1.4 - Que veut-on cartographier ?. IFREMER des habitats marins
42 1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ? sont liées entre elles, mais qu’il est impossible de les intégrer dans une seule typologie hiérarchique (Connor et al., 2006). Le fichier UKSeaMap_FinalReport_Annex7.pdf
montre la relation entre habitats et paysages. La figure ci-après, qui représente l'estuaire de l'Exe, au Royaume-Uni, illustre cette relation.
Carte
de l'estuaire de l'Exe, au Royaume-Uni, qui illustre la relation entre la typologie des paysages marins et celle des habitats
Alors que l'approche des habitats est très bien adaptée à une typologie détaillée (à
échelle fine) du fond de la mer (pour les levés sur le terrain et la cartographie des
habitats), la typologie plus générale des paysages marins est particulièrement utile à des fins de gestion à une échelle plus globale, car une telle gestion se fait souvent plus facilement à cette échelle (p. ex. pour un estuaire entier) qu'à l'échelle d'un habitat.
Le milieu pélagique peut faire l'objet d'une classification faisant appel à des caractéristiques hydrographiques (p. ex. la température et la salinité) d'une manière qui soit pertinente sur le plan écologique. Les résultats de cette classification se rapprochent probablement le plus de la notion d'habitat, bien qu'à une échelle très grossière.
1.4 - Que veut-on cartographier ?
La compréhension des notions fondamentales d'échelle d’une carte et de niveau de détail des habitats est essentielle à la réussite d'un programme de cartographie des habitats.
Ces connaissances permettent à ceux qui commandent des programmes d'avoir des attentes réalistes, à ceux qui planifient des levés sur le terrain de choisir l'équipement approprié, et à ceux qui analysent les données et qui dessinent des cartes de livrer des produits conformes aux besoins des utilisateurs.
Une carte des habitats montre la répartition géographique des classes d'habitat du fond marin. Une carte peut être imprimée sur papier ou affichée sous forme électronique à un
écran. Quel que soit le support, une carte montre une région géographique bien définie, et
1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ? 43 donc restreinte, du fond de la mer. Une définition claire du territoire à couvrir est donc essentielle à la réussite d'un programme de cartographie des habitats.
La représentation d'un territoire sur un support fait intervenir la notion d'échelle d’une
carte, normalement indiquée sous forme du rapport entre les dimensions linéaires de la
carte et celles de la région géographique représentée. Une page A4 fait 21 cm de largeur par 29.7 cm de hauteur (à la française ou mode portrait). Si elle contient une carte qui couvre un territoire de 2 km de largeur par 3 km de longueur (200 000 cm par 300 000 cm), par exemple une petite baie, l'échelle de cette carte est de 20/200 000 (ou
30/300 000), soit 1/10 000. À l'inverse, une structure représentée sur la carte par un
élément de 1 cm a dans la réalité une longueur de 10 000 cm, soit 100 m. Si la même page A4 représente un territoire de 200 km par 300 km, par exemple une mer régionale comme la mer d'Irlande, son échelle est alors de 1/1 000 000, et un élément de 1 cm de longueur sur la carte correspond à 10 km dans la réalité.
Un élément semblable de « taille » figure dans la définition d'un habitat : on considère généralement que la taille minimale d'un habitat marin est d'environ 25 m
2
(5 m × 5 m). La
« taille » se reflète également dans la typologie des habitats, où elle est couramment liée
à la notion de « détail biologique ». À une extrémité du spectre, les classes d'habitat représentent un très haut niveau de détail biologique, par exemple un herbier de Zostera marina sur des sédiments grossiers. À l'extrémité opposée, une classe d'habitat est très générale, par exemple un rocher couvert d’algues et couvre les zones intertidale et subtidale du fond marin. Le plus souvent, les habitats définis de manière détaillée couvrent des surfaces relativement petites du fond de la mer (de l'ordre de 10 à 100 m dans chaque dimension), alors que des habitats définis de manière plus générale couvrent des surfaces plus grandes (avec des dimensions supérieures à 1 km). Dans la planification d'un programme de cartographie des habitats, la détermination du niveau de détail biologique à représenter sur les cartes finales est un élément fondamental de l'ensemble du processus de cartographie, à cause de ses conséquences très importantes sur le choix de la stratégie de cartographie, de l'équipement nécessaire, du type d'analyse
à effectuer, et donc sur le coût total du programme (voir le chapitre 2 « Que veut-on cartographier ? »).
Comme on pourrait s'y attendre, il y a un lien très net entre le territoire à cartographier et le niveau de détail biologique à représenter lorsque l'on détermine l'effort (et donc le coût) nécessaire pour produire la carte. La cartographie de tous les habitats détaillés de la mer d'Irlande de manière à les représenter lisiblement sur du papier A4 donnerait un grand nombre de pages ! Le tableau ci-après montre l'effort nécessaire pour produire des
cartes à chacune des extrémités du spectre du détail des habitats et du territoire représenté, et introduit les termes échelle globale et échelle fine, courants dans le domaine de la cartographie des habitats.
