Infodrog Intervention spécifique à la migration Manuel utilisateur
Intervention spécifique
à la migration dans le domaine des dépendances
Implications pour la pratique
Une publication d’Infodrog
Impressum
Editeur
Infodrog
Centrale nationale de coordination des addictions
Rédaction
Marianne König Setiadi
Aline Bernhardt Keller
Lectorat
Cristina Monterrubio Leu
Traduction
Dominique H. Jenni, Lausanne
Conception graphique
Susanne Walker, visu’l AG, Berne
Adresse de commande
Infodrog
Eigerplatz 5, case postale 460, 3000 Berne 14
Tél. 031 376 04 01
Fax 031 376 04 04 office@infodrog.ch
www.infodrog.ch
© Infodrog 2009
ISBN: 978-3-9522791-6-8
Contenu
1 Avant-propos
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Introduction
3 Compétence transculturelle
4
Communication et travail relationnel
5 Travail avec des interprètes
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Anamnèse
7 Transculturalité et dépendance
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Processus de guérison
9 Approche systémique
10 Traitement de substitution des patient(e)s en situation de précarité
11 Thérapie à l’étranger
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Enfants – Jeunes – Parents
13 Travail avec les familles
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Collaboration avec les communautés de migrant(e)s
15 Réseaux sociaux
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Femmes et prostitution
17 Service social
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Bases juridiques : droit de la migration – sécurité sociale
19 Ancrage institutionnel et Qualité
20 Auteurs
21 Références bibliographiques
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Avant-propos
Si la migration est un phénomène des plus prégnants, en découlent deux des principaux défis de notre temps : l’intégration et l’égalité des chan ces de la population migrante et de leur descendance dans le pays d’ac cueil. Défis qui se posent aussi en termes de santé publique et de soins médicaux, y compris dans le domaine des dépendances.
Tant du côté public que privé, diverses initiatives visent déjà à faciliter l’accès des personnes migrantes aux offres d’aide et à renforcer la com pétence transculturelle des professionnel(le)s. Au niveau national, une stratégie fédérale « Migration et santé » – dont la 2 e phase se déroule depuis 2008 – a été lancée par l’Office fédéral de la santé publique en
2002, en collaboration avec les Offices fédéraux des réfugiés ainsi que de l’immigration, de l’intégration et de l’émigration (aujourd’hui réunis au sein de l’Office fédéral des migrations ODM), et avec la Commission fédérale des étrangers (aujourd’hui Commission fédérale pour les ques tions de migration CFM). Cette stratégie comporte diverses mesures dans les domaines de la promotion de la santé et la prévention, de la formation permanente et continue en santé publique, des soins médi caux et de la recherche ; un accent tout particulier étant mis sur l’an crage d’une égalité des chances en faveur des migrant(e)s dans les struc tures ordinaires (mainstreaming).
La présente publication d’Infodrog sert aussi ce but. Si l’étude « Migra tion et drogue » réalisée en 2000 sur mandat de l’OFSP et la brochure qui en a résulté, « L’importance d’une intervention spécifique à la migration dans la lutte contre la toxicodépendance et ses conséquences pour la pratique » de Dagmar Domenig, s’adressaient principalement aux insti tutions (dans l’optique d’une ouverture transculturelle de leur part), ce manuel vise directement les professionnel(le)s. Ils et elles doivent y
1 Avant-propos
trouver des indications utiles à leur pratique quotidienne avec une cli en tèle issue de la migration et des incitations à réfléchir aux problèmes et ressources spécifiques de ces personnes. Il ne faut pas s’attendre à cet
égard à des approches totalement nouvelles ou différentes. Il s’agit
plutôt d’ouvrir, d’affiner et d’utiliser de manière flexible les offres,
méthodes et concepts existants − au sens du mainstreaming évoqué plus haut et de la compétence transculturelle − de telle manière qu’ils puissent être pertinents et garants du succès pour l’ensemble de la clientèle. Inversement, cela signifie qu’ils sont également valables pour les client(e)s suisses. Les institutions qui développent leur offre de ma nière à l’adapter à la population migrante (c.àd. basent leur travail sur l’approche de la compétence transculturelle) constateront qu’il s’ensuit un effet de synergie et une amélioration de la qualité de leur travail avec la clientèle suisse.
C’est aussi en ce sens que j’aimerais encourager toutes les institutions à
œuvrer en faveur d’une ouverture à la transculturalité, à ancrer celleci et à accorder une attention toute particulière aux besoins de leur clien tèle migrante. J’espère que cette publication d’Infodrog pourra y contri buer.
Dr Andrea Arz de Falco
Vicedirectrice de l’Office fédéral de la santé publique OFSP
Responsable de l’Unité de direction Santé publique
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Introduction
Cet ouvrage, publié par Infodrog, rassemble des textes contenant des notes explicatives, des suggestions ainsi que des réflexions uti les pour le travail au quotidien avec les personnes migrantes dans le domaine des dépendances. Ces textes proviennent de profes sionnel(le)s travaillant dans différents domaines et ayant une lon gue expérience de travail avec la population migrante.
La nécessité d’un tel ouvrage
La majorité des institutions suisses spécialisées dans les dépendances comptent parmi leur clientèle une proportion plus ou moins importante de personnes issues de la migration, avec leurs besoins et leurs ressour ces souvent bien spécifiques. Parmi ces institutions, quelquesunes ont volontairement adapté et ouvert leur offre à ce groupecible, alors que dans d’autres un tel soutien spécifique dépend des connaissances et de l’expérience personnelle des collaborateurs(trices).
Dans le cadre de son mandat, Infodrog s’est vu confier la mission de sou tenir les offres adaptées aux personnes migrantes dans le domaine des dépendances et de contribuer à sa diffusion et à l’amélioration de sa qualité. Le présent ouvrage est conçu comme faisant partie de ce tra vail. Il s’agit d’un outil pratique comportant des indications concrètes et utiles pour le travail au quotidien avec la population migrante. Cet outil sert à sensibiliser les professionnel(le)s aux différents aspects du travail avec une clientèle issue de la migration mais ne prétend pas à l’exhaus tivité.
Par client(e)s issu(e)s de la migration, on entend ici toute personne qui a ellemême ou dont les parents ou grandsparents ont immigré en
Suisse.
2 Introduction
Le groupe de projet
Afin de bénéficier d’un large soutien du terrain et de pouvoir recueillir les connaissances de divers domaines, un groupe de projet a été constitué avec des membres de secteurs d’aide, de professions et de régions de
Suisse les plus divers. En faisaient partie :
• Anne Ansermet Pagot, Fleur de Pavé, Lausanne.
• Osman Besic´, CroixRouge Suisse / migesplus, Wabern.
• Umberto Castra, Contact Netz, Jugend, Eltern und Suchtberatung,
Berne.
• Nelson Feldman, Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), Service d'abus de substances, Genève.
• Pablo SanchezMazas, Association Appartenances, Genève.
• Eliane Schnellmann, Institut für Sozialtherapie, Egliswil.
• Gianni Tiloca, Beratungsstelle für Drogenprobleme (BSD), ipw, Winter thur.
• Enrico Tolotti, Service Social Régional de la Prévôté, Moutier.
• Safija von Beg, Gesundheitsamt des Kantons Zug – Suchtberatung, Zug.
La direction de ce groupe de projet a été assumée par Infodrog, plus précisément par Marianne König Setiadi, Aline Bernhardt Keller et
Cristina Monterrubio Leu.
Cinq séances tenues en 2008 ont d’abord permis de procéder à des
échanges et à des discussions sur des expériences de toutes sortes dans le domaine « migration et dépendance », puis de structurer le manuel et ses divers thèmes. Si plusieurs chapitres ont été élaborés en commun durant les séances, la plus grande partie l’a été cependant individuelle ment par les membres du groupe de projet. Le chapitre consacré aux questions de droit est dû à Attiya Sheikh, avocate au sein de l’étude
Kanonengasse à Zurich. Rut Brunner Zimmermann (ipw, Winterthur),
Andrea Kromer (Mädchenprogramm jumpina) et Mehmet Ertogrul
(Jugendprogramm Jump Winterthur) ont travaillé à la thématique
« Enfants – Jeunes – Parents ». Pour le thème « Traitement de substi tution des patient(e)s en situation de précarité », Isabelle Soulignac
(HUG, Genève) a également apporté sa contribution. La mise en forme rédactionnelle finale a été assumée par Infodrog.
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2 Introduction
Les directives aux auteurs
Il ne leur était pas demandé de mener des études exhaustives mais de traiter les thèmes choisis à travers de brefs textes orientés sur la pratique, les tenants et aboutissants se voyant limités au strict néces saire. Le but étant de réunir, de manière concise, des indications et des positions sur des problèmes concrets comme en rencontrent quotidien nement les professionnel(le)s.
Ces contributions devaient avoir pour fondement la perspective de la compétence transculturelle, qui évite en particulier de culturaliser pro blèmes et ressources. Divers aspects transversaux, nécessairement pris en considération dans toutes les contributions, sont devenus au fil du travail des thèmes (Enfants – Jeunes – Parents, Ancrage institutionnel et Qualité) ou se sont révélés trop peu significatifs ou trop spécifiques pour être traités comme tel.
Les auteurs n’avaient donc pas la tâche facile et leur mission était même proprement paradoxale : tenant compte des univers individuels de vie des client(e)s, au sens d’une approche transculturelle, ils ou elles de vaient fournir de brèves indications et pistes générales (qui devaient à leur tour être elles aussi concrètes). Etant entendu que les auteurs sont inscrits dans des contextes professionnels, méthodologiques et person nels qui leur sont propres.
Une des difficultés (omniprésente avec ce thème) consistait à délimiter la problématique et le groupecible, soit les « client(e)s issu(e)s de la mi gration ». Ce concept complexe et sujet à clarification prouve à lui seul − de même que d’autres termes techniques tels que « spécifiques à la
migration », « adapté aux migrant(e)s » − que ni le groupecible ni les moyens ou objectifs spécifiques ne peuvent être très précisément dé finis. En effet, lorsqu’est choisie pour base de travail l’approche de la compétence transculturelle, les personnes migrantes finissent par dispa raître dans la « foule anonyme » de l’ensemble de la clientèle avec leur condition très personnelle. Et dans la masse se délitent aussi les approches ou méthodes spécifiques à la migration. D’un autre côté, la migration et les forces et problèmes qui s’y rattachent sont pourtant aussi une réalité… Autre paradoxe !
2 Introduction
Les textes
Ce paradoxe et l’exercice d’équilibre qui en résulte sont en partie percep tibles dans les différents chapitres de ce manuel et bien des choses s’ap pliquent non seulement aux personnes migrantes mais à l’ensemble de la clientèle. Les thèmes sont abordés parfois de manière très différente, certains textes étant plus philosophiques alors que d’autres sont très structurés et pragmatiques.
Les textes produits ne défendent aucune « doctrine » et ne présentent pas un style uniforme. Même après avoir subi retouches et aménage ments rédactionnels, ils témoignent encore des approches et expérien ces individuelles de leurs divers auteurs. De ce fait, les chapitres (ainsi que celles et ceux qui les ont rédigés) sont euxmêmes de parfaits repré sentants, dans leur diversité, de la thématique de cet ouvrage.
Si quelques contributions reflètent l’optique d’un domaine particulier de l’aide aux personnes dépendantes (bas seuil, ambulatoire, résidentiel), nombre d’éléments se laissent néanmoins aisément transposer dans les autres domaines.
Les divers chapitres pouvant être lus plus ou moins indépendamment les uns des autres comme des textes autonomes, s’ensuit un certain nombre de recoupements et de répétitions. C’est ainsi que le thème des
« Parents » apparaît dans le chapitre consacré à la communication, dans le chapitre « Enfants – Jeunes – Parents » ainsi que celui du « Travail avec les familles ».
En décrivant les problématiques des client(e)s, les exposés font naturel lement avant tout mention des facteurs de risque et des charges inhérents à la migration. Aussi importetil de ne pas oublier l’autre ver sant de la migration : les forces, le talent d’organisateur, l’initiative, la flexi bilité, la cohésion familiale et les espoirs nécessaires pour quitter son domicile, rompre avec la terre de ses ancêtres, partir dans un autre pays et entreprendre d’y reconstruire une nouvelle vie. Ce sont ces ressources qui doivent, entre autres, être mises en évidence et renfor cées.
Nous espérons que ce manuel, au travers de ses divers chapitres, se ré vélera utile dans la pratique de l’aide aux personnes dépendantes, qu’il soutiendra les professionnel(le)s dans la prise de décision et dans leur travail avec les client(e)s. Il aura également atteint son but s’il incite à
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2 Introduction
débattre de cette thématique et sensibilise aux besoins et ressources des personnes ayant fait ellesmêmes ou dans leur famille l’expérience de la migration.
Remerciements
Notre gratitude la plus vive va aux auteurs et membres du groupe de projet, pour leur disponibilité à collaborer, leur engagement vivant et critique au sein du groupe et bien sûr pour leurs textes. Un grand merci aussi à Dominique H. Jenni pour ses traductions, à Martin Reck pour les recherches bibliographiques ainsi qu’à Susanne Walker de visu’l AG pour la conception graphique.
Infodrog
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Compétence transculturelle
Le concept de la compétence transculturelle est à la base du travail avec la population migrante dans le domaine des dépendances.
Eviter une attitude culturalisante et au contraire donner la priorité
à l’individu avec son histoire personnelle est le gage d’une inter vention spécifique à la migration de qualité.
Définition
La compétence transculturelle se définit comme la « capacité de saisir et de comprendre les modes de vie individuels dans une situation particu lière et dans divers contextes et d’en faire découler des actions corres pondantes et adaptées » (Domenig, 2007). Pour ce qui est de l’émer gence d’un comportement dépendant ainsi que des conseils ou du traitement, cette définition implique qu’un comportement « culturelle ment typique » est moins significatif, venant de client(e)s issu(e)s de la migration, que leurs expériences de vie individuelles et leurs traits de caractère.
L’interprétation de l’apparition ou de l’évolution d’une dépendance est donc à rechercher audelà des représentations et images véhiculées par la société ou les médias, lesquelles visent avant tout à établir une dis tinction entre « nous » et « eux ». La dévalorisation qui en découle impli que en règle générale de « nous » identifier à la modernité et au progrès et de les identifier « eux » au traditionalisme et à la régression. Le concept de compétence transculturelle brise cette dichotomie.
Interaction et facteurs individuels
L’interaction est donc au centre d’un suivi impliquant cette compétence transculturelle, les professionnel(le)s se trouvant en permanence pris
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3 Compétence transculturelle
dans un processus de négociation avec leur clientèle. L’histoire person nelle de chaque client(e) est unique (y compris dans le contexte de la migration), chacun(e) étant diversement marqué(e) par des conditions et facteurs individuels, familiaux et socioéconomiques. Réduire une per sonne à sa nationalité ou à son appartenance religieuse et, ce faisant, méconnaître d’autres facteurs souvent bien plus importants, constitue un manque de professionnalisme. Diverses études ont montré que ce n’est pas tant la « culture » ou l’expérience migratoire en soi qui sont des déterminants essentiels de la santé des populations migrantes, mais bien plus leur statut socioéconomique et les conditions de vie qui en découlent (Meyer, 2009).
Les bases de la compétence transculturelle
La compétence transculturelle repose sur trois piliers : l’autoréflexion, l’empathie et le savoir respectivement l’expérience (Domenig, 2007). Le savoir et l’expérience ne suffisent pas et ce n’est que par une réflexion permanente sur sa propre attitude, par la conscience de ses propres traits de caractère et la curiosité à l’égard d’autrui que pourra se déve lopper une interaction fructueuse.
Compétence thérapeutique et transculturelle
On affirme souvent que la compétence « thérapeutique » comporterait en soi une compétence transculturelle. On argumente qu’empathie, ac ceptation et capacité relationnelle figurent au premier plan de tout set ting thérapeutique et seraient en soi dénuées de toute connotation culturelle, de sorte que des connaissances spécifiques en matière de compétence transculturelle seraient superflues. De bonnes compéten ces thérapeutiques constituent de fait une importante condition préa lable à une compétence transculturelle. Un manque de compétence transculturelle peut pourtant faire que, confronté à un comportement
« étranger », on adopte sans les remettre en question des conduites stéréotypées et qu’empathie et capacité relationnelle se voient décla rées sans valeur. Plutôt que d’envisager d’élargir et d’adapter le réper toire méthodologique d’un processus de conseil ou d’un setting thérapeutique, on va parler d’étrangers(ères) et de l’étranger. Or des professionnel(le)s transculturellement compétent(e)s seront capables de remettre en question des comportements dits « étrangers » et d’agir
3 Compétence transculturelle
en tenant compte tant de la situation que du contexte. Il n’existe pas de client(e) « objectivement » étranger(ère), mais uniquement une manière subjective d’appréhender l’étranger.
Compétence transculturelle de l’institution
Il ne pourra y avoir de véritable compétence transculturelle que si l’in stitution tout entière s’oblige à respecter ce principe. Sinon, les pro fessionnel(le)s transculturellement compétent(e)s se retrouveront
rapidement marginalisé(e)s. De plus, du fait qu’une compétence trans culturelle doit être encouragée au plan individuel, elle doit aussi être
intégrée et ancrée dans les structures de l’institution. Elle doit devenir une compétence propre à tous et toutes les collaborateurs(trices), de la direction au secrétariat et à l’accueil sans oublier que la clientèle elle même devrait avoir les moyens d’acquérir cette compétence.
L’approche de la compétence transculturelle constitue également le fondement des chapitres suivants de ce manuel.
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Communication et travail relationnel
La communication est l’élément clé du travail dans le domaine des dépendances. Il ne s’agit pas uniquement ici de langage verbal ou de connaissances linguistiques (suffisantes ou non), mais bien de l’établissement d’une véritable relation.
Travail relationnel
Qu’une relation de qualité entre professionnel(le)s et client(e)s soit une condition essentielle à la réussite d’une intervention est un fait abondam ment souligné, en particulier à propos du travail auprès de la population migrante. Cela peut notamment signifier qu’institutions et profession nel(le)s devront faire preuve de flexibilité dans l’application des règles
établies. Le ou la professionnel(le) devra aussi se montrer prêt(e) à céder un peu du pouvoir et des certitudes que lui confère son statut d’expert(e) ; il ou elle doit se faire à l’idée que son travail ne se réduit pas à l’espace
thérapeutique. Travailler sur la base de la relation implique aussi qu’on n’y mettra pas fin sans motif, autrement dit qu’on devrait éviter de changer de thérapeute ou de personne de référence.
Communication vers l’extérieur
Dans le cadre de leur activité de relations publiques, les institutions doi vent décider si elles veulent fournir des informations (flyers, Internet) multilingues et, si oui, dans quelles langues. Pour les offres résidentielles particulièrement, il est important de travailler en réseau avec les services d’orientation afin de les faire connaître − par exemple, aux moyens de posters ou de flyers − tant aux dits services qu’à leur clientèle. A cet égard, des contacts étroits avec les médecins de famille sont essentiels.
4 Communication et travail relationnel
Les limites des prestations offertes par l’institution doivent également
être clairement communiquées, par exemple qu’il n’est pas possible de fournir des informations ou une aide d’une manière permanente dans toutes les langues.
Première prise de contact
Les premiers contacts et entretiens sont souvent décisifs pour l’établis sement d’une bonne communication et de bonnes relations. Il convient donc de leur accorder une attention toute particulière.
Fréquemment, les parents (souvent les mères) sont les premiers à pren dre contact avec une institution d’aide, dont le secrétariat, étant leur pre mier interlocuteur, devrait si possible être polyglotte. Lors du premier téléphone, il faut en outre éviter que plusieurs professionnel(le)s inter viennent successivement.
