles sont les sources d’influence dans ces pays ?
•
Dans quelles organisations intergouvernementales votre gouvernement est-il représenté ? Est-il représenté au sein de la
Commission des droits de l’homme des
Nations Unies, du Conseil de sécurité des
Nations Unies, de la Banque mondiale, d’organisations intergouvernementales locales ?
•
Quels ministres, ministères et groupes d’intérêt participent à la formulation de la politique étrangère en général (ou d’autres politiques pertinentes) et à la politique touchant certains pays ou enjeux précis ?
Avez-vous accès à ces personnes ?
•
Qui est chargé de la politique étrangère au sein des partis politiques ?
•
Les médias influencent-ils la politique
étrangère ou commerciale ? Les médias sontils plus influents dans le cas de certains pays ou enjeux plus que dans d’autres ? Certains médias ou journalistes sont-ils plus influents que d’autres, en matière de politique ?
•
Certains individus comme des juges, des universitaires, des écrivains ou des personnalités de la télévision sont-ils plus susceptibles d’exercer une influence que d’autres ?
•
Comment le ministère des Affaires étrangères est-il organisé ? Y a-t-il en son sein des spécialistes de certains pays ou de certains sujets ? Avez-vous des contacts directs avec ces personnes ?
•
Existe-t-il un organisme d’État consacré à l’élaboration de politiques en matière de droits de la personne et de relations internationales, comme une unité des Droits de la personne ? Avez-vous des contacts directs avec ces personnes ?
•
Existe-t-il des lois spécifiques portant sur l’aspect humanitaire des liens militaires et
économiques ?
•
Existe-t-il d’autre groupes intéressés à promouvoir les droits de la personne par le biais de la politique étrangère, comme des
ONG ?
•
Les membres du personnel du ministère des
Affaires étrangères et des autres ministères concernés reçoivent-ils une formation en matière de droits de la personne ?
•
Le gouvernement s’est-il engagé à élaborer des stratégies de promotion des droits de la personne dans certains pays particuliers ?
COMMENT EFFECTUER DU LOBBYING
Aspects pratiques du lobbying
On fait appel à plusieurs techniques lorsque l’on tente d’informer et de persuader des
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (BOÎTE À OUTILS)
personnes qui détiennent le pouvoir ou exercent une influence pour les inciter à protéger et à promouvoir les droits de la personne. Vous pourriez décider de faire appel à vos membres pour entreprendre une action, utiliser l’influence de tiers ou des publicités dans les médias, ou vous pourriez simplement prendre un café avec le ministre des Affaires étrangères. Sachez qu’à long terme, votre réussite dépend également des
éléments suivants :
Préciser ses objectifs
L’objectif d’ensemble d’un programme de lobbying est de faire en sorte que la protection et la promotion des droits de la personne deviennent des éléments incontournables dans les relations internationales du gouvernement
(et dans les politiques intérieures pertinentes).
En fonction du chemin qu’il reste à parcourir avant que cet objectif ne soit atteint, vous pourriez établir d’autres objectifs à plus court terme, en fonction de votre analyse de la situation actuelle. Ces objectifs devraient comprendre notamment :
• la stimulation d’un débat public sur la politique étrangère et les droits de la personne;
• l’établissement de contacts avec des représentants élus et des partis politiques pour traiter de différentes questions liées aux droits de la personne;
• la réalisation d’une étude annuelle indépendante sur les actions du gouvernement en matière de droits de la personne;
• l’accès aux représentants clés de l’unité des droits de la personne du ministère des Affaires
étrangères et l’établissement de bonnes relations de travail avec ces représentants;
• l’accès au ministre des Affaires étrangères et au président et/ou premier ministre, et l’exercice d’une influence auprès de ces personnes;
• la volonté du ministère des Affaires étrangères d’appuyer chacune des causes que vous lui présentez et d’agir en ce sens;
• le fait d’assumer un rôle de premier plan parmi les organisations internationales dans la défense d’une cause particulière liée à un pays ou aux droits de la personne.
Quels que soient vos objectifs, vous devrez pouvoir mesurer les progrès que vous faites, afin de mieux évaluer votre stratégie et votre travail.
Actions des membres
Les gouvernements sont généralement sensibles aux pressions de la communauté.
Vous devrez donc élaborer une stratégie visant
à faire participer vos membres et vos supporters de manière efficace, en leur fournissant les ressources nécessaires pour agir.
•
Organisez des campagnes épistolaires pour vos membres ainsi que d’autres organisations, dans le but de faire connaître des enjeux précis à des membres ciblés du gouvernement ou des élus.
•
Assurez-vous que vos membres tentent de rencontrer leurs représentants élus pour leur signifier leurs inquiétudes à titre d’électeurs.
Ciblez certains représentants et membres influents du gouvernement.
•
Organisez des événements de campagne comme des rencontres et des manifestations publiques dans la circonscription ou le comté de représentants élus.
•
Invitez vos membres à écrire aux médias.
•
Faites participer vos membres à des manifestations publiques organisées à
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (BOÎTE À OUTILS)
l’intérieur ou à l’extérieur lors de rencontres importantes du gouvernement.
Le lobbying auprès de dignitaires
Une visite au bureau d’un décideur constitue souvent une excellente façon d’établir un contact et de transmettre votre message. Vous pouvez contacter le bureau par une lettre officielle en demandant un rendez-vous. La lettre devrait être signée par les personnes qui feront partie de la délégation. Assurez-vous de confirmer le rendez-vous par téléphone, vérifiez l’adresse, l’heure et les indications pour vous rendre au lieu de la rencontre. Si vous ne recevez pas de réponse à votre lettre, appelez de nouveau ou visitez le bureau pour demander un rendez-vous de nouveau, ou ayez recours aux contacts qui pourraient vous aider
à entrer en communication avec le représentant en question.
Éléments à considérer :
•
Prenez soin de bien planifier votre délégation.
Plus votre délégation représentera un éventail d’intérêts différents, mieux vous serez en mesure de présenter tous les faits et les opinions nécessaires pour influencer le décideur.
•
Confiez des tâches différentes à chacun des membres de l’équipe et nommez un chef, qui présentera les participants et dirigera la rencontre.
•
Réfléchissez aux arguments que vous allez présenter, répétez-les, pensez aux questions et aux contre-arguments que l’on vous présentera et réfléchissez aux réponses que vous fournirez.
•
Dites exactement au décideur ce que vous attendez de lui (par exemple, adopter une nouvelle loi, poser une question en Chambre, modifier une politique, s’adresser au conseil des ministres, etc.).
•
Avant de partir, remettez au décideur une déclaration et des documents qui résument vos arguments, et n’oubliez pas de lui laisser vos coordonnées.
•
Faites bon usage du temps qui vous est alloué
– souvent, la moitié de la rencontre est consacrée aux présentations et aux autres questions, et la délégation ne transmet pas son message efficacement.
Un exemple d’objectif de stratégie :
Question : Qui devez-vous convaincre d’agir ?
Réponse : le parlement (la majeure partie des membres).
Question : Qui peut le convaincre, ou qu’estce qui peut le convaincre ?
Réponse : La politique du parti, un enjeu faisant appel à la conscience individuelle ou à la responsabilité personnelle, l’attitude de la communauté, les organisations respectées, les chefs religieux, certains juges, les organisations d’avocats, les préoccupations ou les pressions internationales.
Question : À quel moment agir ?
Réponse : Le parlement doit voter un projet de loi sur la liberté d’expression dans six semaines.
Stratégie possible :
Tentez d’obtenir soit l’engagement des partis politiques envers la liberté d’expression, ou leur engagement en faveur d’un vote fondé sur la conscience individuelle. Identifiez les députés qui sont favorables et ceux qui sont défavorables, ainsi que ceux qui sont susceptibles de changer d’avis. Orientez vos efforts vers ces derniers. Incitez chaque groupe à
écrire à certains députés ciblés et à les rencontrer.
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (BOÎTE À OUTILS)
OÙ FAIRE DU LOBBYING
Conférences internationales
Les diplomates présents à des conférences telles que celles du Commonwealth et des Nations
Unies s’attendent habituellement à faire l’objet de lobbying de la part de militants de leur propre pays ou de militants d’ailleurs, sur différents sujets.
Travailler en équipe
Pour commencer, rencontrez les autres militants de votre pays ou de votre région pour déterminer les principaux objectifs de vos efforts de lobbying et élaborer des stratégies qui convaincront les diplomates d’accepter votre position. Répartissez parmi le groupe les différents diplomates et délégations auprès desquels il faut faire du lobbying.
Lorsque vous rencontrez des diplomates et des délégations pour la première fois, il est important de leur permettre de vous expliquer leur position sur les différents enjeux. Ensuite, au fil de la discussion, si vous constatez que leur position ne va pas dans le sens de votre campagne, c’est alors que vous devez avoir recours au lobbying. Chaque militant devrait partager les résultats de ses rencontres avec les autres membres du groupe qui fait campagne, de manière à éviter un chevauchement d’efforts et de façon à mieux planifier les efforts de lobbying ultérieurs.
CONTRÔLE ET ÉVALUATION
Lorsque vous préparez des stratégies, pensez à des façons de mesurer vos progrès et d’évaluer les résultats de votre stratégie. Cela présume que les objectifs que vous avez fixés sont précis et mesurables.
CONSEILS PRATIQUES POUR LES LOBBYISTES
•
Consolidez votre statut en tant qu’organisation-ressource auprès des personnes qui élaborent des politiques en leur fournissant des informations – bulletins, documents de recherche, publications et résultats de recherches.
•
Exprimez votre volonté d’aider les décideurs à se procurer des documents et des données supplémentaires.
•
Entretenez vos relations avec les personnes qui
élaborent des politiques en leur envoyant des renseignements, en les remerciant lorsque leur vote appuie les enjeux qui vous intéressent et en les invitant à assister aux événements que vous organisez.
•
Encouragez les gens à écrire des lettres personnelles à ces décideurs et faites parvenir une copie de ces lettres à la presse.
Organisez un point de presse pour les personnes qui élaborent des politiques au cours duquel un spécialiste pourra parler de l’importance de l’enjeu qui vous préoccupe.
RÉFÉRENCES
© Publications d’Amnistie internationale:
Guide de campagne d’Amnistie internationale,
2001. 1, rue Easton, Londres WC1X 0DW,
Royaume-Uni. http://www.amnesty.org
Campagne internationale contre les mines terrestres : ICBL Campaign
Kithttp://www.icbl.org/resources/campaignkit/
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Le lobbying
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (ÉTUDE DE CAS)
ÉTUDE DE CAS
LOBBYING INTERNATIONAL
Le Human Rights Watch et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement
C O N T E X T E
En 1991, l’Ouzbékistan a accédé à la souveraineté après plus d’un siècle au sein de l’empire Russe, puis de l’Union soviétique. Sous le règne du président Islam Karimov, la réforme démocratique se fait attendre et les médias sont contrôlés de près par l’État. Le Human Rights Watch indique que l’Ouzbékistan présente l’un des pires dossiers en matière de droits de la personne de toutes les républiques de l’ex-Union soviétique. Un rapport des Nations Unies qualifie d’ailleurs de « systématique » le recours à la torture en Ouzbékistan.
L’émergence de groupes islamistes radicaux en Asie centrale a engendré des craintes accrues liées à la sécurité en Ouzbékistan. À la suite des attaques du 11 septembre, l’Ouzbékistan s’est attiré la faveur des États-
Unis en permettant à ses forces armées d’être basées près de la frontière afghane. Les observateurs des droits de la personne s’inquiètent du fait que dans le contexte de la « guerre à la terreur », il est devenu plus difficile d’attirer l’attention internationale sur les nombreux cas d’abus et de torture que l’on signale.
La Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) a été fondée en 1991 pour aider les anciens pays communistes d’Europe centrale et d’Asie centrale à bâtir des économies de marché. La BERD est le plus grand investisseur dans la région et elle mobilise d’importants investissements directs étrangers en plus de son propre financement. Le document fondateur de la Banque stipule qu’elle existe pour promouvoir le développement dans les pays qui respectent les « principes fondamentaux de la démocratie multipartite, la règle de droit, les droits de la personne et l’économie de marché ».
En mai 2002, le Human Rights Watch et plus de cinquante organisations membres ont lancé une campagne pour inciter la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) à profiter de sa réunion annuelle de 2003 à Tachkent, en Ouzbékistan, pour promouvoir les droits de la personne dans ce pays hôte. En fin de compte, cette campagne a eu pour effet de convaincre la Banque en avril
2004 de limiter ses investissements en
Ouzbékistan.
« Nous avons exprimé notre inquiétude devant le choix du lieu de la réunion, compte tenu du dossier épouvantable du gouvernement ouzbèk en matière de droits de la personne », déclare Veronika Leila Szente Goldston,
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (ÉTUDE DE CAS)
directrice des appels pour la Division Europe et Asie centrale du Human Rights Watch.
« Nous avons averti la Banque que sa décision de tenir sa réunion sans demander de concessions en échange permettrait au gouvernement ouzbèk de considérer cette décision comme un appui à ses politiques répressives », ajoute-t-elle.
NOUS AVONS DÉCIDÉ DE
TRANSFORMER CE QUE NOUS
CONSIDÉRIONS COMME UNE
MAUVAISE DÉCISION EN OCCASION DE
CHANGER LES CHOSES, EN EXIGEANT
QUE LE RESPECT DE NORMES
CONCRÈTES EN MATIÈRE DE DROITS
DE LA PERSONNE SOIT LIÉ AU DROIT
D’ACCUEILLIR LA RÉUNION.
Le Human Rights Watch a fait appel à la
BERD pour qu’elle fasse ce qui suit :
• s’assurer que le gouvernement ouzbèk respecte des normes claires en matière de droits de la personne avant la tenue de la réunion annuelle de 2003;
• inclure la question des droits de la personne dans le programme de la réunion;
• s’assurer que les ONG et les médias locaux participent pleinement à la réunion et ne subissent pas de représailles ultérieures de la part du gouvernement.
Les objectifs plus généraux de la campagne consistaient à encourager la Banque à prendre son mandat politique plus au sérieux, à mieux reconnaître les liens qui existent entre les réformes politiques et économiques et à se servir efficacement de la conditionnalité pour promouvoir les droits de la personne et la démocratie. L’un des objectifs spécifiques de la campagne était d’inciter la Banque à établir des normes précises en matière de politiques et de droits de la personne, normes que doivent respecter les pays qui profitent des activités de la Banque pour continuer de recevoir un financement.