Grand
(plus de 100 km
× 100 km)
Niveau de détail des habitats
Faible Élevé
Effort correspondant au territoire à cartographier : levés typiques à échelle
globale
Effort très important, demandant de grandes quantités de ressources : programme national de levés
Petit
(moins de 20 km
× 20 km)
Les résultats ne justifient pas que l’on fasse des levés.
Effort correspondant au territoire à cartographier : levés typiques à échelle fine
L'effort (et le financement) requis pour la cartographie des habitats sont liés à la fois au territoire couvert et au niveau de détail des habitats voulu.
44 1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ?
Les termes échelle globale et échelle fine peuvent s'appliquer à chaque extrémité de la gamme d'activités de cartographie du point de vue du territoire couvert et du niveau de détail des habitats.
Après avoir bien défini le niveau de détail des habitats requis sur la carte finale ainsi que l'étendue du territoire à couvrir, et obtenu les ressources nécessaires pour entreprendre le travail de cartographie, il faut connaître les différentes méthodes disponibles de production des cartes finales. La sous-section qui suit porte sur les principaux points à considérer pour définir les modalités de cartographie des habitats du territoire choisi.
1.4.1 - Qu'entend-on par cartographie des habitats à échelle globale et à
échelle fine ?
Les cartes à échelle globale et à échelle fine se situent aux deux extrémités du spectre du territoire couvert et du niveau de détail des habitats, et servent généralement à des usages très différents. Les techniques employées pour produire ces cartes peuvent
également être très différentes. Dans le domaine de la cartographie des habitats, on emploie le terme échelle dans un sens très général pour exprimer l'interaction complexe entre l'aire ou la taille des structures, le niveau de détail des habitats et le genre de
cartographie. L'échelle aide donc à définir les méthodes de cartographie des habitats, et ce même si le spectre des échelles ne comporte pas de point fixe marquant la limite entre
échelle globale et échelle fine : il y a plutôt une vaste gamme d'échelles entre les deux extrêmes, avec un chevauchement des objectifs et des méthodes de la réalisation de
cartes.
La notion d'échelle permet néanmoins d'orienter la discussion sur ce que comporte la
cartographie des habitats.
Une bonne compréhension du spectre allant de l'échelle globale à l'échelle fine passe par l'explication d'un certain nombre de termes et de concepts :
1.4.1.1 - Échelle d’une carte et territoire couvert
La notion d'échelle est au cœur de toute discussion sur la cartographie des habitats dans le projet M
ESH
. Les cartes d'habitats imprimées sont généralement à une échelle allant de petite (où les éléments représentés sont petits sur la carte, p. ex. 1/250 000) à grande (où les éléments représentés sont grands sur la carte, p. ex. 1/25 000). Cependant, comme les termes petite échelle et grande échelle sont souvent source de confusion, on parle respectivement d'échelle globale et d'échelle fine, et ce sont ces termes que l'on a adoptés pour ce Guide M
ESH
.
1.4.1.2 – Procédés
À l'échelle la plus fine, des données de télédétection et des échantillons prélevés sur le terrain sont recueillis (en général au cours d'un seul projet) et interprétés dans un but bien précis. Le territoire faisant l'objet des levés est entièrement couvert (souvent à plus de
100 % lorsque les fauchées des sondeurs multifaisceaux se chevauchent) à l'aide de techniques choisies en fonction de leur adaptation aux habitats à cartographier. À l'échelle
globale, la cartographie peut se faire en totalité au bureau, en regroupant de nombreuses sources de données et en les traitant de manière à obtenir des couches à modéliser.
Dans le cas d'échelles intermédiaires, la cartographie peut : (1) se faire en grande partie au bureau à partir de données acquises pour diverses fins ; (2) reposer sur des données acquises dans le cadre d'une campagne de levés à long terme ; (3) reposer sur des levés commandés pour cette seule fin, mais ne couvrant que partiellement les données de télédétection et sur une faible densité d'échantillons prélevés sur le terrain, et être complétée par interpolation.
1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ? 45
1.4.1.3 – Finalité
La cartographie à échelle fine procure une description détaillée de la répartition d'une gamme complète d'habitats. On peut avoir besoin d'une représentation statistiquement solide de l'étendue des habitats, avec des frontières entre habitats bien définies, à des fins de surveillance, souvent dans le cadre d'un plan de gestion de sites. Des cartes à
échelle fine peuvent être comparées entre elles et avec des cartes à échelle globale. On parle alors d'une démarche ascendante.
Une carte à échelle globale résume notre connaissance des tendances générales de la répartition des habitats et vient souvent appuyer l'élaboration de politiques stratégiques ou l'évaluation de leur mise en œuvre (p. ex. évaluation de la proportion d'un type d'habitat présentant un intérêt du point de vue de la conservation qui est incluse à l'échelon national dans un ensemble d'aires marines protégées). Souvent une carte à échelle
globale vise à fournir un aperçu général d'une grande région, destiné à servir de contexte
à des données locales. On parle alors d'une démarche descendante.