Admission
La procédure d’admission devrait être brève et assortie d’un minimum de formalités. Importante, une communication avec beaucoup de souplesse permettra de délivrer les client(e)s de leurs angoisses, de les rassurer et de les orienter. La procédure d’admission dans les hôpitaux en est un bon exemple ; elle n’est pas consacrée qu’au problème de santé proprement dit.
Premier entretien avec un ou une professionnel(le)
Le premier contact entre client(e)s ou famille et thérapeute/personne de référence n’attend souvent pas l’entretien formel d’admission, mais a lieu de manière informelle déjà avant. Ce peut être par exemple une rencontre fortuite avec le ou la client(e) lors de son arrivée dans l’institution ou un contact téléphonique avec des parents qui, le soir de l’entrée de leur en fant dans l’institution, demandent comment va leur fils ou leur fille. De telles rencontres ou discussions informelles sont importantes et repré sentent de bonnes occasions pour préparer le ou la client(e), ainsi que ses proches, à son entrée. De l’attention et une discussion informelle aident à réduire blocages, incertitudes et craintes et à établir de bonnes relations.
Ainsi, tout le personnel (secrétariat/accueil, référents/thérapeutes) doit
être sensibilisé à l’importance, pour des nouveaux venus souvent sur la réserve, d’être accueillis aimablement et activement intégrés.
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4 Communication et travail relationnel
Un accueil chaleureux est également capital lors de l’entretien d’admis sion proprement dit. Etablir une relation de confiance exige des pro fes sionnel(le)s qu’ils ou elles conjuguent compétence professionnelle et fa miliarisation. Des formalités telles que remplir des formulaires devraient
être évitées comme entrée en matière et l’entretien ne pas être surchargé par trop d’informations. Il est néanmoins important de communiquer ce qui est possible dans l’institution et où se situent les limites.
Afin que ce premier entretien n’aboutisse pas à un sentiment d’insatis faction ou à un échec du fait de difficultés et de malentendus purement linguistiques, il devrait s’effectuer, si nécessaire, avec l’assistance d’un ou d’une interprète professionnel(le).
Conception de la dépendance et de la guérison
Pour ce qui est des contenus de la communication, l’ajustement mutuel des représentations de la dépendance et de la guérison est indispensable au processus thérapeutique ou de conseil. A cet égard, des influences culturelles ou des expériences faites par les client(e)s avec le système de soins de leur pays d’origine peuvent être significatives.
La dépendance ne sera, par exemple, pas tenue pour une maladie mais pour une faiblesse personnelle. Et même acceptée en tant que maladie, le processus de guérison peut être compris comme une « réparation » (par les professionnel(le)s ou les médicaments). Des résultats immédiats sont alors attendus des médecins et autres thérapeutes – souvent considérés comme omniscients et omnipotents. En outre, le concept d’une guérison acquise au prix d’un travail personnel sur soimême peut être étranger à une certaine clientèle.
Parler de soi
Il en va de même du processus psychologique – centré sur le vécu intérieur de la personne – à la base de cette approche de la guérison, processus avec lequel les hommes en particulier ont fréquemment des problèmes.
Ils redoutent en effet parfois de se couvrir de honte visàvis de leurs amis et compatriotes et cherchent ainsi à donner une image qu’ils jugent ap propriée. Aussi estil fréquent qu’interrogé(e)s sur leurs représentations et besoins, les client(e)s ne puissent pas répondre d’emblée. Reconnaître et verbaliser des besoins ne sera possible que dans une phase postérieure et fera partie du processus thérapeutique et de guérison. Plutôt que de
4 Communication et travail relationnel
poser des questions ouvertes, il est donc souvent préférable – y compris dans le cours ultérieur de la thérapie ou du conseil – de faire soimême des propositions, c.àd. de procéder de manière directivoempathique. Non seulement cela permet de clarifier les choses et de transmettre des com pétences, mais le processus est de surcroît contrôlable.
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Travail avec des interprètes
Des compétences linguistiques lacunaires rendent difficile voire impossible la communication entre professionnel(le)s et client(e)s et impliquent le recours à un ou une interprète. L’objectif est d’obtenir une communication claire dénuée de tout mal entendu linguistique, sans pour autant perturber le cadre théra peutique et la relation entre professionnel(le) et client(e).
Interprètes professionnel(le)s
Hormis certains cas bien particuliers où il s’agit de ne transmettre que des informations purement objectives, on ne devrait engager que des interprètes professionnel(le)s, si possible certifié(e)s, et ni des proches ou des connaissances des client(e)s, ni des personnes travaillant dans l’institution. Surtout, les enfants ne doivent en aucun cas servir d’inter prètes.
Les interprètes qualifié(e)s sont attentifs(ves) dans leur travail aux
aspects culturels et sociaux et peuvent en conséquence apporter des in formations pour favoriser la compréhension entre les participant(e)s.
Soutien institutionnel
Faire appel à un ou une interprète implique des frais ainsi que des efforts supplémentaires de la part des professionnel(le)s. Aussi doiventils ou elles être soutenu(e)s par la direction via des règles institutionnelles claires sur l’engagement d’interprètes. En plus d’instructions pratiques et d’une formation continue, cela comprend notamment la gestion d’une liste constamment actualisée d’interprètes professionnel(le)s ou la collaboration avec des services professionnels d’interprétariat. Ainsi seratil possible, en cas d’urgence, de disposer rapidement d’un ou d’une interprète.
5 Travail avec des interprètes
S’exprimer dans sa langue maternelle
L’assistance d’interprètes ne rend pas seulement possible la compré hension mutuelle au niveau linguistique, mais elle permet à la clientèle de s’exprimer dans sa langue maternelle et favorise par là l’expression de son état et de ses sentiments intérieurs. Aussi se révèletil parfois opportun de recourir à des interprètes même pour des migrant(e)s qui maîtrisent relativement bien la langue française dans la vie de tous les jours.
Modification de la situation d’entretien
La collaboration d’un ou d’une interprète modifie la constellation thé rapeutique. La relation duelle entre professionnel(le) et client(e) est
rompue et l’intimité de l’entretien s’en trouve modifiée, aussi subtil et neutre que puisse être l’interprète. Le ou la professionnel(le) peut égale ment se sentir contrôlé(e) dans une telle situation.
Selon les interprètes, la traduction comprendra plus ou moins de com posantes culturelles et la part de subjectivité, d’intuition et d’émotion jouera un rôle plus ou moins important. Dans ce contexte, il convient de veiller à éviter des « alliances » entre deux personnes.
La traduction prend du temps, temps qui doit être inclus dans la planifi cation de l’entretien. De surcroît, le flux de la discussion étant sans cesse interrompu, une concentration et une patience accrues de tous et
toutes les participant(e)s sont requises.
Indications pratiques
Avant leur premier entretien, le ou la professionnel(le) expliquera à son ou sa client(e) les principes régissant la collaboration d’interprètes : res pect du secret professionnel et neutralité à tous égards. L’accord du ou de la client(e) doit être acquis ; cas échéant, cet accord sera renouvelé lors de nouvelles interventions de l’interprète comme aussi, en cours d’entretien, lors de situations particulières. Il peut faire l’objet d’un
document écrit et signé par les trois parties. Même si l’interprète fait preuve de neutralité, il faut être attentif aux répercussions du genre, de la nationalité ou du groupe d’appartenance de celuici.
Il peut être utile de donner connaissance à l’avance du contenu approxi matif et des objectifs de l’entretien à l’interprète. Par ailleurs, il est judi
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5 Travail avec des interprètes
cieux de collaborer constamment avec le ou la même interprète, cela permettant de réduire l’investissement en temps et ayant un effet po sitif sur l’atmosphère, l’intensité et la continuité de l’entretien. Un lan gage simple et clair de la part du ou de la professionnel(le) facilitera éga lement la traduction. Ce qui est dit doit l’être explicitement ; en d’autres termes, il ou elle ne doit pas déléguer inconsciemment la responsabilité de transmettre certains contenus à l’interprète.
Enfin, il peut se révéler utile de recourir à des moyens auxiliaires dans la langue des migrant(e)s pour faciliter la communication sur certains
thèmes délicats (p. ex. brochures de prévention du sida, de l’hépatite C, etc.).
Pour informations
L’interlocuteur privilégié pour tout renseignement ou information sur la traduction interculturelle est Interpret, l’Association suisse pour l’inter prétariat communautaire et la médiation culturelle. Son site Web
(www.interpret.ch) fournit des définitions et des arguments sur la tra duction interculturelle, des indications sur la manière de mener un en tretien, un registre des services professionnels d’interprétariat et d’in terprètes certifié(e)s, ainsi qu’une bibliographie et de précieux liens.
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Anamnèse
Les individus ont une compréhension de la santé et de la maladie qui est marquée du sceau de l’histoire et de la culture. Elle se forme dans un contexte social donné. L’échange, entre migrant(e)s et professionnel(le)s, de leurs représentations respectives sur l’ori gine de la maladie et la guérison est donc très important. A cet
égard, il faut donc être sensible à l’importance de la langue dans l’évaluation et la présentation de symptômes. Ce qui est écrit ci après sur l’anamnèse est en grande partie également valable pour la thérapie, en particulier dans l’approche selon laquelle l’anam nèse constitue déjà un processus thérapeutique.
Autoévaluation et évaluation par des tiers
Les migrant(e)s dépendant(e)s ont souvent un grand besoin de confor mité, d’appartenance et présentent un degré élevé de faculté d’adapta tion. A l’utilisation d’instruments cliniques de diagnostic (SKID I/SKID II/
SKID D 1 ), nous constatons, expérience faite, un écart entre l’autoéva luation et l’évaluation par des tiers. L’autoévaluation montre souvent une surestimation de la capacité de contrôle par rapport à sa propre consommation. Les procédures standardisées ne sont donc pas tou jours pertinentes dans la recherche de troubles psychiques ou de la per sonnalité, les systèmes modernes de diagnostic ne comportant souvent aucun paramètre sensible à la culture.
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SKID I & II : strukturiertes Klinisches Interview für DSM IV. (Interviews cliniques structurées pour le DSM IV). Batterie de tests « pouvant être utilisés chez des patients présentant des troubles psychiques traités ambulatoirement ou rési dentiellement », publiée par Hogrefe Verlag, maison d’édition spécialisée
allemande leader dans le domaine de la psychologie et domaines annexes : cf. www.testzentrale.de/ ?mod&id=373 (n. d. t.).
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6 Anamnèse
Or, le statut social exerce une influence directe sur la santé psychoso ciale. La santé d’un individu est en particulier étroitement liée à la qua lité et à l’ampleur de ses réseaux sociaux. C’est pourquoi on peut accep ter par exemple dans certaines situations une motivation externe pour suivre une thérapie (p. ex. « Je veux suivre une thérapie pour faire plaisir
à ma famille, pour la décharger »). Tous ces facteurs doivent donc être pris en compte dans l’anamnèse.
Objectif visé : une histoire globale de la maladie
L’objectif est d’établir une histoire globale de la maladie. Cela signifie qu’en plus du diagnostic clinique, l’anamnèse prendra également en considération les paramètres sociaux de la santé : statut social, réseaux sociaux, soutien social, stress social et sexe social 2 .
Les professionnel(le)s doivent avoir la capacité d’appréhender les réali tés individuelles de leur clientèle, de modifier leurs perspectives et d’en courager des processus de compréhension mutuelle. Ils éviteront les in terprétations culturalisantes et les erreurs d’interprétation qui font que des représentations et comportements incompréhensibles ou problé matiques de la part de client(e)s se voient imputés à des particularismes culturels. Des modèles spécifiques à la migration dans la pathogenèse et la maîtrise de la maladie doivent pourtant être reconnus et les ressour ces significatives des individus concernés mises en valeur.
Finalement, il s’agit de faire en sorte que les client(e)s comprennent et maîtrisent mieux leur situation, leurs problèmes de santé et leur poten tiel de développement et soient en mesure de définir euxmêmes et ellesmêmes la voie qu’ils ou elles veulent emprunter.
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Sexe social : par opposition au sexe génétique, conditionné par des paramètres génétiques, le sexe social renvoie aux représentations, tâches, fonctions et rôles attribués aux femmes et aux hommes, dans la société en général et dans leur vie publique et privée (cf. Eichler, Fuchs, MaschweskySchneider 2000, in
OFSP/Glossaire) (n. d. t.).
6 Anamnèse
Pratique narrative
En les racontant, les événements acquièrent sens et importance dans une histoire de vie subjective. Les récits des client(e)s jouent un rôle
central dans le processus de maîtrise des maladies. Thérapeutes et client(e)s reconnaissent les principes de la double expertise – soit que les client(e)s sont responsables de leur situation de vie (incluant leur his toire de migrant[e]) et les thérapeutes des aspects cliniques.
Relation
Dans leurs contacts avec la personne concernée, les professionnel(le)s se montreront authentiques. Une attitude en retrait au moment d’enga ger une relation empêche en effet un joining réussi, soit l’établissement et le maintien d’une relation de travail constructive. Il est à cet égard important de toujours respecter l’altérité et sa souveraineté.
Obstacles
Souvent, le concept de culture ne fait l’objet d’aucune réflexion dans les organisations d’aide. Or, des processus de culturalisation et de stéréoty pisation peuvent inconsciemment survenir lors de l’établissement de l’anamnèse, la culture étant comprise de manière défensive comme quelque chose de statique, d’étranger.
Si les migrant(e)s ont souvent fait des expériences traumatisantes liées
à des guerres ou à d’autres événements violents, ils ou elles en ont aussi faites au cours du processus migratoire. Dès lors, un questionnement anamnestique dénué d’attention peut déstabiliser les client(e)s et
affecter tant leur état de santé physique que psychique. De bonnes connaissances sur l’apparition et le traitement de troubles posttrau matiques sont conséquemment indispensables pour agir de manière professionnelle.
Conseils, stratégies et instruments
Une anamnèse sensible aux dimensions culturelles et spécifique à la migration implique notamment de prendre en considération les ques tions suivantes : origine culturelle et sociale, migration des parents,
parcours d’intégration, différences observées entre pays d’origine et pays d’accueil, rapport pays d’origine – Suisse, génération de migra tion des parents, compréhension des rôles, migration et dépendance.
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6 Anamnèse
Certaines conditionscadres doivent en outre être respectées :
• Disposer de suffisamment de temps.
• Setting de nature à favoriser l’intensité et l’approfondissement de l’entretien.
• « Small talks » lors de la prise de contact.
• Conduite claire de l’entretien.
• Locaux accueillants.
• Attitude d’estime et d’acceptation envers les personnes sollicitant de l’aide.
• Orientation sur les ressources et les solutions.
Le questionnement anamnestique requiert créativité et flexibilité.
L’inté rêt propre de l’individu devant être respecté. Des entretiens avec la famille ou d’autres proches sont souvent très instructifs quant aux systèmes d’interprétation et de comportements des client(e)s.
Une fois l’anamnèse terminée, il est recommandé d’avoir un échange professionnel au sein de l’équipe de soins afin de définir la stratégie thé rapeutique (durant les trois premiers mois suivant l’entrée du ou de la client[e]). Enfin, le diagnostic doit être compris comme un processus.
7
Transculturalité et dépendance
Dans un contexte de transculturalité, il est nécessaire de s’inter roger sur les adaptations possibles et nécessaires de l’accueil et du cadre thérapeutique offerts aux populations migrantes voire, à la lumière de nos investigations, de la formulation même des problé matiques posées par ces patient(e)s.
La dépendance comme signe d’intégration
La dépendance est décrite comme une problématique souvent colorée de facteurs culturels sans que l’on sache bien distinguer ce qui revient en propre à ces facteurs.
La littérature nous fournit quelques pistes faisant penser que la préva lence de la toxicodépendance chez les migrant(e)s croît en fonction de leur degré d’acculturation dans leur pays d’accueil pour égaler ensuite les prévalences des autochtones. Il s’agit donc plutôt d’un signe d’inté gration que de maladaptation ou de difficultés d’acculturation. D’autres conceptions évoquent l’idée de la toxicodépendance comme possibilité d’accès à des réseaux « ultracourts » d’intégration. Le produit et son commerce rassembleraient des caractéristiques de « codages sociaux » et de « langage » rapidement accessibles pour une création facilitée de liens sociaux à la personne peu intégrée.
Lorsqu’on parle de psychopathologie chez un ou une patient(e) migrant(e), on peut communément commettre, parmi d’autres, deux erreurs fon damentales. La première serait de surestimer la valence de la culture dans la psychopathologie présentée par le ou la patient(e). La seconde, de la minimiser en considérant une universalité structurelle de l’individu et de la pathologie.
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7 Transculturalité et dépendance
Culture et identité
Il est actuellement assez bien établi que pour les jeunes d’origine étran gère, la construction de référentiels personnels comme de réseaux so ciaux et culturels harmonieux relève d’une équation complexe qui peut s’avérer chaotique. A l'adolescence en particulier, la confrontation iden titaire avec les modèles parentaux est souvent difficile. Le contexte d’acculturation des parents, souvent problématique, peut rendre ten dus voire ambigus les rapports à leur culture d’origine. Ceci peut exacer ber les malentendus et les clivages habituels à cette période de dévelop pement.
La clinique de cette population doit nous conduire à évaluer de quelle façon la culture d’origine parvient à exister et s’étayer. Parfois elle devient « fantomatique », obsédante voire persécutrice. C’est un des as pects importants de la formulation culturelle (outil d’évaluation et de compréhension transculturelle du DSM IV). Cette dernière peut per mettre de comprendre les rapports parfois très problématiques que certain(e)s patient(e)s nourrissent soit à l’adresse de leurs parents ou de leur communauté, jugés « rétrogrades et murés dans des principes cultu rels catégoriques » soit au contraire, visàvis de leur culture d’adoption ou visàvis des conditions de vie laissées aux familles migrantes dans le pays d’accueil.
Dans ces processus d’acculturation, le vécu des migrant(e)s peut en effet s’entendre comme une constante « réinterprétation » de sa réalité
interne, sensible à tout nouvel événement intercurrent, personnel ou familial. Il convient alors d’accompagner ces possibles remaniements identificatoires ou au contraire « désidentificatoires », dans le parcours des migrant(e)s vers l’autonomie et la gestion pulsionnelle.
Démarche de questionnement
Nous pouvons imaginer quatre questionnements fondamentaux per mettant une bonne approche et compréhension des spécificités cultu relles que peut revêtir une toxicodépendance chez un ou une patient(e) migrant(e) :
7 Transculturalité et dépendance
1. Les motifs de la consommation : deuils, traumas individuels ou collectifs (conflits ou guerres) ? Ces motifs sontil en rapport avec des données
• prémigratoires ?
• migratoires ?
• postmigratoires ?
• culturelles ?
• liées au processus d’acculturation ?
• liées aux difficultés de la communication interculturelle ?
2. Quelles difficultés/obstacles peut rencontrer un ou une mi gran t(e) dans le traitement de sa toxicodépendance au sein des dispositifs mis en place dans le pays d’accueil ?
Par exemple : la cure de méthadone, les programmes d’héroïne, le sevrage hospitalier, le suivi psychologique ou psychiatrique, les place ments résidentiels sontils adapté à cette population ?
3. Quelles ressources manquent dans le dispositif ? Support reli gi eux, communautaire, familial, parrainage ?
4. Quel statut ont la toxicodépendance et les modalités des traite ments de la toxicodépendance dans le pays d’origine ? Comment traiteton la toxicodépendance dans le pays d’origine des mi grant(e)s ?