Recourir au mandat particulier de la BERD
La BERD est une institution unique en son genre parmi les institutions financières internationales en ce qu’elle a un mandat politique (voir « Contexte politique »). « Il semblait donc logique de demander à la BERD d’appliquer son mandat, selon Szente
Goldston. Au lieu de demander l’annulation de la réunion, nous avons décidé de transformer ce que nous considérions comme une mauvaise décision en occasion de changer les choses, en exigeant que le respect de normes concrètes en matière de droits de la personne soit lié au droit d’accueillir la réunion. »
Le Human Rights Watch a également pris soin d’indiquer que l’organisme ne prônait pas l’isolation devant l’engagement. « Nous avons insisté sur la différence qu’il y a entre l’engagement, particulièrement dans le secteur privé, et l’attribution d’une récompense politique et financière à un gouvernement répressif en lui permettant de devenir l’hôte d’une réunion annuelle», dit Szente Goldston.
Faire passer le message
Le Human Rights Watch a transmis son message de différentes façons. L’organisation a lancé sa campagne par une lettre ouverte au président de la BERD, signée par une coalition de plus de 50 ONG de la région, dont une douzaine de l’Ouzbékistan. Le lancement avait été prévu pour coïncider avec la réunion de 2002 de la BERD à Bucarest, où
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (ÉTUDE DE CAS)
l’organisation avait fait part de ses inquiétudes aux dirigeants de la Banque, notamment le président Lemierre. La campagne a été rendue publique par le biais d’un communiqué de presse et d’une conférence de presse qui a eu lieu à Bucarest, et par un travail considérable de sensibilisation effectué avant, pendant et après la réunion de Bucarest.
UNE CARTE TOURISTIQUE
« ALTERNATIVE » DE TACHKENT
INDIQUÉ LES LIEUX FRAPPÉS DE
VIOLATIONS, AINSI QUE LES SITES
TOURISTIQUES TRADITIONNELS.
Dans une page spéciale de son site Web, le
Human Rights Watch a encouragé les groupes et les individus à s’associer à la campagne et à l’appuyer par des gestes concrets.
L’organisation a également entretenu des liens
étroits avec ses partenaires de la campagne, en leur fournissant des mises à jour sur les développements en Ouzbékistan et sur ses communications avec la Banque.
Le Human Rights Watch a également investi des ressources importantes pour susciter l’intérêt des médias, particulièrement dans des publications comme The Economist et le
Financial Times, susceptibles d’influencer les dirigeants de la Banque – en provoquant un sentiment de gêne lié à la décision de la BERD de tenir la réunion à Tachkent. « Nous pensions qu’une critique provenant de la presse financière aurait plus d’effet sur la Banque que de recevoir les mêmes critiques uniquement de la part de groupes humanitaires », dit Szente
Goldston. Par exemple, en octobre 2002, The
Economist a publié un article intitulé « La
Banque Européenne en faveur de la répression et de la dictature ? » et cet article a causé des remous au sein de la Banque.
Le lobbying auprès des dirigeants de la Banque
« Dans l’ensemble, la Banque s’est montrée
étonnamment ouverte et réceptive face à nos inquiétudes et nous avons eu facilement accès
à ses plus hauts dirigeants pendant toute la durée de la campagne », dit Szente Goldston.
Elle croit que l’une des explications vraisemblables de cette réceptivité, c’est que contrairement aux diplomates de l’ONU ou du Conseil européen, la BERD n’était pas habituée aux approches des groupes humanitaires. La nouveauté de ces échanges rendait l’expérience intéressante et attrayante.
« La lassitude habituelle que nous sentons chez les diplomates à Genève ou les bureaucrates de l’Union européenne, habitués au lobbying en faveur des droits de la personne, était absente, dit Szente Goldston. C’était nouveau pour eux comme pour nous ! »
L’un des outils imaginatifs que l’on a présenté aux dirigeants de la Banque était une carte touristique « alternative » de Tachkent, distribuée aux participants de la réunion de
2003, sur laquelle le Human Rights Watch avait indiqué les lieux frappés de violations, ainsi que les sites touristiques traditionnels.
« Cet outil a été choisi pour toucher des banquiers et des investisseurs et non des diplomates, plus au fait des traités internationaux sur les droits de la personne, dit
Szente Goldston. Nous sentions qu’il fallait une approche plus directe et plus percutante pour leur exprimer nos inquiétudes. »
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (ÉTUDE DE CAS)
Pressions indirectes
Le Human Rights Watch a exercé des pressions indirectes sur la BERD par le biais d’activités de défense des droits dirigées vers des institutions comme l’Union européenne (UE), les Nations Unies, l’Organisation sur la sécurité et la coopération en Europe et le
Conseil de l’Europe. Le groupe a également ciblé les gouvernements intéressés – notamment les États-Unis, les pays de l’UE et le Japon – pour montrer son inquiétude et pour exercer des pressions sur la BERD.
Deux exemples illustrent les résultats de ces pressions indirectes. Après la réunion de
POUR LA TOUTE PREMIÈRE FOIS, LA
BERD A ÉTABLI DES NORMES EN
MATIÈRE DE DROITS DE LA
PERSONNE POUR UN PAYS DANS
LEQUEL ELLE MÈNE SES ACTIVITÉS
ET A RENDU TOUT APPUI FINANCIER
FUTUR CONDITIONNEL AU RESPECT
DE CES NORMES.
janvier 2003 du Conseil de coopération entre l’Union européenne et l’Ouzbékistan – la plus importante rencontre bilatérale de l’année entre l’UE et le gouvernement ouzbèk –l’UE a laissé savoir qu’elle s’attendait à ce que les autorités ouzbèk « démontrent à la communauté internationale que des changements politiques et économiques seront effectués » avant la prochaine réunion de la
BERD. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a également adopté une résolution en juin 2002 exprimant le souhait que la décision de la Banque de tenir sa réunion annuelle en Ouzbékistan permettrait d’amener des réformes démocratiques et une amélioration de la situation des droits de la personne dans ce pays.
Ressources de la campagne
Le Human Rights Watch a consacré beaucoup d’énergie et d’efforts à cette campagne, qui a exigé un travail considérable de la part du personnel de la division Europe et Asie centrale, particulièrement de la part de sa directrice des appels qui avait le plus grand rôle à jouer dans ce projet. Le directeur adjoint et un chercheur en Ouzbékistan installé à
Tachkent ont également consacré beaucoup de temps à la campagne.
Plusieurs autres membres de l’organisation ont participé à différentes étapes du projet, du personnel des communications au directeur exécutif, lequel la BERD a invité à la réunion annuelle à Tashkent en qualité de panéliste principal.
DÉFIS
Malgré la facilité avec laquelle le Human
Rights Watch a pu communiquer avec les dirigeants de la Banque, et malgré l’intérêt que la campagne a suscité au sein de la communauté internationale et la presse, l’organisation a tout de même connu certaines difficultés et frustrations en cours de route.
Ainsi, en plus d’être persévérants, il fallait faire preuve de souplesse.
Peu après le lancement de la campagne, il
était clair que la BERD ne ferait pas de l’amélioration concrète des droits de la personne en Ouzbékistan une condition de la tenue de la réunion par le gouvernement de ce pays, en expliquant que la décision de tenir la réunion à Tachkent ne signifiait pas qu’elle
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (ÉTUDE DE CAS)
endosse les politiques du gouvernement ouzbèk, mais constituait plutôt une « invitation au progrès ». « Nous avons été déçus qu’une telle déclaration rhétorique ne soit pas accompagnée d’exigences précises, explique Szente
Goldston. Nous estimions qu’il s’agissait d’une belle occasion manquée. »
À la suite de cet épisode contrariant, le
Human Rights Watch a quelque peu raffiné son message. « Notre argument principal était désormais le suivant : que la réunion serve à promouvoir les droits de la personne ou à endosser les politique du gouvernement dépendait de la manière dont la réunion serait menée et des retombées qu’elle aurait », dit
Szente Goldston. L’organisation continuait d’insister sur l’importance, pour la Banque, d’énoncer des mesures réformatrices précises, accompagnées d’un échéancier clair auquel le gouvernement ouzbèk devrait se conformer après la réunion.
En mars 2003, moins de deux mois avant la réunion, la BERD a posé un geste inattendu qui différait des demandes initiales du Human
Rights Watch, mais qui a permis de mettre de l’avant la question des droits de la personne et de formuler certaines attentes quant aux réformes nécessaires avant la tenue de la réunion annuelle. La Banque a adopté une stratégie nouvelle pour l’Ouzbékistan qui, pour la première fois, établissait des normes spécifiques pour le gouvernement : une plus grande ouverture politique et des médias libres, des groupes de la société civile indépendants pouvant agir et s’enregistrer librement, et l’application des recommandations du Rapporteur spécial des
Nations Unies sur la torture. On a accordé une année à l’Ouzbékistan pour s’y conformer.
« Nous étions tout de même déçus que l’adoption de ces normes ne soit pas liée à la réunion annuelle, dit Szente Goldston. Mais nous avons bien accueilli l’annonce et avons encouragé la Banque à poursuivre sa stratégie. » La Banque a également réagi positivement aux deux autres demandes faites par le Human Rights Watch : que le contenu de la réunion reflète les préoccupations concernant les droits de la personne et que les
ONG et les médias locaux puissent y participer pleinement.
Suivi de la réunion
Après la réunion de Tashkent, le Human
Rights Watch a poursuivi sa campagne, en insistant désormais sur le besoin de s’assurer du respect des normes que la BERD avait
établies pour le gouvernement ouzbèk.
L’organisation a également mis l’accent sur la responsabilité de la Banque d’intervenir auprès des ONG locaux et des journalistes qui se sont prononcés contre les pratiques abusives du gouvernement, afin de les protéger contre toute forme de représailles.
Pendant l’année qui a suivi la réunion et jusqu’en mars 2004, alors que la Banque devait évaluer les progrès accomplis par le gouvernement ouzbèk dans le domaine des droits de la personne, le Human Rights Watch a publié des mises à jour régulières sur le pays en se concentrant particulièrement sur les trois aspects importants que la BERD avait cernés.
L’organisation a maintenu ses pressions sur la
Banque par le biais de ses rencontres régulières avec des dirigeants clés de la Banque, des gouvernements intéressés et des institutions comme l’OSCE, sur laquelle la BERD se fie
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (ÉTUDE DE CAS)
pour effectuer ses évaluations politiques.
« Nous relancions aussi régulièrement les médias et d’autres institutions cibles sur ce sujet pour nous assurer que la question demeurait une priorité pour la Banque », dit
Szente Goldston. The Economist a d’ailleurs publié quatre articles consacrés précisément à la BERD et à l’Ouzbékistan.
IMPACT
La campagne a eu plusieurs impacts importants, notamment :
•
Pour la toute première fois, la BERD a établi des normes en matière de droits de la personne pour un pays dans lequel elle mène ses activités et a rendu tout appui financier futur conditionnel au respect de ces normes.
Lorsque le gouvernement n’a pas réussi à démontrer qu’il avait fait des progrès dans le domaine des droits de la personne, la BERD a posé le geste sans précédent, en avril 2004, de limiter ses investissements en Ouzbékistan.
•
La réunion annuelle de la Banque, qui traite habituellement des occasions d’investissement dans le pays hôte, s’est plutôt penchée sur le mauvais dossier de l’Ouzbékistan en matière de droits de la personne et la mesure dans laquelle la décision de la Banque d’y tenir sa réunion annuelle était compatible avec son mandat. Des ONG et des journalistes locaux ont pu participer à la réunion et en profiter pour mettre publiquement leur gouvernement au défi de modifier son dossier en matière de droits de la personne.
•
La Banque s’est transformée de façon significative. Elle a réaffirmé son engagement envers la démocratie et les droits de la personne et s’exprime désormais plus ouvertement sur ces questions.
•
Une vaste coalition d’ONG de l’Ouzbékistan et d’autres pays d’Asie centrale a été mobilisée et se montre prête à poursuivre la campagne.
La coalition veut profiter de la poussée générée par les actions de la Banque à l’égard de l’Ouzbékistan et l’encourage à prendre des mesures semblables dans plusieurs autres pays, plus particulièrement en Asie centrale et dans le Caucase.
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Le Lobbying
3
.8
TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (ÉTUDE DE CAS)
ÉTUDE DE CAS
LOBBYING NATIONAL
La mission de 2003 de l’Institut international de la presse en Israël
C O N T E X T E
Le conflit qui persiste en Israël et dans les territoires occupés de la rive gauche et de la Bande de
Gaza a rendu la région particulièrement dangereuse pour les journalistes qui y travaillent. Cependant, même avant de faire face au danger en faisant leur travail, de nombreux journalistes et travailleurs des médias éprouvent depuis quelques années de grandes difficultés à simplement obtenir l’autorisation d’exercer leur métier.
L’un des plus grands problèmes est que les permis de travail sont souvent refusés aux employés des médias
étrangers. Ce problème vient, en fait, de la décision du Service de presse du gouvernement israélien (GPO) de commencer à faire passer les correspondants étrangers et le personnel des médias étrangers qui demandent des permis de travail par le Service de l’emploi, où ces personnes sont sujettes aux règles générales liées au marché du travail. En conséquence, à la demande d’un syndicat israélien, certains membres du personnel des médias étrangers
(plus particulièrement les équipes de télévision) se voyaient refuser leur demande. « Cela entravait surtout le travail des équipes télé étrangères dans la couverture des événements dans les territoires palestiniens », dit Anthony
Löwstedt, coordonnateur pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à l’Institut international de la presse (IIP).
Un autre problème concernait l’impossibilité pour les journalistes palestiniens d’obtenir des cartes de presse. En janvier 2002, le GPO, évoquant des motifs de sécurité, adoptait une politique générale consistant à refuser d’accorder une accréditation aux journalistes palestiniens employés par les organisations de presse internationales. «
Cela compromettait sérieusement l’aptitude des journalistes à faire leur travail et nuisait, par conséquent, au bon fonctionnement des médias », selon M. Löwstedt.
Pendant deux ans, ces problèmes ont entaché les relations entre la presse étrangère et les organismes gouvernementaux, en plus de restreindre gravement la liberté de la presse en Israël et dans les territoires palestiniens.
À la fin du mois de mars 2003, une mission regroupant six membres de l’Institut international de la presse (IIP) s’est rendue en
Israël pour tenter de régler un conflit entre l’Association de la presse étrangère (FPA) et le
Service de presse du gouvernement israélien
(GPO). La mission s’est concentrée sur deux problèmes précis : le refus d’accorder des permis de travail aux employés des médias étrangers et le refus d’accorder des cartes de presse, dans des situations où la sécurité n’était pas en jeu, à des
Palestiniens travaillant pour des médias
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (ÉTUDE DE CAS)
étrangers dans les territoires palestiniens. Une semaine seulement après la fin de la mission, un de ces problèmes avait été réglé.
PARLER LIBREMENT ET CLAIREMENT.
NE PAS AVOIR PEUR. VOUS DEVEZ
TRANSMETTRE VOTRE MESSAGE DE
MANIÈRE CONVAINCANTE
Choisir de lancer une mission
Hanoch Marmari, un membre du conseil de l’IIP et rédacteur en chef du quotidien israélien
Ha’aretz, a suggéré la tenue de la mission lors d’une réunion du conseil de l’IIP en 2002. La mission visait à solutionner le conflit, plutôt que simplement recueillir des faits.