1.4.1.4 - Résolution, exactitude et valeur prédictive
À l'échelle la plus fine, la cartographie vise une exactitude et un pouvoir de résolution
élevés. On peut devoir refaire la cartographie à une date ultérieure, ou avoir besoin de
cartes présentant un certain degré de certitude statistique afin d'étayer la prise de décisions ou des mesures de gestion. Les cartes à échelle globale visent à montrer la répartition des habitats de manière indicative seulement (donc à ne pas prendre au pied de la lettre), avec un pouvoir de résolution et un degré d'exactitude faibles. L'information représentée sur la carte illustre toutefois de manière raisonnablement fiable l’agencement des habitats.
1.4.1.5 – Effort
Des régions étendues sont généralement cartographiées à une échelle globale, à cause du coût élevé par unité d'aire de levés exhaustifs. Il faut toutefois noter que ce n'est pas toujours nécessairement le cas – un programme national de cartographie comme le programme national irlandais de levés benthiques porte sur une grande région cartographiée de façon détaillée. Une grande région peut être subdivisée en plusieurs composantes plus petites, chacune étant cartographiée à une échelle fine dans le cadre d'un programme de levés à long terme. De petites zones font normalement l'objet de levés détaillés, car il serait coûteux et plutôt vain de mobiliser une équipe de levés pour n'entreprendre que des levés superficiels.
La figure ci-après résume ces concepts dans le spectre d'une échelle cartographique de globale à fine.
46 1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ?
Résumé des principales caractéristiques de la cartographie des habitats pour une gamme d'échelles typiques
Tous les programmes de cartographie des habitats visent à produire des cartes adaptées aux objectifs visés. Ces cartes doivent montrer la meilleure estimation possible de la répartition des habitats, fondée sur les données facilement disponibles les plus appropriées, ou sur de nouveaux levés conçus pour procurer les meilleures données possibles compte tenu des contraintes de temps et de budget. La finalité de cartes d'habitats situées aux extrémités du spectre est probablement très différente, allant du suivi de l'état de sites et de nouveaux développements pour l'échelle la plus fine, à la planification stratégique de politiques pour l'échelle la plus globale. Dans le cas de certaines applications, il faut « imbriquer » des cartes à plusieurs échelles pour aider les utilisateurs à comprendre divers aspects de l'environnement.
1.4.1.6 - Imbrication de cartes à différentes échelles
Lorsque l'on rassemble des cartes à différentes échelles d'un territoire donné, les cartes à
échelle fine montrent les détails, alors que les cartes à échelle globale montrent une répartition plus générale des habitats visibles à une échelle fine. Si les deux types de
cartes sont exacts, il devrait y avoir une forte correspondance entre les deux : les cartes à
échelle globale devraient représenter les mêmes classes d'habitat et avec les mêmes
1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ? 47 frontières que les cartes à échelle fine, mais de manière plus sommaire ; par exemple, certaines classes d'habitat détaillées pourraient être regroupées à un niveau supérieur de la typologie des habitats, ou certains habitats ne pas être illustrés sur les cartes à échelle
globale à cause de leur trop petite taille. Par contre, il arrive souvent que les cartes à
échelle globale et les cartes à échelle fine soient produites à partir de données de sources différentes, ce qui risque de se traduire par une faible correspondance entre les classes et frontières d'habitats des deux types de cartes. On peut toutefois s'attendre à ce que ces différences s'estompent avec le temps, à mesure que la qualité et le pouvoir de résolution des cartes s'améliorent grâce à l'apport de nouvelles données. Le fait que les cartes à
échelle globale soient de plus en plus souvent produites par généralisation de cartes à
échelle fine plutôt que par modélisation d'autres données physiques devrait également contribuer à atténuer ces différences.
L'imbrication de cartes à différentes échelles est un cas particulier de la situation où une
carte à échelle fine résultant d'un levé des habitats est incluse dans une carte à échelle
globale résultant d'une modélisation cartographique. Il est possible que les deux cartes ne correspondent pas exactement, en raison des démarches radicalement différentes
(ascendante et descendante) qui les sous-tendent. Il est en outre peu probable que le
modèle cartographique puisse être modifié uniquement pour correspondre aux levés détaillés. Cela fait ressortir les grandes différences entre les deux types de cartes quant à leur finalité et à leur valeur prédictive, et illustre les difficultés de l'utilisation de données à différentes échelles.
Cette situation est susceptible de se présenter souvent dans le programme M
ESH
, et il vaut la peine de s'attarder sur la nature de ces différences et des défauts de correspondance. D’autre part, les échelles intermédiaires (entre 1/100 000 et 1/25 000) ont souvent été laissées de côté.
Il apparaît clairement que des cartes à échelle fine peuvent servir à valider le modèle cartographique sous-jacent des cartes à échelle globale, mais il demeure difficile d'évaluer l'importance des écarts irréconciliables entre les deux types de cartes, à cause des différences que l'on vient d'exposer.
1.4.2 - Quels sont les plus petits habitats cartographiables ?