• Trouveton d’autres modalités de traitement ou de soins dans le pays d’origine ? Sontils facilement accessibles ?
• Existetil une disqualification, une discrimination ou une exclusion particulière des toxicodépendant(e)s dans le pays d’origine ?
• A quoi ou à qui attribueton la toxicodépendance dans cette cul ture ; qui s’en défend, qui s’en cache ?
• L’accès au produit estil facile ?
Globalement ici, quelle gestion faiton des « quatre piliers » (préven tion, traitement, réduction des risques, répression) dans le pays d’origine des migrant(e)s ?
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7 Transculturalité et dépendance
Les obstacles
De la part des équipes de soins
• Attente et attribution du rôle médical, stigmatisation des migran t(e)s ou de certaines communautés migrantes.
• Problématique genre.
• Problèmes linguistiques.
• Etiologies culturelles : à quoi ou à qui attribueton la toxicodépen dance dans la culture en question, qui s’en défend, qui s’en cache ?
• Problèmes relationnels : existetil une disqualification, une discri mination ou une exclusion particulière des toxicodépendant(e)s
migrant(e)s dans le pays d’accueil ?
• Contreattitudes des soignant(e)s.
De la part du ou de la patient(e)
• Accès aux soins, structures des soins inadaptées, méconnaissance des dispositifs de soins.
• Peur de la stigmatisation dans le pays et dans la famille.
• Méfiance face au respect de la confidentialité et du secret médical.
• Nonreconnaissance de la toxicodépendance comme une maladie
(mais plutôt comme une déviance).
• Nonacceptation de certaines formes de traitement, rejetées par
l’entourage (cure de méthadone).
Conseils, stratégies et instruments
Il apparaît essentiel dans ce contexte de questionner nos représenta tions et nos constructions théoriques sur l’approche de la toxicodépen dance pour les populations migrantes.
Les outils de formulation culturelle d’une affection médicale peuvent offrir un modèle d’évaluation structurée à utiliser pour mieux prendre en compte la différence (culturelle) entre soignant(e) et soigné(e). Cepen dant, ces outils ne sont encore que très mal ancrés ou systématisés dans nos pratiques institutionnelles et cliniques.
Eléments de la formulation culturelle :
• Identité culturelle de l’individu.
• Explications culturelles de la maladie.
7 Transculturalité et dépendance
• Facteurs culturels liés à l’environnement psychosocial et au niveau de fonctionnement.
• Eléments culturels de la relation entre l’individu et le clinicien.
• Synthèse de l’évaluation culturelle et implication dans le diagnostic et la prise en charge.
Il s’agit ici de repérer les problèmes de compréhension de la maladie entre les patient(e)s et les soignant(e)s et d’évaluer comment certains aspects de l’affection peuvent revêtir une spécificité en rapport à la culture d’origine, au statut de migrant(e) et bien entendu à la rencontre entre patient(e), soignant(e)s et structures de soins dans ce contexte.
Une technique, même thérapeutique, ne peut en effet se concevoir hors d’une culture. Elle est même un des outils principaux de transmission.
Cette dimension est essentielle, car, en tant que thérapeute, il faut être conscient de l’aspect « médiateur de transmission » de la culture.
Identifier les traumatismes
Pour les patient(e)s migrant(e)s toxicodépendant(e)s, il convient d’être tout particulièrement attentif à évaluer les possibilités d’un diagnostic lié à un traumatisme.
Les modèles explicatifs pour un abus de substance en association avec un trouble de stress posttraumatique (PostTraumatic Stress Disorder,
PTSD) sont les suivants :
• Hypothèse de l’automédication (Khantzian, 1985).
• Utilisation de l’effet amnésiant de l’alcool et des benzodiazépines face
à la mémoire traumatique (Stewart, 1998).
• Dissociation chimique (Langeland, Van Den Bosch, 2002).
• Hypothèse de la prise de risques ou en réponse à la recherche de sen sations, à l’impulsivité.
• Hypothèse de la susceptibilité.
• Hypothèse d’un troisième facteur étiologique commun à la toxicodé pendance et au PTSD.
• Hypothèse de l’affiliation, socialisation et médiatisation des relations ;
« réseaux ultracourts » (Gransard et Nathan, 1999).
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7 Transculturalité et dépendance
A noter que les histoires et événements traumatiques sont certaine ment plus fréquents que l’existence propre d’un PTSD.
Nous ne pouvons par ailleurs qu’insister sur la nécessité de former les
équipes de soins pour toxicodépendant(e)s à la formulation culturelle et
à l’acquisition d’une compétence culturelle. Nous rappellerons que le ou la médiateur(trice) culturel(le) doit faire partie intégrante du réseau de soins. Il ou elle détient en effet une connaissance complémentaire de la réalité du ou de la patient(e), est en lien avec la communauté de celuici ou de celleci et peut donner un reflet de l’intégration sociale dans leur communauté. Il ou elle peut ainsi permettre une meilleure concordance du ou de la patient(e) avec la structure et la philosophie des soins propo sés et faciliter son adhésion thérapeutique.
Enfin, si les compétences culturelles des équipes de soins demeurent in suffisantes, il est utile d’avoir recours à une consultation transculturelle
(sur le modèle de A. M Kleinman, progressivement mis en place dans de nombreux hôpitaux) donnant accès au travail heuristique sur la psycho pathologie de ces patient(e)s et ouvrant de nouvelles pistes de soins, d’orientation et de ressources communautaires ou sociofamiliales.
8
Processus de guérison
Guérir est une aspiration universelle. La fonction de la guérison comporte en soi un sentiment proche de la peur de la finitude, de la mort ou du néant. C’est pourquoi la guérison concerne depuis des siècles le corps et l’âme (esprit). Il ne s’agit pas ici d’une approche technique ou médicale, mais d’une base de travail centrée sur la relation. L’objectif est d’accompagner au mieux le processus de guérison ou, du moins, d’aider en cas de nonguérison.
Parler de sa dépendance
Le ou la migrant(e), par sa condition multiculturelle ou de déraciné(e), doit redéfinir son identité personnelle et culturelle. Une multitude de facteurs externes et internes participent à cette construction. Le désir de guérison fait partie, entre autre, des revendications que nous ren controns dans nos pratiques de médecin, psychologue, infirmier(ière),
éducateur(trice) ou assistant(e) social(e).
La dépendance est souvent perçue comme une « maladie honteuse » par le cercle familial et par la personne ellemême. Elle recherche une aide médicale et est habitée par un sentiment d’échec familial. Cette perception crée une injonction paradoxale avec laquelle le ou la mi grant(e) aura à composer :
« Je suis dépendant(e) et pour guérir je dois en parler, mais ma maladie est une honte pour ma famille, je ne dois donc pas en parler ! »
De ce fait, les relations de soins et d’aide entre les patient(e)s mi grant(e)s et le personnel aidant se complexifient, contrairement à une maladie guérissable par un acte chirurgical et la prise de médicaments.
On parle plus facilement de ce genre d’atteinte et elle fait souvent l’objet d’une acceptation plus sereine par le système de soins et l’entourage du malade. La dépendance, mauvaise réponse à une bonne recherche et
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30
8 Processus de guérison
vraie souffrance tout de même, met la personne et son entourage en situation d’échec.
Une approche spécifique à la migration
Une approche spécifique à la migration pourrait apporter un complé ment utile à l’intervenant(e). Sorte de petit mode d’emploi en trois temps utilisable en une séance ou sur un processus plus long, cela dé pendra du temps à disposition.
1. Le temps de l’acceptation de la différence
Pour y parvenir, il faut être attentif à ne pas créer de hiérarchie cultu relle mais plutôt à comprendre les explications des client(e)s et à les considérer comme plausibles. Le refus de l’évolution linéaire de la cul ture nous permet de considérer comme égale toute connaissance. La perception de l’autre se fait dans la reconnaissance de son problème au sens de Lévinas. Ce dernier étend la responsabilité que nous avons en vers notre famille à tout être humain. Ce qu’il nomme « l’expérience du visage » consiste à rencontrer l’autre dans sa vulnérabilité avec empa thie ; j’ai donc un sentiment de responsabilité envers cet « autre que moi » qui qu’il soit.
En résumé, ma culture n’est pas supérieure. La vulnérabilité humaine est semblable dans toutes les cultures, elle ne peut ni ne doit m’échap per et je suis responsable de la relation que je crée avec mon visàvis.
Si ce positionnement pose problème, j’en réfère à mes collègues ou je renonce à la prise en charge à un stade précoce.
2. Le temps de la responsabilité
L’intervenant(e) travaille à la recherche de solutions pragmatiques. La deuxième cybernétique systémique nous propose quelques repères :
L’intervenant(e) est partie prenante du processus de guérison. Il ou elle est acteur(trice) et influence le système de référence de la personne
dépendante. Ses représentations sur la guérison et la maladie vont avoir une influence aussi sur le vécu de l’autre. Il ou elle participe à la construc tion de la réalité en cours d’observation.
8 Processus de guérison
Le système est capable d’évolution et être un membre actif du système implique la coconstruction de la solution. On proposera des solutions communes visant des objectifs pragmatiques à court et moyen terme.
L’entretien motivationnel, la méthode de résolution de problèmes de
Palo Alto, l’analyse transactionnelle et les thérapies cognitivocompor tementalistes sont d’excellents outils à ce stade. On évitera la culturali sation du problème.
3. Le temps du travail sur le ressenti
Le ou la client(e) et l’intervenant(e) construisent ensemble une nouvelle définition du problème.
Après avoir expérimenté la collaboration pragmatique au point 2, la re lation de confiance se crée.
Il n’est pas aisé de définir exactement la nature de son problème. Dans leur ouvrage « l’instant de guérison », JeanJacques Lagardet et
Christian Flèche prônent une approche en quatre temps inspirée de la médecine biologique, comme un chemin de découverte du ressenti de la per sonne :
1. Les actes : quelle est la trame de son histoire ?
2. Les pensées : comment sa manière de penser influence ses actions ?
3. Les sentiments : estelle triste, joyeuse ? Atelle peur ou estelle en colère ?
4. Le ressenti : peuton aider à décrire ce qui est ressenti avec des mots adéquats ?
La perception de son ressenti aura l’avantage de permettre une appro che simple du vécu conscient et inconscient.
Inventer une solution
La dépendance intègre un parcours de vie. Elle ne reste plus cette île dé serte dont personne n’a encore foulé les rivages. L’intervenant approche de la côte (point 1) et observe les passages dans les récifs. Il jette l’ancre et aborde avec circonspection les côtes (point 2). Il partira ensuite à la découverte de l’intérieur de l’île (point 3).
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8 Processus de guérison
La main experte de l’aventurier ne pourra amener une aide que si elle s’intègre à l’écosystème bien fragile de l’ensemble des éléments natu rels qui composent le tout y compris les mécanismes de défense indis pensables au maintien de l’équilibre.
« Les faits n'appartiennent tous qu'au problème, non à sa solution. »
Cette citation de Wittgenstein nous amène à conclure sur une injonc tion constructive : inventer une solution consiste à pratiquer l’art de la découverte. Nous nous rappellerons également les mots de Christian
Bobin, écrivain français : « Ce qu'on sait de quelqu'un empêche de le connaître. »
9
Approche systémique
Trop fréquemment, la migration n’est associée qu’à des problèmes alors qu’avec une attitude de « nonsavoir » et de curiosité, les res sources vont retrouver la place centrale qui leur revient et les com pétences propres des client(e)s être encouragées.
Focaliser sur les ressources plutôt que sur les déficits
Si la littérature spécialisée ne manque pas de traiter de la migration, elle le fait toutefois la plupart du temps dans une optique axée sur les déficits. C’est ainsi que le terme « migration » se voit trop facilement associé à « problèmes ». Et s’il est abondamment écrit sur la « culture », l’accent y est mis sur les différences. Or, une telle attitude crée une distance entre thérapeutes et client(e)s.
« Les recherches scientifiques concernant la santé psychosociale des migrant(e)s se sont jusqu’ici fortement orientées sur la pathologie et ne prennent guère en considération la perspective de la population mi grante ellemême et de ses ressources. La situation des migrant(e)s y est plutôt fréquemment problématisée dans le cadre d’un discours sur la misère. » (Regula Weiss, 2003, p. 283). On tient donc trop peu compte que la migration cache en elle des ressources personnelles. Les indivi dus qui prennent sur eux tout un processus migratoire développent nécessairement d’énormes ressources pour pouvoir maîtriser cette tâche vitale. Aussi peutil être d’un grand profit de porter le regard, dans l’activité de conseil ou de traitement des migrant(e)s, sur leurs ressources plutôt que leurs déficits. L’approche systémique orientée vers la solution offre à cet égard une méthode idéale et des instruments appropriés.
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34
9 Approche systémique
Attitude de non-savoir et de curiosité
Avec une attitude de « nonsavoir », on évite de tomber dans le « piège de la culturalisation ». Ce nonsavoir entraîne « une attitude générale ou un point de vue où les actes des thérapeutes manifestent une curio sité sincère et riche. Ce qui signifie que leurs actes et attitudes expri ment plutôt le besoin d’en apprendre plus sur ce qui a été dit que de communiquer des opinions ou des attentes préconçues à l’égard des client(e)s, de leurs problèmes ou de ce qui devrait être changé. Le ou la thérapeute se positionne ainsi d’emblée d’une manière qui lui permet d’être « informé(e) » par le ou la client(e). » (Anderson & Goolischian,
1992, p. 29, cité dans Peter De Jong / Insoo Kim Berg, 1999, p. 46).
Pleins pouvoirs aux client(e)s
Se focaliser moins sur les problèmes et plus sur les forces et l’empowerment de la clientèle crée, dans la pratique, les bases sur les quelles clients et clientes peuvent aller chercher l’autorisation d’élargir leurs propres compétences et de les intégrer à leur vie quotidienne.
Porter son regard sur les solutions, accompagner les client(e)s dans la recherche de leurs propres solutions et visions décharge les thérapeu tes de l’idée de devoir euxmêmes ou ellesmêmes imaginer des solu tions. Là aussi, la responsabilité doit être laissée aux personnes deman dant conseil, comme le pense De Shazer : « La meilleure manière de décider quelle porte peut être ouverte pour trouver une solution
con siste à obtenir une description de ce que le ou la client(e) va faire de différent et/ou ce qui se passera si le problème est résolu, de manière à créer ainsi l’attente d’un changement positif. » (De Shazer, 1985, p. 46, cité dans Peter De Jong / Insoo Kim Berg, 1999, p. 37).
Les attitudes, méthodes et instruments mentionnés ici n’ont pas été
élaborés spécialement à l’intention du travail avec la population mi grante. Dans la mesure toutefois où ils sont orientés vers l’individu et ses ressources, ils conviennent parfaitement au travail avec cette
clientèle.
9 Approche systémique
Entre possible et réel
« Le possible est presque infini, tandis que le réel est strictement déli mité. Le réel, c’est presque toujours un possible, élu dans une multi tude. Un cas particulier du possible. C’est pourquoi la pensée peut l’aborder de diverses manières. Pénétrer dans le possible, c’est modifier notre regard sur le réel. » (Friedrich Dürrenmatt, Justice
1
)
1
Dans la traduction d’Etienne Bariller,
éditions Julliard/L’Age d’Homme, 1986, p. 63 (n. d. t.).
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10
Traitement de substitution des patient(e)s en situation de précarité
La mise en place d’un traitement de substitution pour des mi gran t(e)s en situation de précarité pose des questions concernant
l’accueil, la prise en charge pécuniaire, la durée du traitement ainsi que le retour dans le pays d’origine ou le départ vers un autre pays.
Les non-entrée en matière (NEM) et les « sans-papiers »
Parmi les patient(e)s migrant(e)s en situation précaire, on peut identi fier deux groupes bien distincts :
Nonentrée en matière (NEM) : ce premier groupe concerne des person nes qui ont déjà fait une demande d’asile, laquelle a été refusée. Ces patient(e)s sont appelés NEM par les services administratifs et se re trouvent de facto sans assurance, sans logement et sans ressources.
Ces patient(e)s restent néanmoins connus et enregistrés dans le can ton. Ils risquent l’expulsion du jour au lendemain. Ils peuvent bénéficier de l’aide sanitaire ou sociale d’urgence.
Les « sanspapiers » : ce deuxième groupe concerne des migrant(e)s qui n’ont pas fait de demande d’asile et qui vivent de manière anonyme et clandestine en Suisse. Ces patient(e)s n’ont officiellement aucune
existence légitime sur le plan administratif. Il est très difficile de les re censer et de les quantifier. Ces personnes n’ont pas d’assurance, pas de ressources et pas de logement officiel mais demeurent sur le terri toire.
Dans les deux cas, ces patient(e)s ont parfois une demande précise :
recevoir un traitement de substitution en raison d’une dépendance aux opiacés. Ils ou elles peuvent aussi rencontrer des problèmes somati ques dus à une mau vaise santé physique et mentale.
10 Traitement de substitution des patient(e)s en situation de précarité
Importance de favoriser l’accueil et le lien malgré la méfiance
Ces patient(e)s sont souvent dans la crainte d’être arrêtés par la police, d’être jugés, mis à l’écart. Il est donc essentiel de les rassurer en invo quant le secret médical et professionnel.
Dans certains cas, le recours à un ou une interprète est indispensable pour évaluer les besoins des patient(e)s et transmettre les objectifs et limites du traitement. La consultation devrait se dérouler avec les médecins, infirmiers(ières) et travailleurs(euses) sociaux(les) sen si bili sé(e)s à cette problématique.
Le financement et la durée du traitement
Les démarches dépendent de la législation cantonale. Dans certains cantons, le ou la patient(e) a accès non seulement à un traitement de substitution, mais également à une prise en charge globale avec ECG et bilan sanguin d’entrée, ce qui permet parfois de mettre en évidence une pathologie sousjacente.
La durée du traitement est très variable, car elle dépend en priorité du risque d’expulsion ou du départ précipité du ou de la patient(e). C’est souvent un traitement à évaluer en permanence, car il peut durer de quelques semaines à plusieurs mois.
Il est essentiel de planifier un sevrage en cas de retour dans le pays d’origine (procédure de renvoi ou retour volontaire) ou en cas de départ vers un autre pays. Dans le cas où le traitement avec méthadone ou buprénorphine serait assuré, il est important de contacter les autorités sanitaires à l’avance et d’établir un rapport médical. Le ou la patient(e) doit être informé(e) de son droit à la santé par rapport à la problémati que de dépendance aux drogues en cas de retour. Les professionnel(le)s doivent s’informer sur le type de soins dispensés dans le pays d’origine.
Dans le cas du départ volontaire, le sevrage est organisé avec les pa tient(e)s selon la date de départ.
Lorsque cela est possible, et avec l’accord des patient(e)s, le service de soins en Suisse peut contacter la CroixRouge pour une aide au départ en vue de la suite des soins à l’étranger.
Un courrier doit être préparé afin d’être présenté aux responsables sanitaires en cas de poursuite des soins à l’étranger.
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10 Traitement de substitution des patient(e)s en situation de précarité
Certaines situations particulières exigent la poursuite des soins ambu latoires malgré l’absence d’une couverture financière, mais cela doit se faire avec l’accord explicite du médecin chef de service.
Le problème de la prise en charge financière dans ces situations montre l’importance de développer des ressources au niveau cantonal et fédé ral afin de couvrir les besoins en matière de soins.
Traitement des patient(e)s requérant(e)s d’asile
Ces patient(e)s sont couvert(e)s par l’assurancemaladie de base. L’accès aux traitements ambulatoires et hospitalier (en unité publique de soins) est entièrement pris en charge par la LAMal. L’assurance de base donne en Suisse une couverture assez complète pour la problématique de la dépendance.