« Alors que les missions récentes entreprises par des organisations pour la liberté de la presse se concentraient sur les actes violents de l’armée israélienne contre des journalistes, ce qui a incité le gouvernement israélien à durcir sa position, nous avons décidé de nous attaquer à deux problèmes plus limités », indique Löwstedt. L’IIP a décidé qu’une délégation composée de membres éminents, incluant son directeur, devrait traiter de ces enjeux directement avec le gouvernement.
« À plusieurs occasions dans le passé, l’IIP a pu constater qu’une mission de défense de la liberté de la presse représente un outil efficace lorsque l’analyse de la situation montre que la diplomatie est plus efficace que la visibilité », remarque Löwstedt.
Présenter la cause aux représentants du gouvernement
Les membres de la mission ont rencontré des représentants des deux parties impliquées dans la dispute, ainsi que le président de la Knesset, le ministre de l’Intérieur, le directeur du bureau du Premier ministre, l’agent de presse du gouvernement et le président du conseil de presse.
Pendant leurs rencontres avec des représentants du gouvernement, les membres de la mission ont exprimé leurs préoccupations concernant le non-respect de la liberté de presse résultant des difficultés d’ordre bureaucratique. Les membres de la mission ont
également dit qu’ils étaient inquiets puisque ces difficultés pouvaient être motivées politiquement dans le but de réduire la couverture médiatique étrangère des
événements dans la région et de pénaliser les médias étrangers dont la couverture était considérée comme nuisible à Israël.
« Les membres de la mission ont précisé qu’ils n’étaient pas venus en Israël en mission de protestation, mais pour représenter une organisation internationale préoccupée par la liberté de la presse, indique Löwstedt. Ils tentaient d’aider à aplanir les difficultés et à solutionner le conflit. »
Les participants à la mission considéraient que leur rôle en Israël consistait à signaler aux
échelons supérieurs des autorités et à la population d’Israël l’importance de la liberté de la presse, ainsi que celle de la liberté de déplacement et d’accès pour les journalistes et les travailleurs des médias, même en temps de conflit violent et intense entre Israël et les
Palestiniens. « Ils ont indiqué que jamais, dans l’histoire d’Israël, même au plus fort des hostilités, de tels obstacles n’avaient été dressés devant les médias étrangers », indique Löwstedt.
Les dirigeants israéliens ont répondu avec intérêt et exprimé leur désir de régler le différend. Les membres de la mission ont bien accueilli les déclarations fermes du directeur du bureau du Premier ministre selon lesquelles les autorités politiques n’avaient pas pour
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (ÉTUDE DE CAS)
objectif de restreindre la liberté de la presse et qu’il s’agissait seulement de difficultés bureaucratiques qu’il fallait régler. Ils ont compris, à l’issue de la rencontre, qu’une solution au problème des cartes de presse pour les employés palestiniens des médias étrangers pourrait être trouvée prochainement. Les membres de la mission ont également été encouragés par la volonté apparente du ministre de l’Intérieur d’étudier la question des permis de travail et de résidence, ainsi que par l’intérêt exprimé par le président de la Knesset d’en arriver à une solution à l’amiable.
LES PARTICIPANTS DE LA MISSION
DE L’IIP NE VISAIENT PAS LA
CONFRONTATION, MAIS ILS ONT
LAISSÉ ENTENDRE SANS
ÉQUIVOQUE QUE L’IMAGE
INTERNATIONALE D’ISRAËL SERAIT
TERNIE SI LE GOUVERNEMENT
CONTINUAIT DE RESTREINDRE LA
LIBERTÉ DES MÉDIAS.
Les membres de la mission ont remercié ces dirigeants de l’ouverture d’esprit qu’ils ont démontrée lors de leurs rencontres, et de leur volonté manifeste d’écouter et de réagir face aux problèmes.
Ressources de la campagne
Les six membres de la mission ont défrayé les frais liés à leur voyage. « Les éditeurs et les journalistes de premier plan sont généralement intéressés à participer à de telles missions, car celles-ci présentent de bonnes occasions de rencontrer certains membres influents du gouvernement et des médias dans les secteurs en crise, sans parler de la dimension humanitaire de ce type d’entreprise », indique
Löwstedt.
Le fonds de l’IIP pour la liberté de la presse a défrayé certains frais supplémentaires. L’aspect logistique a été pris en charge par deux membres du bureau principal de l’IIP à Vienne, en collaboration avec l’adjoint du membre du conseil de l’IIP en Israël, à Tel Aviv.
DÉFIS
Dans l’ensemble, l’IIP a indiqué que sa mission s’est heurtée à des difficultés somme toute « mineures » . « Nous croyons que notre membre du conseil israélien, Hanoch Marmari, a su choisir le moment le plus opportun pour organiser la mission, selon Löwstedt. Il est essentiel d’avoir quelqu’un sur place pour surveiller les progrès et planifier l’échéancier. »
Le chef de l’Association de la presse étrangère,
Dan Perry, a également joué un rôle de premier plan en effectuant la plus grande partie du travail de préparation sur le terrain. L’IIP a su profiter des liens personnels de MM. Perry et
Marmari, tandis que leur participation ajoutait
à la légitimité de la mission.
L’un des défis d’une telle mission consiste à choisir le bon ton, c’est-à-dire un ton diplomatique mais ferme, permettant d’effectuer un lobbying efficace auprès du représentant du gouvernement sur certains enjeux politiques délicats. Les participants de la mission de l’IIP ne visaient pas la confrontation, mais ils ont laissé entendre sans
équivoque que l’image internationale d’Israël serait ternie si le gouvernement continuait de restreindre la liberté des médias. À ceux qui se trouvent dans une telle situation, le directeur de l’IIP, Johann Fritz, recommande de « parler librement et clairement. Ne pas avoir peur.
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (ÉTUDE DE CAS)
Vous devez transmettre votre message de manière convaincante et ne pas vous laisser intimider ». Il ajoute, « Ne tentez pas de les adoucir. Allez droit au but. »
Il n’est pas facile d’obtenir des représentants du gouvernement qu’ils posent des gestes. À tout le moins, Löwstedt explique qu’il est important que vous sachiez exactement ce que vous attendez des représentants du gouvernement avant le début des rencontres.
Un autre défi consistait à s’assurer que les enjeux n’étaient pas uniquement d’intérêt international, mais également intérieurs.
« Nous avons aussi approché plusieurs joueurs locaux à ce sujet, soit l’État, le gouvernement, l’opposition, les institutions indépendantes, etc., pour provoquer un débat dans le pays, indique Löwstedt. Notre stratégie consistait à tenter de saturer les principales institutions du pays en traitant de ces enjeux. »
IMPACT
L’un des deux enjeux principaux ayant mené à l’organisation de la mission allait bientôt être résolu. L’IIP a publié un communiqué de presse le 1er avril 2003, soit le dernier jour de la mission, et en moins d’une semaine, les règles en matière de permis de travail pour les employés des médias étrangers ont été
éliminées.
« Nous croyons que cet aspect de la mission a été un succès complet et presque instantané, indique Löwstedt. Il est impossible de savoir hors de tout doute si la modification des règles en matière de permis de travail est le résultat direct de la mission, mais nous croyons que la mission a eu un grand impact. »
Par contre, le refus d’accorder des cartes de presse aux journalistes palestiniens n’a pas été renversé aussi rapidement. Le gouvernement israélien a refusé de modifier sa position. Puis, en avril 2004, la Cour suprême d’Israël a statué que les restrictions étaient illégales et que les journalistes palestiniens pouvaient obtenir des cartes si les vérifications de sécurité leur permettaient de travailler en Israël. Le gouvernement a interjeté appel de cette décision. (Le gouvernement peut interjeter appel auprès de la Cour suprême en Israël, mais une fois seulement.)
L’IIP a continué de suivre la situation et a
écrit au gouvernement israélien en mai pour protester contre son appel de la décision de la
Cour suprême. Finalement, le 5 août 2004, la
Cour a maintenu sa décision, que le gouvernement doit maintenant appliquer.
Alors que le jugement venait en réponse aux poursuites lancées par Reuters et Al-Jazeera concernant l’accréditation de leurs journalistes, l’IIP croit néanmoins que sa mission a
également permis de faire avancer le processus.
« La liberté de la presse en Israël et dans les territoires occupés est une question compliquée, indique Löwstedt. Il subsiste encore d’énormes problèmes. Nous considérons cependant que notre mission a connu un franc succès. »
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TROISIÈME PARTIE 3.8 LE LOBBYING (RESSOURCES)
LE LOBBYING – RESSOURCES
Democracy Center – Lobbying : Les bases http://www.democracyctr.org/ressources/lobbyi ng.html
Comment faire du lobbying lors de rencontres
intergouvernementales. Felix Dodds, Michael
Strauss. Publié par Stakeholder Forum, 2004.
http://www.unedforum.org/publications/books
/lobby.php
Human Rights Watch http://www.hrw.org/campaigns/
Campagne internationale contre les mines terrestres – Lobbying efficace http://www.icbl.org/ressources/campaignkit/lo bby.html
Fédération internationale des journalistes –
Campagne pour Gyorgy Gongadze
http://www.ifjgongadze.org/
Institut international de la presse – Missions
pour la liberté de la presse
http://www.freemedia.at/missions.htm
People for the Ethical Treatment of Animals –
Conseils en matière de lobbying
http://origin.www.animalactivist.com/actguide
9.asp
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TROISIÈME PARTIE 3.9 LES CONFÉRENCES DE PRESSE (BOÎTE À OUTILS)
Les conférences de presse
3
.9
BOÎTE À OUTILS
COMMENT ORGANISER UNE CONFÉRENCE DE PRESSE EFFICACE
C O N T E X T E
Les conférences de presse constituent une manière bien établie d’attirer l’attention sur votre campagne.
Certaines organisations ont su les utiliser fort efficacement pour s’attirer une importante couverture médiatique nationale et internationale. Elles consistent habituellement en une brève déclaration prononcée par un ou plusieurs conférenciers, qui répondent ensuite aux questions et qui accordent des entrevues pour assurer un suivi.
La conférence de presse peut s’avérer un moyen efficace de créer « un événement médiatique » et de transmettre le message de base de votre organisation à tous les médias en une seule fois. Elle fournit également l’occasion à votre organisation de rencontrer des journalistes et d’autres membres de l’auditoire et de créer des liens avec eux. Une annonce faite par une vedette vous assurera également une meilleure couverture médiatique.
PLANIFIER UNE CONFÉRENCE DE PRESSE
Les conférences de presse exigent des médias qu’ils fassent l’effort d’envoyer des journalistes ou des
équipes de télévision sur place. Évidemment, il faudra que l’événement en vaille la peine. Cela signifie que vous devrez livrer une bonne nouvelle qui sera mise en valeur par sa présentation lors d’une conférence de presse, ou une nouvelle que regretteront de rater les journalistes qui n’y assisteront pas. Les journalistes penseront d’abord
à ce qu’ils pourraient retirer de la conférence de presse, par rapport à ce qu’ils seront susceptibles de retirer d’un communiqué de presse ou d’une entrevue téléphonique.
Normalement, une conférence de presse est seulement justifiée si l’une ou l’autre des conditions suivantes sont remplies :
•
Une nouvelle originale ou importante sera annoncée.
•
Votre organisation profite de la participation d’une vedette – une personne laquelle s’intéressent les médias.
LISTE DE VÉRIFICATIONS
Accorder suffisamment de préavis
•
Donnez une semaine de préavis si possible, mais jamais moins de deux jours, afin que les personnes intéressées puissent inscrire l’événement à leur agenda.
•
Envoyez un avis aux médias indiquant la date, l’heure et l’endroit, le nom des personnes qui s’y exprimeront, le sujet ou thème de la conférence et le nom des personnes ressources à
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TROISIÈME PARTIE 3.9 LES CONFÉRENCES DE PRESSE (BOÎTE À OUTILS)
contacter pour de plus amples renseignements.
•
Appelez les journalistes pour vous assurer qu’ils ont pris connaissance de l’avis, pour les convaincre d’assister à la conférence de presse et pour vous donner une idée de nombre de journalistes qui seront présents.
Calendrier
•
Réfléchissez au meilleur moment pour attirer l’attention des médias.
•
Dans plusieurs pays, il semble que le meilleur moment pour tenir une conférence de presse soit tard en matinée (entre 10 h et 11 h) ou tôt l’après-midi (entre 14 h 30 et 15 h).
•
Débutez la conférence de presse à l’heure prévue.
Lieu de la conférence de presse
•
Le lieu choisi devra être facile d’accès.
•
Les journalistes s’y rendront-ils en automobile
? Auront-ils accès à un stationnement ?
•
Le lieu est-il facile à trouver ? Posez des affiches ou une bannière pour bien identifier l’endroit.
Vous assurer que le lieu choisi possède ce qui suit :
• suffisamment de places et un bon éclairage;
• des prises électriques (pour les équipes de télévision);
• un environnement sonore adéquat (bien isolé des bruits de l’extérieur comme le trafic, les téléphones, etc. Aurez-vous besoin d’un micro
?);
• un bon aménagement (où les gens vont-ils s’asseoir ? Où allez-vous installer un fond ? Y a-t-il assez d’espace pour présenter une exposition ? Y a-t-il une pièce séparée qui pourra servir à enregistrer des entrevues individuelles après la conférence de presse ?).
Accueillir les gens
•
Une personne de votre organisation, identifiée par un écusson, devrait accueillir les visiteurs, inscrire leur nom, les orienter et donner une bonne impression initiale.
•
Offrez des rafraîchissements.
•
Notez le nom de tous les visiteurs et assurezvous de leur fournir toutes les informations nécessaires (une copie du rapport, un cahier de presse ou de campagne contenant des renseignements de base et une copie du discours qui sera prononcé).
Choisir un président
Le président :
• présentera les conférenciers;
• expliquera les arrangements et les procédures
(par exemple, s’il y a possibilité de tenir des entrevues individuelles après la conférence de presse et qui contacter à ce sujet);
• gérera le flot des questions;
• répondra à certaines questions si c’est possible;
• assurera la clôture de la conférence.
Limiter la composition du panel et la longueur des discours
•
En règle générale, présentez deux conférenciers, trois au plus, à qui vous accorderez cinq minutes chacun s’il y a plus d’un conférencier.
•
Le plus il y a de conférenciers, le plus il y aura de messages et le moins de contrôle vous exercerez sur le message que les journalistes recevront.
IFEX 123
La conférence de presse peut s’avérer un moyen efficace de créer « un événement médiatique » et de transmettre le message de base de votre organisation à tous les médias en une seule fois.
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TROISIÈME PARTIE 3.9 LES CONFÉRENCES DE PRESSE (BOÎTE À OUTILS)
•
Les longs discours peuvent être imprimés et distribués aux médias.
•
Lisez seulement les passages clés que vous voulez voir cités par les médias.