Il y a plusieurs réponses à cette question ! Comme on l'a mentionné à la sous-section
1.3.5 « Quelle est la taille d'un habitat ? », les habitats n'ont pas de taille naturelle précise, mais on recommande généralement d'utiliser une taille d'au moins 5 m × 5 m (il n'est pas obligatoire de prendre des carrés) pour les levés et échantillonnages d'habitats. Il faut toutefois se rappeler que des levés d'habitats de cette taille sur le terrain ne signifient pas que la carte finale sera aussi détaillée. Il se peut que seuls des habitats homogènes plus vastes puissent être représentés sur une carte à l'échelle choisie, à cause des règles
(limites) de la cartographie – voir plus loin. Il faut aussi que les télécapteurs puissent détecter des habitats de petite taille : un capteur doit avoir un pouvoir de résolution suffisant pour enregistrer des habitats de taille unitaire – voir plus loin.
On entend habituellement par pouvoir de résolution l’aptitude à distinguer des objets ou des éléments adjacents d'une scène, qu'il s'agisse d'une photo, d'une image ou de la réalité sur le terrain. La limite de résolution est généralement donnée par la dimension linéaire (souvent exprimée en mètres) des plus petites structures que l'on peut distinguer.
Mais le contraste joue un rôle dans notre capacité de distinguer des objets : si deux objets sont de la même couleur, ils sont plus difficiles à distinguer que s'ils sont très différents par la couleur, la teinte ou la luminosité. Lorsque l'on choisit un outil de télédétection pour la cartographie des habitats, il est évidemment essentiel de tenir compte de son aptitude
à distinguer, tant du point de vue spatial que de la texture, les habitats à représenter sur la carte finale. Les données de télédétection se traduisent normalement par des images imprimées (analogiques) ou électroniques (numériques). Lorsqu'une image est
48 1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ? géoréférencée, c'est-à-dire mise en correspondance avec les coordonnées du monde réel, chaque pixel (de l'anglais picture element) correspond à une surface au sol. L'aire de cette surface est déterminée par la limite de résolution spatiale du capteur. Les capteurs modernes (à bord de satellites, d'avions ou de navires) ont généralement une limite de
résolution spatiale de l’ordre du mètre ou de quelques décimètres. Le paragraphe 1.4.2.2
« Résolution dans le domaine de la télédétection » donne plus de détails techniques à ce sujet.
Après l’acquisition d’images lors d'un levé, deux méthodes couramment employées permettent de distinguer les structures au sol (ou au fond de la mer) : l'interprétation manuelle et la classification automatique. Dans le cas d'une interprétation manuelle sur un document analogique (une image imprimée ou une pellicule), l’interprète qui trace des
polygones représentant des habitats aura tendance à entourer des unités dont la plus petite dimension est d'au moins 3 mm sur le document (ou une surface dont l'aire est d'au moins 9 mm²). Il ne s'agit pas d'une règle absolue mais plutôt d'une « règle empirique »
établie pour de simples raisons de confort lors du tracé. C’est ce que l’on appelle la plus
petite unité interprétable.
Les télécapteurs ont des sources d’erreur (bruit systémique) inhérentes à leur conception et à leur fonctionnement. Les pixels ne doivent donc pas être considérés individuellement, car la valeur d’un pixel en particulier pourrait fort bien être le résultat d’une erreur du système. Lorsque des pixels forment des groupes ayant des valeurs semblables, l’information qu’ils représentent est plus fiable et plus susceptible d’être conforme à une unité sur le terrain. Ces groupes forment les plus petites unités interprétables d’une image, souvent de dimensions comparables aux plus petites unités interprétables manuellement. Dans un cas comme dans l’autre, la plus petite unité
interprétable constitue le critère à considérer pour le choix de l’outil de télédétection le plus approprié pour distinguer les types d’habitat dans le cadre d’un programme de
cartographie.
La cartographie fait intervenir un mélange d’esthétique et de science. Un cartographe doit généralement faire des compromis entre l’échelle, le niveau de détail et la facilité d’utilisation d’une carte. Trop de détails rendent une carte déroutante et difficile à lire ; trop peu de détails diminuent la valeur d’une carte. En général, les plus petites formes dessinées sur une carte – les plus petites unités cartographiques – ont des dimensions de
1 à 3 mm selon leur nature (point, trait ou polygone). Une règle empirique actuellement adoptée en « cartographie thématique », où l’on ne représente en principe que des surfaces, suggère de ne pas tracer de polygones de moins de 9 mm² ; dans le cas particulier des cartes d’habitats terrestres du projet CORINE sur l'occupation des terres , la plus petite unité choisie a été de 25 mm². Dans notre cas, en adoptant des habitats d’une taille minimale de 5 m × 5 m, la représentation d’un habitat de 25 m² par une unité visible de 9 mm² sur papier correspond à une échelle d’environ 1/2000. Il s’agit donc de l’échelle de base qui garantit de voir toutes les unités d’habitat ; les cartes dessinées à une échelle plus grossière ne permettront pas de voir les unités d’habitat de 25 m². Les paragraphes
1.4.2.4 « Limites de la cartographie (pour les cartes au trait) » et 1.4.2.5 « Limites de la cartographie thématique maillée » abordent plus en détail les limites de la cartographie.