Par contre, une délégation de soins (document sur papier) établie par un médecin est souvent nécessaire.
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Thérapie à l’étranger
A première vue, une thérapie à l’étranger paraît toujours oppor tune pour des client(e)s issu(e)s de la migration, que ce soit pour des raisons linguistiques, culturelles ou comme moyen pour eux ou elles de « retrouver leurs racines ». En tous les cas, il convient de soigneusement peser les arguments pour ou contre un tel choix.
De surcroît, la qualité de l’offre et surtout le retour en Suisse desdit(e)s client(e)s doivent se voir accorder la plus grande atten tion.
Arguments pour et contre une thérapie à l’étranger
Ce sont souvent les parents qui poussent à renvoyer leur fils ou leur fille dans leur pays natal, que ce soit par honte ou par crainte des con séquences de la toxicomanie de leur enfant ou par conviction qu’une thérapie y sera plus adaptée et plus efficace qu’un traitement en
Suisse.
Les motifs plaidant en faveur ou non d’une thérapie à l’étranger doivent dans tous les cas faire l’objet d’une évaluation individuelle pour chaque cliente. Il n’est par exemple pas question qu’une telle thérapie ait lieu pour permettre aux professionnel(le)s de sortir d’une situation de thé rapie ou de conseil bloquée. Et encore moins sur la base d’allégations culturalisantes (« La problématique du ou de la client(e) est de nature culturelle, aussi vautil mieux qu’il ou elle aille dans son pays, où on le ou la comprend mieux »). Une thérapie à l’étranger ne doit pas non plus
être simplement choisie pour des raisons de coût. Elle est souvent vue d’un bon œil par les organismes payeurs qui négligent toutefois l’importance du travail administratif et organisationnel que cela
suppose, travail qui mérite toujours d’être pris en considération.
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11 Thérapie à l’étranger
Dans bien des cas, qu’on ne saurait toutefois généraliser, une thérapie
à l’étranger est parfaitement indiquée : par exemple lorsqu’un séjour résidentiel n’est pas possible en Suisse par manque de connaissances linguistiques. Ou lorsque la relation avec le pays d’origine est très
étroi te respectivement doit être rétablie ou qu’il s’agit de (re)découvrir sa propre culture.
Conditions de la réussite d’une thérapie à l’étranger
Les deux points indubitablement les plus importants pour le succès d’une thérapie à l’étranger sont la qualité de l’offre ainsi que le soutien accordé aux client(e)s avant et après leur séjour hors de Suisse.
La qualité d’une institution étrangère ne peut pas être contrôlée depuis la Suisse, à quoi s’ajoute l’absence de contrats de prestations entre or ganismes payeurs et institutions étrangères. Aussi faudraitil veiller à ce que l’institution choisie bénéficie d’une reconnaissance officielle du pays concerné.
La collaboration directe entre institutions suisses et étrangères peut aussi donner de très bons résultats (exemple : l’ancien projet Xenos, avec une collaboration entre le CEIS – Centro Solidarietà de Modène/
Italie – et diverses institutions ou organisations de migrant(e)s en
Suisse).
Il est de plus indispensable de discuter ouvertement avec le ou la
client(e) de sa motivation intérieure, des motifs d’une thérapie à l’étranger et de ses avantages et désavantages. En effet, s’il ne s’agit que de (re)prendre contact avec le pays d’origine, un simple voyage avec le ou la client(e) peut aussi avoir un effet positif.
Retour en Suisse
Un des points critiques d’une thérapie à l’étranger, auquel il faut accor der la plus grande attention est celui du retour en Suisse. Le séjour à l’étranger peut en effet devenir une sorte de « vacances » et, de retour en Suisse, des rechutes de consommation peuvent apparaître. D’autant que le vocabulaire utilisé pour une thérapie à l’étranger (qui constitue aussi un « voyage ») est pour une part le même que celui utilisé pour une dépendance : il s’agit d’un « trip », d’une initiation.
Le retour ainsi que le suivi postérieur doivent donc être soigneusement préparés, parents et autres proches jouant à cet égard un rôle impor
11 Thérapie à l’étranger
tant. Idéalement, le travail de soutien parental devrait se poursuivre parallèlement à la thérapie de leur enfant à l’étranger. A relever aussi que les groupes d’échanges d’expériences regroupant parents et
client(e)s, après leur retour en Suisse, ont également fait leurs preuves.
Situations particulières
Des problèmes particuliers se posent en cas d’expulsion du territoire ou de renvoi de personnes dépendantes ou sous traitement de substitu tion (p.ex. requérant(e)s d’asile). Il va alors falloir en très peu de temps clarifier les possibilités de prise en charge dans le pays de renvoi, y con tacter les services compétents et, cas échéant, adapter le traitement de substitution ou prévoir un sevrage.
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Enfants – Jeunes – Parents
Toute migration modifie à bien des égards la structure familiale.
Les enfants et adolescent(e)s sont toujours particulièrement affecté(e)s par une situation migratoire. Après leur intégration le plus souvent rapide dans le pays d’accueil, ils ou elles se voient en partie confronté(e)s à des exigences contradictoires. A quoi
s’ajoute qu’ils ou elles doivent, la plupart du temps, assumer des tâches d’adultes ainsi que des fonctions de médiateurs(trices). Les offres d’aide doivent donc, avant tout, réduire la pression résultant de cette situation et ce, si possible, en y associant les parents.
Enfants et adolescent(e)s ne peuvent être considérés indépendamment de leur famille, et en particulier de leurs relations avec leurs parents. Les problématiques rencontrées par les familles de migrant(e)s et leurs en fants ne se distinguent pas nécessairement de celles rencontrées par les familles suisses, quand bien même il peut y avoir des différences spécifi ques à la migration ; différences qui, selon l’origine et la situation indivi duelle, acquièrent plus ou moins d’importance.
Adolescence et migration
Durant la phase de l’adolescence, les jeunes migrant(e)s doivent maîtri ser − en plus des processus liés à leur développement − leur situation de migrant(e)s. Ceci peut entraîner une pression considérable et des réac tions d’évitement. Emigrer signifie devoir quitter un contexte de vie et en intégrer un nouveau, avec le déracinement et les efforts d’adapta tion que cela implique. Les enfants en particulier doivent endurer de grandes tensions, étant en partie confrontés à des attentes et des va leurs provenant de deux côtés : de la famille et de la communauté mi grante d’une part, de leur nouvel environnement d’autre part. Ce qui
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peut aboutir à des conflits de loyauté, conflits susceptibles d’être parti culièrement aigus chez les jeunes filles issues d’un milieu traditionnel.
Situation socio-économique
Un éventuel déclin socioéconomique de la famille dû à la migration peut encore accroître la pression et affecter le développement des en fants et la formation de leur identité. En effet, d’une part ils ou elles perçoivent le déclin du statut social de leurs parents et, d’autre part, se retrouvent − en tant que membres d’une classe sociale socioéconomi quement faible − avec des chances conséquemment réduites de forma tion et d’emploi. Et si les deux parents sont contraints de travailler, les enfants se trouveront de plus fréquemment laissés à euxmêmes.
Langue – Formation – Intégration
Nombre d’enfants et de jeunes issus de familles migrantes doivent ap prendre à s’accommoder du fait que leurs parents ne comprennent et ne parlent pas ou guère la langue locale. C’est avant tout le cas des mères, en particulier de celles venues en Suisse dans le cadre du regrou pement familial. Or, le manque de compétences linguistiques s’accom pagne fréquemment d’un faible niveau de formation, toutes choses qui font que les parents, par exemple, ne peuvent guère soutenir leurs en fants à l’école. Ils manquent de plus souvent d’informations ou ne sa vent pas où ils pourraient en obtenir, que ce soit concernant le système scolaire, les offres de loisirs, le système de santé, diverses consultations, etc. Et cela est souvent encore plus marqué lorsque l’éducation des en fants se trouve aux mains de la mère. S’ils ont de surcroît fait de mauvai ses expériences avec les autorités, les parents n’ont plus aucune con fiance dans les offres de soutien officielles ; ils se sentent impuissants et privés de toute compétence décisionnelle.
Souvent aussi, les familles ne sont guère intégrées dans la vie sociale indigène, les parents ne faisant partie d’aucune association suisse et n’ayant parfois pas d’amis suisses. Ils ont également tendance à em pêcher leurs enfants de prendre part à la vie sociale du pays d’accueil
(par exemple lors de camps scolaires).
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12 Enfants – Jeunes – Parents
Rôles et conflits des enfants et des adolescent(e)s
Les jeunes sont donc fréquemment obligé(e)s de se débrouiller seul(e)s et d’agir sous leur propre responsabilité. Et non seulement ils ou elles doivent prendre soin d’euxmêmes ou d’ellesmêmes mais ils ou elles sont de surcroît souvent responsables du bon fonctionnement de la fa mille en tant que traducteurs(trices) et médiateurs(trices) culturel(le)s pour leurs parents. Ce faisant, ils ou elles assument des rôles et fonc tions d’adultes qui les surmènent et peuvent entraver leur propre déve loppement. S’ensuivent des inversions de hiérarchie au sein de la famille, aussi problématiques pour les enfants que pour les parents. De plus, la tension entre la bonne intégration des enfants et celle, défaillante, des parents entraîne des angoisses, des malentendus et des divergences d’opinion. Ces dernières recèlent un important potentiel de conflit qui peut se manifester dans le cadre de la collaboration instaurée à l’occa sion d’un conseil ou d’une thérapie.
Angoisses parentales
D’un autre côté, les parents souhaitent que leurs enfants suivent une formation professionnelle garante d’une vie meilleure et d’une ascen sion économique. Pour réussir dans le système scolaire et de formation professionnelle suisse, les jeunes doivent développer des aptitudes et capacités individuelles susceptibles d’être en contradiction avec les exi gences de leur famille et les valeurs de leur communauté. Les progrès des enfants en matière d’intégration peuvent engendrer des angoisses chez les parents : crainte de voir les enfants s’éloigner de leur famille et de ses valeurs traditionnelles, crainte de ce qu’ils ou elles évoluent dans un monde inconnu des parents. Aussi les messages délivrés par les pa rents aux enfants sontils souvent empreints d’angoisse, changeants et contradictoires. Et ce avant tout pour les filles issues de familles plutôt traditionnelles.
Compréhension divergente des problèmes
Quel est le problème, d’où provientil et comment peuton le résoudre ?
Les réponses à ces questions peuvent grandement diverger. Les parents rendent fréquemment la culture locale responsable, de par sa permissi vité, des problèmes de dépendance de leur enfant. Ils se montrent mé fiants ou ont des préjugés négatifs à l’encontre de la Suisse ainsi que de
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ses institutions et conseillers(ères). Aussi la solution consistetelle, à leurs yeux, à renvoyer leur fils ou leur fille dans la mère patrie. Ce qui peut aussi faire office de menace à l’égard d’enfants bien intégrés ici, pour qui le pays d’origine va alors devenir source d’angoisse.
Enfin, la dépendance n’étant parfois pas considérée comme une maladie mais comme une faute personnelle, si une consultation ou une thérapie est acceptée, on attendra d’elle − ou de l’intervenant(e) − une guérison immédiate.
L’expérience migratoire en tant que ressource
La migration, les conditions de vie dans le pays d’immigration, les multi ples exigences et défis rencontrés par des enfants et des adolescent(e)s en pleine croissance ne doivent pas uniquement être considérés comme des charges. Il s’y cache aussi et surtout beaucoup d’espoirs, de force et d’aptitudes ainsi que beaucoup de travail et de réussites de leur part, que ce soit en tant qu’individus ou en tant que familles. C’est sur ces ressour ces qu’une intervention d’aide doit s’appuyer.
Objectif : réduire pressions et tensions
Une intervention d’aide dans le domaine des dépendances a d’abord pour but de réduire tensions et pressions tant chez les enfants et les adolescent(e)s que chez les parents. L’estime de soi et l’idée que l’on se fait de soimême doivent être améliorées, en même temps qu’il faut
éradiquer tout regard négatif porté sur soi. Les craintes et souhaits de toutes les personnes concernées ayant pu s’exprimer, une médiation in tergénérationnelle sera alors possible. Il n’empêche que les droits et de voirs de la vie en Suisse doivent être clairs, et l’accès aux informations et institutions concernées garanti. Cas échéant, il faudra mettre sur pied des réseaux concrets.
Confiance et estime
Une relation de confiance est capitale, mais a pour condition pratique qu’il n’y ait si possible pas de changement de conseiller(ère).
Pour ce qui est du travail avec les enfants, le jeu occupera une place cen trale, dans la mesure où c’est l’agir − et non l’échange verbal − qui a la priorité. Par ailleurs, l’utilisation de symboles et de rituels peut aussi servir d’outil transitionnel avec les adolescent(e)s et les adultes.
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12 Enfants – Jeunes – Parents
Accepter et manifester de l’estime pour le monde et les expériences des client(e)s, en particulier quant à leurs efforts d’intégration, va renforcer leur estime de soi. A côté de cela, il est également nécessaire de leur transmettre les valeurs prévalant en Suisse.
Participation des parents
A moins d’avoir des conceptions de la dépendance et des processus de guérison totalement différentes et incompatibles avec l’approche thé rapeutique du ou de la client(e) et des professionnel(le)s, les parents doi vent autant que possible être associés à la prise en charge. Cela évite que l’écart de leurs connaissances et de leur intégration avec celles de leurs enfants ne se creuse encore plus. Il est également important que les deux parents soient expressément invités, faute de quoi les mères ne viennent souvent pas, alors que ce sont elles qui détiennent la compé tence de décider au sein de la famille.
Le travail avec les parents ou les communautés de migrant(e)s exige parfois de procéder par expérimentation pour trouver le meilleur moyen de les approcher. Des parents coopératifs peuvent servir d’informateurs
à cet effet. Il arrive aussi que des canaux déjà existants (p.ex. soirées de parents à l’école) se révèlent utiles pour approcher les parents. Leur offrir la possibilité de déterminer les conditionscadres d’une rencontre est également prometteur. Par ailleurs, marquer son respect et son estime pour la famille et le chemin parcouru par elle, constitue une base pour impliquer les parents et leur donner confiance. Découvrir et donner un nom à des valeurs morales communes peut permettre de définir des buts communs, d’interpréter positivement (reframing) la situation migratoire et d’en souligner les aspects positifs. La confiance en soi des parents et des enfants en est confortée. En effet, les parents sousesti ment généralement leurs capacités et leur propre efficacité.
Enfin, les parents et leurs droits doivent être pris au sérieux et réelle ment pris en compte. Leur autodétermination doit être encouragée en même temps qu’ils doivent être renforcés dans leur rôle. Ils sont ainsi
à même de se mobiliser pour soutenir leur enfant. Les décisions sur la suite de ce qui est fait avec leur fils ou leur fille dépendent d’eux ou du moins sont prises conjointement avec eux. Les règles et les
con séquences qu’entraîne leur respect ou nonrespect doivent être né gociées et arrêtées avec parents et adolescent(e)s. De même, il est
12 Enfants – Jeunes – Parents
impor tant d’avoir également avec les parents des entretiens de sortie appro fondis.
Communication
Dans nombre de cas, l’assistance d’un ou d’une interprète s’impose.
Cette tâche ne saurait être assumée par un membre de la famille, et surtout pas par des enfants ou des adolescent(e)s.
En formulant les objectifs de manière compréhensible pour toutes et tous, on crée de la sécurité. Aussi vautil la peine de vérifier qu’informa tions et accords sont bien compris. Quant à l’état des connaissances, il doit lui aussi être régulièrement contrôlé.
Aide concrète
Il est également souvent possible d’apporter une aide concrète, par exemple en facilitant l’accès à des institutions et offres sociales ou culturelles. Ces actions, même modestes, ont souvent plus d’impact que des discours.
Obstacle : appréciations erronées
Bien des difficultés relèvent d’erreurs d’appréciation de toutes sortes com mises de part et d’autre. Un comportement problématique de la part de jeunes migrant(e)s est fréquemment considéré par les professionnel(le)s comme dû à la migration, plutôt que comme un problème social et de classe sociale : pauvreté, chômage (du père surtout), maladie, etc. En effet, les ressources et compétences des migrant(e)s sont souvent sousesti mées, parce qu’ils ou elles ne maîtrisent pas la langue française et font preuve d’hésitation et d’ignorance dans leur manière d’agir. C’est en parti culier vrai pour ce qui est de la position et de la compétence des mères, loin d’être aussi dénuées d’autorité au sein de la famille qu’il semble à l’exté rieur. D’un autre côté, les difficultés de compréhension sont elles aussi souvent sousestimées. Même lorsque les parents disposent de bonnes connaissances de la langue locale, peuvent en tout temps survenir des mal entendus susceptibles de compromettre l’activité de conseil ou la thérapie.
Les migrant(e)s pour leur part sousestiment souvent leurs capacités et leur efficacité. Ils ou elles ont aussi une autre compréhension du bienêtre de l’enfant. Il leur est difficile d’admettre que l’Etat assume une responsa bilité sociale et que les enfants ne sont pas simplement livrés sans droits propres à leurs parents.
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Travail avec les familles
Dans la thérapie des dépendances, les ressources que représentent les familles peuvent être encore mieux utilisées. Pour cela, l’inter vention doit être compatible avec le système de signification de la famille. L’histoire familiale se situera au centre de la thérapie : dans un environnement marqué par l’oubli, on va exercer le « se souve nir » et donner par là une continuité à l’histoire familiale, sans pour autant nier le problème.
Pour commencer par une comparaison, on pourrait dire que, de la même manière que les pyramides de l’ancienne Egypte ont affaire aux change ments climatiques, les besoins concrets des familles issues de la migra tion et ayant des problèmes de dépendance ont souvent affaire aux ser vices d’aide. Dans les deux cas, il s’agit d’histoires nées d’un rapport niant la réciprocité. Partant de l’histoire familiale, les réflexions qui suivent vont tenter de rétablir une telle réciprocité.
Histoire familiale
Fort d’une remarquable entente muette entre familles et profession nel(le)s, le travail thérapeutique n’accorde d’ordinaire que peu voire pas du tout d’attention à l’histoire migratoire. La reconstitution de l’his toire familiale et migratoire doit être un moment émotionnellement fort du travail thérapeutique, où l’histoire familiale va servir d’instru ment pour remuer le passé et découvrir des valeurs que l’on pourra ap pliquer à la situation présente. Ce qui équivaut – dans le contexte d’une migration qui fige les souvenirs, les refoule parfois ou leur donne trop de pouvoir – à faire un exercice de mémoire, où il s’agit de se souvenir. La migration est fréquemment liée au refoulement : en effet, pour pouvoir changer, il faut oublier le chemin parcouru et se concentrer sur le but.
13 Travail avec les familles
« Aller toujours de l’avant, toujours plus loin » de même que les peines quotidiennes sont les sacrifices à consentir pour un avenir meilleur, le prix payé à cet effet étant refoulé ou idéalisé. C’est ensuite dans la
« phase de décompression » de la migration (Sluzki, 2001) que surgissent les problèmes.
Déracinement et difficultés d’intégration
Inclure la famille dans le travail thérapeutique est aussi indispensable qu’ardu. Il est important que des thèmes tels que le deuil (de personnes ou de lieux), les difficultés d’intégration ou les résistances à s’intégrer dans le pays d’accueil puissent être mis en discussion avec les familles.
Familles qui présentent souvent une problématique multiple. Le déraci nement d’une personne hors des structures naturelles dont elle est issue peut conduire à un malaise transgénérationnel et aux études de cas qui en découlent.