•
Les journalistes sont des personnes occupées, qui s’ennuient facilement et qui peuvent avoir tendance à interpréter la nouvelle par le biais de leurs propres questions et des entrevues individuelles qu’ils effectuent après la conférence.
Distribuer une copie de la déclaration principale au début de la conférence
Cela permettra aux journalistes de suivre plus facilement ce qui se dit et fera en sorte que la déclaration de votre groupe sera rapportée plus exactement.
•
Indiquez « Seul le discours prononcé fait foi » sur la déclaration, puisque les discours ne suivent jamais exactement le texte préparé.
Communiqué de presse de suivi
•
Préparez-le à l’avance et présentez-y les meilleures citations tirées de la conférence, celles qui seront le plus susceptibles d’être reprises dans les médias. Le communiqué de presse devrait être distribué auprès des médias qui n’ont pas assisté à la conférence de presse.
Couvrir votre propre conférence de presse
•
Assurez-vous d’avoir un photographe sur place et effectuez un enregistrement audio de la conférence.
•
Offrez des photos aux médias et écrivez un article pour vos propres publications.
Autres conseils
•
Les différents types de médias ont des besoins différents. La radio et la télévision désirent obtenir leurs propres entrevues et utiliseront rarement des séquences ou des enregistrements tirés de la conférence principale. Assurez-vous de prévoir suffisamment de temps pour ces entrevues.
•
Une conférence de presse conjointe peut être organisée avec d’autres groupes si vous travaillez ensemble sur une même action. Les visées des autres organisations peuvent être plus étendues que les vôtres, c’est pourquoi vous devrez clairement signaler aux journalistes que chacun des groupes participant à la conférence de presse a des objectifs différents.
•
Un recours modéré et circonspect à la conférence de presse est préférable. Vous donnerez ainsi l’impression que votre conférence de presse est un événement qui est digne d’être couvert.
Budget
En préparant votre conférence de presse, vous devrez prévoir au budget les montants correspondant aux éléments suivants :
• le local dans lequel a lieu la conférence;
• l’équipement audio et un technicien;
• le papier et les autres fournitures de bureau;
• la diffusion du communiqué de presse;
• les rafraîchissements;
• les frais de déplacement et d’hébergement.
Circonstances dans lesquelles une conférence de presse peut s’avérer inefficace
Dans certains régimes autoritaires où les médias sont fortement contrôlés par l’État, les conférences de presse peuvent ne pas attirer l’attention de manière très efficace. Les autorités peuvent ordonner aux journalistes de ne pas assister à votre conférence de presse, ce qui limitera grandement la couverture médiatique de votre événement. Pis encore, les
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TROISIÈME PARTIE 3.9 LES CONFÉRENCES DE PRESSE (BOÎTE À OUTILS)
autorités peuvent exercer des pressions sur les médias pour déformer le message de votre conférence de presse et ternir l’image de votre organisation.
Dans ces circonstances, il peut être plus efficace de faire parvenir votre message aux journalistes étrangers installés dans votre pays.
LE COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Le communiqué de presse est un moyen couramment employé pour diffuser des nouvelles aux médias. Il peut être utilisé pour annoncer votre conférence de presse et remplir les fonctions suivantes :
•
Annoncer à l‚avance un événement que vous planifiez.
•
Annoncer le lancement d‚une campagne.
•
Résumer la position de votre organisation face
à certains événements.
•
Attirer l‚attention sur l‚état des droits de la personne.
•
Fournir des renseignements de base.
•
Attirer l‚attention sur un nouveau rapport et en donner les détails.
•
Faciliter la tâche aux journalistes pour s‚assurer qu‚ils communiquent la nouvelle et que les données dont ils disposent sont exactes.
Conseils sur les communiqués de presse
•
Faites en sorte qu‚ils soient courts, simples et vifs. Ces communiqués devraient idéalement
être rédigés sur une seule page, deux au plus.
•
Assurez-vous que les deux premiers paragraphes répondent aux interrogations suivantes : Qui ? Quoi ? Où ? Quand ?
Pourquoi ?
•
Mettez l‚en-tête en majuscules ou en caractères gras pour capter l‚intérêt.
•
Faites des phrases et des paragraphes courts.
•
Rendez la première phrase intéressante. Les journalistes ne continueront pas à lire si vous ne captez pas leur attention dès le début.
•
Tentez d‚inclure une citation pertinente d‚un représentant de votre organisation, avec des mots forts et des objectifs clairs. Les journalistes peuvent reformuler un communiqué de presse, mais ils ne changeront pas une citation. Vérifiez toujours l‚exactitude d‚une citation avec la personne concernée avant de publier le communiqué.
•
Imprimez toujours vos communiqués de presse sur du papier à en-tête. L‚allure officielle et professionnelle du communiqué ajoutera à sa crédibilité et permettra aux journalistes de savoir tout de suite d‚où il provient.
•
Incluez toujours dans le communiqué le nom d‚au moins une personne-ressource avec ses coordonnées de jour et de soir. Assurez-vous qu‚il sera possible de joindre cette personne à ces numéros aux heures indiquées.
•
Tapez tout au clavier, n‚écrivez rien à la main.
Assurez-vous de ne faire aucune faute d‚orthographe.
•
Indiquez toujours la date sur vos communiqués de presse. Indiquez clairement
à qui il est adressé (par exemple, au directeur de l‚information) et l‚heure de l‚embargo. S‚il n‚y a pas d‚heure d‚embargo, indiquez « Pour diffusion immédiate ».
Il est important d’assurer un suivi à vos communiqués de presse. Que vous postiez le communiqué ou que vous l‚envoyiez par télécopieur, vous ne saurez pas s‚il a atteint son destinataire à moins de vérifier. Il n‚y a qu‚une
IFEX 126
façon de vous en assurer et de savoir si le journaliste est intéressé, c‚est de parler à la personne directement.
La plupart du temps, cela suppose un coup de téléphone. Soyez bien préparé lorsque vous faites cet appel. Vous pourriez devoir résumer le contenu de votre communiqué de presse en deux ou trois phrases et ce sera l‚occasion pour vous de convaincre la personne au bout du fil.
Quelle est la perspective, pourquoi s‚agit-il d‚une nouvelle, pourquoi cela devrait-il intéresser le public ? Notez ces différents aspects en quelques points concis. Un agent des affectations occupé n‚aura que quelques instants à vous consacrer et pendant ces quelques instants il devra décider si votre conférence de presse en vaut la peine, alors soyez bien préparé.
RÉFÉRENCES
©Publications d’Amnistie internationale.
Guide de campagne d’Amnistie internationale,
2001. 1, rue Easton, Londres WC1X 0DW,
Royaume-Uni. http://www.amnesty.org
TROISIÈME PARTIE 3.9 LES CONFÉRENCES DE PRESSE (BOÎTE À OUTILS)
IFEX 127
TROISIÈME PARTIE 3.9 LES CONFÉRENCES DE PRESSE (ÉTUDE DE CAS)
Conférences de presse
ÉTUDE DE CAS
CONFÉRENCES DE PRESSE
Le rapport annuel du Comité pour la protection des journalistes
C O N T E X T E
Chaque année en mars, le Comité pour la protection des journalistes (Committee to Protect Journalists,
CPJ installé à New York) lance, à l’échelle mondiale, son rapport annuel sur la liberté de la presse, Attacks on the
Press, lors d’une conférence de presse qui a lieu à Washington, D.C.
« L’organisation de la conférence de presse constitue un réel défi, explique l’éditrice déléguée du CPJ, Amanda
Watson-Boles. Mais nous en arrivons toujours à la conclusion que l’événement même et le lieu de sa tenue présentent des avantages évidents pour le CPJ et son travail de représentation et de défense des journalistes. »
3
.9
« Le lieu, le lieu »
Le CPJ organise sa conférence de presse dans la capitale des États-Unis, où de nombreux médias possèdent des bureaux nationaux ou américains.
La visibilité ainsi accordée à l’événement et à l’analyse du rapport annuel du CPJ leur confère de meilleures chances d’être médiatisés. Le fait de se trouver dans la capitale des États-Unis permet aussi au personnel du CPJ de rencontrer de nombreux journalistes installés à
Washington, ainsi que des membres de différents gouvernements, tant dans les organismes des États-Unis que dans les ambassades étrangères.
Au début de l’année, et parfois plus tôt, le coordonnateur des communications du CPJ réserve une salle au National Press Club (NPC) pour y tenir la conférence. Cette réservation anticipée est rendue nécessaire par l’emploi du temps chargé du NPC. Environ un mois avant l’événement, le personnel commence à planifier l’événement en effectuant des réservations de voyage et d’hébergement, ainsi qu’en planifiant des rencontres.
Les éléments que le personnel du CPJ prend en considération dans son budget comprennent notamment :
• le lieu de l’événement (ce qui comprend la location de la salle, l’équipement audio et les techniciens, la distribution du communiqué de presse et un déjeuner léger pour les participants);
• les coûts liés au voyage et à l’hébergement;
• les dépenses accessoires.
IFEX 128
TROISIÈME PARTIE 3.9 LES CONFÉRENCES DE PRESSE (ÉTUDE DE CAS)
L’organisation de la conférence comprend la coordination des emplois du temps de plusieurs personnes. Le chef de bureau du CPJ travaille de concert avec chacun des coordonnateurs de programmes régionaux pour effectuer les préparatifs de voyage et réserver les chambres d’hôtel. Le coordonnateur des communications s’occupe de la logistique de la conférence même, en collaboration avec le directeur exécutif et le directeur adjoint du CPJ. Chacun des coordonnateurs de programmes régionaux organise des rencontres ou des entrevues avant ou après la conférence de presse.
Rôle de l’équipe éditoriale
Dans la semaine qui précède la conférence, l’équipe éditoriale de New York complète le communiqué de presse de la conférence et
LE CPJ DOIT S’EFFORCER DE FAIRE
COMPRENDRE LA PERTINENCE DE NOTRE
CONFÉRENCE DE PRESSE ET DES ENJEUX
QUE NOUS PRÉSENTONS.
aide les coordonnateurs de programmes régionaux à mettre au point leurs remarques.
Des citations tirées de la conférence de presse sont ajoutées aux communiqués de presse dans des espaces prédéterminés, une fois que l’événement a eu lieu.
L’équipe éditoriale est également chargée de faire parvenir des copies du livre à Washington
à temps pour la conférence, afin de pouvoir en faire la distribution pendant l’événement.
Enfin, les éditeurs travaillent auprès du coordonnateur des communications et du webmestre du CPJ pour réviser et publier le communiqué de la conférence de presse dès que celle-ci a eu lieu.
DÉFIS
Le CPJ tient cette conférence de presse depuis plusieurs années; il devient donc de plus en plus facile de l’organiser. Chaque année, à la fin de l’événement, l’organisme trouve qu’il est fort utile de tenir une réunion d’évaluation dans le but de déterminer ce qui pourra être fait différemment à l’avenir, afin d’éliminer les problèmes l’année suivante.
« Le plus grand défi consiste à convaincre les gens d’assister à la conférence de presse même, dit Watson-Boles. Avec les élections présidentielles et la guerre en Irak qui dominent les manchettes, le CPJ doit s’efforcer de faire comprendre la pertinence de notre conférence de presse et des enjeux que nous présentons. »
Relier le travail du CPJ aux événements marquants de l’actualité
Une bonne façon de parvenir à cette fin consiste à établir des liens entre les événements majeurs de l’actualité et le travail du CPJ. Par exemple, dans le passé, le CPJ s’est attaché à rendre compte des dangers qui menacent les journalistes qui couvrent la guerre en Irak, ou
à étudier la façon dont les attaques du 11 septembre 2001 ont affecté la liberté de la presse à l’échelle planétaire.
Entretenir les contacts
« Un autre moyen pour nous d’assurer une présence importante à la conférence de presse consiste à continuellement entretenir nos contacts au sein des médias et d’en établir de nouveaux », indique Watson-Boles. Le CPJ y parvient en rencontrant des journalistes à
Washington, comme par exemple les influents rédacteurs en chef du Washington Post ou du bureau local du New York Times.
IFEX 129
TROISIÈME PARTIE 3.9 LES CONFÉRENCES DE PRESSE (ÉTUDE DE CAS)
Lors de la conférence de presse même, le défi consiste à faire en sorte que les conférenciers seront concis et s’en tiendront à leur message. La meilleure façon de régler ce problème est d’écrire les remarques et de faire une répétition bien avant l’événement.
IMPACT
Le CPJ mesure l’impact de sa conférence de presse de plusieurs façons, parmi lesquelles on
évaluera le nombre de bulletins de nouvelles traitant de la conférence; les réactions qu’elle a pu susciter dans certains gouvernements (par exemple, les autorités de l’Érythrée ont réagi chaque fois que le CPJ a condamné l’état de la liberté de la presse dans ce pays); et les réactions généralement positives de journalistes qui assistent à la conférence de presse.
Une plus grande couverture médiatique peut aussi s’avérer particulièrement utile pour certains pays qui, habituellement, reçoivent peu d’attention de la part de la presse internationale. Par exemple, lors de la conférence de presse en 2002, le programme africain du CPJ avait réussi à susciter un intérêt significatif de la part des médias au sujet de la crise entourant la liberté de presse en Érythrée, où le gouvernement avait obligé la fermeture de la presse privée du pays en septembre 2001, évitant ainsi d’attirer l’attention mondiale sur ses agissements pendant que le monde entier était tourné vers les attaques du 11 septembre.
En plus de la conférence de presse, le personnel du CPJ confirme le fait que les rencontres et les entrevues avec des journalistes et des représentants des États-Unis ou des gouvernements étrangers constituent
également des façons utiles de transmettre le message du CPJ à un plus vaste public.
IFEX 130
TROISIÈME PARTIE 3.9 LES CONFÉRENCES DE PRESSE (RESSOURCES)
CONFÉRENCES DE PRESSE – RESSOURCES
Amnistie internationale : Guide de campagne
d’Amnistie internationale, 2001 (disponible sous forme de document PDF à l’adresse http://web.amnesty.org/pages/campaigningmanual-eng)
BBC iCan http://www.bbc.co.uk/dna/ican/A1935920
Fenton Communications - Now Hear This:
Effective Advocacy Communication
http://www.fenton.com/ressources/nht_report.
asp
Human Rights Connection http://www.hrconnection.org/hrc/overview/
Making the Most of the Media: Tools for Human
Rights Groups Worldwide, Center for
Sustainable Human Rights Action, 2001
Oxfam - Make Trade Fair Campaign Toolkit http://www.maketradefair.com/en/
People for the Ethical Treatment of Animals -
Working with the Media
http://origin.www.animalactivist.com/actguide
11.asp
SPIN Works: A Media Guidebook for
Grassroots Organizers, the SPIN Project
IFEX 131
TROISIÈME PARTIE 3.10 CAMPAGNES ÉPISTOLAIRES (BOÎTE À OUTILS)
Campagnes
épistolaires
3
.10
BOÎTE À OUTILS
COMMENT L’ÉCRITURE DE LETTRES PEUT RENFORCER UNE CAMPAGNE
C O N T E X T E
Les campagnes épistolaires sont couramment utilisées pour défendre les droits de la personne et ce, depuis des dizaines d’années. Ces campagnes sont simples à organiser et proposent aux gens une manière facile de participer et d’agir. Les messages des campagnes peuvent viser différents publics dans le pays d’origine comme
à l’étranger. Ces campagnes tirent parti du fonctionnement de la bureaucratie gouvernementale et, dans plusieurs pays, elles ont l’avantage de ne pas coûter cher. Elles sont souples et personnalisées. Elles fouettent le moral des troupes, éduquent et renforcent l’image de mouvement de masse de votre action.