Une fois que les images de télédétection ont été interprétées pour donner des classes d’habitats, le cartographe doit produire une carte finale montrant les habitats avec le niveau de détail voulu. À cette étape, la relation entre la plus petite unité interprétable d’une image et la plus petite unité cartographique dépend de la finalité du programme de
cartographie et des spécifications de la carte finale. En simplifiant beaucoup, et en laissant de côté un certain nombre de problèmes et décisions complexes, il y a fondamentalement deux manières de procéder, selon la façon dont les personnes qui commandent le travail de cartographie formulent leur demande (voir la figure ci-après).
¾
Si la demande porte sur la cartographie d’unités d’habitat (p. ex. d’un certain nombre de mètres carrés), on peut alors suivre le processus de gauche, qui établit successivement les outils de télédétection appropriés et l’échelle à employer pour la
1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ? 49
carte résultante (la plus petite unité interprétable et la plus petite unité cartographique
étant alors fixées dans la demande).
¾
On peut aussi demander de « cartographier un territoire donné au 1/10 000, en représentant les habitats le plus en détail possible ». Dans ce cas, c’est le processus de droite de la figure qui s’applique. Dans le cas d’une carte au 1/10 000, la plus petite
unité cartographique est de 30 m × 30 m (900 m²), taille minimale de l’unité d’habitat interprétable. La limite de résolution de télédétection devrait donc être d’au moins
5 m (une règle empirique suggère en effet que la limite de résolution d’un capteur soit d’environ un cinquième de la plus petite unité interprétable requise). Si la plus petite
unité interprétable est inférieure à la plus petite unité cartographique, le cartographe doit regrouper des unités pour créer des unités d’habitat plus grandes que la plus
petite unité cartographique – un processus appelé généralisation, qui introduit d’autres genres de problèmes.
Manière dont la formulation d’une demande de cartographie (imposant soit l’échelle de la carte, soit les unités minimales d’habitat à identifier) influence le choix de la résolution du levé de télédétection.
Les boîtes en bleu sont celles où des choix sont possibles.
50 1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ?
1.4.2.1 - Raisons techniques pour lesquelles certains habitats peuvent ne pas
être cartographiés
Les habitats (le substrat et d’autres propriétés du milieu comme le biote) peuvent être définis par les caractéristiques biologiques et physiques observables prédominantes.
Cependant, comme on le voit dans la figure qui suit, trois facteurs compliquent cette définition :
– le biote caractéristique d’un habitat sédimentaire est surtout présent à l’intérieur du sédiment (endofaune) et n’est pas facilement visible ;
– la biodiversité d’habitats rocheux peut se manifester en grande partie dans de petites niches difficiles à échantillonner à distance (sous des corniches rocheuses, sous des blocs, dans le rocher).
Roche en place
Sable Bloc
Faune invisible Faune cachée
Ces facteurs ont un impact énorme sur un programme de cartographie et sur toute utilisation de cartes pour répondre à des questions sur la biodiversité et sur la présence d’espèces rares qui pourraient être cruciales pour la mise en œuvre de politiques et la gestion d’activités humaines qui en découle.
La prochaine figure décrit trois scénarios qui illustrent certains des principaux problèmes auxquels on risque de faire face pour la cartographie des habitats.
1. L’illustration de gauche représente un habitat de sédiments meubles qui héberge surtout une endofaune. Il peut être difficile de détecter et de cartographier de tels
habitats par télédétection et même par échantillonnage, pour les raisons suivantes : a. plusieurs des propriétés des sédiments qui influent sur le facteur de réflexion ne sont pas mesurées ; b. les propriétés acoustiques des sédiments peuvent être affectées ou non par l’activité de l’endofaune ; c. l’échantillonnage peut ne pas représenter adéquatement le biote. Le prélèvement à la benne révèle une partie de l’endofaune, mais la faible ampleur du prélèvement (typiquement 0,1 m
2
) ne permet pas d’assurer que les échantillons sont vraiment représentatifs d’une zone plus vaste (à moins de prélever un certain nombre de réplicats), et il est probable que la mégafaune davantage dispersée ne soit pas échantillonnée. La vidéo (dans une eau claire) permet d’échantillonner une zone plus vaste et plus représentative, mais non de voir la plus grande partie de l’endofaune.
Par conséquent, les liens entre les propriétés observées des sédiments et le faciès acoustique peuvent être douteux. Même si les données acquises sont adéquates pour cartographier le type de sédiment, les liens entre le faciès acoustique et
1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ? 51 l’endofaune risquent d’être incertains. Par conséquent, pour de nombreux habitats, on arrive à cartographier le type de sédiment avec un certain succès, mais la
cartographie des habitats définis par leur endofaune est beaucoup moins réussie.
2. Dans l’illustration du centre, le biote manifeste a un effet marqué et caractéristique sur le faciès acoustique, et la vidéo est un bon instrument d’observation du biote. Par contre, les observations du couvert ne permettent pas toujours d’identifier les types de Laminaires de façon certaine, et il se peut que la seule forme de vie reconnue soit celle des Laminaires alors qu’un important biote se cache sous le couvert.