Mythes familiaux
Dans le travail avec des familles issues de la migration, ce qui apparaît ne correspond pas toujours à ce qui est. Il faut donc souvent insister − en particulier concernant la répartition des rôles familiaux − pour compren dre ce qu’il y a vraiment derrière l’image projetée.
Les mythes familiaux ont une importance toute particulière dans les familles de migrant(e)s. Souvent, ces mythes sont les instruments au moyen desquels on entretient l’illusion de ce que l’on croit être. En fait notamment partie le mythe du « retour au pays ». Méconnaître et ne pas intégrer ces mythes condamneraient à l’échec toute intervention thérapeutique.
Absence de syncrétisme
Dans les familles connaissant des problèmes de dépendance, la hié rarchie générationnelle est souvent inversée et il y a un manque de syn crétisme, soit d’attaches fondées sur une identité de groupe familiale (la famille même). L’absence de syncrétisme signifie que la famille n’est pas parvenue à fondre l’ancien et le nouveau monde en un seul.
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13 Travail avec les familles
Chronification et angoisse
Les familles issues de la migration ne consultent souvent que très tard, lorsque le problème est déjà devenu chronique. La famille demande de l’aide au moment où le système familial est en crise, faute de quoi elle ne solliciterait pas d’aide. Cela signifie que les professionnel(le)s devront d’abord s’occuper de l’angoisse de la famille et tranquilliser celleci d’une manière ou d’une autre avant de pouvoir se consacrer au problème pro prement dit. Traiter avec précaution la gêne, voire la honte et la disposi tion à communiquer qui en découle, constitue la pierre angulaire de toute relation thérapeutique. En d’autres termes, accepter cette gêne est la clé de la compréhension et du changement.
Communication symbolique
Lorsqu’on parle de dépendance avec les familles, on aboutit générale ment d’abord à une situation bloquée et à une communication symbo lique, par laquelle les familles transmettent plus leur propre angoisse que des informations utiles (ainsi vaton par exemple répandre du sel pour écarter le mal). Or, une thérapie peut tout à fait partir de cette communication symbolique dans laquelle sont présents les contenus et les valeurs de la culture d’origine.
Enfants délaissés
Nombre de jeunes ont vécu séparés − réellement ou symboliquement − de leur famille. En particulier les enfants de la migration des années 60 et 70, qui ont souvent grandi chez leurs grandsparents. Cet abandon − tenu secret, méconnu ou franchement assumé − est un thème central dans l’histoire de nombreux jeunes émigré(e)s.
Attitude des professionnel(le)s
Concernant notre attitude de professionnel(le)s, il est essentiel d’avoir la modestie et l’honnêteté intellectuelle de nous considérer comme porteurs d’un savoir qui n’englobe pas tout. En effet, ce dernier est lié à un contexte donné et à notre histoire personnelle ; il ne peut, par consé quent, être que partiel. Ce savoir (qu’on peut aussi nommer culture) peut être remis en question et se modifier dans le dialogue avec la clien tèle issue de la migration. S’il s’agit d’être sensible à l’importance réelle des différences culturelles et de ne pas sousestimer à cet égard sa pro
13 Travail avec les familles
pre appartenance culturelle, il ne faut pas non plus surestimer la diver sité des personnes provenant d’autres cultures. Le b.a.ba de la trans culturalité consiste à faire face à ce défi en ayant pleinement conscience de ses propres limites, sans pour cela se cacher derrière un bureau ou un technicisme exagéré.
Un tel travail peut par exemple s’inspirer des « trois directives pour la direction d’une séance » (d’après Selvini Palazzoli, 1988) : hypothétisa tion, circularité et neutralité.
« Hypothétiser » signifie formuler des hypothèses sur la base des infor mations reçues. Par « circularité », on entend la faculté de considérer le comportement observé dans une famille non de manière linéaire comme un simple mécanisme de cause à effet, mais comme un circuit de régu lation dans lequel tous les éléments du système déterminent récipro quement leur comportement. « Neutralité » (« impartialité ») repré sente l’effet pragmatique du comportement des professionnel(le)s durant la thérapie. Cela signifie qu’aucun vacuum ne se produit dans le système familial une fois la thérapie terminée et que la famille doit à nouveau s’en sortir sans thérapeute.
Première rencontre
Une attention toute particulière devrait être accordée aux modalités de la première rencontre. Une grande part des possibilités d’avoir accès à la famille est à cette occasion en jeu. Ce qui ouvre cet accès et fait que nous soyons acceptés par le système familial n’a la plupart du temps rien à voir avec la thérapie. Le ou la professionnel(le) devrait autant que pos sible tenter de trouver dans sa propre histoire des liens avec l’histoire de ses client(e)s : il est en effet toujours bon de pouvoir partir de points communs.
Constellations et dynamiques intrafamiliales
Il se trouve toujours quelqu’un dans la famille qui s’occupe plus intensé ment de la personne dépendante. Aussi devonsnous, si nous voulons que la famille soit prête à nous « abandonner » l’un de ses membres, lui offrir un substitut, soit une autre personne vers laquelle elle pourra diri ger une énergie désormais devenue libre. Souvent, dans une première phase, les professionnel(le)s du travail social doivent proposer leurs ser
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13 Travail avec les familles
vices au membre de la famille le plus impliqué. Il suffit par exemple de penser aux longs entretiens téléphoniques avec la mère (surtout lors de thérapies résidentielles) qui appelle presque chaque jour pour parler de son fils ou de sa fille.
S’engager avec de telles personnes dans une lutte de pouvoir et se dis puter le ou la patient(e) désigné(e) n’a aucun sens ; il vaut mieux accepter la situation et diriger l’échange thérapeutique. Par la suite, on thémati sera ouvertement la relation particulièrement étroite existant entre l’un des parents et l’enfant. Une attention particulière étant accordée aux mécanismes provoquant une distorsion de la réalité (refoulement, idéalisation).
Plutôt que de se disputer en ayant un comportement en miroir et en se posant en concurrent, il vaut mieux travailler à une alliance thérapeuti que avec la famille où chacun peut apporter, dans le respect de sa propre fonction, sa contribution personnelle à la thérapie. On attachera enfin beaucoup d’importance à l’individu et on accordera suffisamment d’es pace aux besoins, impulsions, rêves et désirs de chacun(e) pour qu’ils puissent convenablement s’exprimer.
La visite à domicile − un classique de la thérapie familiale − peut aussi se révéler un très bon moyen. En tous les cas, ce travail en territoire étran ger, s’il peut se révéler risqué, ne doit toutefois pas être tabou.
Si la thérapie doit permettre de dévoiler les processus ayant eu des ef fets traumatisants, les dyades − et pas uniquement celles typiques en thérapie familiale − doivent également être analysées avec précision.
Père, mère, 1 re enfant, 2 e enfant, toutes ces personnes seront mises en relation les unes avec les autres. Il est important aussi que les client(e)s aient clarifié leurs dépendances relationnelles pour qu’une thérapie de l’addiction soit possible. A ce propos, le mode d’initiation à la drogue − seul, à deux, en groupe − doit lui aussi être reconstitué et ana lysé en profondeur.
Il est important de tenir compte de la dimension trigénérationnelle de l’histoire familiale, un rôle central revenant souvent aux grandsparents dans les familles issues de la migration ; soit parce que réellement pré sents, soit en tant que référence émotionnelle. Aussi faudraitil tou
13 Travail avec les familles
jours reconstituer les deux familles d’origine même si, généralement, l’une d’entre elles est plus fortement impliquée dans l’histoire.
Thèmes thérapeutiques
Les thèmes suivants peuvent être discutés lors des séances de thérapie : familles d’origine et histoire migratoire, abandon de ses parents, expé riences migratoires traumatisantes, mythe de la migration.
Il ressort toujours et encore des histoires de cas d’adolescent(e)s que la dépendance aux drogues est le lieu où convergent les thématiques fa miliales non résolues. Ces thèmes (tels que l’histoire migratoire) doivent
être remodelés en contenus relationnels utilisables, processus qui faci lite l’échange intergénérationnel.
Nombre de familles émigrées ont pour caractéristique particulière la transmission, de parents à enfants, d’une tâche symbolique, ce qui re présente une grande difficulté.
Alors que le malaise dû à la dépendance aux drogues était devenu une stratégie de vie, la thérapie familiale doit mettre fin à cette tendance et créer des passerelles de communication. Une des approches thérapeuti ques possibles consiste à agir de telle manière sur le système familial − au moyen d’« ordonnances » apparemment absurdes − que le symptôme ne puisse pas continuer d’exercer sa fonction stabilisatrice sur l’équilibre familial (conformément au concept d’intervention paradoxale déve loppé par Selvini Pallazzoli).
Il est important, dans la famille, de travailler avec ce qui fonctionne, plu tôt que de risquer de traiter un faux problème, un mal davantage pro jeté que réel.
Le travail transculturel est l’occasion d’examiner non seulement l’indivi dualité des client(e)s, mais également les professionnel(le)s qui, en tant que sujets, occupent une place centrale, avec leurs réflexions. Avoir conscience de son appartenance culturelle comme de la relativité de cette appartenance fait partie intégrante de leur travail.
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Collaboration avec les communautés de migrant(e)s
Les communautés et organisations de migrant(e)s sont importan tes avant tout pour le travail de prévention et pour une large diffu sion, au sein de la population migrante, des informations sur les offres d’aide. Entrer dans ces communautés n’est toutefois pas toujours simple et maintenir avec elles des contacts actifs exige la plupart du temps beaucoup d’investissement.
Fonctions des communautés de migrant(e)s
Selon que la migration d’un groupe déterminé de population remonte à plus ou moins longtemps, les communautés et organisations fondées dans le pays d’accueil ont des fonctions diverses. Dans la phase initiale d’émigration d’un groupe déterminé, il s’agit plus de se soutenir mutuellement, de se rencontrer et d’échanger entre compatriotes, de ressentir son appartenance à une collectivité particulière et enfin de re trouver des rôles ancestraux. Dans une phase ultérieure plus organisée, les préoccupations sociopolitiques passent au premier plan, l’organisa tion devenant pour ses membres un lien entre l’Etat d’origine ou son ambassade et les autorités du pays d’accueil. C’est ainsi qu’elle inter vient en faveur de procédures administratives, des droits sociaux et po litiques et fournit à ses membres un soutien pratique en la matière. Plus tard, une fois disparus les problèmes directs d’intégration, en particulier une fois arrivée la seconde génération grandie dans le pays d’accueil, les organisations sont souvent plutôt culturelles ou régionales. Il est donc important, en travaillant avec les communautés de migrant(e)s, de bien savoir à chaque fois lesquelles de ces fonctions elles ont, respectivement
à quel point et de quelle manière une collaboration peut s’établir.
14 Collaboration avec les communautés de migrant(e)s
Objectifs du travail avec les communautés de migrant(e)s
La collaboration avec une organisation de migrant(e)s a le plus souvent pour objectif d’entrer en contact avec des migrant(e)s qui ne peuvent guère être atteint(e)s par d’autres canaux afin, par exemple, de pouvoir transmettre des informations sur des offres d’aide ou des questions de prévention. Cette collaboration peut aussi servir au travail en réseau, dans l’optique d’un renforcement du réseau social de la clientèle. Si les circonstances s’y prêtent, une personneclé de la communauté pourra
être directement intégrée dans le processus thérapeutique.
A prendre en considération
Il convient de faire preuve d’ouverture et de neutralité à l’égard des valeurs traditionnelles et spirituelles d’une communauté, valeurs qui peuvent parfois être utilisées comme ressources et facteurs de protec tion. Il est important, à ce propos, de tenir compte d’éventuels tabous : l’addiction ou l’infection au HIV d’un membre peut signifier la stigmati sation de toute la communauté et avoir pour conséquence que la per sonne en question se verra évitée ou exclue.
Il est également important de bien connaître les structures de pouvoir ;
être en contact ou travailler avec la « mauvaise » personne peut en effet faire perdre toute chance d’accéder à la communauté. S’adjoindre la col laboration de personnes ellesmêmes membres de la communauté et jouant le rôle de médiateurs(trices) ou de multiplicateurs(trices) peut
être d’un grand secours.
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Réseaux sociaux
Le processus migratoire s’accompagne de difficultés et de situa tions de stress. La capacité de les maîtriser dépend notamment des réseaux sociaux dans lesquels une personne est intégrée, ainsi que de la sécurité et du sentiment d’appartenance que ceuxci lui procurent.
La migration en tant qu’événement critique
Les processus migratoires peuvent être considérés comme des événe ments de vie critiques. Ils sont occasionnés par des mutations sociales et culturelles : modifications des structures familiales et des réseaux so ciaux, perte de statut, modification de la répartition des rôles et trans fert de rôles, nouveaux symboles et nouvelles attributions de sens, lan gue et législation différentes. Peuvent s’y ajouter d’autres difficultés et expériences négatives telles que le racisme ou la discrimination sociale.
Des conditions de vie précaires influent sur les structures familiales et le comportement éducatif. Les situations inconnues engendrent des sen timents d’insécurité et du stress chez les personnes concernées. Du sur menage dans la vie quotidienne peut conduire à des relations sociales et
émotionnelles pesantes et tendues.
Du fait de l’absence de réseaux sociaux et de soutien de l’entourage fa milial, la satisfaction de besoins sociaux et émotionnels se voit fréquem ment renvoyée à plus tard (vacances, retour dans le pays d’origine) et compensée par l’acquisition de biens matériels.
15 Réseaux sociaux
Maîtrise du stress
La maîtrise du stress dépend des facteurs de protection et de risque d’un individu. En outre, une rupture de l’équilibre entre facteurs saluto gènes et pathogènes entraîne une charge pour la santé. Quant aux
situations prolongées de stress, elles peuvent provoquer des maladies psychiques et une dépendance à des substances psychoactives.
Réseaux sociaux et santé
Dans notre société moderne basée sur la division du travail, les réseaux sociaux peuvent grandement contribuer à la santé sociale, en ce qu’ils procurent sécurité, sentiment d’appartenance et donnent un sens à la vie. Bernd Röhrle considère les éléments du soutien social cidessous comme protecteurs :
• attaches sociales
• réduction du stress
• soutien dans la maîtrise des problèmes de la vie quotidienne
• satisfaction des besoins fondamentaux
• renforcement de la conscience de sa propre valeur
• formation d’une identité stable
• transmission de normes et de valeurs
• orientation
• fonction de contrôle
Mise sur pied de réseaux sociaux
Le but est de développer ou de mettre sur pied un réseau social porteur en faveur des client(e)s. Cela débutera par une analyse de l’état de leurs réseaux sociaux, en fonction des caractéristiques suivantes : quantité, qualité, proximité, cohésion, lacunes relationnelles, contacts sociaux.
C’est sur la base de cette analyse qu’il sera possible de développer les ressources dont disposent réellement les client(e)s.
Le développement et la mise sur pied concrète, pas à pas, d’un réseau exige ensuite le soutien des professionnel(le)s. Ils ou elles peuvent servir de médiateurs(trices) auprès de groupes d’entraide, organiser des grou pes de parents au sein de l’institution et s’investir dans les quartiers concernés. Les réseaux institutionnels peuvent mettre à disposition de l’aménagement de réseaux sociaux leurs ressources et établir le contact
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15 Réseaux sociaux
avec des personnesclés. Enfin l’institution peut elle aussi, dans le cadre de ses relations publiques, contribuer à éradiquer des opinions xéno phobes.
Procédé et instruments
La réussite du travail en réseau repose sur une conscience accrue, chez les client(e)s, du soutien que leurs propres ressources sociales peuvent potentiellement leur apporter. Ce travail peut néanmoins rencontrer nombre de résistances, dues à une profonde défiance ayant pour
arrièrefond leur histoire de migration. C’est ainsi que sentiments de honte, manque de confiance en soi, traumatismes ou crainte de l’auto rité peuvent faire obstacle au processus d’émancipation.
Une entrée en relation chaleureuse où l’on exprimera l’estime et la re connaissance pour ce qui a été réalisé ne manquera pas d’aplanir le che min pour la suite du travail. Un accompagnement pratique au quotidien sera également d’une grande aide.
Instruments utiles au processus d’émancipation :
• l’analyse de situation à l’aide de la théorie de l’atome social et culturel
(selon Jacob Moreno).
• des entretiens de groupes recourant à la technique de l’interaction centrée sur le thème (selon Ruth Cohn).
• promotion des compétences sociales : les manuels de la thérapie com portementale dialectique selon Marsha Linehan peuvent être d’une très grande aide.
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Femmes et prostitution
Les femmes migrantes travaillant dans le milieu de la prostitution sont difficiles d’accès pour les professionnel(le)s des dépendances.
En particulier en raison de la gêne, voire de la honte liée à leurs
activités. Elles cachent ainsi souvent leur véritable activité aux ser vices spécialisées (médecins, services sociaux et administratifs, etc.). Une vision réaliste de leur situation est par conséquent diffi cile à avoir.
Entrer en contact avec cette population, leur amener des messages clairs et ciblés de prévention (MST, maladies infectieuses, etc.) et les aiguiller vers le réseau médicosocial existant, si nécessaire, sont les objectifs principaux à poursuivre.
Les femmes sont confrontées à plusieurs difficultés qui ont des réper cussions sur leur santé et leur prise de contact avec des services d’aide.
Précarité des conditions de travail
L’exercice du travail du sexe est fréquemment lié à des facteurs écono miques. Cette activité permet aux femmes migrantes de financer un projet professionnel impossible à réaliser dans leur pays d’origine ou plus généralement d’entretenir une partie de leur famille restée au pays. Les femmes sont, de ce fait, victimes des pressions familiales
(obli gation d’envoyer de l’argent à la famille), tributaires de l’absence de contrôles policiers pour exercer leur activité lorsqu’elles sont sans papiers et victimes de diverses personnes profitant de la précarité de leur situation.
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16 Femmes et prostitution
Pression des clients pour des prises de risques
Les propositions de sexe tarifé se diversifient (salons de massage, clubs privés, rue, internet, etc.) et l’offre dépasse la demande. Par con séquent, les clients ont tendance à fixer les règles de la prestation et nombreux sont ceux qui cherchent à faire baisser les prix ou demandent une relation non protégée.
Pas de domicile stable
Lorsque les femmes sont sans statut de séjour valable en Suisse, elles sont obligées d’avoir recours à la souslocation. Il s’agit de domiciles précaires, car dépendant des personnes qui souslouent (difficulté à trouver un logement, expulsion immédiate si le loyer n’est pas payé, prix de location exorbitant, etc.).
Pas d’assurance-maladie
Malgré le droit à toute personne de contracter une assurancemaladie, de nombreuses femmes sanspapiers ne sont pas assurées. Plusieurs facteurs sont à l’origine de cette situation : méconnaissance du droit d’être assurée, réticences des caisses maladie à assurer une personne clandestine ou système d’assurance trop onéreux pour leurs revenus.
Accès aux soins spécialisés difficile
Compte tenu de l’absence fréquente d’assurancemaladie, l’accès aux soins spécialisés est difficile. Les femmes minimisent souvent les
sy mptômes qu’elles ont et diffèrent une consultation. Lorsque le
problème médical devient aigu, la prise en charge est faite dans l’urgence et est ainsi directement liée à la sensibilité du personnel social et médical.