À QUI DEVRIEZ-VOUS ADRESSER VOS LETTRES ?
La lettre de protestation type est adressée à un représentant en particulier du gouvernement d’un autre pays. Elle soulève poliment une question et demande qu’une action précise soit entreprise. Cependant, la campagne épistolaire est une technique si souple qu’elle peut être utilisée de bien des façons. Ainsi, les lettres peuvent être envoyées aux personnes suivantes :
•
Aux dignitaires locaux, aux commandants de l’armée et aux autres individus qui sont directement responsables des dossiers de violations des droits de la personne, afin d’exercer une pression et faire valoir vos inquiétudes, ainsi que les encourager à réfléchir
à la question des droits de la personne et à agir en ce sens.
•
Aux journaux et aux autres médias pour les inviter à accroître leur couverture médiatique d’un pays particulier, des affaires étrangères ou des droits de la personne en général.
•
Aux partisans des droits de la personne pour recueillir des fonds.
•
Aux ambassades, comme moyen efficace de transmettre le message aux gouvernements ciblés.
•
Aux représentants gouvernementaux, pour leur fournir la preuve du bien-fondé de vos inquiétudes et pour qu’ils puissent utiliser ces preuves pour exiger des changements.
•
Aux organismes non gouvernementaux (ONG) des droits de la personne dans certains pays ciblés, pour les soutenir moralement et les encourager à poursuivre leur travail.
IFEX 132
TROISIÈME PARTIE 3.10 CAMPAGNES ÉPISTOLAIRES (BOÎTE À OUTILS)
•
Aux prisonniers et à leurs familles, comme moyen de remonter leur moral et leur donner l’occasion de communiquer avec le monde extérieur.
Organiser une action épistolaire
Une façon populaire d’accroître le volume et la vitesse d’une campagne épistolaire consiste à utiliser des groupes et des réseaux d’écriture.
Des groupes de bénévoles se rassemblent sur une base hebdomadaire ou mensuelle pour
écrire ou signer des lettres, ou éventuellement installer des stands publics pour recueillir davantage d’appuis. À l’aide de l’Internet, vous pouvez également constituer de vastes réseaux d’écrivains installés dans des villes différentes.
Vous pouvez également envoyer des informations traitant d’un cas particulier à l’aide de listes d’envois électroniques et demander à des bénévoles de rédiger des lettres ou simplement signer et envoyer des lettres déjà rédigées.
Les questions suivantes pourront vous aider
à planifier une action épistolaire :
•
Combien de lettres aimeriez-vous envoyer et en combien de temps ?
•
Les lettres seront-elles susceptibles d’être plus efficaces si les personnes mentionnent qu’elles sont membres de votre organisation ?
•
Des lettres provenant de certains secteurs de la communauté auront-elles plus d’impact ?
•
À quel point les lettres envoyées aux différents dirigeants doivent-elles varier dans leur contenu ?
•
Est-il plus important d’envoyer un grand nombre de lettres, ou moins de lettres plus personnalisées ? S’il est préférable que les lettres soient de nature plus personnelle, alors il est préférable de ne pas fournir de lettre type.
Quels sont les éléments requis ?
Les groupes doivent disposer de suffisamment de renseignements pour comprendre ce que l’on attend d’eux et ce qu’ils doivent faire.
Cela signifie habituellement que l’on doit leur fournir les éléments suivants :
• des renseignements de base sur l’enjeu, le pays et le cas particulier, ainsi qu’un résumé de votre stratégie;
• certains points particuliers qui peuvent être soulevés pour signifier vos inquiétudes, possiblement sous la forme de paragraphes interchangeables;
• vos recommandations;
• les adresses des destinataires, leurs titres et les salutations d’usage;
• des conseils sur le nombre de lettres à envoyer, les adresses les plus importantes, la longueur idéale des lettres, le nombre de points à soulever dans chaque lettre, etc.
Les antécédents, les directives et les points importants à soulever dans une seule lettre ne devraient pas dépasser une page ou deux. Les
éléments précis que vous devrez inclure dépendront du fait que la lettre s’inscrit ou non dans une campagne plus vaste. Si votre groupe reçoit des renseignements de base sur le pays ciblé et la stratégie choisie pour aborder les enjeux, alors vous serez à même de décider quels enjeux mettre en lumière ainsi que la meilleure façon d’assurer que vos lettres auront un impact.
Nota : Si vous joignez une ébauche de lettre, les membres seront susceptibles de
IFEX 133
Il était évident que ces lettres avaient consolé et encouragé
Gallardo pendant son séjour en prison et qu’elles avaient permis à sa famille d’organiser une campagne dont les résultats étaient très loin d’être assurés d’avance.
TROISIÈME PARTIE 3.10 CAMPAGNES ÉPISTOLAIRES (BOÎTE À OUTILS)
simplement la recopier et vous perdrez ainsi les avantages liés aux lettres personnalisées.
LES TYPES DE LETTRES
Lettres à grand impact
Une lettre rédigée par un ancien président, une vedette des sports, un chanteur populaire, une figure importante du monde des affaires, un universitaire, un juge ou un général pourrait avoir plus d’impact sur le destinataire qu’une lettre de vos membres ou d’un membre du public. Une lettre conjointe signée par toutes ces personnes ou par certaines d’entre elles peut
également avoir un impact significatif. Lorsque vous décidez qui sera susceptible d’avoir le plus d’influence, vous devrez considérer l’enjeu dont il est question, la population du pays visé et tout lien particulier entre le pays visé et votre propre pays.
Il peut être tentant d’approcher les mêmes personnes pour obtenir des lettres à grand impact, ou de demander l’appui de personnalités qui se sont déjà prononcées en faveur des droits de la personne. Cependant, l’impact d’une lettre peut dépendre en partie du fait qu’elle aura été écrite par une personnalité que l’on n’associe pas habituellement à la défense des droits de la personne – ce qui illustre symboliquement l’étendue de l’intérêt porté à une question ou unecause particulière.
La lettre ouverte
•
S’il s’agit d’une lettre ouverte, une copie pourra être envoyée aux lettres au rédacteur en chef dans les journaux.
•
Le fait de la rendre publique aidera à renforcer l’image de votre organisation dans votre milieu en tant qu’organisation respectée, accroissant ainsi son influence.
•
Elle peut aider à obtenir l’appui d’autres groupes.
•
Elle peut servir de point focal pour d’autres formes de publicité, surtout si le signataire est disposé à s’exprimer sur la question devant les médias et qu’il est en mesure de le faire.
•
Il peut être possible d’organiser une séance de
« signatures publiques » pour lancer un
événement auquel seront conviés les médias.
•
Des copies de la lettre peuvent être envoyées à l’ambassade du pays visé et à votre propre ministère des Affaires étrangères.
Lettres provenant de secteurs particuliers de la communauté
Des lettres provenant de différents secteurs de votre communauté sont plus susceptibles d’influencer une situation que ne le sont des lettres générales envoyées par des individus.
Les avocats, par exemple, sont respectés dans plusieurs milieux et ainsi, une lettre au nom des avocats sera vraisemblablement efficace. Si les inquiétudes sont dirigées vers les militaires, ceux-ci seront plus susceptibles d’écouter des confrères militaires professionnels.
La lettre personnelle
Une lettre personnelle, plutôt qu’un appel général, sera sans doute plus susceptible de retenir l’attention des représentants du gouvernement. Cela rend également le recours
à une réponse standardisée plus difficile. Plus les lettres seront détaillées, personnalisées et ciblées, plus elles seront efficaces. Des renseignements personnels peuvent indiquer la profession de l’auteur, si la personne a visité le pays, ou fournir des détails sur le milieu de l’auteur pour mettre en valeur la nature personnelle de l’appel.
IFEX 135
TROISIÈME PARTIE 3.10 CAMPAGNES ÉPISTOLAIRES (BOÎTE À OUTILS)
Appels de masse
1) La lettre rédigée à l’avance
L’une des façons les plus simples de générer un grand nombre de lettres, c’est de les rédiger à l’avance. Un texte standard simple peut être rédigé, nécessitant seulement l’ajout d’une signature, l’adresse de retour, une enveloppe et un timbre. Cet échantillon pourra ensuite être copié et envoyé à vos membres à peu de frais.
Il est probable que les premières parmi ces lettres rédigées à l’avance qui se retrouveront sur le bureau du représentant du gouvernement visé auront le plus d’impact, puisque ce dernier réalisera rapidement que le contenu des lettres suivantes est semblable et qu’elles font toutes partie d’une même campagne. L’impact de ce genre de lettres dépendra ensuite essentiellement de leur nombre – le nombre total de lettres indiquant le degré d’inquiétude face au problème. La distribution de lettres à signer et à envoyer permet également de sensibiliser le public et peut constituer la première étape de la participation de certains individus à la défense des droits de la personne.
Certaines organisations installent des stands publics – présentant des lettres déjà rédigées avec des enveloppes affranchies – et demandent aux gens de signer une lettre, d’ajouter une adresse de retour et de faire un don pour couvrir les frais postaux. Cette façon de faire a l’avantage de garantir que les lettres seront bel et bien envoyées. D’autres groupes choisissent de distribuer des lettres plus librement et en plus grand nombre lors de rencontres publiques, dans les lieux de travail, etc. Cette méthode favorise une plus grande distribution, mais n’assure pas que les lettres seront postées.
2) Les cartes postales
Les cartes postales imprimées à l’avance pour la campagne constituent une autre façon de faire connaître vos inquiétudes en matière de droits de la personne et de vous assurer que votre message se démarque pendant son trajet à travers le système postal.
Les cartes postales peuvent être adressées aux représentants gouvernementaux. Elles peuvent également être envoyées aux organisations humanitaires en signe de solidarité, pour les encourager dans leur travail et stimuler les membres.
L’une des faces des cartes peut présenter à peu près n’importe quoi, qu’il s’agisse d’une image, d’un message de campagne très direct, ou d’autre chose. L’autre face pourra être préadressée et présenter un résumé de vos préoccupations dans une langue pertinente, de manière à exiger seulement une signature et un timbre. Il s’agit également d’une manière efficace de donner une activité pratique à faire à chaque membre qui désire appuyer une campagne. Des séries de cartes postales peuvent
être incluses dans un bulletin ou dans toute autre correspondance envoyée aux membres.
CERTAINS CAS DANS LESQUELS LES CAMPAGNES
ÉPISTOLAIRES PEUVENT NE PAS ÊTRE APPROPRIÉES
OU EFFICACES
•
Certaines cibles demeurent très indifférentes face à l’inquiétude internationale. Par exemple, un chef de gouvernement a déclaré, après avoir appris qu’un grand nombre de lettres lui avait été envoyé d’Allemagne, « Je ne me souviens pas avoir compté des
Allemands parmi mes électeurs. »
IFEX 136
•
L’envoi en masse de lettres peut s’avérer contre-productif si le système postal du pays visé est inefficace.
•
Les lettres ne sont pas très utiles dans les situations où règne le chaos ou une crise et où le gouvernement est en voie de s’effondrer.
•
Les campagnes épistolaires peuvent s’avérer inappropriées là où l’analphabétisme est important et où les coûts postaux sont très
élevés.
RÉFÉRENCES
©Publications d’Amnistie internationale.
Guide de campagne d’Amnistie internationale,
2001. 1, rue Easton, Londres WC1X 0DW,
Royaume-Uni. http://www.amnesty.org
TROISIÈME PARTIE 3.10 CAMPAGNES ÉPISTOLAIRES (BOÎTE À OUTILS)
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TROISIÈME PARTIE 3.10 CAMPAGNES ÉPISTOLAIRES (ÉTUDE DE CAS)
Les campagnes
épistolaires
3
.10
ÉTUDE DE CAS
LE PEN INTERNATIONAL ET SA CAMPAGNE EN FAVEUR DU GÉNÉRAL GALLARDO
C O N T E X T E
Le brigadier général mexicain Jose Francisco Gallardo Rodriguez a été arrêté en 1993, une semaine après que le magazine mexicain Forum eut publié des extraits de son mémoire de maîtrise intitulé « La nécessité d’un ombudsman militaire au Mexique ». Gallardo avait plaidé en faveur d’un ombudsman civil indépendant pour enquêter sur les cas d’abus des droits de la personne commis par l’armée. En effet, depuis des dizaines d’années, le climat d’impunité régnant au Mexique avait permis aux personnes responsables de centaines de violations des droits de la personne, parmi lesquelles on compte des disparitions et des meurtres, d’échapper à la justice.
En réponse à ses écrits, les autorités militaires ont accusé Gallardo de malversation, de fraude et de dommages causés à des biens appartenant à l’armée – des accusations dont il avait été libéré quatre années auparavant. On offrait au général d’être libéré s’il admettait sa « culpabilité », ce qu’il refusa de faire. Plus tard, en mars et avril 1998,
Gallardo a été condamné à près de 29 ans d’emprisonnement à la suite d’accusations de « vol » et de « recherche illégale de profit ».
En 1996, la Commission interaméricaine des droits de l’homme (IACHR) étudiait le dossier et arrivait à la conclusion que Gallardo avait été emprisonné « sans raison ni justification juridique ». Plus tard, le Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire déclarait que la détention du général était arbitraire.
Frustrée face au refus du gouvernement mexicain de se plier à ses recommandations de 1996 et de plus en plus préoccupée par la sécurité de Gallardo en prison, la IACHR a demandé à la Cour interaméricaine des droits de l’homme de se saisir de la cause de Gallardo. La Cour a accepté la cause et a ordonné au gouvernement mexicain de se présenter à une audience à San Jose, au Costa Rica, le 18 février 2002. Onze jours avant cette date, le gouvernement nouvellement élu de Vicente Fox annonçait la libération de M. Gallardo.
Le brigadier général Jose Francisco Gallardo
Rodriguez a été arrêté en 1993 en représailles à ses écrits, qui réclamaient des réformes en matière de droits de la personne au sein des forces armées mexicaines. La campagne visant à s’opposer aux accusations et à assurer la libération de Gallardo a été entreprise par le
PEN international, Amnistie internationale et d’autres organismes, aboutissant à la libération de Gallardo en 2002.