3. Enfin, dans l’illustration de droite, les moyens acoustiques peuvent détecter de manière fiable les divers habitats rocheux, et ces mêmes structures être observées par vidéo. Mais la plus grande partie du biote reste cachée, et seules quelques stations de plongée permettront d’acquérir d’importantes données sur la biodiversité.
Situations où les techniques de prélèvement et d’enregistrement ne permettent de détecter qu’une partie d’un habitat benthique
Le choix des bons moyens d’échantillonnage favorise évidemment le succès du processus de cartographie, mais les utilisateurs doivent néanmoins être conscients des limites techniques de la cartographie pour ne pas avoir d’attentes irréalistes vis-à-vis des
cartes d’habitats. On peut devoir accepter le fait que la seule manière de cartographier des données sur la diversité consiste à utiliser des données ponctuelles superposées à une carte d’habitats définie de manière globale.
En résumé, si les structures qui définissent un habitat sont visibles et détectables, il y a une bonne probabilité que l’on puisse cartographier cet habitat. Si elles sont visibles mais cachées d’une manière ou d’une autre pour l’outil de télédétection, alors ou bien on arrivera à déduire la présence de l’habitat à partir d’autres caractéristiques, ou bien la
carte d’habitats obtenue sera incomplète (voir la figure ci-après) !
52 1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ?
Résumé des considérations fondamentales à propos de la nature de tout habitat que l’on souhaite cartographier.
1.4.2.2 - Résolution dans le domaine de la télédétection
Il est important de comprendre le fonctionnement d’un outil de télédétection, afin d’apprécier son aptitude à détecter des structures benthiques telles que des habitats (en zone intertidale ou subtidale). Beaucoup d’excellents ouvrages et sites Web expliquent tous les aspects techniques de la télédétection ; par exemple, Green et al. (1999) décrivent l’utilisation de télécapteurs aéroportés ou satellitaires pour la cartographie marine en région tropicale. La suite de ce paragraphe repose sur de l’information disponible dans le site WEB de la NASA (États-Unis ) et sur certaines définitions extraites de Wikipedia .
Les télécapteurs mesurent et enregistrent la magnitude et la fréquence de l’énergie
électromagnétique (lumière) ou de nature acoustique (son). Les télécapteurs embarqués
à bord d’avions ou de satellites utilisent normalement des capteurs d’image qui mesurent l’énergie réfléchie par les objets observés ; les capteurs les plus utilisés pour la détection sous-marine font appel à des dispositifs acoustiques, mais les résultats sont souvent rendus sous forme d’images. Les capteurs d’image se répartissent en deux grandes catégories : les capteurs actifs et les capteurs passifs. Les capteurs passifs, qui forment la majorité des capteurs aéroportés ou satellitaires en usage à l’heure actuelle, ne font que recevoir la lumière solaire naturelle réfléchie ou l’énergie électromagnétique émise par les objets. Les capteurs actifs fournissent leur propre énergie, qui est transmise aux objets observés puis réfléchie vers les capteurs. Les systèmes acoustiques, les radars et les
lidars (qui utilisent des rayons laser) sont tous des capteurs actifs.
Les premiers télécapteurs enregistraient des images photographiques (prises par des caméras) gravées sur pellicule ou des traces imprimées sur des rouleaux de papier
(sonars). Dans les deux cas, les images étaient produites sous forme analogique. Elles
étaient fixes et ne se prêtaient qu’a peu de traitement (corrections, modifications de contraste, de couleur, etc.) ; plus récemment, elles ont pu être converties sous forme
électronique numérique, permettant des traitements limités. La plupart des capteurs modernes enregistrent maintenant l’information sous forme numérique, souvent des images numériques. Une image numérique est formée de nombres qui représentent des
attributs tels que la luminosité, la couleur ou la longueur d’onde de l’énergie rayonnée, ainsi que la position de chaque point ou pixel de l’image. Le pixel (de l’anglais picture
element) est la plus petite unité d’une image. Une image numérique est formée de pixels disposés en lignes et colonnes ; une telle image est dite matricielle, tramée ou maillée.
1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ? 53
Les dimensions des pixels et leur contenu en information sont deux aspects de la
résolution de l’image.
Le terme résolution a une signification populaire, mais il est mieux défini dans un sens technique. On entend habituellement par pouvoir de résolution l’aptitude à distinguer des objets ou des éléments adjacents d'une scène, qu'il s'agisse d'une photo, d'une image ou de la réalité sur le terrain. La limite de résolution est souvent donnée par la dimension linéaire (souvent exprimée en mètres) des plus petites structures que l'on peut distinguer.
Mais le contraste joue un rôle dans notre capacité de distinguer des objets : si deux objets sont de la même couleur, ils sont plus difficiles à distinguer que s'ils sont très différents par la couleur, la teinte ou la luminosité. Les télécapteurs mesurent des différences et des variations souvent exprimées par trois types principaux de résolution, dont chacun influence la précision des télécapteurs et leur utilité pour la cartographie des habitats.
Résolution spatiale – Le pouvoir de résolution spatiale d’un capteur est son aptitude à distinguer les détails d’un motif ou d’une image. La limite de résolution spatiale, c’est-àdire la plus petite distance entre des motifs ou des objets que l’on peut distinguer dans une image, est souvent exprimée en mètres.