Les tabous sur les consommations rendent la prévention difficile
On constate fréquemment une consommation excessive de produits psychotropes chez les travailleuses du sexe. Certaines d’entre elles
étaient déjà consommatrices dans leur pays d’origine. Les substances sont utilisées pour se donner du courage avant d’aller travailler, pour anesthésier un malêtre lié à l’activité et aux conditions de vie. Les pro duits psychotropes sont souvent mélangés (cocaïne, cannabis, alcool et
16 Femmes et prostitution
médicaments). L’approvisionnement en médicaments se fait fréquem ment par Internet. La consommation mène à une baisse de vigilance sur le lieu de travail et outre la mise en danger de la santé, c’est aussi la sécurité de la personne qui est touchée. Parler réductions des risques et consommation avec les femmes migrantes est difficile, car le sujet est souvent tabou et la consommation inavouée.
Déclarer une agression
Lorsque les femmes en situation irrégulière sont victimes d’agression et vont déposer une plainte contre leur agresseur auprès de la police judiciaire municipale, elles subissent régulièrement un examen de leur situation en Suisse et passent parfois plusieurs heures en cellule. Leur statut de victime se transformant en statut d’accusée rajoute encore au traumatisme de l’agression. Diverses entrevues et négociations avec la police peuvent aboutir (c’est le cas à Lausanne par exemple) à un compromis respectueux des droits des êtres humains.
Etablir une relation de confiance
Il est essentiel d’aborder le thème de la consommation par des moyens détournés : par exemple, par la question de la sécurité de la femme dans l’exercice de son activité (vigilance amoindrie). La mise en place d’une relation de confiance permet d’aborder les inquiétudes des
femmes pour leur santé et leur sécurité. Cela permet aussi de trans mettre les messages principaux de prévention ainsi que des infor mations sur les divers produits psychotropes (par des fiches théma tiques affichées et par la remise de matériel de prévention dans différentes langues). Pour établir une relation de confiance, il est pos sible de mettre en place un espace de parole où chacune peut s’exprimer librement. Les femmes prostituées toxicomanes sont parfois stigmati sées par les femmes prostituées qui ne le sont pas. L’appartenance à une autre culture peut encore accentuer cette stigmatisation et un
espace de parole peut permettre d’établir un dialogue entre les cli entes, de baisser les tensions et de favoriser la tolérance. De la part des intervenantes, il est aussi utile de faire un travail collectif sur leurs représentations des différentes appartenances et réalités des clientes.
Elargir l’équipe avec des femmes ayant un parcours de migration, et donc souvent un grand potentiel de capacités transculturelles, devrait
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16 Femmes et prostitution
être favorisé. Cela permettrait d’ap procher certaines populations
migrantes qu’il est difficile d’atteindre et de familiariser les inter venantes avec certaines caractéristiques du travail du sexe pour ces
populations.
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Service social
Une personne franchissant la porte d’un service social afin d’y re quérir de l’aide est souvent mal à l’aise et exprime fréquemment un sentiment de honte. C’est un dernier recours, car plus aucune structure ne peut lui venir en aide (notion de subsidiarité). La dé pendance à l’argent de la communauté est un poids que la per sonne porte souvent avec peine. Si celleci est étrangère et souffre de dépendance, on constate que ce malaise se transforme facile ment en sentiment « de perte de la face » ou de l’honneur. Les risques ne sont pas uniquement individuels mais aussi collectifs à travers l’appartenance familiale et/ou clanique.
Le paradoxe du travail dans un service social
La qualité de vie d’un ou d’une migrant(e) dépend de la compétence qu’il ou elle développe à se construire une nouvelle identité à travers une redéfinition et une négociation entre son identité personnelle et culturelle. Une multitude de facteurs externes et internes participent à cette construction : un des éléments importants est sa relation avec le sys tème sociosanitaire du pays qui l’accueille. Les migrant(e)s ont souvent recours aux services sociaux, ceci pour différentes raisons.
L’assistant(e) social(e), considéré(e) comme un « agent » de la fonction publique, doit alors assumer un rôle complexe. Il ou elle intervient d’une part en prenant un ensemble de mesure selon des règlements, lois et autres ordonnances qui souvent n’ont pas la même signification pour les mi grant(e)s. Il ou elle est donc un « agent limitatif » et empêche les abus. D’autre part, il ou elle doit jouer un rôle de médiateur(trice) culturel(le) en intégrant un facteur relationnel positif indispensable à une bonne relation avec le ou la migrant(e).
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17 Service social
Déni
L’assistant(e) social(e) risque d’être mis(e) en difficulté par la stratégie d’évitement, bien souvent inconsciente, mise en action par le ou la mi grant(e), sous pression parfois de son entourage. Il ou elle aura ten dance à cacher une dépendance, à ne pas la nommer. Cette stratégie de déni crée aussi un paradoxe puisqu’il s’agit de ne pas dévoiler ce qui est perçu comme honteux par le ou la migrant(e) mais de substituer une demande d’aide pour une dépendance par une autre demande à l’image d’un leurre (un leurre en tant que mécanisme d’autodéfense).
Un constat intéressant a été fait dans un service social : sur un groupe de 200 personnes d’origine étrangère, le personnel interrogé estime à une dizaine le nombre de personnes ayant un problème de dépendance.
Les hôpitaux somatiques, au contraire, ne voient pas la même réalité.
La proportion d’hospitalisations suite à un problème de dépendance serait proche du tiers.
Une explication à ce décalage provient du fait que les immigrés cachent leur dépendance pour éviter de perdre la face. Par le fait d’avoir quitté leurs proches, ils ou elles ont une obligation de réussite face à la famille.
Dans une attitude de défense, ils ou elles détourneront inconsciem ment l’attention du thérapeute sur un autre objet ou sujet de préoccu pation.
Reprenant les considérations cidessus, on pourrait formuler l’hypo thèse que le ou la migrant(e) est enfermé(e) dans un paradoxe que l’on pourrait formuler comme suit :
« Je suis dépendant(e), c’est une honte pour moi, ma famille et ma communauté, je ne dois donc pas en parler ! Mais pour guérir il faudrait que j’en parle et que, par là, je mette en danger l’équilibre de mon groupe d’appartenance identitaire d’origine. Mon équilibre personnel serait ainsi menacé ! »
Approche systémique
La variante culturelle introduit donc une complexification de la prise en charge dont l’intervenant(e) doit tenir compte.
17 Service social
Nous pouvons dire que cette compréhension préalable est nécessaire pour travailler parmi les migrant(e)s souffrant de dépendances dans les services sociaux. Nous proposons d’aller audelà des préconstruits cul turels et d’imaginer le développement d’une stratégie qui tient compte de l’individu mais aussi de son identification aux contraintes culturelles du groupe. A cet effet, il semble que l’approche systémique est la mieux
à même de fournir des outils contextuels nécessaires à ce travail.
Basé sur la confiance
Le travail sera facilité si la relation est perçue par le ou la profession nel(le) comme une expérience enrichissante. Vivre la relation avec
« l’autre » en faisant preuve d’empathie établira un contrat de con fiance permettant la parole et le « diagnostic du problème dans sa
réalité ». Commence alors seulement ce que l’on appelle la coconstruc tion d’une solution.
Vu la complexité du problème et la supposée nécessité de ne pas « rater sa cible », pourquoi ne pas laisser le droit à l’intervenant(e) de ne pas s’occuper de migrant(e)s si tel n’est pas son souhait ! Cela équivaut à en accepter la complexité et non pas à disqualifier l’intervenant(e) (dans certains services, des professionnel(le)s ne sont pas à l’aise avec des enfants par exemple alors que d’autres prennent en charge les famil les). Une alternative possible serait aussi la création de spécialisations internes dans les services sociaux. Des travailleurs(euses) sociaux(les) pourraient alors traiter des problèmes spécifiques et conseiller leurs collègues au besoin. Une décharge en temps leur permettrait de deve nir des spécialistes locaux de la migration ; ce qui se justifierait par le nombre élevé de migrant(e)s.
Le ou la travailleur(euse) social(e), bien qu’agent public, ne peut pas être
« seulement » agent public, il ou elle est toujours un visàvis ! Il ou elle ne peut « administrer l’autre » et aura toujours besoin de créer des liens pour comprendre la demande de son ou de sa client(e). L’outil principal pour y arriver est sa capacité à considérer l’autre dans sa globalité en
étant capable de l’écouter et de s’impliquer dans une relation. Pour cela, une certaine liberté personnelle est également requise…
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Bases juridiques : droit de la migration – sécurité sociale
Le suivi de client(e)s de nationalité étrangère dans les institutions du domaine des dépendances pose des questions en terme du droit aux assurances. Il est parfois difficile de s’orienter dans cette mul titude de lois, c’est pourquoi une vue d’ensemble des bases juridi ques liées à cette thématique est proposée.
1 Droit de la migration
Le 1 er janvier 2008 a vu l’entrée en vigueur de la loi fédérale sur les
étrangers (LEtr). Elle règle principalement l’entrée et la sortie en Suisse, l’admission aux divers types de séjour, le regroupement familial, la poli tique d’intégration ainsi que la fin du séjour, y compris les mesures de contraintes. La loi sur l’asile (LAsi) ainsi que la loi fédérale sur l’acquisi tion et la perte de la nationalité suisse (loi sur la nationalité, LN) règlent d’autres statuts juridiques spécifiques. Il faut par ailleurs relever que plus de la moitié de la population résidente non suisse dépend en pre mier lieu de l’accord sur la libre circulation des personnes (LCP). Les ressortissant(e)s des Etats nonmembres de l’UE sont appelés ressor tissant(e)s d’Etat tiers. La LEtr concerne en premier lieu ces res sortissant(e)s d’Etats tiers, qui ne bénéficient d’aucun des privilèges
découlant de la LCP.
1.1 Nationalité et conventions
Juridiquement, la première question qui se pose est de savoir si quelqu’un possède une nationalité ou non et, si oui, laquelle. Ne disposent (selon les circonstances) d’aucune nationalité les personnes dites sanspapiers ou encore les apatrides. Pour les ressortissant(e)s étrangers(ères), il faut donc aussi vérifier s’il existe un accord – ou « convention » – sur la sécurité sociale avec leur Etat d’origine. Interviennent en outre les lois
18 Bases juridiques : droit de la migration – sécurité sociale
fédérales et ordonnances relatives, les circulaires, les directives ainsi que les sources cantonales voire communales du droit. La question d’un droit aux prestations ne peut faire l’objet de catégories ou de réponses générales à partir du statut de séjour (p. ex. autorisation de séjour B ou d’établissement C). C’est ainsi qu’en matière de sécurité sociale les dis positions applicables à une ressortissante italienne, bosniaque ou in dienne au bénéfice du même type d’autorisation de séjour pourront ne pas être les mêmes selon les conventions passées avec leurs pays. Natu rellement, il y a aussi nombre de situations où la nationalité ne joue aucun rôle, le domicile ou l’exercice d’une activité lucrative en Suisse, par exemple, suffisant en soi à ouvrir un droit à des prestations. La nationa lité et une éventuelle convention constituent néanmoins les critères de base lorsqu’il s’agit d’établir un droit à des prestations de sécurité sociale.
1.2 Droit constitutionnel et droit international
En principe, l’article 8 alinéa 2 de la Constitution fédérale (Cst) qui in s titue l’égalité de traitement entre ressortissant(e)s suisses et étran
gers(ères) s’applique également aux assurances sociales. Une exception n’est possible en la matière que lorsque la nationalité représente un cri tère objectif de différenciation. La Suisse a conclu de nombreux accords bilatéraux et multilatéraux en matière de sécurité sociale afin de renfor cer ce principe d’égalité de traitement. Deux de ces accords les plus importants sont l’Accord sur la libre circulation des personnes (ALCP) ainsi que la Convention instituant l’Association européenne de libreéchange
(AELE) avec les Etats de laquelle – Liechtenstein, Islande et Norvège – une réglementation analogue à celle de la LCP fut adoptée.
1.3 Accord sur la libre circulation des personnes (ALCP)
L’accord sur la libre circulation des personnes montre à quel point un accord peut influencer le statut juridique de ressortissant(e)s étran gers(ères) en matière de sécurité sociale. En vigueur depuis le 1 er juin
2002 et constituant un droit directement applicable, il règle – du point de vue suisse – le statut juridique des ressortissant(e)s des Etats mem bres de l’UE, en particulier l’entrée et le séjour en Suisse de personnes ayant ou non une activité lucrative. Le but en est de garantir que seront réciproquement accordées les mêmes conditions de vie, d’emploi et de
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18 Bases juridiques : droit de la migration – sécurité sociale
travail que celles accordées aux nationaux (art. 1 ALCP). Un des principes essentiels en est la nondiscrimination des ressortissant(e)s d’une par tie contractante (art. 2). Le devoir de coordination des systèmes natio naux de sécurité sociale permet ainsi de garantir la libre circulation dans l’espace européen. L’article 8 de l’ALCP stipule que cette coordination doit régler notamment l’égalité de traitement, la détermination de la législation applicable et le paiement des prestations. Ce devoir de coor dination n’implique toutefois pas un devoir d’harmonisation. A moins que l’ALCP ne parvienne à modifier cet état de fait, ce sont les accords bilatéraux sur la sécurité sociale déjà existants qui entrent en jeu. Il faut donc toujours vérifier si un tel accord peut être appliqué, que ce soit du point de vue de la personne, de l’objet ou du temps.
2 Sécurité sociale
S’il a été question jusqu’ici de sécurité sociale c’est que, d’un point de vue juridique, l’aide sociale d’urgence et le droit des assurances sociales re présentent des sources financières différentes, même si toutes deux contribuent à garantir la sécurité sociale des ressortissant(e)s suisses et des migrant(e)s. A cet égard, il faut déterminer quelle institution doit
être sollicitée en priorité et laquelle peut n’être que subsidiairement mise à contribution.
2.1 Aide d’urgence et aide sociale
Selon l’article 12 de la Constitution fédérale (Cst), « quiconque est dans une situation de détresse et n’est pas en mesure de subvenir à son en tretien a le droit d’être aidé et assisté et de recevoir les moyens indis pensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine ».
Ce qui est appelé le droit au minimum vital, duquel les requérant(e)s d’asile et les sanspapiers peuvent aussi se réclamer. Le minimum légal octroyé au titre du droit des assurances sociales l’est par le canton de domicile ou de séjour, d’autant plus que l’aide sociale est régie par les législations cantonales. En se fondant sur le droit cantonal ou commu nal, les normes de la Conférence suisse des institutions d’action sociale
(CSIAS) acquièrent dès lors un caractère obligatoire, caractère contrai gnant qu’elles n’ont pas a priori puisqu’il s’agit des normes d’une organi sation faîtière. De même, la Suisse a aussi conclu une convention d’as sistance avec des pays comme l’Italie, le Portugal et la Turquie.
18 Bases juridiques : droit de la migration – sécurité sociale
2.2 Droit des assurances sociales
Contrairement au droit pratiquement universel à un minimum vital pro venant de l’aide sociale ou de l’aide d’urgence, le droit des assurances sociales relève d’abord du droit fédéral et est subordonné à d’autres cri tères. L’assurance sociale couvre en premier lieu les conséquences juridi ques de la réalisation d’un risque (p. ex. maladie, accident, invalidité, décès), pour autant que certaines conditions soient remplies, que ce soit du point de vue de la personne, de la matière ou du temps.
Exemple : selon la loi fédérale sur l’assuranceaccidents (LAA), une per sonne est assurée contre les accidents dès le jour où elle commence ou aurait commencé le travail en vertu de l’engagement, mais en tout cas dès le moment où elle prend le chemin pour se rendre au travail (art. 3, al. 1 LAA). Au cas où l’assuré(e) se trouve totalement ou partiellement incapable de travailler par suite d’un accident, il ou elle a droit à une in demnité journalière. Ce droit naît le 3 e jour qui suit celui de l’accident et s’éteint dès que l’assuré(e) a recouvré sa pleine capacité de travail, dès qu’une rente est versée ou dès que l’assuré(e) décède. L’indemnité jour nalière de l’assuranceaccidents n’est cependant pas allouée s’il existe un droit à une indemnité journalière de l’assuranceinvalidité ou à une allocation de maternité selon la loi du 25 septembre 1952 sur les allo cations pour perte de gain (art. 16 LAA). Si l’événement initial n’est pas qualifié d’accident mais de maladie, c’est en principe la LAMal qui s’ap plique. S’agissant de la personne, il faut conséquemment vérifier si elle est assurée à titre obligatoire ou facultatif. Puis s’il s’agit objectivement, du point de vue du droit des assurances sociales, d’un accident et s’il y a incapacité totale ou partielle de travail. Enfin, depuis quand et jusqu’à quand l’assureuraccident est tenu de verser des prestations, que ce soit au titre d’indemnités journalières et/ou pour des frais de traitement.
L’aide sociale n’intervient qu’à titre secondaire, pour autant qu’il ne soit pas possible de faire valoir un droit à l’encontre des assurances sociales.
Aussi estil à chaque fois important de clarifier le droit à d’éventuelles prestations (provisoires) dues par exemple au titre d’indemnités journa lières ou de rentes, en particulier lorsque diverses assurances sociales entrent en ligne de compte (exemple typique : combinaison entre assu ranceaccidents, assurancemaladie, assurancechômage et assurance
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18 Bases juridiques : droit de la migration – sécurité sociale
invalidité). En plus d’être subordonnées à diverses lois et ordonnances fédérales telles la LAI/RAI ou LAMal/OAMal, les diverses branches léga les des assurances sociales le sont par principe à la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA), qui règle les rapports entre assurances sociales fédérales et assurés. La LPGA définit notamment les concepts de maladie, d’accident, d’incapacité de travail et d’invalidité, ainsi que les différents types de prestations (prestations financières ou en nature). Elle comporte aussi une disposition sur la ré duction ou le refus de prestations en cas de dommage causé intention nellement ou de violation du devoir de réduction du dommage (art. 21) ainsi que d’autres principes de procédures (p. ex. art. 28 – Devoir de
collaboration des assurés, art. 33 – Obligation de l’autorité de garder le secret à l’égard de tiers). Enfin, elle contient des règles de coordination comme aussi des dispositions sur l’assistance judiciaire nécessaire pour garantir l’application du droit en cas de litige.
3 Critères de rattachement dans l’assurance sociale
Dans toutes les branches du droit des assurances sociales – assurance vieillesse et survivants (AVS), assuranceinvalidité (AI), assurancemala die (LAMal), assurancechômage (LACI), assuranceaccidents (LAA), prestations complémentaires (PC), prévoyance professionnelle (LPP), al locations familiales et pour enfants ainsi qu’allocations pour perte de gain en cas de service et de maternité – il faut examiner leur applicabilité respective à raison de la personne, de la matière et du temps, à l’aide des critères de rattachement cidessous.
A ce propos, il faut toujours se demander :
• quel est le droit applicable (cf. chiffre 1) ;
• si une personne est soumise à une branche du droit des assurances sociales en vertu de son domicile ou d’une activité lucrative ;
• si des cotisations doivent être versées en tant que personnes exerçant ou non une activité lucrative ;
• s’il y a obligation de cotiser ou choix de la cotisation et si la cotisation a
été versée durant la période minimale exigée ;
• si s’applique le principe de la soumission à la législation du lieu de tra vail ou à celui du pays dans lequel le travail s’effectue ;
18 Bases juridiques : droit de la migration – sécurité sociale
• si l’objet de cotisation (soit la base servant à calculer le montant de la cotisation) peut être déterminé ;
• si la rétrocession de cotisations pourrait – en cas de départ de la Suisse –
être réclamée ;
• s’il y a tout simplement sinistre et qualité d’assuré ;
• s’il existe une convention internationale et si toutes les assurances sociales concernées y sont inclues.