Le PEN international est une association mondiale d’écrivains, constituée de 134 centres du PEN dans 96 pays. Son Comité des écrivains emprisonnés (WiPC), fondé en 1961, utilise les campagnes épistolaires comme moyen de pression privilégié pour toutes ses campagnes
IFEX 138
TROISIÈME PARTIE 3.10 CAMPAGNES ÉPISTOLAIRES (ÉTUDE DE CAS)
importantes. Avec les années, le PEN international a réalisé que les campagnes
épistolaires sont efficaces dans les situations suivantes :
• comme moyen d’inciter les gouvernements à changer leur position;
• comme activité principale parmi d’autres, telles que les visites à l’ambassade, les missions, les pétitions et le contact direct avec les familles;
• comme outil publicitaire auprès des médias.
LE SOUTIEN MORAL QUE L’ON APPORTE
À LA FAMILLE EST EXTRÊMEMENT
IMPORTANT ET AIDE À LUI DONNER LE
COURAGE NÉCESSAIRE POUR
POURSUIVRE LA LUTTE.
À titre d’association d’écrivains, le PEN a réalisé que l’écriture de lettres est le meilleur moyen d’utiliser les aptitudes de ses membres dans le cadre d’une campagne. Parmi les signataires de lettres figurent des écrivains
éminents, ce qui contribue à susciter l’intérêt des médias et accorde à l’effort un impact plus important. Parmi les écrivains ayant signifié leur appui à Gallardo, on note Gabriel García
Márquez, Mario Vargas Llosa et Fernando
Savater.
Mise en œuvre de la campagne épistolaire
Avant de décider de lancer une campagne, le
PEN international recueille des renseignements sur le cas. Si l’organisation décide de lancer une campagne, le secrétariat international rédige un document de base résumant le cas, avec des actions recommandées pour guider l’écriture des lettres et les autres activités. Le secrétariat contacte également par courriel les centres du
PEN à travers le monde pour demander aux membres s’ils sont intéressés à participer à l’action en adoptant l’écrivain à titre de membre honorifique.
Les centres du PEN qui accordent à un
écrivain le titre de membre honorifique forment ensuite un réseau. Dans le cas de
Gallardo, plusieurs centres l’ont nommé membre honorifique. Ils l’ont contacté directement ainsi que sa famille, ce qui a permis de partager les nouvelles les plus récentes, de montrer leur solidarité et de soutenir la famille. « Le soutien moral que l’on apporte à la famille est extrêmement important et aide à lui donner le courage nécessaire pour poursuivre la lutte, indique la directrice de programme du WiPC, Sara
Whyatt. Les membres de la famille souffrent souvent autant que la personne emprisonnée. »
Les actions sont entreprises à des moments clés, comme avant une audience d’appel, lorsque les nouvelles font état de problèmes dans les prisons, ou à l’occasion d’anniversaires. Ces actions supposent un ensemble plus large de centres du PEN actifs au sein du réseau régional (quelque 20 centres hispanophones, surtout dans les Amériques) ou le Réseau d’Action Rapide, qui rassemble les 50 membres, en plus d’autres individus et organismes. Pendant ses neuf années d’incarcération, plusieurs actions du Réseau d’Action Rapide et régionales ont appuyé la cause de Gallardo.
Pendant cette période, le PEN a envoyé des lettres à un grand nombre de destinataires, soit le gouvernement mexicain (avec certains
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TROISIÈME PARTIE 3.10 CAMPAGNES ÉPISTOLAIRES (ÉTUDE DE CAS)
résultats), la Commission mexicaine des droits de la personne (avec de bons résultats), les médias mexicains (qui ont bien couvert la cause), les médias étrangers, les ambassades mexicaines à l’étranger, différents ministères des affaires étrangères, l’Organisation des États américains (OEA), ainsi que plusieurs rapporteurs de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies.
DANS LA MAJORITÉ DES CAUSES
DONT NOUS NOUS OCCUPONS, LES
PERSONNES SONT RELÂCHÉES
PLUS TÔT QU’ELLES NE L’AURAIENT
ÉTÉ AUTREMENT.
entrepris une mission au Mexique pour enquêter et attirer l’attention sur le cas.
RESSOURCES DE LA CAMPAGNE
La campagne en faveur de la libération de
Gallardo faisait partie des activités principales du PEN et n’a pas occasionné de frais supplémentaires pour l’organisation.
Le PEN international dispose des services d’un recherchiste pour couvrir les Amériques et l’Afrique. Ce dernier était chargé de rassembler les données liées à la cause de
Gallardo, de rédiger des documents de campagne et de surveiller les activités du centre du PEN. Ce recherchiste travaille sous la supervision du directeur de programme.
En 1996, Gallardo était l’une des cinq personnes à l’honneur lors de la Journée internationale des écrivains emprisonnés du
PEN, un événement annuel qui vise à stimuler les actions épistolaires à grande échelle, à mettre en lumière des cas précis et à augmenter le nombre de ses membres. Le réseau des Amériques du PEN a également
DÉFIS
« Le manque de réponse directe des gouvernements à nos lettres peut être frustrant
», affirme Whyatt. Il n’existe pas de remède magique à cette frustration, mais Whyatt indique que « le fait que le gouvernement ne répond pas aux lettres ne veut pas dire qu’il ne les lit pas ». Il y a déjà eu des cas où elle a rencontré des autorités qui n’avaient jamais répondu à ses lettres, mais il était clair qu’elles les avaient lues et qu’elles les avaient prises en considération.
Whyatt ajoute que le manque de réponse directe « ne semble pas décourager nos membres ». Bien que l’on ne constate pas nécessairement d’impact immédiat à la suite d’une campagne épistolaire, certaines preuves indiquent qu’elles ont un effet bien réel.
« Dans la majorité des causes dont nous nous occupons, les personnes sont relâchées plus tôt qu’elles ne l’auraient été autrement », indique
Whyatt. Elle ajoute qu’en 2003, 40 p. 100 des cas pour lesquels le PEN a émis des alertes à travers le Réseau d’Action Rapide se sont soldés par des « résultats positifs ». Il n’est cependant pas possible d’affirmer hors de tout doute que ces résultats sont le fruit des campagnes épistolaires, mais, encore selon
Whyatt, l’exercice « n’est certainement pas vain ».
Whyatt remarque que la participation à des campagnes épistolaires parmi les membres du
PEN a tendance à être plus importante lorsqu’il s’agit d’écrivains, de femmes et de certains pays, qui captent l’intérêt plus que d’autres – par exemple, Cuba semble susciter plus d’intérêt que la Chine.
IFEX 140
TROISIÈME PARTIE 3.10 CAMPAGNES ÉPISTOLAIRES (ÉTUDE DE CAS)
L’un des défis à surmonter dans la cause de
Gallardo était son statut de militaire, qui d’emblée n’aidait pas à encourager la participation. « Le fait que Gallardo était un général dans l’armée et non un écrivain exigeait que l’on expose clairement les raisons pour lesquelles nous défendions sa cause », affirme
Whyatt. Elle indique que le PEN s’intéresse à
Whyatt ajoute qu’il existe « une certaine antipathie à l’égard des généraux de l’armée », ce qui rendait d’autant plus important pour le
PEN international d’expliquer soigneusement la cause à ses membres.
La complexité de cette cause constituait un défi supplémentaire, puisque le tribunal chargé de la cause était un tribunal militaire et que les accusations n’étaient pas à prime abord directement reliées aux écrits de Gallardo. « La complexité du cas obligeait à faire très attention aux détails », dit Whyatt.
IL EST TRÈS CLAIR
QUE LA PRESSION
INTERNATIONALE, A
MENÉ À SA LIBÉRATION.
trois catégories de cas : des écrivains et des journalistes détenus en raison de leurs écrits; des
écrivains et des journalistes détenus pour d’autres raisons; et des personnes qui ne sont pas des écrivains de métier mais dont les écrits leur ont attiré des ennuis. Gallardo correspondait à cette troisième catégorie.
IMPACT
« Il a été difficile au début d’intéresser les gens au cas de Gallardo, indique Whyatt. Toutefois, de plus en plus de personnes se sont senties concernées et cela a fait boule de neige ». Elle explique que cette campagne « a été l’une de nos plus réussies », surtout dans ses étapes ultérieures, lorsque les communications entre le PEN, la famille, l’OEA et la IACHR sont devenues plus fréquentes et plus détaillées.
« Même s’il ne s’agissait pas d’un simple cas d’écrivain emprisonné, le sort de Gallardo a su capter l’imagination d’un grand nombre de membres », dit Whyatt. Elle explique que les centres hispanophones du PEN en Amérique latine ont été les groupes les plus actifs de la campagne, ce qui a coïncidé avec une croissance générale de l’activisme au sein des groupes du PEN de la région. Les documents de la campagne du PEN ciblaient les gens vivant dans la région, qui ont saisi le contexte de l’affaire un peu mieux que les personnes de l’extérieur. Whyatt ajoute que le réseau des
Amériques du PEN s’est montré particulièrement efficace dans la création de réseaux internes, planifiant des actions conjointes et s’assurant que le cas de Gallardo figurait au sommet de la liste des priorités nationales du centre, ainsi qu’au sein du PEN international.
Les efforts du PEN et des autres groupes et individus ont abouti à la libération de
Gallardo en février 2002. Après sa sortie de prison, le général a félicité la cinquantaine d’ONG qui l’avaient soutenu, incluant le PEN international. « Il est très clair à mes yeux que la pression internationale, exercée en grande partie par le PEN, a mené à sa libération », ajoute Whyatt, qui fait remarquer que dans
IFEX 141
TROISIÈME PARTIE 3.10 CAMPAGNES ÉPISTOLAIRES (ÉTUDE DE CAS)
bien des cas, la pression internationale n’a pas d’impacts aussi évidents.
Lors du Congrès de novembre 2003 du
PEN à México, Gallardo et sa famille sont arrivés avec plusieurs boîtes contenant les milliers de lettres qu’il avait reçues – dont plusieurs avaient été envoyées par les membres du PEN – et dont les timbres prouvaient l’origine internationale. « Il était évident que ces lettres avaient consolé et encouragé
Gallardo pendant son séjour en prison et qu’elles avaient permis à sa famille d’organiser une campagne dont les résultats étaient très loin d’être assurés d’avance », ajoute Whyatt.
Dans le discours qu’elle a prononcé au
Congrès, l’épouse de Gallardo soulignait, entre autres, l’importance des livres que le PEN faisait parvenir à Gallardo en prison, qui, selon elle :
ont été si importants pour aider mon mari à supporter son séjour en prison. Il ne se sentait pas emprisonné, les fenêtres étaient ouvertes et les murs n’existaient pas pour lui. Nous, sa famille, allions lui rendre visite et au lieu de trouver un
être timide et inhibé, c’était tout le contraire.
C’était lui qui nous encourageait à poursuivre la lutte et c’est la raison pour laquelle notre famille n’a pas été détruite. Ils ne pouvaient pas détruire notre famille. Grâce à votre appui, nous avons obtenu la libération de mon mari [..]. Nous avons reçu 35 000 lettres [...] Merci.
Entre-temps, le général Gallardo expliquait au Congrès que « Sans le travail du Comité des
écrivains emprisonnés, il aurait été si difficile pour le gouvernement mexicain d’ouvrir la porte de ma cellule [...] J’aimerais remercier
Dieu et le PEN international. Je leur dois la liberté. »
IFEX 142
CAMPAGNES ÉPISTOLAIRES – RESSOURCES
Amnistie internationale - Réseau d’Action
Rapide
http://web.amnesty.org/pages/ua-index-eng
Media Awareness Project – Trois conseils pour
les campagnes épistolaires
http://www.mapinc.org/3tips.htm
National Ressources Defense Council – Un
échantillon de lettre en ligne
http://www.gettherealscoop.org/takeaction.asp?
step=2&item=52109
Policy.ca – Comment écrire efficacement à
l’éditeur et aux politiciens
http://www.policy.ca/action/letter_ writing.php3
Comité des écrivains emprisonnés du PEN international – Réseau d’Action Rapide http://www.internationalpen.org.uk/
TROISIÈME PARTIE 3.10 CAMPAGNES ÉPISTOLAIRES (RESSOURCES)
IFEX 143
TROISIÈME PARTIE 3.11 AUTRES RESSOURCES DE CAMPAGNE
Autres ressources de campagne
3
.11
AUTRES RESSOURCES DE CAMPAGNE
Amnistie internationale – Campagne mondiale
contre la violence envers les femmes
http://web.amnesty.org/actforwomen/indexeng
Citizen Works – Outils d’organisation http://www.citizenworks.org/tools/toolsmain.php
Community Toolbox – L’organisation d’une
défense efficace
http://ctb.ku.edu/tools/en/part_I.htm
Consumers International – Popularité et
principes : Un guide de campagne, 1999 http://www.consumersinternational.org/docum ent_store/Doc37.pdf
Campagne internationale pour l’interdiction des mines terrestres – Outils de campagne http://www.icbl.org/ressources/campaignkit/
Jim Britell : Organize to Win: A Grassroots
Activist’s Handbook, 2001 http://www.britell.com/text/tgrassroots.html
New Tactics in Human Rights: A Resource for
Practitioners, New Tactics Project, 2004.
http://www.newtactics.org/main.php/Toolsfor
Action/TheNewTacticsWorkbook
Oxfam http://www.oxfam.org/eng/programs_camp.htm
Selene – Un groupe-conseil suédois aidant les
ONG à faire campagne
http://www.selene.se/
World Wildlife Fund - Detox Campaign http://www.panda.org/campaign/detox/
IFEX 144
TROISIÈME PARTIE À PROPOS DE L’IFEX
À propos de l’IFEX
Alors que de graves violations à la liberté d’expression continuent d’être commises partout dans le monde, l’Échange international de la liberté d’expression (IFEX) se dresse comme une importante force d’opposition contre toutes les formes d’atteinte à la liberté d’expression. L’IFEX est un réseau virtuel regroupant 64 organisations qui surveille en continu l’état de la liberté d’expression dans le monde et transmet les informations recueillies
à un grand nombre d’individus et d’organismes à l’échelle de la planète.
L’IFEX est né en 1992 à Montréal, au Canada, de la rencontre de plusieurs grands organismes réunis pour discuter des moyens d’atteindre leurs objectifs communs.
À la base, l’IFEX se compose d’organisations dont les membres refusent de rester indifférents quand ceux et celles qui ont le courage de revendiquer leur droit fondamental de s’exprimer librement sont censurés, brutalisés, ou même assassinés. L’IFEX rassemble une communauté mondiale extrêmement diversifiée et dévouée. Depuis quelques années, de nombreux nouveaux membres issus des pays en développement se sont associés à la communauté de l’IFEX, apportant avec eux une perspective et une énergie nouvelles.
LE RÉSEAU DES ALERTES DE L’IFEX : UNE AIDE À LA
DÉFENSE DES JOURNALISTES EN DANGER
Le Réseau des alertes de l’IFEX constitue l’une des principales composantes de l’organisme. Les organisations membres rapportent au Secrétariat de l’IFEX les cas d’atteinte à la liberté d’expression qui se produisent dans leur région géographique ou dans leur domaine d’activités.