Résolution spectrale – Le pouvoir de résolution spectrale d’un capteur est sa sensibilité de réponse à une gamme de fréquences donnée (surtout dans le cas de capteurs aéroportés ou satellitaires). Les gammes de fréquences couvertes comprennent souvent non seulement la lumière visible, mais aussi la lumière invisible et des rayonnements
électromagnétiques. Les objets au sol sont identifiables par les différentes longueurs d’onde réfléchies (interprétées par différentes couleurs), à condition que le capteur utilisé puisse détecter ces longueurs d’onde.
Résolution radiométrique – Le pouvoir de résolution radiométrique (souvent appelé contraste radiométrique) est l’aptitude du capteur à mesurer la force du signal (réflectance acoustique) ou la luminosité des objets. Plus un capteur est sensible à la réflectance des objets par comparaison avec leur voisinage, plus il permet de détecter et d’identifier des objets petits.
Lorsque l'on choisit un outil de télédétection pour la cartographie des habitats, il est
évidemment essentiel de tenir compte de son aptitude à distinguer, tant du point de vue spatial que de la texture, les habitats à représenter sur la carte finale.
1.4.2.3 - Limites d’interprétation
Même s’il est possible de détecter une structure, d’autres raisons peuvent rendre cette
information difficile à représenter sous forme de polygones d’habitat. Par exemple, l’information sur la classe d’habitat peut se situer à un très bas niveau dans la typologie
E
UNIS
(p. ex. variantes locales ou sous-habitats), d’où un très grand nombre de classes dans la zone échantillonnée, dont plusieurs ne sont échantillonnées qu’une ou deux fois.
Il est possible que l’on ne puisse pas interpréter les données de télédétection en utilisant ce grand nombre de classes, parce que (1) il y a trop peu d’échantillons de chaque classe pour que l’on puisse être certain de leur interprétation, ou (2) ces classes produisent des signatures très semblables ou qui se chevauchent dans les données de télédétection, de sorte que l’on n’arrive pas à les distinguer. Dans ces cas, une carte d’habitats plus générale montrant un moins grand nombre de classes peut être plus appropriée. Il faut prendre ces limites en considération à un stade précoce du processus de planification.
Compte tenu des objectifs du programme, vaut-il vraiment la peine de faire une carte avec un pouvoir de résolution et un niveau de détail élevés, au vu des coûts importants et de la complexité de l’analyse à effectuer ?
Il est donc possible que l’on doive produire des cartes à échelle globale en simplifiant des données à échelle fine. Cette simplification peut introduire des erreurs lorsqu’un analyste
54 1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ? doit décider comment combiner des classes qui se présentent (sous forme de pixels isolés ou en petits groupes) à une échelle qui ne peut pas être représentée sur une carte.
1.4.2.4 - Limites de la cartographie (pour les cartes au trait)
La cartographie fait intervenir un mélange d’esthétique et de science. Il faut généralement faire des compromis entre l’échelle, le niveau de détail et la facilité d’utilisation d’une
carte. Trop de détails rendent une carte déroutante et difficile à lire ; trop peu de détails diminuent la valeur d’une carte. Le tableau suivant montre la relation entre la taille (en mm) d’un objet sur une carte et la taille réelle des objets représentés à différentes
échelles. Il faut se rappeler que des polygones dont les dimensions sont de 2 à 3 mm constituent probablement la limite inférieure de ce qui peut être représenté sur une carte
(imprimée). Il est clair que, même à une échelle fine, des objets de moins de 10 m (et préférablement de moins de 20 m) ne peuvent pas être montrés sur une carte.
Taille (mm) d’un objet sur une carte
1
Taille réelle (m) de l’objet représenté, selon l’échelle de la carte
1/10 000 1/25 000 1/50 000 1/100 000
10 25 50 100
Un carré des dimensions indiquées dans le tableau est le plus petit habitat qui peut être représenté sur une carte aux échelles correspondantes, et constitue donc par définition la
plus petite unité cartographique. Il faut en tenir compte dans la planification des levés puisqu’il s’agit de la limite de résolution et du niveau de détail le plus élevé que l’on peut attendre de la carte finale. La plus petite unité cartographique ne correspond ni à la limite
de résolution des télécapteurs (qui peuvent être beaucoup plus précis), ni à strictement parler à l’exactitude et à la précision de la carte (qui peuvent être bien moindres).
Les dimensions de plus petite unité cartographique indiquées dans le tableau sont celles de polygones qui sont normalement de forme irrégulière plutôt que carrés. Le cas des
cartes maillées est quelque peu différent. Il est possible de reproduire des cartes avec des pixels de taille beaucoup plus petite (un pixel est en réalité un tout petit carré, dont les côtés ne sont généralement pas marqués par des traits) qu’un polygone tracé avec un contour bien défini.
Un pixel d’une taille donnée correspond à une plus petite surface du fond de la mer sur une carte à échelle fine que sur une carte à échelle globale. La taille du pixel imprimé détermine donc la limite de résolution de la carte. Le tableau ci-dessous est typique de la façon dont les cartographes voient la limite de résolution d’une carte. Il montre les dimensions réelles représentées par des pixels imprimés de trois tailles différentes
(0,1 mm, 0,25 mm et 1 mm de côté) pour un certain nombre d’échelles. Ce tableau permet de connaître la limite de résolution d’une image matricielle.