4 Assurance-maladie obligatoire
L’assurancemaladie suisse comprend, conformément à la loi fédérale sur l’assurancemaladie (LAMal), l’assurance obligatoire des soins et l’assurance facultative d’indemnités journalières que nous n’aborderons pas ici. Adhérer à l’assurance des soins étant obligatoire, toutes les per sonnes domiciliées en Suisse en bénéficient en principe. Il y a donc obli gation de s’assurer. Cette obligation doit garantir la solidarité dans l’as surance sociale. L’adhésion doit intervenir dans les 3 mois qui suivent la prise de domicile ou la naissance en Suisse. Des exceptions limitées à l’obligation de s’assurer sont cependant possibles, par exemple pour des
étrangers(ères) bénéficiaires d’immunités. L’obligation de l’assureur de fournir des prestations dépend de l’affiliation à une assurancemaladie.
Le remboursement des prestations n’intervient qu’une fois l’affiliation effective. Les prestations peuvent de surcroît être refusées à tous et toutes les assuré(e)s ne s’acquittant pas de leurs obligations en termes de cotisations ou de primes. Il s’ensuit de fait une suspension de la cou verture au sens du droit des assurances. Il est déterminant, pour que des prestations soient versées, que les fournisseurs de prestations (méde cins, pharmaciens, chiropraticiens, sagesfemmes, laboratoires, établis sements médicosociaux ou de cure balnéaire, etc. ; cf. art. 35 ss LAMal) soient admis. Encore fautil, pour que des prestations soient rembour sées, qu’elles soient de surcroît efficaces, appropriées et économiques.
En cas de doute, la prudence s’impose et la prise en charge des coûts doit
être préalablement confirmée par la caissemaladie.
Sous réserve de dispositions dérogatoires de la législation sur l’asile, la loi fédérale sur l’assurancemaladie (LAMal) s’applique également aux requérants d’asile. Peuvent cependant être limités, en vertu de l’art. 82a de la loi sur l’asile, tant le choix de l’assureurmaladie que celui du four
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18 Bases juridiques : droit de la migration – sécurité sociale
nisseur de prestations. L’« Arrêté fédéral concernant le statut des réfu giés et des apatrides dans l’assurancevieillesse et survivants et dans l’assuranceinvalidité » règle l’assimilation de principe des réfugié(e)s et apatrides aux ressortissant(e)s suisses dans le domaine de l’aide sociale et des prestations relevant du droit des assurances sociales. A noter que par réfugié(e)s, contrairement aux requérants d’asile, il faut entendre les personnes reconnues comme telles et ayant obtenu l’asile en Suisse.
Or, l’affiliation et le paiement des primes, fondés sur la simple domicilia tion en Suisse – et non la nationalité – constituent pourtant le critère de rattachement à telle ou telle assurance. Il convient toutefois d’observer qu’avec l’entrée en vigueur de la LCP c’est le pays où ils ou elles travaillent et non le domicile qui est déterminant pour les ressortissant(e)s des
Etats concernés. Il en va de même du système d’assurance des familles : autrement dit, les membres de la famille n’ayant pas d’activité lucrative sont assurés là où est assuré le membre ayant une telle activité. A noter que les frontaliers des pays limitrophes de la Suisse disposent du droit de choisir leur assureur. A la lumière de ce qui précède, il ressort que toutes les personnes domiciliées en Suisse ont par principe droit, du fait de l’obligation de s’assurer, au remboursement des prestations de soins maladie.
4.1 Assurancemaladie en cas de dépendance
Voyons maintenant ce qu’il en est du remboursement, en vertu du droit de l’assurancemaladie, de prestations en cas de dépendance, notam ment de toxicomanie. Un comportement de dépendance ne représente une maladie, au sens du droit des assurances sociales, que lorsque les causes et conséquences de la dépendance sont imputables à une mala die, ou en causent une, et qu’un traitement médical est nécessaire. La difficulté est à cet égard d’établir s’il existe une dépendance nécessitant traitement et à quelles conditions en résulte un devoir de prestations de la part de l’assureurmaladie.
Il peut être procédé, en vertu du droit des assurances sociales, à des
réductions voire à des refus de prestations lorsqu’un ou une assuré(e) ne se conforme pas à son devoir de réduction des dommages (principe : cf. art. 21 LPGA). Toutefois, la mise à contribution de l’assurancemaladie en cas de toxicomanie ne peut être refusée en se référant au devoir de
18 Bases juridiques : droit de la migration – sécurité sociale
réduction des dommages de l’assuré(e). Et ce, même si l’on peut dire que celuici a, sinon intentionnellement, du moins éventuellement inten tionnellement provoqué une dépendance ou une maladie. « Eventuelle ment intentionnellement » signifiant que l’on ne souhaite pas forcé ment la survenue d’un événement mais que l’on accepte cas échéant l’éventualité de le provoquer.
Le chiffre 8 de l’annexe 1 de l’Ordonnance sur les prestations de l’assu rance des soins (OPAS) fixe l’étendue des prestations à charge de l’assu rance obligatoire des soins en cas de toxicomanie ayant caractère de maladie. La jurisprudence fédérale (ATF 116 V 107 E. 7b – Question de la prise en charge d’un traitement à long terme à la méthadone chez des héroïnomanes) a pour conséquence qu’un refus de prestations pour cause de faute de l’assuré(e) est pratiquement exclu en cas de toxico manie. L’hypothèse à la base de cet arrêté et de cette pratique est que l’échec d’un sevrage ne saurait être imputé, chez des toxicomanes, à l’absence de bonne volonté, mais à la dépendance ellemême. Se pose dès lors la question d’une inégalité de traitement par rapport à d’autres personnes dépendantes qui se voient astreintes à l’abstinence, à l’obli gation de maigrir ou de limiter leur consommation d’alcool et/ou de tabac.
4.2 Conclusions
L’assurancemaladie constitue un exemple approprié pour montrer que les migrant(e)s n’ont pas à être plus mal loti(e)s que les Suisses et les
Suissesses pour ce qui est du recours à des prestations relevant du droit des assurances sociales. Ce qui pose plutôt problème – et ce à l’ensemble des assurés – c’est l’interprétation des concepts d’efficacité, d’adéqua tion et d’économicité d’une prestation ainsi que, de manière générale, le sens à donner au devoir de réduction des dommages. Il est fréquem ment fait mention, dans le discours tant juridicopolitique que social, d’un « système à deux vitesses » s’agissant de la distinction entre res sortissant(e)s d’Etats au bénéfice de la LCP et ressortissant(e)s d’Etats tiers. Or il ne s’agit pas de mettre fin à des privilèges, nos efforts devant plutôt avoir pour objectif que les membres les plus faibles de la popula tion migrante (requérants d’asile, sanspapiers) bénéficient autant que possible d’une égalité de traitement et voient leurs droits renforcés,
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18 Bases juridiques : droit de la migration – sécurité sociale
ce d’autant plus que l’idée de solidarité sociale est à la base même des assurances sociales. Pour ce qui est de la prise en charge des prestations dans les cas de dépendance, des efforts doivent encore être faits pour leur harmonisation et, là aussi, pour une égalité de traitement des per sonnes concernées aussi conforme que possible aux besoins.
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Ancrage institutionnel et Qualité
L’objectif de l’ancrage institutionnel d’une intervention spécifique
à la migration dans le domaine des dépendances est d’encourager et de consolider sa qualité, sa cohérence et sa continuité.
Approche topdown
Dans une institution du domaine des dépendances, une offre adaptée aux besoins des migrant(e)s est limitée si elle n’est pas ancrée institu tionnellement et activement soutenue par la direction. Ce travail spéci fique auprès des migrant(e)s dépend alors de l’initiative (aléatoire) ou du statut personnel de migrant(e)s de quelques collaborateurs(trices).
Si ceuxci ou cellesci quittent l’institution, leurs connaissances en la
matière sont aussi perdues. Pour assurer durablement l’offre, une
approche « topdown » est donc aussi importante que l’engagement et les connaissances spécifiques de collaborateurs(trices). Il s’agit là d’un
« diversity management » au sens large, intégrant – au profit de toutes et tous – les ressources et besoins hétérogènes du personnel et des client(e)s.
Systèmes de management de la qualité
On dispose de divers systèmes de management de la qualité pour garan tir la qualité du travail d’une institution. Les indications fournies cides sous pour l’ancrage institutionnel d’une aide aux personnes dépendan tes adaptée aux migrant(e)s suivent la systématique du référentiel modulaire QuaThéDA, la norme qualité de l’OFSP pour le domaine des dépendances (www.quatheda.ch).
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19 Ancrage institutionnel et Qualité
1 Processus de management
Modèle institutionnel et stratégie/développement
Le modèle institutionnel peut codifier un principe général ; par exemple que les prestations offertes par l’institution soient accessibles à toutes les personnes ayant besoin d’aide, indépendamment de leur origine, de leur religion, cas échéant de leur langue et de leur statut de séjour. L’ap proche transculturelle selon laquelle les client(e)s seront appréhen dé(e)s en fonction de la réalité de leur histoire personnelle et non sur fonds de stéréotypes culturels devrait également être décrite. Ceci peut aussi être l’occasion de mettre l’accent sur une approche centrée sur les ressources.
La stratégie découlant de ce modèle institutionnel mentionnera les objec tifs à moyen terme, groupescible, offres, etc. au travers desquels l’institu tion entend se positionner dans son environnement. Il s’agira là aussi de définir les objectifs visés par rapport à la clientèle migrante. Les buts à court terme – liés à des adaptations de l’offre ou à des projets de déve loppement ultérieur – y seront précisés, assortis de directives claires.
Concept d’exploitation et de prestation
(buts, groupescible, offres, méthodes)
Le concept d’exploitation, qui définit la gestion et l’organisation prati que de l’institution, peut faire état d’unités organisationnelles, de ca naux d’information et d’orientation ainsi que de responsabilités. Il pour ra également répertorier les modalités de communication interne ainsi que les collaborations avec des offices et organismes extérieurs, des services spécialisés et des professionnel(le)s de la migration ou des as sociations de migrant(e)s.
Le concept de prestation de services définit les groupescible de l’insti tution, ses objectifs ainsi que l’offre subséquente de traitement, de thé rapie ou de prise en charge. Peut y être décrit si et comment il est tenu compte des problématiques et ressources spécifiques à la clientèle mi grante et quelles méthodes et canaux (ou moyens) sont engagés à cet effet. En font, par exemple, partie le recours à des interprètes et le travail avec les proches, qui peuvent parfois bénéficier de dispositions particu
19 Ancrage institutionnel et Qualité
lières ou de dérogations (p. ex. concernant l’interdiction de contacts avec l’extérieur dans les institutions résidentielles). Un autre thème im portant est celui du temps consacré à la prise en charge, respectivement au traitement ou à la thérapie de client(e)s issu(e)s de la migration.
Direction et organisation
Il est important que le thème migration soit introduit et ancré – au sens d’un mainstreaming – à tous les niveaux et dans tous les canaux/lieux d’information et d’orientation. En plus des membres de la direction, d’autres personnes peuvent se voir chargées de cette question au sein de l’institution (avec des cahiers des charges et des ressources en rap port). La mise en place d’une information régulière est aussi impor tante. Comme pour d’autres formes de discriminations, la direction doit
également établir des procédures claires en cas de discrimination ra ciste. Enfin, l’égalité des chances doit être garantie, que ce soit pour la clientèle ou les collaborateurs(trices) issu(e)s de la migration.
Communication externe et coopération
L’existence d’une clientèle issue de la migration rend particulièrement importantes les questions des difficultés d’accès aux offres et de colla boration interdisciplinaire.
Des contacts institutionnalisés avec les associations/organisations de migrant(e)s contribuent à réduire le déficit d’information et les aident à avoir confiance dans l’aide offerte aux personnes dépendantes. Ce tra vail de relations publiques (p. ex. sous forme de séances d’information) peut aussi être organisé conjointement par plusieurs institutions, profi tant ainsi de synergies. Le concours de médiateurs(trices) ou de multi plicateurs(trices) peut se révéler décisif.
La coopération entre professionnel(le)s et une mise en réseau débor dant les frontières de la spécialisation est indiquée, que ce soit avec d’autres institutions s’occupant de dépendance et ayant des offres
spécifiques pour les migrant(e)s (notamment en vue d’éventuels trans ferts), avec des professionnel(le)s et institutions spécialisées dans les soins de santé (psychiatrie, consultations ambulatoires pour victimes de tortures ou de guerre, etc.) ou avec des spécialistes de la migration et de l’intégration (autorités, offices d’intégration, consultations juridiques).
78
19 Ancrage institutionnel et Qualité
Management de la qualité, conduite institutionnelle et évaluation
Il est important, pour garantir la qualité des objectifs et prestations spécifiques à la migration, de les faire figurer dans les principaux docu ments de l’institution et de les intégrer dans les procédures de manage ment de la qualité.
Il se peut aussi que l’évaluation de l’offre exige de recueillir des données particulières liées à la condition de migrant(e), telles que nationalité, lieu de naissance, type de permis de séjour, durée de séjour en Suisse, mo ment de la migration (du ou de la client(e), de ses parents ou grandspa rents), langue(s) parlée(s), langue des parents ou religion.
2 Supports
Personnel
La compétence transculturelle des collaborateurs(trices) est un facteur central du succès du travail d’aide aux personnes toxicodépendantes is sues de la migration et doit être prise en compte dans la politique du personnel (personnel avec expérience professionnelle dans le domaine migration, formation permanente et continue dans la compétence transculturelle, personnel luimême issu de la migration).
Financement / Présentation des comptes
Le travail avec les migrant(e)s implique de leur consacrer plus de res sources et plus de temps (notamment pour les collaborations avec des professionnel(le)s ou services extérieurs, pour le travail d’information ou pour le recours à des interprètes). Les ressources nécessaires à cet effet doivent donc être prévues et garanties.
Prescriptions légales / Conventions
Les institutions doivent connaître et respecter les prescriptions légales relatives aux migrant(e)s ayant un impact sur leur travail, telles la loi sur les étrangers et la loi sur l’asile (y compris les ordonnances relatives) ou la norme pénale sur le racisme.
19 Ancrage institutionnel et Qualité
3 Processus de prestations
Les processus de prestation concernent les offres concrètes des institu tions en matière de transmission d’information, phase exploratoire et admission, thérapie et réhabilitation, conseil, accompagnement, suivi, remise de substance, documentation, sortie, travail en réseau, inter vention de crise. Les éléments et approches spécifiques aux migrant(e)s dont doit tenir compte le travail concret d’aide à ces personnes sont décrits dans les chapitres du manuel QuaThéDA.
80
20
Auteurs
Les textes du manuel ont été rédigés par les membres du groupe de projet et d’autres auteurs (cf. Introduction). Certaines contribu tions proviennent d’un travail individuel, d’autres de discussions entre les membres du groupe ou d’échange entre ceuxci et des collègues.
Les auteurs ont travaillé les thèmes suivants
• Anne Ansermet Pagot : Femmes et prostitution, Thérapie à l’étranger,
Collaboration avec les communautés de migrant(e)s.
• Aline Bernhardt Keller : Travail de rédaction, Travail avec des interprè tes, Femmes et prostitution.
• Osman Besic´ : Compétence transculturelle.
• Rut Brunner Zimmermann : Enfants – Jeunes – Parents.
• Umberto Castra : Travail avec les familles, Communication et travail relationnel, Thérapie à l’étranger, Collaboration avec les communau tés de migrant(e)s.
• Mehmet Ertogrul : Enfants – Jeunes – Parents.
• Nelson Feldman : Traitement de substitution des patient(e)s en situa tion de précarité, Travail avec des interprètes, Thérapie à l’étranger,
Collaboration avec les communautés de migrant(e)s.
• Marianne König : Travail de rédaction, Introduction, Ancrage institu tionnel et Qualité, Communication et travail relationnel.
• Andrea Kromer : Enfants – Jeunes – Parents.
• Pablo SanchezMazas : Transculturalité et dépendance, Thérapie à l’étranger, Collaboration avec les communautés de migrant(e)s.
• Eliane Schnellmann : Anamnèse, Réseaux sociaux, Communication et travail relationnel.
20 Auteurs
• Attiya Sheikh : Bases juridiques : droit de la migration – sécurité sociale.
• Isabelle Soulignac : Traitement de substitution des patient(e)s en situation de précarité.
• Gianni Tiloca : Enfants – Jeunes – Parents, Communication et travail relationnel.
• Enrico Tolotti : Processus de guérison, Service social, Thérapie à l’étran ger, Collaboration avec les communautés de migrant(e)s.
• Safija von Beg : Approche systémique.
82
21
Références bibliographiques
Les publications et liens électroniques sont organisés par chapitre, certains pouvant apparaître dans plusieurs chapitres. Une version détaillée et fréquemment mise à jour peut être con sultée sur la page « Migration » d’Infodrog (www.migration.infodrog.ch).
1 Avant-propos
Les informations et publications relatives à la stratégie fédérale sont disponibles sur le site de l’Office fédéral de la santé publique : www.miges.admin.ch.
• Domenig, Dagmar ; Office fédéral de la santé publique OFSP (éd.)
(2002) : L’importance d’une intervention spécifique à la migration dans la lutte contre la toxicodépendance et ses conséquences pour la prati que. Berne : OFSP
• Office fédéral de la santé publique OFSP (éd.) (2008) : Migration et santé. Résumé de la stratégie fédérale phase II (2008 à 2013). Berne :
OFSP
• Office fédéral de la santé publique OFSP (éd.) (2002) : Migration et santé. Stratégie de la Confédération pour les années 2002 à 2006.
Berne : OFSP
21 Références bibliographiques
2 Introduction
• Burgi, Didier ; Carron, Raphaëlle (1997) : Le projet migrants. Prévention du sida et des comportements de dépendance auprès des communau tés étrangères en Suisse. Berne : Office fédéral de la santé publique
OFSP
• Colbeaux, Christian (2004) : Addictions et migrations. Actes des sixiè mes rencontres de l'Unité de soins et d’information sur les drogues du
Centre hospitalier de Douai, 19 septembre 2003. Douai : Unité de Re cherches et de Formation sur les Drogues URFD
• Domenig, Dagmar (2001) : Migration, Drogen, transkulturelle Kompe tenz. Berne : Hans Huber
• Lanfranchi, Andrea (2006) : Kulturschock ? Interkulturelle Kompe tenz in psychosozialen Berufen. Dans : Psychoscope, 8 (27), p. 1214
(Téléchargeable sur http ://ausbildungsinstitut.ch/de/images/pdf/psc_ kulturschockmeilen.pdf)
• Orlando, John (1996) : Deuxième génération d'étrangers et toxicoma nies. Travail de recherche. Genève : Ecole supérieure de travail social
• Salman, Ramazan (éd.) ; Tuna, Soner (éd.) ; Lessing, Alfred (éd.) (2002) :
Handbuch interkulturelle Suchthilfe. Modelle, Konzepte und Ansätze der Prävention, Beratung und Therapie. 2 e édition. Giessen : Psycho sozialVerlag
• Weiss, Regula ; Stuker, Rahel (1998) : Interprétariat et médiation cultu relle dans le système de soins. Rapport de base. Neuchâtel : Forum suisse pour l’étude des migrations et de la population SFM
• Weiss, Regula ; Stuker, Rahel (1998) : Lorsque patients et soignants ne parlent pas la même langue... Patients de langue étrangère : interprétariat et médiation culturelle dans le système des soins.
Berne : Office fédéral de la santé publique OFSP
Des informations et recherches sur le sujet peuvent être consultées sur le site du fonds national suisse de la recherche scientifique : www.snf.ch.