À son tour, le Secrétariat diffuse ces informations aux membres de l’IFEX et à plus de 10 000 autres organismes et individus abonnés à travers le monde.
IFEX 145
TROISIÈME PARTIE À PROPOS DE L’IFEX
Le Réseau des alertes permet une réponse prompte et coordonnée à l’échelle mondiale aux violations de la liberté de presse et de parole. En 2003 seulement, 42 journalistes ont
été tués dans l’exercice de leurs fonctions. Des centaines d’autres ont été attaqués ou emprisonnés. Les alertes actions aident à braquer les projecteurs du monde entier sur les responsables de ces actes – et cela contribue à faire changer les choses car ceux qui violent les droits de la personne aiment souvent le faire dans l’ombre.
Les alertes actions constituent la pierre angulaire de notre travail, pour la simple raison que nous savons que les campagnes épistolaires aident à déverrouiller les portes des prisons, à
éliminer les interdictions de publier et même à sauver des vies. Le Réseau des alertes fournit
également des mises à jour concernant certains cas d’actualité et fait circuler d’importants communiqués de presse traitant d’enjeux liés à la liberté d’expression sous toutes ses formes.
Quiconque peut obtenir copie d’alertes en provenance de partout dans le monde – pour plus de renseignements, contactez le Réseau à l’adresse alerts@ifex.org.
LE COMMUNIQUÉ DE L’IFEX : FOURNIT UNE INFORMA-
TION MONDIALE À JOUR
Le Communiqué de l’IFEX est une publication électronique hebdomadaire qui met en lumière les plus récents développements et enjeux qui concernent la liberté d’expression dans l’ensemble de la communauté mondiale. Cet outil précieux contient des informations régionales sur les violations de la liberté d’expression et sur ses victoires, ainsi que des renseignements à jour sur les conférences, les ateliers et les prix du domaine de la libre expression. Le
Communiqué propose une grande variété de documents, dont certaines informations provenant des organismes membres de l’IFEX, ou d’autres organismes œuvrant en faveur des droits de la personne et des médias internationaux. Publié en français, en anglais et en espagnol, le Communiqué est gratuit et disponible par courriel à l’adresse suivante : communique@ifex.org.
PROGRAMME D’EXTENSION ET DE DÉVELOPPEMENT :
AIDE À BÂTIR DE NOUVEAUX ORGANISMES ET RÉSEAUX
Le Programme d’extension et de développement constitue un nouveau secteur clé pour l’IFEX. Fondé sur la reconnaissance des
écarts importants entre le Nord et le Sud, le
Programme a été conçu pour appuyer et renforcer de jeunes organismes œuvrant en faveur de la liberté d’expression et des réseaux régionaux dans les pays en développement et les pays en transition. L’IFEX tente donc, par ses ressources techniques et financières, par la diffusion de renseignements ainsi que par un soutien et une reconnaissance au niveau international, de minimiser les dangers et les obstacles énormes auxquels font face les personnes qui tentent de mettre sur pied des groupes voués à la libre expression dans certains pays gangrenés par les violations des droits de la personne et la censure. Courriel : outreach@ifex.org.
ÉLABORATION DE STRATÉGIES ET DÉVELOPPEMENT D’AP-
TITUDES : LE CONGRÈS ET LES ATELIERS DE L’IFEX
Le Congrès de l’IFEX constitue l’occasion privilégiée pour les partenaires et les organismes membres de l’IFEX de se réunir afin de discuter de nouvelles stratégies leur permettant de faire face aux enjeux les plus pressants en matière de liberté d’expression, de constituer des réseaux, de partager leur expertise et de décider des
IFEX 146
TROISIÈME PARTIE À PROPOS DE L’IFEX
orientations futures du réseau IFEX au cours des prochaines années.
Les ateliers du Programme d’extension, qui ont habituellement lieu pendant le Congrès de l’IFEX, sont conçus pour renforcer les capacités des groupes installés dans le Sud et dans les pays en transition. À ce jour, ces ateliers ont essentiellement porté sur la formation dans le domaine des alertes actions et de l’Internet, ainsi que sur la levée de fonds et le soutien organisationnel. Les ateliers fournissent aux groupes une occasion unique de se rencontrer pour partager leurs idées et faire progresser leur travail sur la liberté d’expression.
SITE WEB DE L’IFEX : UN SITE CLÉ POUR OBTENIR DE
L’INFORMATION SUR LA LIBERTÉ D’EXPRESSION DANS LE
MONDE – WWW.IFEX.ORG
Le site Web de l’IFEX joue un rôle de premier plan dans les activités et le développement du réseau. Toutes les alertes de l’IFEX et son
Communiqué sont disponibles en ligne dès maintenant, en anglais, en espagnol et en français (là où c’est possible). De plus, des liens renvoient à des sources d’informations importantes et à des recherches menées par différents groupes partout dans le monde. Des dizaines de milliers d’abonnés ont accès à ces renseignements par le biais du site Web de l’IFEX (www.ifex.org). Tant le Communiqué que les alertes sont offerts en français, en anglais et en espagnol, ce qui permet à de très nombreux utilisateurs d’y accéder.
OPÉRATIONS DE L’IFEX
Le Secrétariat du réseau IFEX est géré par
Journalistes canadiens pour la liberté d’expression, un organisme membre de l’IFEX.
Le Secrétariat de l’IFEX est situé à Toronto, au
Canada. Le Secrétariat aide à la coordination du travail des membres de l’IFEX, réduisant ainsi le chevauchement des activités et facilitant l’atteinte de nos objectifs communs.
L’IFEX a, à sa tête, un Conseil constitué de 13 membres de l’IFEX. Le statut de membre ordinaire de l’IFEX est offert aux organismes non gouvernementaux indépendants qui
œuvrent en faveur de la liberté d’expression.
COORDONNÉES
Le Secrétariat de l’IFEX, a/s Journalistes canadiens pour la liberté d’expression
489, rue College, bureau 403
Toronto (Ontario) Canada M6G 1A5
Téléphone : +1 416 515 9622, télécopieur :
+1 416 515 7879
Courriel : ifex@ifex.org
Site Web : http://www.ifex.org
IFEX 147
TROISIÈME PARTIE
RÉPERTOIRE DES MEMBRES DE L’IFEX
RÉPERTOIRE DES MEMBRES DE L’IFEX
Africa Free Media Foundation (anciennement
Network for Defence of Independent Media,
NDIMA)
C.P. 70147 - 00400
Nairobi, Kenya
Tél. : + 254 66 51118
Tél. /Téléc. : +254 66 50836
Courriel : ndima@ndima.org
Site Web : http://www.ndima.org
Aliansi Jurnalis Independen (Alliance des journalistes indépendants, AJI)
Jl. Danau Poso D1 no. 29, Bendungan Hilir
Jakarta 10210 Indonésie
Tél. : +62 21 5790 0489
Téléc. : +62 21 5734581
Courriel : ajioffice@aji-indonesia.or.id
(Veuillez envoyer en CC à : sekretariatnya_aji@yahoo.com)
Site Web : http://www.ajinews.or.id
ARTICLE 19
6-8 Amwell Street
Londres
Royaume-Uni EC1R 1UQ
Tél. : +44 207 278 9292
Téléc. : +44 207 278 7660
Courriel : info@article19.org
Site Web : http://www.article19.org
Association of Independent Electronic
Media (ANEM)
3, Marsala Birjuzova
11000 Belgrade
Serbie et Monténégro
Tél. : +381 (0)11 182-534/ +381 (0)11 182-496/
+381 (0)11 183-652
Courriel : anem@anem.org.yu
Site Web : www.anem.org.yu/
Cairo Institute for Human Rights Studies
(Institut du Caire pour l’étude des droits de l’homme, CIHRS)
C.P. 117 (Maglis El-Shaab), 11516
Le Caire, Égypte
Adresse de voirie : 9 rue Rustom
Garden City – 15e étage,
Appartement 71, Le Caire, ÉGYPTE
Tél. : +202 794 6065 / 795 1112
Téléc. : +202 792 1913
Courriel : info@cihrs.org
Site Web : http://www.cihrs.org
Journalistes canadiens pour la liberté d’expression (CJFE)
489 College Street, Suite 403
Toronto, Ontario M6G 1A5, Canada
Tél. : +1 416 515 9622
Téléc. : +1 416 515 7879
Courriel : cjfe@cjfe.org
Site Web : http://www.cjfe.org
Cartoonists Rights Network, International (CRN)
10600 Alison Drive
Burke VA 22015
USA
Tél./Téléc. : + 703 250 0035
Courriel : mayte6@aol.com
Site Web : http://www.cartoon-crn.com
Center for Human Rights and Democratic
Studies (Centre pour les Droits de l’homme et les études démocratiques, CEHURDES)
Service central des postes, boîte 21179
New Baneswar, Katmandu, Népal
Tél. : + 0977 1 267374 / 475283
Téléc. : + 0977 1 466599
Courriel : cehurdes@enet.com.np or cehurdes@yahoo.com
Site Web : http://www.cehurdes.org.np
Centre for Journalism in Extreme Situations
(Centre pour le journalisme en situations extrêmes, CJES)
Zubovsky Bulvar 4
Bureau 320
Moscou, Russie 119992
Tél. : +7 095 201 76 26 / +7 095 201 35 50, poste 124
Téléc. : +7 095 201 76 26
Courriel : panfilov@cjes.ru or lyuda@cjes.ru Site
Web : http://www.cjes.ru
IFEX 148
TROISIÈME PARTIE
RÉPERTOIRE DES MEMBRES DE L’IFEX
Center for Media Freedom and Responsibility
(Centre pour la liberté et la responsabilité des médias, CMFR)
2e étage, Ateneo Professional Schools
130 H.V. de la Costa St.
Salcedo Village, Makati City 1227
Philippines
Tél. : +63 2 840 0889/+63 2 894 1314/ +63 2 894
1326
Téléc. : +63 2 840 0889
Courriel : cmfr@surfshop.net.ph
Site Web : http://www.cmfr.com.ph
www.laneta.apc.org/cencos
Centro de Reportes Informativos sobre
Guatemala (Centre des informations de presse sur le Guatemala, CERIGUA)
2a. Calle 1-42, Zona 1,
Ciudad de Guatemala,
Guatemala, C.A.,
Tél./Téléc. : +502 223 81456 / +502 222 12521 /
+502 225 11289 / cell: 502 530 89549
Courriel : cerigua@guate.net.gt, cerigua@intelnet.net.gt
Site Web: http://www.cerigua.org
Centre algérien de défense de la liberté de la presse (CALP)
Khaled Mahrez
Alger, Algérie
Tél./Téléc. : +213 61 576637
Courriel : k.mahrez@medenergie.com or khaledmahrez@hotmail.com
Comisión de Libertad de Prensa de la
Asociación de Periodistas de Guatemala (Comité sur la liberté de la presse de l’association des journalistes du Guatemala, APG)
14 calle 3-29, Zona 1
Guatemala City, Guatemala
Tél. : +502 232 1813
Téléc. : +502 238 2781
Courriel : apege@intelnet.net.gt
Centro Nacional de Comunicación Social (Centre national pour la communication sociale, CEN-
COS)
Medellín 33, Colonia Roma
06700 México, D.F. México
Tél. : +52 55 5533 6475/5533 6476
Téléc. : +52 55 5208 2062
Courriel : cencos@prodigy.net.mx or cencos@laneta.apc.org
Site Web : www.prodigyweb.net.mx/cencos or
Committe to Protect Journalists (Comité pour la protection des journalistes, CPJ)
330 Seventh Avenue
New York, NY 10001 États-Unis
Tél. : +1 212 465 1004
Téléc. : +1 212 465 9568
Courriel : info@cpj.org
Site Web : http://www.cpj.org
Egyptian Organization for Human Rights
(Organisation égyptienne pour les droits de l’homme, EOHR)
8/10 rue Mathaf El Manial
Manial El Roda
Le Caire, Égypte
Tél. : +20 2 363 6811/362 0467
Téléc. : +20 2 362 1613
Courriel : eohr@link.com.eg or eohr@eohr.org
Site Web : http://www.eohr.org
Ethiopian Free Press Journalists’ Association
(Association éthiopienne des journalistes de la presse libre (EFJA)
C.P. 31317
Addis-Abeba, Éthiopie
Tél./Téléc. : +251 1 55 5021
Tél. mobile : +2511 9222 939
Courriel : efja@telecom.net.et
Fédération professionnelle des journalistes du
Québec (FPJQ)
1012, avenue du Mont-Royal est, bureau 105
Montréal, Québec H2J 1X6 Canada
Tél. : +1 514 522 6142
Téléc. : +1 514 522 6071
General email: info@fpjq.org
Site Web : http://www.fpjq.org
IFEX 149
TROISIEME PARTIE
RÉPERTOIRE DES MEMBRES DE L’IFEX
Formación Jurídica para la Acción (Formation juridique pour l’action, FORJA)
Ernesto Reyes 065, Providencia
Santiago, Chili
Tél. : +56 2 735 4845
Téléc. : +56 2 777 6196
Courriel : ongforja@entelchile.net
Site Web : http://www.forja.cl
Free Expression Ghana (FEG)
C.P. 207
Adresse de voirie : The Human Rights Centre
Ghana International Press Centre
Nkrumah Circle
Accra, Ghana
Tél. : +233 21 234692
Téléc. : +233 21 237004
Courriel : freedom@africaonline.com.gh
Free Media Movement (FMM)
237/ 22, Wijeya Kumaratunga Road
Colombo 05, Sri Lanka
Tél. : +94 74 519 567/94 717 32623
Téléc. : +94 1 821236/94 1 591314
Courriel : fmm@diamond.lanka.net
Freedom House
120 Wall Street
New York, New York 10005 États-Unis
Tél. : +1 212 514 8040
Téléc. : +1 212 514 8055
Site Web : http://www.freedomhouse.org/
Freedom of Expression Institute (FXI)
C.P. 30668 Braamfontein 2017
Adresse de voirie: 21e étage, Sable Centre,
41 De Korte Street