Limite de résolution (dimensions sur la carte)
Petit (0,1 mm) Moyen (0,25 mm) Gros (1 mm)
1/5000 0,5
1/10 000 1
1/25 000
1/50 000
1/100 000
1/250 000
2,5
5
10
25
1,25
2,5
6,25
12,5
25
62,5
5
10
25
50
100
250
Cela ne signifie pas toutefois que les images matricielles ont une plus grande définition que les cartes au trait comportant des polygones. En effet, les pixels ne sont pas faits
1 - Qu'est-ce que la cartographie des habitats ? 55 pour être vus individuellement. Un pixel isolé ne signifie pas grand chose en soi. Lorsque des pixels forment des groupes de valeurs semblables, l’information qu’ils représentent est plus fiable. Les zones qui ont un aspect tacheté à cause des variations entre pixels voisins sont considérées comme des zones hétérogènes. Il serait erroné de supposer que la classe correspondant à chaque pixel est située avec exactitude. Par conséquent, la
plus petite unité cartographique est à peu près la même pour des polygones et pour des
groupes de pixels.
1.4.2.5 - Limites de la cartographie thématique maillée
Une fois déterminée la plus petite taille d’habitat à enregistrer lors d’une campagne de levés, il faut choisir un moyen de télédétection ayant le pouvoir de résolution correspondant. Le pouvoir de résolution du capteur (voir paragraphe 1.4.2.2 « Résolution dans le domaine de la télédétection ») doit être suffisant pour que le nombre de « pixels purs » soit beaucoup plus grand que le nombre de pixels périphériques, afin de minimiser l’erreur de calcul de l’aire. Pour donner une règle empirique, la limite de résolution spatiale doit être de l’ordre d’un cinquième de la plus petite taille d’habitat. Dans le cas d’une unité d’habitat de 5 m × 5 m, un capteur ayant une limite de résolution de 1 m permet d’enregistrer dans le pire des cas 16 pixels purs (16 m²) sur 25, ce qui donne une
erreur d’au plus 30 %. Cette règle empirique n’est valable que dans les cas bien tranchés où la couleur (radiométrie) prévaut, autrement dit lorsqu’une unité au sol est d’une couleur relativement homogène et bien contrastée par rapport à son voisinage. Si l’unité se caractérise par une texture plutôt que par une couleur (p. ex. de petites cuvettes réparties sur une unité de substrat rocheux vue sur une photographie aérienne), il est préférable d’avoir un pouvoir de résolution plus élevé pour la faire ressortir. À l’heure actuelle, de nombreux outils de télédétection ont un tel pouvoir de résolution (spatiale, spectrale et radiométrique). C’est le cas en particulier de tous les imageurs aéroportés et des lidars, ainsi que des sonars à balayage latéral et des sondeurs multi faisceaux pour des eaux relativement peu profondes (moins de 100 m). Certains satellites modernes (Ikonos,
Quickbird) ont également un tel pouvoir de résolution.
Après l’acquisition d’images lors d'un levé, deux méthodes couramment employées permettent de distinguer les structures au sol (ou au fond de la mer) : l'interprétation manuelle et la classification automatique. Dans le cas d'une interprétation manuelle sur un document analogique (une image imprimée ou une pellicule), l’interprète qui trace des
polygones représentant des habitats aura tendance à entourer des unités dont la plus petite dimension est d'au moins 3 mm sur le document (ou une surface dont l'aire est d'au moins 9 mm²). Il ne s'agit pas d'une règle absolue, mais plutôt d'une « règle empirique »
établie pour de simples raisons de confort lors du tracé. C’est ce que l’on appelle la plus
petite unité interprétable.
Lorsque l’on a recours à la classification automatisée des images pour produire une
« carte thématique » du sol, chaque pixel d’une image se voit affecter une classe correspondant à un type d’habitat si l’image est traitée pour montrer des habitats. Les télécapteurs ont des sources d’erreur (bruit systémique) inhérentes à leur conception et à leur fonctionnement. Les pixels ne doivent donc pas être considérés individuellement, car la valeur d’un pixel en particulier pourrait fort bien être le résultat d’une erreur du système.
Lorsque des pixels forment des groupes ayant des valeurs semblables, l’information qu’ils représentent est plus fiable et plus susceptible d’être conforme à une unité sur le terrain.
Ces groupes forment les plus petites unités interprétables d’une image. Néanmoins, certaines zones ont quand même un aspect tacheté à cause des variations entre pixels voisins, et il est préférable de les considérer comme hétérogènes. Comme les pixels d’une image classifiée sont regroupés, la plus petite unité interprétable est à peu près la même pour des polygones tracés manuellement et pour des groupes de pixels d’images
matricielles classifiées automatiquement. D’une manière semblable au travail sur une
« image implicite » (p. ex. un imprimé d’une photographie aérienne), si une personne doit

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