84
21 Références bibliographiques
3 Compétence transculturelle
• Domenig, Dagmar (éd.) (2007) : Transkulturelle Kompetenz. Lehrbuch für Pflege, Gesundheits und Sozialberufe. 2 e édition. Berne : Hans
Huber
• Domenig, Dagmar (2002) : L’importance d’une intervention spécifique
à la migration dans la lutte contre la toxicodépendance et ses consé quences pour la pratique. Berne : Office fédéral de la santé publique
OFSP
• Meyer, Katharina (éd.) (2009) : La santé en Suisse. Rapport national sur la santé 2008. Berne : Hans Huber
4 Communication et travail relationnel
• Domenig, Dagmar (2002) : L’importance d’une intervention spécifique
à la migration dans la lutte contre la toxicodépendance et ses consé quences pour la pratique. Berne : Office fédéral de la santé publique
OFSP
• Domenig, Dagmar (2001) : Migration, Drogen, transkulturelle Kompe tenz. Bern : Hans Huber
Voir également les références du chapitre 2 et 3.
5 Travail avec des interprètes
Des informations détaillées sont disponibles sur le site de l’Association suisse pour l'interprétariat communautaire et la médiation culturelle : www.interpret.ch
Concernant la pratique :
• Bischoff, Alexander ; Loutan, Louis (2000) : Mit anderen Worten : Dol metschen in Behandlung, Beratung und Pflege. Bern : Bundesamt für
Gesundheit BAG
21 Références bibliographiques
• Saladin, Peter (éd.) (2008) : Diversité et égalité des chances. Les fonde ments d'une action efficace dans le microcosme des institutions de santé. Berne : Office fédéral de la santé publique OFSP et H+ Les hôpi taux de Suisse
Concernant les questions juridiques et financières :
• Achermann, Alberto et al. (2008) : Rapport sur le financement des prestations d’interprétariat dans les institutions suisses de santé pour les personnes qui ne maîtrisent pas la langue officielle locale. Berne :
Groupe d’experts sur mandat de l’Office fédéral de la santé publique
OFSP et de H+ Les hôpitaux de Suisse
• Ayer, Ariane ; Gilbert, Muriel (2004) : Droits du patient migrant : quelles sont les bases légales de la consultation médicale en présence d'un interprète ? Résumé de la recherche CFE 03806. Berne : Commission fédérale des étrangers
• Ayer, Ariane ; Gilbert, Muriel (2005) : Die Rechte des migrierten Patien ten : Welche Rechtsgrundlagen bestehen für die Arzt konsultation in
Gegenwart eines Dolmetschers ? Freiburg und Bern : im Auftrag des
Bundesamtes für Gesundheit BAG
6 Anamnèse
• Domenig, Dagmar (éd.) 2007 : Transkulturelle Kompetenz. Lehrbuch für Pflege, Gesundheits und Sozialberufe. 2 e édition. Bern : Hans
Huber
• Heimann, H.M. ; Penka, S. ; Heinz, A. (2007) : Erklärungsmodelle von
Migranten für Abhängigkeitserkrankungen – eine Untersuchung an
Aussiedlern aus der ehemaligen Sowjetunion, Migranten aus der Tür kei sowie einheimischen Deutschen. Dans : Suchttherapie, 2007 ; 8 : p. 5762
• Moro, Marie Rose (éd.) ; Rousseau, Cécile (éd.) (1998) : Parcours de l’exil.
Cliniques transculturelles. PRISME – Psychiatrie, Recherche et Inter vention en Santé Mentale de l'Enfant 3/1998. Montréal : Editions du
CHU SainteJustine
86
21 Références bibliographiques
• Office fédéral de la santé publique OFSP (éd.) (2007) : Qu’estce qu’on sait de l’état de santé des populations migrantes ? Les principaux résultats du « Monitoring de l’état de santé de la population migrante en Suisse ». Berne : OFSP
7 Transculturalité et dépendance
• Baubet , Thierry ; Taïeb, O. (2005) : Guide de formulation culturelle.
Dans : Annales médicopsychologiques 1/2005, p. 3843. Paris : Elsevier
• Grandsard, Catherine ; Nathan, Tobie (1999) : La toxicomanie : un ré seau ultracourt. Dans : Les Cahiers de Prospective Jeunesse 1/1999 –
La question du plaisir... Le plaisir en question. Bruxelles : Prospective
Jeunesse
• Kaës, René ; Faimberg, Haydée ; Enriquez, M. ; Baranes, J.J. (2003) :
Transmission de la vie psychique entre générations. Collection Incons cient et culture. Paris : Dunod
• König, Marianne ; Dietrich, Nicolas (2007) : Police – travail social – mi gration – toxicodépendances. Compétences transculturelles, de l’huile dans les rouages. Documentation de la journée nationale,
Bienne, le 1 er décembre 2006. Berne : Infodrog
• Lekeuche, Philippe ; Mélon, Jean (1990) : Dialectique des pulsions. Col lection Bibliothèque de pathoanalyse. 3 e édition Bruxelles : De Boeck
• LewisFernandez, R. ; Diaz, N. (2002) : The cultural formulation. A method for assessing cultural factors affecting the clinical encounter.
Dans : Psychiatry quarterly 4/2002, p. 271295
• Sibony, Daniel (2002) : Peur de la violence et violence de la peur.
Dans : Massé, Eric (éd.) : Cette violence qui nous tient. Cosmopolitiques, cahiers théoriques pour l’écologie politique, nº 2. Paris et La Tour d'Aigues : Cosmopolitiques/ Editions de l'Aube
• Von Overbeck Ottino, Saskia ; Ottino, Jérôme (2001) : Avoir ou être : tribulation identitaires chez les adolescents migrants. Dans : L'Autre, cliniques, cultures et sociétés, revue transculturelle 1/2001, p. 95108.
Grenoble : La Pensée sauvage
21 Références bibliographiques
• Yahyaoui, Abdessalem (1992) : Toxicomanie et pratiques sociales.
Travail clinique et social en milieu maghrébin. Grenoble : La Pensée sauvage/APPAM
8 Processus de guérison
• Bobin, Christian (1995) : Le trèsbas. Collection Folio. Paris : Gallimard
• Flèche, Christian ; Lagardet, JeanJacques (2004) : L’instant de guéri son. BarretsurMéouge : Le Souffle d’Or
• LéviStrauss, Claude (2001) : Tristes tropiques. Collection Pocket terre humain. Paris : Pocket
• Lévinas, Emmanuel (2006) : Altérité et transcendance. Collection Biblio essais. Paris : Le Livre de Poche
• Wittgenstein, Ludwig (2001) : Tractatus logicophilosophicus. Collec tion TEL. Paris : Gallimard
9 Approche systémique
• Doutrelugne, Yves (2009) : Thérapies brèves. Situations cliniques. Col lection Pratiques en psychothérapie. IssylesMoulineaux : Masson
Elsevier
• Doutrelugne, Yves ; Olivier Cottencin (2008) : Thérapies brèves. Prin cipes et outils pratiques. Collection Pratiques en psychothérapie.
IssylesMoulineaux : MassonElsevier
• Gravel, Sylvie (éd.) ; Battaglini, Alex (éd.) (2000) : Culture, santé et eth nicité. Vers une santé publique pluraliste. Montréal : Direction de la santé publique de MontréalCentre (Rapport de synthèse téléchar
ge able sur http ://www.santepubmtl.qc.ca/Publication/migration pub.html)
• Radice von Wogau, Janine ; Eimmermacher, Hanna ; Lanfranchi,
Andrea (Hrsg.) (2004) : Therapie und Beratung von Migranten. Syste mischinterkulturell denken und handeln. Weinheim : Beltz
88
21 Références bibliographiques
• Tousignant, Michel (1992) : La santé mentale des migrants. Analyse de son contexte social et longitudinal. Dans : Santé mentale au Québec
2/1992, p. 3546. Montréal : Communauté et santé mentale (télé chargeable sur http ://www.erudit.org/revue/smq/1992/v17/n2/index.
html)
10 Traitement de substitution des patient(e)s en situation de précarité
Deux sites recueillent des informations sur et pour les sanspapiers :
• Plateforme nationale pour les soins médicaux aux sanspapiers :
regroupe les services de conseil proposant des consultations et des soins médicaux aux sanspapiers (http://www.santesanspapiers.ch/ indexfr.php).
• www.sanspapiers.ch rassemble un certain nombre d'informations générales et pratiques concernant les sanspapiers pour l'ensemble de la Suisse.
• Kiener Regina und von Büren Lucie (2007) : Strafbarkeit durch medizi nische Betreuung von SansPapiers ? Dans : Asyl. Schweizerische Zeit schrift für Asylrecht und praxis 4/2007, p. 1116. Bern : Schweizerische
Flüchtlingshilfe SFH
Voir également les références du chapitre 18.
11 Thérapie à l’étranger
Dans le dossier « Voyage » sous la rubrique « dossiers thématiques »
figurent différents sites qui donnent des recommandations sur les pos sibilités de substitutions à l’étranger (www.infoset.ch).
21 Références bibliographiques
12 Enfants – Jeunes – Parents
• Bolzman, Claudio ; Fibbi, Rosita ; Vial, Marie (2003) : Secondas – Secon dos. Le processus d'intégration des jeunes adultes issus de la migra tion espagnole et italienne en Suisse. Zurich : Seismo
• Domenig, Dagmar (Hrsg.) (2007) : Transkulturelle Kompetenz. Lehrbuch für Pflege, Gesundheits und Sozialberufe. 2 e édition. Berne : Hans
Huber (voir le chapitre « Migrationskinder » écrit par A. Lanfranchi, p. 371393)
• Feld, Katja ; Freise, Josef ; Müller, Annette (Hrsg.) (2005) : Mehrkultu relle Identität im Jugendalter. Die Bedeutung des Migrationshinter grundes in der Sozialen Arbeit. Münster : Lit Verlag
• Lanfranchi, Andrea (2004) : Aus Secondos werden Stars. Integration von Eingewanderten als Transformationsprozess. Dans : Psychoscope,
25 (3), p. 69
• Mey, Eva (2008) : Jugendliche mit Migrationshintergrund. « Zwischen
Stuhl und Bank » oder « global kids » ? Dans : Terra cognita. Schweizer
Zeitschrift zu Integration und Migration 13/2008 – Identitäten, p. 7881. Berne : Commission fédérale pour les questions de migration
(CFM), www.terracognita.ch
Voir également les références du chapitre 2.
13 Travail avec les familles
• BoszormenyiNagy, Ivan ; Framo, James L. (Hrsg.) (1975) : Familienthe rapie : Theorie und Praxis. 2 tomes. Reinbek bei Hamburg : Rowohlt
• Cirillo, Stefano ; Berrini, Roberto ; Cambiaso, Gianni ; Mazza, Roberto
(1996) : La famiglia del tossicodipendente. Milano : Raffaello Cortina
Editore
• Désy, Michel ; Battaglini, Alex ; Bastien, Robert (2007) : Mesure de l’intensité nécessaire à l’intervention auprès des jeunes immigrants et leur famille. Westmount : Centre jeunesse de Montréal et Centre de la jeunesse et de la famille Batshaw (téléchargeable sur http ://www.
santepubmtl.qc.ca/Publication/migrationpub.html)
90
21 Références bibliographiques
• Fibbi, Rosita ; Cattacin, Sandro (2002) : L’auto e mutuo aiuto nella mi grazione. Una valutazione d’iniziative di self help tra genitori italiani in
Svizzera.
• Granovetter, Mark S. (1973) : The strength of weak ties. Dans : Ameri can Journal of Sociology 6/1973, p. 13601380. Chicago : University of
Chicago Press
• Michard, Pierre (2005) : La thérapie contextuelle de Boszormenyi
Nagy. Une nouvelle figure de l'enfant dans le champ de la thérapie familiale. Collection Carrefour des psychothérapies. Bruxelles : De
Boeck
• Minuchin, Salvador et al. (1967) : Families of the slums. An exploration of their structure and treatment. New York : Basic Books
• Selvini Palazzoli, Mara (1988) : I giochi psicotici nella famiglia. Milano :
Raffaele Cortina Editore
• Sluzki, Carlos E. (2001) : Psychologische Phasen der Migration und ihre
Auswirkungen. Dans : Hegemann Thomas ; Salman, Ramazan (Hrsg) :
Transkulturelle Psychiatrie. Konzepte für die Arbeit mit Menschen aus anderen Kulturen. Bonn : PsychiatrieVerlag
21 Références bibliographiques
14 Collaboration avec les communautés de migrant(e)s
• Dahinden, Janine (2002) : «Um meine Batterien aufzuladen». Über die
Bedeutung von Kultur in den Vereinen von Migrantinnen und Mi granten. In : Terra cognita. Schweizer Zeitschrift zu Integration und Migration 1/2002 – Welche Kultur ?, p. 7277. Téléchargeable sur www.terracognita.ch
• Matthey, Laurent ; Steiner, Béatrice (2008) : Nous, moi – les autres. Les associations de migrants et la formation de l’identité. Présentation à la Journée annuelle 2008 de la Commission fédérale pour les questions de migration publiée sous: http://www.ekm.admin.ch/fr/index.php
(Actuel > Manifestations)
• Site Internet du Forum pour l'intégration des Migrantes et des
Migrants (FIMM Suisse), l'organisation faîtière des associations de
migrants en Suisse : http ://www.fimm.ch/index.php/index.html
15 Réseaux sociaux
• Bakis, Henry (1993) : Les réseaux et leurs enjeux sociaux. Collection
Que saisje ? Paris : Presses universitaires de France
• Cohn, Ruth C. (2009) : Von der Psychoanalyse zur themenzentrierten
Interaktion. Von der Behandlung einzelner zu einer Pädagogik für alle.
16 e édition. Stuttgart : KlettCotta
• Degenne, Alain (2004) : Les réseaux sociaux. Collection U Sociologie.
2 e édition. Paris : A. Colin
• Mehran, Firouzeh (2006) : Traitement du trouble de la personnalité borderline. Thérapie cognitive émotionnelle. Collection Médecine et psychothérapie. IssylesMoulineaux : MassonElsevier
• Moreno, Jacob L. (2001) : Psychodrama und Soziometrie. Schriften zu
Psychodrama, Gruppenmethode und Spontanität. 2 e édition. Köln :
Edition Humanistische Psychologie
92
21 Références bibliographiques
16 Femmes et prostitution
• Ansermet Pagot, Anne et al. (2007) : Rapport d’activités 2007. Lau sanne : Fleur de Pavé. (Téléchargeable sur http ://www.infoset.ch/inst/ fleur)
• Attac (éd.) (2008) : Mondialisation de la prostitution. Atteinte globale
à la dignité humaine. Collection Les petits libres. Paris : Mille et Une
Nuits
• Chimienti, Milena (2009) : Prostitution et migration. La dynamique de l'agir faible. Zurich : Seismo
• Dahinden, Janine ; Stants, Fabienne (2006) : Arbeits und Lebensbedin gungen von CabaretTänzerinnen in der Schweiz. Neuchâtel : Forum suisse pour l’étude des migrations et de la population SFM
• Domenig, Dagmar (2002) : L’importance d’une intervention spécifique
à la migration dans la lutte contre la toxicodépendance et ses consé quences pour la pratique. Berne : Office fédéral de la santé OFSP
• Dupertuis, Valérie ; Ziegler, Geneviève (2000) : Dépendances aux dro gues illégales et prostitution. Dans : Dépendances 11/2000, p. 2627.
YverdonlesBains et Lausanne : Groupement Romand d'Etudes des
Addictions GREA/Institut suisse de prévention de l'alcoolisme et autres toxicomanies ISPA. (Téléchargeable sur http ://www.greataria.ch/ dossiers/Infos/Revues/dependances11.htm)
• Groupe de travail « Femmes – Dépendances » (1998) : Points de vue sur les toxicodépendances des femmes en Suisse romande. Enquête sur la demande et l’offre d’aide spécialement destinée aux femmes. Lau sanne : Institut suisse de prévention de l'alcoolisme et autres toxico manies ISPA
• Guillemaut, Françoise (éd.) (2007) : Femmes et migrations en Europe.
Stratégies et empowerment. Lyon : Le dragon Lune (Le rapport de
2004 est téléchargeable sur http ://pagespersoorange.fr/cabiria/ publications.html.)
• Guillemaut, Françoise (éd.) (2002) : Femmes et migrations. Les femmes venant d'Europe de l'Est. Lyon : Le dragon Lune
• WelzerLang, Daniel (éd.) ; Schutz Samson, Martine (éd.) (1999) : Pros titution et santé communautaire. Essai critique sur la parité. Lyon : Le
Dragon Lune. (Téléchargeable sur http ://pagespersoorange.fr/ cabiria/publications.html)
21 Références bibliographiques
17 Service social
• La fondation suisse du service social international offre son soutien aux enfants et aux familles confrontés à des problématiques d’ordre sociales et juridiques, dans un contexte transnational (www.ssiss.ch).
18 Bases juridiques : droit de la migration – sécurité sociale
Bases légales, autorités, organisations :
• Recueil systématique du droit fédéral
• http ://www.admin.ch/ch/f/rs/rs.html
• http ://www.humanrights.ch
• http ://www.bfm.admin.ch/bfm/fr/home.html
Consultation juridique, avocats :
• Fédération suisse des avocats (FSA) http ://www.swisslawyers.com
Ce site permet d’effectuer une recherche d’avocat par canton, do maine juridique et langue (« Recherche d’un avocat »). Les diverses associations cantonales offrent aussi un conseil juridique gratuit ou contre une modeste rémunération (cf. « Permanences juridiques »).
A noter que tous et toutes les avocat(e)s ne sont pas membre de cette fédération.
• Juristes démocrates de Suisse
• http ://www.djsjds.ch
Ce site permet lui aussi de chercher (via « Avocat ») un(e) avocat(e) par canton, langue ou domaine juridique.
• http ://www.osar.ch et http ://www.humanrights.ch
Bibliographie :
• Gafner, Magalie (2008) : Autorisations de séjour en Suisse. Un guide juridique : présence, regroupement familial, travail, assurances socia les. Ed. revisée. Lausanne : Editions La Passerelle
• Kieser, Ueli (2009) : ATSGKommentar. 2. Auflage. Zurich : Schulthess
Juristische Medien
93
94
21 Références bibliographiques
• Maurer, Alfred ; Scartazzini, Gustavo ; Hürzeler, Marc (2009) : Bundes sozialversicherungsrecht. 3. Auflage. Bâle : Helbing Lichtenhahn
• Spescha, Marc ; Thür, Hanspeter ; Zünd, Andreas ; Bolzli, Peter (2008) :
Migrationsrecht. Zurich : Orell Füssli
• Uebersax, Peter ; Rudin, Beat ; Hugi Yar, Thomas ; Geiser, Thomas
(Hrsg.) (2009) : Ausländerrecht – Eine umfassende Darstellung der
Rechtsstellung von Ausländerinnen und Ausländern in der Schweiz –
Von A(syl) bis Z(ivilrecht). Handbuch für die Anwaltspraxis Bd. VIII.
2. Auflage. Bâle : Helbing Lichtenhahn
• Widmer, Dieter (2008) : Sozialversicherungsrecht transparent. Zurich :
Schulthess Juristische Medien
19 Ancrage institutionnel et Qualité
• Office fédéral de la santé publique OFSP (2006) : Le référentiel modu laire de QuaThéDA. La norme de qualité pour le domaine des dépen dances. Berne : OFSP
• Office fédéral de la santé publique OFSP (2006) : Manuel QuaThéDA modulaire. Informations et exemplestype relatifs au référentiel Qua
ThéDA. Berne : OFSP
• Saladin, Peter (éd.) (2008) : Diversité et égalité des chances. Les fonde ments d'une action efficace dans le microcosme des institutions de santé. Berne : Office fédéral de la santé publique OFSP et H+ Les hôpi taux de Suisse

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