Braamfontein, Johannesburg 2001
South Africa
Tél. : +27 11 403 8403
Téléc. : +27 11 339 4109
Courriel : fxi@fxi.org.za
Site Web : http://www.fxi.org.za
Fundación para la Libertad de Prensa
(Fondation pour la liberté de la presse, FLIP)
Santiago Flórez G., Assistant
Calle 119B No. 5-38
Bogotá, Colombie
Tél. : +571 4009678 or + 571 4009677
Téléc. : +571 481 6348
Courriel : redalerta@flip.org.co or redalerta@cable.net.co
Site Web : http://www.flip.org.co/
Glasnost Defence Foundation (GDF)
4, Zubovsky Bul., local 432
119021 Moscou, Russie
Tél. : +7 095 201 4420/201 3242
Téléc. : +7 095 201 4947
Courriel : fond@gdf.ru
Site Web : http://www.gdf.ru
Greek Helsinki Monitor (GHM)
C.P. 60820
GR-15304 Glyka Nera
Grèce
Tél. : +30 210 347 2259
Téléc. : +30 210 601 8760
Courriel : office@greekhelsinki.gr
Site Web : http://www.greekhelsinki.gr
Hong Kong Journalists Association
(L’Association des journalistes de Hong Kong,
HKJA)
Flat A, 15/F Henfa Commercial Building
348-350 Lockhart Road
Wanchai, Hong Kong
Tél. : +852 2591 0692
Téléc. : +852 2572 7329
Courriel : hkja@hk.super.net
Site Web : http://www.hkja.org/hk
IFEX 150
TROISIEME PARTIE
RÉPERTOIRE DES MEMBRES DE L’IFEX
Human Rights Watch (HRW)
350 Fifth Avenue, 34th Floor
New York, New York
10018-3299 États-Unis
Tél. : +1 212 290 4700
Téléc. : +1 212 736 1300
Courriel : hrwnyc@hrw.org
Site Web : http://www.hrw.org
Independent Journalism Centre (IJC), Moldova
53, Sciusev str.,
Chisinau MD 2012
Moldova
Tél. : + 3732 2 213652/ + 3732 2 227539
Téléc. : + 3732 2 226681
Courriel : assistant@ijc.md
Site Web : http://ijc.iatp.md
Independent Journalism Centre (IJC), Nigeria
Adresse de voirie: 27 Acme Road, Ogba
Adresse postale :
C.P. 7808, Ikeja Lagos, Nigeria
Tél./Téléc. : +234 1 4924998
Courriel : ijcmonitor@yahoo.com
Site Web : http://www.ijc-nigeria.org
Index on Censorship
6-8 Amwell Street
Londres
Royaume-Uni EC1R 1UQ
Tél. : +44 207 278 2313
Téléc. : +44 207 278 1878
Courriel : rohan@indexoncensorship.org
Site Web : http://www.indexonline.org
Inter American Press Association (IAPA)
1801 S. W. 3rd Ave.,
Edificio Jules Dubois
Miami, Florida 33129, États-Unis
Tél. : +1 305 634 2465
Téléc. : +1 305 635 2272
Courriel : info@sipiapa.org
Site Web : http://www.sipiapa.com
Institut Studi Arus Informasi (L’Institut pour l’étude de la libre circulation de l’information, ISAI)
Jalan Utan Kayu 68-H
Jakarta 13120 Indonésie
Tél. : +62 21 857 3388
Téléc. : +62 21 856 7811
Courriel : office@isai.or.id
Site Web : http://www.isai.or.id
Fédération Internationale de Journalistes (IFJ)
International Press Center Residence Palace
155, Rue de la Loi - Bloc C B-1040
Bruxelles, Belgique
Tél. : +322 235 2207
Téléc. : +322 235 2219
Courriel : ifj@ifj.org
Site Web : http://www.ifj.org
Instituto Prensa y Sociedad (Institut pour la presse et la société, IPYS)
Calle Sucre No. 317 Barranco
Lima, Pérou
Tél. : +511 247 3308, +511 247 0406
Téléc. : +511 247 3194
Courriel : postmaster@ipys.org
Site Web : http://www.ipys.org
International Federation of Library Associations and Institutions (IFLA)- FAIFE (Free Access to
Information and Freedom of Expression
Committee)
Birketinget 6
DK-2300 Copenhagen S
Danemark
Tél. : +45 32 587077, composer le 532 / + 45 32
586066, poste 532
Téléc. : +45 32 840201
Courriel : susanne.seidelin@ifla.org or faife@ifla.org
Site Web : http://www.ifla.org/faife/index.htm
IFEX 151
TROISIEME PARTIE
RÉPERTOIRE DES MEMBRES DE L’IFEX
International Foundation for Protection of Freedom of Speech (Fondation internationale pour la défense de la liberté de parole « Adil Soz »)
25, rue Zhambyl
Bureau 706
Almaty, 480100
République du Kazakhstan
Tél./Téléc. : +7 3272 911 670
Courriel : info@adilsoz.kz or steblyuk@adilsoz.kz
Site Web : http://www.adilsoz.kz
International Press Institute (Institut international de la presse, IIP)
Spiegelgasse 2, A-1010
Vienne, Autriche
Tél. : +43 1 512 90 11
Téléc. : +43 1 512 90 14
Courriel : ipi@freemedia.at
Site Web : http://www.freemedia.at
Association internationale des éditeurs
Alexis Krikorian, Coordinateur du Comité pour la liberté de publier (krikorian@ipa-uie.org)
3, avenue de Miremont,
Ch-1206, Genève
Suisse
Tél. : +41 22 346 30 18
Téléc. : +41 22 347 57 17
Courriel : secretariat@ipa-uie.org
Site Web : http://www.ipa-uie.org
Journaliste en danger (JED)
374, avenue colonel Mondjiba
Complexe Utexafrica
Galerie Saint Pierre, Kinshasa/Ngaliema
B.P. 633 Kinshasa I
République démocratique du Congo
Tél. : +243 99 29 323 / + 243 99 96 353
Téléc. : 001 347 52 15 110
Courriel: direction@jed-afcentre.org
Site Web : http://www.jed-afrique.org
Journalists’ Trade Union (JuHI)
33 rue Khagani, Bakou AZ1000
Azerbaïdjan
Tél. : +994 12 493 2261; 493 4678
Tél. mobile : +994 50 324 6530
Téléc. : +994 12 498 7818
Courriel : juhiaz@juhiaz.org
Site Web : http://www.juhiaz.org
Media, Entertainment and Arts Alliance (MEAA)
245 Chalmers St
Redfern, NSW 2016
Australie
Tél. : + 61 2 9333 0999
Téléc. : +61 2 9333 0933
Courriel : mail@alliance.org.au
Site Web : http://www.alliance.org.au
Foundation pour les Médias en Afrique (MFWA)
C.P. LG 730
Legon, Ghana
Tel.: +233 21 24 24 70
Téléc. : +231 21 22 10 84
Courriel : events@mfwaonline.org
Site Web : http://www.mfwaonline.org
Media Institute (MI)
Adresse de voirie:
P.O. Box 46356,
00100
Nairobi, Kenya
Adresse postale :
College Hse, 2/F
Koinange Street
Tel: +254 721 878844
Courriel : mediainst@wananchi.com
Site Web : http://www.kenyanews.com
Media Institute of Southern Africa (MISA)
Adresse de voirie: 21 Johann Albrecht St,
Windhoek West, Windhoek
(Note: Cette adresse peut être utilisée pour la messagerie, mais PAS comme adresse postale)
Adresse postale : Private Bag 13386
Windhoek, Namibie
Tél. : +264 61 232975
Téléc. : +264 61 248016
Courriel : research@misa.org
Site Web : http://www.misa.org
IFEX 152
TROISIEME PARTIE
RÉPERTOIRE DES MEMBRES DE L’IFEX
Media Rights Agenda
10 Agboola Aina Street, off Amore Street
Ikeja
C.P. 52113
Ikoyi, Lagos
Nigeria
Tél. : +234 1 493 6033
Téléc. : +234 1 493 0831
Courriel : pubs@mediarightsagenda.org
Site Web : http://www.mediarightsagenda.org
Media Watch
Adresse de voirie:
4F Eastern housing,
4 circuit house Road
Dhaka-1000, Bangladesh.
Adresse postale :
Boîte du service central des postes 3521
Ramna, Dhaka
Bangladesh
Tél. : +880 2 8318608
Téléc. : +880 2 956 7070
Courriel : media@bdonline.com
Netherlands Association of Journalists
(Association néerlandaise des journalistes, NVJ)
Joh. Vermeerstraat 22,
Postbus 75997
1071 DR Amsterdam
Pays-Bas
Tél. : +31 20 676 6771
Téléc. : +31 20 662 4901
Courriel : vereniging@nvj.nl
Site Web : http://www.villamedia.nl/n/
Norwegian PEN
Tordenskjoldsgate 6B,
0160 Oslo
Norvège
Tél. : + 47 22479220
Téléc. : + 47 22479201
Tél. mobile : + 47 926 88 023
Courriel : pen@norskpen.no
Site Web : http://www.norskpen.no
Pacific Islands News Association (PINA)
- Secrétariat de la PINA
Level 2, Damodar Centre
46 Gordon Street
Private Mail Bag,
Suva, Fiji
Tél. : + (679) 3303 623
Téléc. : + (679) 3303 943
Mobile: + (679) 9210 456
Courriel : pina@connect.com.fj
seinilakai@hotmail.com
- Apulu Lance Polu, Président
C.P. 1321
Apia
Samoa
Tél./Téléc. : +685 23827
Courriel : talamag@samoa.ws
Pakistan Press Foundation (PPF)
Press Centre
Shahrah Kamal Ataturk
Karachi 74200 Pakistan
Tél. : +92 21 263 3215 / 21 262 7882
Téléc. : +92 21 263 1275 / 21 263 1125
Télex: 29868 PPI-PK
Courriel : ppf@pakistanpressfoundation.org or foe@pakistanpressfoundation.org
Site Web : http://www.pakistanpressfoundation.org
PEN American Center
568 Broadway, bureau 401
New York, New York 10012 États-Unis
Tél. : +1 212 334 1660
Téléc. : +1 212 334 2181
Courriel : ftw@pen.org
Site Web : http://www.pen.org
IFEX 153
TROISIEME PARTIE
RÉPERTOIRE DES MEMBRES DE L’IFEX
PEN Canada
24 Ryerson Avenue, bureau 214
Toronto, Ontario, M5T 2P3, Canada
Tél. : +1 416 703 8448
Téléc. : +1 416 703 3870;
Courriel : pen@pencanada.ca
Site Web : http://www.pencanada.ca
PROBIDAD
Calle del Egeo No. 39,
Col. Jardines de Guadalupe,
Antiguo Cuscatlán, Depto. La Libertad,
El Salvador,
Tél. : +503 243 9806
Téléc. : +503 211 7829
Courriel : contacto@probidad.org
Site Web : http://www.probidad.org
Reporters sans frontières (RSF)
Secrétariat international
5, rue Geoffroy Marie
Paris 75009, France
Tél. : +33 1 44 83 84 84
Téléc. : +33 1 45 23 11 51
Courriel : rsf@rsf.org
Site Web : http://www.rsf.org
Sindicato de Periodistas del Paraguay (Syndicat des journalistes du Paraguay, SPP)
Adresse de voirie : Humaitá 186 (C.P. 1245)
Adresse postale : Casilla de Correo 1320
(C.P. 1209)
Asunción, Paraguay
Tél./Téléc. : +595 21 440 617
Courriel : spp17@conexion.com.py
Southeast Asian Press Alliance (SEAPA)
538/1 Samsen Road, Dusit
Bangkok, 10300 Thaïlande
Tél./Téléc. : +662 243 5579
Courriel : seapa@seapabkk.org
Site Web : http://www.seapabkk.org
Thai Journalists Association (TJA)
538/1 Samsen Rd.
Dusit, Bangkok 10300, Thaïlande
Tél. : +66 2 668 9422
Téléc. : +66 2 668 7505
Courriel : reporter@inet.co.th
Site Web : http://www.tja.or.th
Union des Journalistes d’Afrique de l’Ouest
17, Boulevard de la République
BP 21722
Dakar, Sénégal
Tél. : +221 842 01 41/ 842 01 43
Téléc. : +221 842 02 69
Courriel : synpicsujao@sentoo.sn
Site Web : http://www.ujaowaja.org/
- Bureau du Ghana
C.P. 4031
House No. B816/12 Adom Villa,
North Ordorkor
Accra, Ghana
Tél. : +233 21 315652
Téléc. : +233 21 237004
Tél./Téléc. : +233 21 234694
Association mondiale des radiodiffuseurs communautaires (AMARC)
Secrétariat international
705 rue Bourget, #100
Montréal, QC, Canada H4C 2M6
Tél. : +1 514 982 0351
Téléc. : +1 514 849 7129
Courriel : amarc@amarc.org
Site Web : http://www.amarc.org
Association mondiale des journaux (WAN)
7 rue Geoffroy St-Hilaire
75005 Paris
France
Tél. : +33 14 742 8500
Téléc. : +33 14 742 4948
Courriel : contact_us@wan.asso.fr
Site Web : www.wan-press.org
IFEX 154
World Press Freedom Committee (WPFC)
11690-C Sunrise Valley Drive
Reston, VA 20191
États-Unis
Tél. : +1 703 715 9811
Téléc. : +1 703 620 6790
Courriel : freepress@wpfc.org
Site Web : http://www.wpfc.org
Writers in Prison Committee (WiPC),
PEN international
9/10 Charterhouse Buildings
Goswell Road,
Londres EC1M 7AT
Royaume-Uni
Tél. : +44 207 253 3226
Téléc. : +44 207 253 5711
Courriel : intpen@gn.apc.org or info@wipcpen.org
Site Web : http://www.internationalpen.org.uk/
TROISIEME PARTIE
RÉPERTOIRE DES MEMBRES DE L’IFEX
IFEX 155
TROISIÈME PARTIE CRÉDITS PHOTOGRAPHIQUES
CRÉDITS PHOTOGRAPHIQUES
Page 10 : Un marchand de journaux à Kabul,
Afghanistan
Photo : Anna Nowak-Rivière, UNESCO
Page 21 : Des journalistes et activistes des médias réclament une plus grande liberté de la presse lors d’un rassemblement à Colombo, Sri Lanka.
Photo : Agence France-Presse/Association mondiale des journaux
Page 81 : Sir Paul McCartney et sa femme Heather
Mills-McCartney assistent à un événement bénéfice en appui à Adopt-a-Minefield UK.
Photo : Adopt-A-Minefield UK http://www.landmines.org.uk
Page 100 : Un journaliste du Concord Times lit le journal à l’extérieur de son bureau à Freetown,
Sierra Leone.
Photo : Roger Holmes, Journalistes canadiens pour la liberté d’expression
Page 28 : Un garçon tient une affiche lors d’une manifestation qui a eu lieu à New Delhi en novembre
2003 pour dénoncer la condamnation de cinq journalistes de The Hindu à 15 jours d’emprisonnement pour avoir soi-disant critiqué le gouvernement.
Photo : Agence France-Presse/ Association mondiale des journaux
Page 124 : Un journaliste et son caméraman en reportage pour Radio Télévision Kosovo.
Photo : Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe
Page 134 : Des milliers de lettres envoyées en appui
à Jose Francisco Gallardo ont aidé à la libération du brigadier général mexicain en 2003.
Photo : © Amnistie internationale
Page 57 : Un journaliste lit le journal interdit The
Daily News, du Zimbabwe.
Photo : Agence France-Presse/ Association mondiale des journaux
IFEX 156

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